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CHAPITRE 7. CONSERVATION PAR FERMENTATION
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7.3 Prétraitements
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VIEW THE DOCUMENT7.3.1 Compléments à l'extraction du jus
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7.4 Fermentation alcoolique
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VIEW THE DOCUMENT7.4.2 Matériel
VIEW THE DOCUMENT7.4.3 Cas particuliers
7.5 Acétification
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VIEW THE DOCUMENT7.5.2 Matériel
VIEW THE DOCUMENT7.5.3 Cas particuliers
7.6 Post-traitements
VIEW THE DOCUMENT7.6.1 Décantation-filtration
VIEW THE DOCUMENT7.6.2 Pasteurisation
VIEW THE DOCUMENT7.6.3 Conditionnement

Conservation des Fruits à Petite Échelle (CTA - ILO - WEP, 1990, 244 p.)

CHAPITRE 7. CONSERVATION PAR FERMENTATION

7.1 Introduction

Ce chapitre traite de la fabrication du vinaigre qui est, par définition, le produit d'une double fermentation d'un liquide sous l'action sélective de certains micro-organismes tels que les levures et les bactéries, le liquide en question étant un extrait de fruits.

Les micro-organismes se développent naturellement sur un substrat contenant des matières fermentescibles (certains sucres et amidons, notamment); ils les transforment en alcool, puis en acide. Ils peuvent aussi être inoculés dans ce substrat par l'homme pour accélérer la phase de démarrage de la fermentation. Un traitement ultérieur à la chaleur (pasteurisation) peut être requis pour stabiliser le produit fini.

7.2 Procédé général et échelles de production

La fabrication du vinaigre comprend, après extraction du jus de fruits (moût), deux étapes principales:

- la fermentation alcoolique (ou fermentation submergée) qui se déroule en anaérobiose sous l'action de la levure Saccharomyces cerevisiae ou S. ellipsoideus, laquelle transforme les sucres fermentescibles des fruits en alcool éthylique;

- la fermentation acétique (ou fermentation aérée) qui se déroule à l'air libre sous l'action de la bactérie acétobacter (Mycoderma aceti), laquelle transforme l'alcool éthylique obtenu à la phase précédente en alcool acétique.

Le produit fini doit contenir 4 pour cent d'acide acétique (c'est-à-dire 4 g d'acide pour 100 ml de liquide). Par conséquent, seuls des fruits donnant un jus contenant au moins 8 pour cent de sucres fermentescibles peuvent entrer dans la fabrication d'un vinaigre répondant à cette norme.

La ligne générale de cette fabrication est illustrée à la figure 75.

7.3 Prétraitements

Ceux-ci ont été vus au chapitre 2. Les fruits, après lavage, parage, épluchage et éventuellement dénoyautage ou épépinage, subissent une étape d'extraction de leur jus.

7.3.1 Compléments à l'extraction du jus

Le jus peut être extrait de tous les rebuts de calibrage et des déchets tels que peaux, brisures, etc. A partir d'une tonne d'ananas, par exemple, il est possible d'obtenir 450 kg de déchets à 75 pour cent d'humidité et 270 kg de jus par pressage de ces déchets. Quelques cas particuliers sont examinés ci-après.


Figure 75. Ligne de fabrication du vinaigre

a) Dattes. Ecraser 4 kg de dattes dénoyautées avec 5 l d'eau à 35-40°C, laisser macérer; le liquide obtenu doit contenir 300 g de sucre par litre.

b) Bananes. On peut procéder de l'une des trois manières suivantes:

- broyer les fruits et les mélanger à un volume égal d'eau;

- appliquer le traitement calco-sulfurique suivant:

· additionner la pulpe broyée de chaux en poudre (0,25 à 1,0 pour cent) afin d'éliminer la pectine contenue dans la pulpe et d'éviter ou de ralentir les phénomènes de brunissement;

· homogénéiser en tournant vivement ou en malaxant;

· laisser reposer 15 mn;

· ajouter ensuite de l'acide sulfurique concentré 6N pour neutraliser l'excès de chaux et ramener le pH à sa valeur initiale comprise entre 4,2 et 4,7;

· passer ce mélange dans une presse ou à la centrifugeuse pour en extraire le jus;

· décanter;

- extraire la pectine de la pulpe des fruits par voie enzymatique au moyen d'une pectinase à froid ou à 50°C et avec une dose de 0,5 à 1,0 g de pectine par kg de bananes. Il peut être souhaitable d'ajouter du jus de citron pour éviter tout phénomène d'oxydation qui dénaturerait la saveur et la couleur du jus.

Les méthodes d'extraction du jus d'autres fruits ont été étudiées antérieurement.

7.3.2 Chauffage

Principe

Cette opération a pour but d'homogénéiser la pulpe et d'éliminer tous les micro-organismes présents naturellement dans celle-ci ou introduits lors des diverses manipulations. Elle s'effectue a une température minimale de 90°C et dure par exemple 1 h pour de 36 l de jus de bananes.

On peut faciliter l'action du traitement thermique en ajoutant un acide minéral (2,5 ml d'acide chlorhydrique concentré par litre de jus) pour diminuer le pH du jus si celui-ci n'est pas assez bas, c'est-à-dire voisin de 4,0.

Matériel

On utilise soit des bassines de cuisson à double fond et chauffées à la vapeur, soit un bain-marie qui peut être chauffé à feu nu puisque le liquide n'est pas directement en contact avec la source de chaleur.

7.4 Fermentation alcoolique

7.4.1 Principe

Le liquide chauffé est transvasé dans une cuve de fermentation où il refroidit pendant une nuit jusqu'à ce que sa température soit tombée à 40°C. On ajoute alors une levure du genre Saccharomyces qui transforme les sucres fermentescibles du jus selon la réaction suivante:


Un rendement théorique de 51 pour cent d'alcool correspond en pratique à 45-47 pour cent d'alcool. Si le substrat contient par exemple 10 pour cent de sucres fermentescibles, on obtiendra environ 4,6 pour cent d'alcool.

Le rendement de la fermentation peut être accru en incorporant des enzymes pectolytiques (0,5 pour cent en poids de la pulpe des fruits) ou en ajoutant du phosphate diammonique ou bipotassique à raison de 5 g/100 l.

Adjonction de levure. - Celle-ci peut être réalisée de diverses manières:

- on peut ajouter au liquide du moût de fruits ayant déjà subi une fermentation alcoolique;

- on peut fabriquer un ferment en procédant comme suit. On prend par exemple 3,8 l de jus de pommes contenant 8 à 15 pour cent de sucre; on fait bouillir, on refroidit une nuit et l'on inocule la levure Saccharomyces ellipsoïdeus. On laisse ensuite fermenter 24 h dans un endroit chaud puis on inocule avec cette préparation 95 à 190 l de jus frais qui pourront eux-mêmes servir à inoculer d'autres jus; ou

- on peut utiliser de la levure de boulanger déshydratée (produit stable très facile à stocker). On ajoute dans ce cas 10 pour cent de ferment (en pour-cent du volume de liquide).

La fermentation dure de 7 à 15 jours. Elle doit se dérouler en milieu anaérobiose (c'est-à-dire que les cuves doivent être fermées) et si possible sans agitation pour homogénéiser le mélange; au début de la fermentation, en effet, la pulpe monte en surface sous l'effet de la production de CO2, ce qui a pour effet de ralentir le processus.

Les conditions optimales d'une bonne activité des levures sont un pH du jus compris entre 4,2 et 4, et une température de 29-30°C.

Si la température dépasse 32°C, la vitalité des levures diminue et celles-ci font place aux bactéries qui dégradent les sucres avec une production de chaleur beaucoup plus importante que celle produite par l'action des levures. Cette élévation considérable de température a pour effet de stopper la production d'alcool. Lorsque la teneur en alcool atteint 12 à 18 pour cent (selon les levures), la fermentation est stoppée. On décante alors le mélange (les débris de pulpe tombent au fond), puis on siphonne le liquide surnageant et on le filtre à travers de la gaze ou du nylon. Il doit être ensuite stocké à température ambiante à l'abri de l'air si la phase d'acétification n'intervient pas tout de suite.

7.4.2 Matériel

La fermentation alcoolique s'effectue en fûts, en tonneaux ou dans des cuves constituées d'un matériau chimiquement inerte (inox, ciment enduit de vernis, bois). Les récipients seront préalablement rincés avec de l'eau additionnée de métabisulfite de sodium à 5 pour cent.

La capacité des récipients doit être égale à 1,3 fois le volume du liquide que l'on désire faire fermenter; ainsi, 36 l de jus nécessiteront un fût de 50 l ou deux fûts de 25 l chacun. On utilise des cuves et des fûts d'une capacité variant entre 20 et 200 l, munis d'un couvercle hermétique et d'un robinet permettant le soutirage du liquide (figures 69 à 71).

7.4.3 Cas particuliers

Les procédures varient quelque peu selon les espèces fruitières traitées:

- ananas: il suffit d'ajouter du sucre au jus extrait;

- dattes: il faut ajouter 0,2 g d'acide tartrique par litre de liquide et du phosphate diammonique (le pH doit être compris entre 3,3 et 4,0), puis du moût fermenté et laisser reposer huit jours à 25-30°C;

- oranges: il faut ajouter du sucre ou des mélasses d'agrumes dans les jus de presse (on appelle ici mélasse le jus sucré et riche en pectine extrait des déchets d'agrumes par pressage, puis filtré et éventuellement désacidifié);

- mangues, raisins: procédure normale;

- bananes: on ajoutera les levures sous forme de moût déjà fermenté ou de pâtes fermentées produites à partir de farine de bananes;

- pommes de cajou: il faut enrichir le jus à 17°Brix (il titre normalement 11,5°Brix en moyenne) avec un sirop à 40°Brix (20 litres de sirop pour 80 litres de jus), puis ajouter du phosphate et du métabisulfite de sodium (5 g pour 100 1) et laisser fermenter 2 à 10 jours à température ambiante.

L'enrichissement d'un jus de fruits en sucre permet sa fermentation si sa teneur en sucres fermentescibles n'est pas suffisante au départ; il permet aussi d'accroître la production d'alcool pour un jus à teneur normale en sucres.

7.5 Acétification

7.5.1 Principe

Cette opération s'effectue en aérobiose, c'est-à-dire en présence d'oxygène. Elle consiste à utiliser une bactérie du genre acétobacter pour transformer l'alcool éthylique produit à la phase précédente en acide acétique. La réaction chimique est la suivante:


Le rendement théorique de cette phase est la production de 0,67 g d'acide acétique pour 0,51 g d'alcool (lui-même produit à partir de 1 g de glucose), c'est-à-dire à peu près 130 pour cent d'acide pour 100 pour cent d'alcool. En réalité, on obtiendra 50 à 55 pour cent d'acide acétique à partir de 100 pour cent de sucre.

On peut procéder selon plusieurs méthodes:

- laisser le fût ou la cuve ouverts et attendre une contamination naturelle par un acétobacter; cette méthode est peu efficace et peu fiable;

- on peut ajouter du vinaigre non pasteurisé produit lors d'un cycle précédent (1 l de vinaigre pour 5 l de liquide fermenté); ou

- on peut ensemencer de l'agar-agar avec une culture d'acétobacter. Cette méthode comporte des risques assez fréquents de mutation de cette bactérie; si on l'utilise, il vaut mieux la coupler à une addition de 2 pour cent d'acide acétique (pourcentage du poids par rapport au volume de filtrat).

La fermentation débute à partir du septième jour (la bactérie forme alors un film à la surface du liquide); elle doit se dérouler à une température comprise entre 23 et 29°C.

La méthode à suivre est exposée au tableau 49; on suppose que l'on dispose au départ de 30,2 l de liquide ayant subi la première phase de fermentation (fermentation alcoolique).

Tableau 49. Production du vinaigre

(Source: Desrosier, N. et J., 1977)

Jours

Jus ajouté ayant subi la fermentation alcoolique seulement

Acidité du vinaigre

Quantité de vinaigre changée


Quantité (l)

Acidité (%)

(%)

(l)

0

30,2

1,04

1,04


7



1,23


14



2,56


21



4,94

11,4

21

15,1

1,00

3,30


28



4,30


35



5,35

18,9

35

19,5

1,20

3,00


42



4,10


49



5,20

18,9

49

18,9

1,30

3,30


On procède comme suit:

- on ajoute le vinaigre non pasteurisé (au jour 0);

- on mesure ensuite régulièrement l'acide acétique formé (par titrage avec une solution de soude);

- lorsque l'acidité (c'est-à-dire la teneur en acide acétique) atteint la valeur désirée (aux alentours de 4 pour cent), ici aux environs du 21e jour, on soutire la moitié du vinaigre formé et on la remplace par du moût non acétifié;

- on poursuit les mesures d'acidité; lorsqu'on atteint à nouveau 4 pour cent on remplace une nouvelle fois la moitié du vinaigre formé par du moût non acétifié, et ainsi de suite.

On stocke au fur et à mesure le vinaigre que l'on a soutiré. Cette méthode présente l'avantage d'être très rapide grâce à une bonne circulation de l'air dans le liquide en fermentation. En effet, on produit 68 l de vinaigre en sept semaines avec une cuve de 57 litres de contenance (voir tableau 49)

7.5.2 Matériel

On utilise des fûts ou des tonneaux en aluminium, en bois, en métal émaillé ou en acier inoxydable, aérés par des orifices de diamètre variant entre 3,8 et 5,0 cm recouverts de gaze pour empêcher la pénétration des insectes.

Un indicateur de niveau est souhaitable pour connaître les volumes de vinaigre prélevés. Le fût sera pourvu d'un robinet de soutirage (figure 76).


Figure 76. Fût d'acétification

7.5.3 Cas particuliers

- dattes: la fermentation dure 7 jours à 30°C. On peut obtenir 2 à 4 l de vinaigre à 6-7 pour cent par kg de dattes (avec un reliquat d'alcool de 120 mg par l de vinaigre);

- bananes: on obtient 1 l de vinaigre à 5 pour cent d'acidité par kg de bananes entières (le rendement réel atteint 74 pour cent du taux de conversion théorique);

- pommes de cajou: il faut relever si besoin est le degré d'alcool du produit de la fermentation alcoolique ou éventuellement ajouter du sucre.

7.6 Post-traitements

7.6.1 Décantation-filtration

La décantation se fait en containers fermés et complètement remplis pour éviter toute attaque de l'acide acétique par des bactéries aérobies. Elle a pour but de provoquer la sédimentation des colloïdes et dure un mois.

Le liquide est ensuite siphonné et filtré grossièrement.

7.6.2 Pasteurisation

Le principe et le matériel de pasteurisation avant conditionnement ont été exposés dans la section 5.2.3.

Cette opération, qui permet de stabiliser le liquide chimiquement et microbiologiquement et de favoriser le vieillissement du produit, s'effectue en vrac dans des bassines à double fond pendant 15 mn à 65-70°C.

On peut ajouter du sel (1-2 pour cent en poids par volume) ou sulfiter le produit (70 ppm de SO2), notamment dans le cas des bananes.

7.6.3 Conditionnement

Le remplissage s'effectue a chaud, immédiatement après pasteurisation, dans des bouteilles de verre ou de plastique. Un matériau résistant à l'acide est effectivement requis. Ces récipients doivent pouvoir être fermés de manière hermétique. Le chapitre 8 renseigne sur les propriétés des matériaux d'emballage et les modes de fermeture des récipients.

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