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Première partie - La technologie laitière et fromagère
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Du lait fermenté au fromage
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Créer un atelier de fabrication de fromages
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Créer une Petite Fromagerie. Expériences et Procédés. (GRET, 1994)

Première partie - La technologie laitière et fromagère


Figure 1 - Les principales opération de la transformation.

Du lait fermenté au fromage

Les laits fermentés

La production de laits fermentés est depuis toujours très répandue en Afrique subsaharienne. Aliment nutritif, savoureux, le lait fermenté, dans les pays tropicaux, est plus facile à conserver que le lait frais, plus digeste et ses vertus thérapeutiques sont reconnues.

· Le kéfir est une boisson effervescente, acide et légèrement alcoolisée, très populaire au Caucase. Il est préparé avec du lait de vache, de chèvre ou de brebis. Les Caucasiens le stockent traditionnellement dans des outres en peau. Les prélèvements quotidiens sont chaque jour remplacés par du lait frais, provoquant ainsi une fermentation continue.

· Le k oumis est l'aliment de base des tribus nomades de Russie et d'Asie, il est fabriqué à partir de lait de jument.

· Le leben est originaire du Moyen-Orient. C'est un lait caillé consommé après égouttage dans un tissu ou après concentration dans une jarre poreuse qui permet l'évaporation d'une partie de l'eau.

En Afrique, les peuples d'éleveurs ont également développé des techniques de fabrication de laits fermentés. Les deux exemples suivants en sont l'illustration. Dans les deux cas, la fermentation s'effectue de façon spontanée. Les Peuls et les Masaïs accumulent du lait, jour après jour, dans un récipient de terre ou une jarre. Le lait stocké à température ambiante fermente seul: l'acide lactique augmente naturellement jusqu'à atteindre 1%. Le produit obtenu, visqueux et au goût prononcé d'acide lactique, est généralement consommé pendant les repas.

La méthode des pasteurs éthiopiens du Sidamo est plus sophistiquée. Le lait de vache coagulé naturellement est filtré pour éliminer une partie du liquide limpide (sérum). Un sixième du volume total est ensuite extrait sous forme de petit-lait.

Ce produit se conserve plus longtemps (environ 20 jours), mais la perte de sels minéraux et de vitamines lors de la filtration le rendent moins nutritif.

· Le yaourt est le plus connu des produits laitiers fermentés; il est de plus en plus consommé dans les pays africains. La fabrication artisanale de yaourts est une activité intéressante pour les pays tropicaux: les équipements sont relativement simples et le produit est très apprécié des consommateurs.

Les grands types de fromage

Avec 10 litres de lait à 3% de matières grasses on fabrique environ un kilo de fromage fermenté à pâte demi-dure ou environ deux kilos de fromage non-fermenté à pâte molle. Le fromage à pâte molle contient plus de petit-lait que le fromage demi-dur.

On distingue deux grands types de fromages (voir tableau page suivante): les fromages frais et les fromages affinés.

Les fromages frais

Ce sont les fromages les plus fabriqués dans les pays tropicaux. Leur fabrication est simple, rapide et ne nécessite pas d'affinage. De courte conservation, ils sont consommés immédiatement. Ils sont assez déminéralisés.

Dans certains cas, le fromage obtenu provient simplement de l'égouttage d'un caillé non étuvé auquel on ajoute un peu de présure pour accélérer la coagulation.

Les fromages Frais moulés

Parmi les fromages frais moulés, on peut citer le queso blanco, très répandu en Amérique latine. Ce fromage mixte, blanc, très salé, acide et crémeux, peut être consommé frais dès sa fabrication ou être affiné durant une période variant de 2 semaines à 2 mois (cf. diagramme de fabrication page suivante).

Les pâtes fraîches ou fromages frais lissés: il s'agit de fromages de type petit suisse. La coagulation reste de type nettement lactique.


Figure 2 - Le fromage frais moulé

Les fromages affinés

Les fromages affinés proviennent d'un caillé enzymatique pressé. On distingue: les pâtes pressées non cuites et les pâtes pressées cuites.

· Les pâtes pressées non cuites

Le pressage du caillé, accélérant l'évacuation du sérum, durcit la pâte par déshydratation.

Les pâtes pressées non cuites les plus connues sont: le saint-paulin et le hollande, le cheddar, le cotija mexicain, la feta (fromage d'origine grecque, blanc, salé et affiné en saumure), le domiati (également affiné en saumure et contenant 10 % de sel), le white cheese ou queso blanco. Les trois derniers fromages cités peuvent être fabriqués à petite échelle, ils donnent de bons rendements et se conservent très bien en climat tropical. Les consommateurs leur réservent généralement un accueil favorable (cf. l'expérience du Cipea présentée dans le quatrième chapitre de ce livre ainsi).

· Les pâtes pressées cuites

Les fromages à pâte pressée cuite, comme l'emmenthal, le gruyère, le comté ou le parmesan, sont généralement de grandes tailles et pèsent jusqu'à 120 kg. La qualité du lait est importante et les conditions de fabrication, très précises, requièrent un contrôle rigoureux.

Pour obtenir une déshydratation poussée, l'égouttage, complexe, s'opère en plusieurs phases. Préalablement découpé et brassé très finement, le caillé sérum est d'abord chauffé lentement jusqu'à 55 °C puis placé dans des filtres en tissu retournés plusieurs fois. L'affinage, également long, peut durer plusieurs mois.

Ce type de production est donc difficilement adaptable aux pays tropicaux.

· Les fromages très secs

Ce sont les fromages que fabriquent les nomades. Les aoules, par exemple, sont produits à partir du babeurre acidifié issu du barattage, c'est-à-dire du lait écrémé aigri. Le takammart contient 4 à 7 % d'eau environ.

Les fromages fondus

Les fondus se caractérisent par une pâte homogène sans croûte, élastique, onctueuse, d'aspect brillant. Ce sont des produits alimentaires fromagers particulièrement bien adaptés aux besoins des pays chauds. Grâce à une matière sèche comprise entre 40% et 50%, ils se conservent aisément plusieurs semaines hors du réfrigérateur.

Il existe deux types de fondus: les fondus résultant d'une seconde transformation de fromages préexistants (Vache qui rit), les fondus obtenus à partir de la transformation du lait écrémé ou de poudre de lait (exemple: la cancoillotte).

Les grands types de fromages: récapitulatif

TYPE

CARACTÉRISTIQUES

EXEMPLES

FROMAGES FRAIS

Caill, surtout lactique

Semi-pâteux: petit suisse.


(coagulation lente)

Solide mixte: chèvre frais ou queso blanco.


Egouttage jamais poussé, humidité importante.

Solide toujours frais: minas, labaneh, surati.


Pas d'affinage.


FROMAGES AFFINES

Affinage


Pâte molle

Pas de pressage

Camembert, féta.

Pâte pressée non cuite

Caillé mixte. Pressage.

Saint-paulin, beynaz peynir, fromages sem-durs grecs.

Pâte pressée cuite

Caillé presure. Brassage et chauffage du caillé.

Parmesan (reggiano), gruyère


Pressage.


Pâtes filées

Filetage du caillé.

Oaxaca.

Fromages très secs

Déshydratation poussée.

Chèvres secs, fromages du pourtour du Sahara.

Fromages fondus

Fusion de fromages.

Cancoilltte, fromages à tartiner

Opter pour les pâtes pressées plutôt que pour les pâtes molles

Quels types de fromage vaut-il mieux fabriquer dans les pays tropicaux?

· La fabrication de fromages à pâte molle, qui exige des fermentations et un mûrissement très délicat à réussir, a peu de chances de succès dans les pays en développement.

En effet, pour réussir à produire ce type de fromage, il faut pouvoir maintenir une température et une humidité de l'air précises, très difficiles à obtenir dans un pays tropical.

La production de ce type de fromage exige l'emploi de matériels techniques assez complexes et onéreux. Les investissements de départ sont lourds, ce qui se répercute forcément sur le prix du fromage.

Celui-ci ne peut être vendu que comme un produit de luxe sur un marché forcément étroit. En outre, les fromages à pâte molle se conservent très peu de temps sous un climat tropical (deux ou trois jours hors d'un air refroidi).

LA FABRICATION DU «MINAS» AU BRÉSIL

Sa texture est voisine de celle du saint-paulin et sa pâte, blanche, non cuite mais pressée, a des petits trous et un goût faiblement acide.

L'affinage du minas se réalise en chambre froide, pendant 20 jours. Le lait frais est pasteurisé et refroidi à 32 °C, température de caillage. Le taux de matières grasses n'est pas ajusté. On ajoute une dose de chlorure de calcium, des levains mésophiles et de la présure liquide (force 1/10 000). Le décailiage se fait après 40 à 50 minutes et l'on découpe le produit, à l'aide d'un tranche-caillé, de façon à obtenir de gros cubes de 8 cm de côté. Après le découpage, on brasse le caillé lentement pendant une période moyenne de 50 mn, à la fin de laquelle les grains sont légèrement consistants.

Ayant éliminé tout le lactosérum, les grains de caillé sont cassés manuellement et moulés. Dans une première étape, le pressage dure 16 heures et dans une seconde, après le retournage des moules, 30 minutes. Enfin le salage, effectué dans une saumure à 10 - 12 °C avec une teneur en sel d'environ 20 %, prend une journée.

· Il est donc préférable d'opter pour des fromages à pâte pressée, avec ou sans cuisson, du type hollande, saint-paulin, port-salut, emmenthal ou gruyère. Ils sont relativement simples à produire et se conservent beaucoup plus longtemps que les pâtes molles. De plus, presque toujours fabriqués à partir de lait entier, ils possèdent d'excellentes qualités nutritionnelles, avec un taux important de protéines et de matières grasses.

Ils être fabriqués sans inconvénient dans des laieries-beurreries, puisqu'il n'y a pas de risque de contamination du beurre par les moisissures, contrairement à la production de pâtes molles.

Les fromages à pâte pressée présentent l'inconvénient d'être souvent assez volumineux, mais ils sont faciles à diviser en petites portions et leur croûte sert d'emballage permanent.

LE «PRATO» DU BRÉSIL

Sa pâte pressée et demi-cuite, souple et de couleur jaunâtre, le rend assez différent du minas et assez voisin des fromages hollandais tels que le gouda et la mimolette. A l'intérieur, il ne présente pas de trous irréguliers, seulement quelques trous ronds, petits et brillants. Le goût, ainsi que l'arôme, sont faibles.

On utilise toujours du lait frais, pasteurisé HTST et refroidi à 32 °C. Comme pour le minas, le taux butyreux du lait n'est jamais ajusté. On y ajoute une dose de chlorure de calcium, des levains mésophiles, un colorant, du roucou, et de la présure liquide (force 1/10 000). La coagulation se fait en 50 minutes et l'on découpe le caillé à plusieurs reprises à l'aide d'un tranche-caillé jusqu'à obtention de grains aussi petits que des grains de maïs.

Avant-feu, on réalise pendant 20 minutes un brassage plus doux. Ensuite, on chauffe le tout lentement jusqu'à 41 °C, en utilisant de la vapeur circulant dans les parois internes du tank et en même temps, on brasse plus rapidement. Après-feu, le brassage se prolonge jusqu'à 40 à 50 minutes.

Ayant éliminé le lactosérum, le caillé est pressé dans un coin du tank pendant 20 minutes puis coupé en pains de 2 kg qui sont immédiatement mis sous presse pour une durée de 16 heures sans retournage. Le salage s'effectue dans une saumure à 10-12 °C, avec une concentration de sel voisine de 20 %, pendant 48 heures.

Les techniques de fermentation du lait

Les produits laitiers fermentés dépendent du type de fermentation, lactique ou acide de type mixte.

· La fermentation du lait peut être obtenue naturellement sans apport de ferments ni ensemencement microbien. La flore lactique ambiante (streptocoques et lactobacilles) se développe spontanément et produit de l'acide lactique qui provoque le caillage.

· La fermentation peut également être obtenue de façon artificielle par l'introduction de levain ou ferment.

Le lait est d'abord porté à ébullition pendant 10 minutes pour détruire la population microbienne. Il ne faut pas prolonger le chauffage plus longtemps, pour ne pas dénaturer les protéines et détruire les vitamines.

Puis on introduit dans le lait refroidi un levain ou un ferment (provenant souvent du lait fermenté du lot précédent). La température d'incubation est maintenue entre 30 et 38 °C durant tout le temps de fermentation (de trois à quatre heures). Cette température ne doit pas être dépassée, sinon le lait présentera une vilaine apparence; une température trop basse ralentit le processus de fermentation et favorise le développement de micro-organismes indésirables. Cette méthode ne nécessite pas de récipients particuliers.

Les techniques de fabrication du yaourt

Le lait entier, écrémé ou partiellement écrémé convient aussi bien à la fabrication du yaourt. Celle-ci s'opère en ajoutant au lait des ferments lactiques qui, par leur action, coagulent le lait.

Une souche de ferment pour yaourt se compose de deux types de bactéries: Streptococcus thermophilis et Lactobacillus bulgaricus.

Le processus est simple mais délicat car il exige de parfaites conditions d'hygiène afin d'éviter la présence de bactériophages ou d'antibiotiques qui peuvent empêcher le développement microbien.

Les souches de ferments se présentent sous forme liquide ou Iyophilisée.

La préparation du levain se fait en mélangeant dans un récipient le ferment, liquide ou en poudre, à du lait. On place ensuite ce levain dans une étuve réglée à 43-45 °C jusqu'à coagulation. Il faut compter 3 heures pour une souche liquide et 5 heures pour une souche Iyophilisée. Le produit obtenu, appelé souche mère (ou aussi ferment), sert à l'ensemencement de levains pour la fabrication des yaourts. La souche mère se conserve 8 jours environ à 4 °C. Un yaourt issu d'une fabrication précédente peut remplacer la souche mère.

Le procédé de fabrication du yaourt

Pour obtenir un yaourt, on ajoute d'abord le ferment (la souche mère), à raison de 2 %, au lait chauffé à 48-50 °C maximum. Puis on conditionne le lait en pots. Après s'être assuré que le lait mis en pots a atteint une température de 43 ou 45 °C, on place les pots dans une étuve (ou une chambre chaude) préchauffée également à 43 ou 45 °C. L'étuve sert à maintenir la température du lait et non à le réchauffer.

La coagulation intervient au bout de deux heures et demie, mais les pots ne sont retirés de l'étuve qu'après trois heures environ. Ils sont ensuite placés en chambre froide au moins 12 heures avant consommation.

Pour obtenir du yaourt brassé, il faut réaliser une étape supplémentaire où l'on brasse le coagulum obtenu après la fermentation.

La conservation du yaourt

Les yaourts se conservent environ 12 à 15 jours à une température de + 2 à + 4 °C. La durée de conservation est plus courte si les yaourts sont transportés et stockés à une température plus élevée.

Voir diagramme de fabrication du yaourt page suivante:


Figure 3 - Diagramme de fabrication du yaourt

Créer un atelier de fabrication de fromages

Le matériel nécessaire pour faire fonctionner une petite unité de transformation laitière peut être très simple, mais il faut avant tout tenir compte de la quantité de lait que l'on peut collecter dans la région, des problèmes de transport dus à l'éloignement et à la dispersion des producteurs, du type de produit à réaliser et de la commercialisation du produit fini.

Il est nécessaire de bien connaître le marché local, les goûts des consommateurs, les coutumes et les interdits alimentaires. Une petite étude de marché est indispensable, notamment pour évaluer le prix de vente des produits.

Deux possibilités se présentent pour construire une petite fromagerie. Elle peut être construite avec des matériaux et un équipement fabriqués sur place. il peut aussi s'agir d'une micro-fromagerie pré-fabriquée (clé en main) composée de modules préfabriqués importés.

Le coût moyen de l'installation d'un atelier de transformation du lait construit à partir de matériel et d'équipements locaux est estimé à environ 50 000 FF.

La fabrication du fromage comporte trois grandes phases successives: le caillage (ou coagulation), l'égouttage et l'affinage.

Les locaux

Affecter une pièce par opération

Il est souhaitable de respecter le principe de la marche en avant, c'est-à-dire que le lait doit rentrer d'un côté et le fromage ressortir de l'autre.

D'autre part, il est important d'isoler les secteurs de fabrication de ceux facilement souillés qui nécessitent de nombreux travaux.

Chaque pièce est affectée à une opération:

- un sas d'entrée;
- une pièce de lavage en dehors du circuit;
- une pièce de transformation;
- une à plusieurs pièces d'affinage: séchoir, caves, chambre froide;
- une pièce d'emballage et d'expédition.

Respecter une hygiène scrupuleuse

On n'insistera jamais assez sur l'importance de l'hygiène tout au long de la chaîne de fabrication du fromage: réception du lait, transformation, conditionnement. L'hygiène est primordiale pour obtenir des fromages de bonne qualité.

Tout le matériel en contact avec le fromage doit être lavé au savon et à l'eau chaude, rincé à l'eau claire systématiquement après chaque utilisation pour éviter la prolifération des germes. Les mains doivent être désinfectées à l'eau de javel. En effet, les bactéries peuvent se reproduire très rapidement: une nouvelle génération toutes les trente minutes.

Le port de bottes est indispensable. Le sol, les murs, les installations de la fromagerie doivent être nettoyés périodiquement à l'eau javellisée, puis rincés abondamment à l'eau claire.

Le lait est un aliment fragile qui s'abîme très vite. Il perd alors ses qualités, goût, odeur et texture. Il est conseillé de le garder à l'abri de la lumière, d'éviter les mouvements brusques et de ne pas employer d'ustensiles en cuivre.

Un lait mal conservé s'acidifie; une fois chauffé, il floculera ou caillera. Son odeur devient désagréable, son goût amer, il est moins nutritif et peut même provoquer des maladies.

Le lait peut également prendre une odeur désagréable s'il est placé près de produits à odeur prononcée comme la peinture, les détergents ou les pesticides. Il ne faut donc pas le stocker dans une pièce contenant ces types de produits.

Les bâtiments de réception et de fabrication

Chaque corps de bâtiment doit être sain, propre et d'un entretien facile. Les fenêtres sont garnies de grillage anti-mouches. Le sol est cimenté, légèrement en pente afin d'évacuer les eaux de lavage (pente de 2 à 3 %).

Pour garantir une température constante à l'intérieur, le bâtiment peut être construit en pierres avec un revêtement intérieur de ciment et de chaux, ce qui facilite le nettoyage, ou en banco recouvert de ciment.

Les lavages fréquents des locaux avant, pendant et après toute la fabrication nécessitent également un approvisionnement suffisant et régulier en eau. On compte en moyenne 5 litres d'eau par litre de lait traité. Nous conseillons un puits fermé équipé d'une motopompe.

La cave d'affinage

L'affinage requiert un taux élevé d'humidité (80 % d'humidité relative) et une température basse (8 à 12 °C). La climatisation est toujours onéreuse, voire même parfois impossible en région chaude. Une des meilleures solutions consiste à construire une cave semi-enterrée (d'une hauteur de 2,50 m environ, dont 1,50 m sous terre), de préférence située sous le bâtiment de fabrication. La surface de la cave dépend de la quantité de lait traité: 50 m2 suffisent pour un traitement de 100 à 150 litres par jour.

Il faut prévoir des ouvertures sur l'extérieur pour la partie de la cave située au dessus du sol. Ces aérations sont indispensables pour renouveler l'air; il est préférable d'aérer la nuit, lorsqu'il fait plus frais. Outre l'aération, une méthode simple pour abaisser la température de quelques degrés dans la cave consiste à disposer des récipients remplis d'eau fraîche. En mettant régulièrement des glaçons dans l'eau, elle restera fraîche.

La collecte du lait

Le lait collecté le matin de bonne heure est aussitôt apporté à la fromagerie. Il est indispensable de veiller à la parfaite propreté des récipients de collecte, de protéger le lait de la poussière et de la pluie. En effet un lait sale prend une forme compacte impropre à la production.

A la réception, le lait apporté par chaque éleveur est mesuré individuellement, puis filtré afin d'enlever les impuretés. Il est analysé afin de connaître sa composition bactériologique précise et d'évaluer sa qualité.


Figure 4 - Contrôle bactériologique du lait

Le fromager inscrit les quantités reçues et les qualités (variables d'un jour à l'autre) sur une fiche de réception.

Le matériel pour la collecte du lait

La collecte du lait se fait par transport motorisé ou encore à bicyclette et parfois même à pied.


Figure 5 - La réception du lait

On peut utiliser des bassines en plastique pour la traite. Pour le transport, on utilisera des bidons en almasilium: 5 ou 10 litres pour le producteur et 30 ou 50 litres pour le collecteur.

Un bidon doseur servira à mesurer la quantité de lait collectée et à connaître le paiement à effectuer au producteur.

Le matériel pour la réception du lait

L'équipement de base nécessaire au moment où le lait arrive à la fromagerie est le suivant:

- des bidons à lait en almasilium de différentes tailles;
- des seaux;
- des agitateurs.

Petit équipement de laboratoire

Ils sont nécessaires pour mesurer rapidement, même de façon approximative, un certain nombre de caractéristiques du lait (figures page suivante).

· La densité du lait

On utilise le lactodensimètre qui permet de contrôler la teneur en eau du lait et de reconnaître le lait "mouillé", auquel on a ajouté de l'eau. Deux à trois lactodensimètres et quelques éprouvettes suffisent.

· L'acidité du lait

On utilise un petit appareil appelé acidimètre; le réactif employé est la soude.

· La matière grasse du lait

Il faut pour cela disposer d'une centrifugeuse manuelle qui permet de séparer la matière grasse du lait (par la vitesse de rotation), d'un butyromètre et d'un réactif (acide sulfurique).


Figure 6 - Petit matériel de laboratoire

La pasteurisation du lait

Une fois collecté, le lait est pasteurisé. Pour les fromages fabriqués à partir de lait cru, cette opération n'est pas obligatoire.

· La pasteurisation permet de détruire un certain nombre de bactéries nuisibles à la fabrication du fromage. Elle peut s'effectuer simplement: le lait est chauffé pendant 20 secondes à une température de 80 à 85 °C. Celle-ci est vérifiée à l'aide d'un thermomètre.

Si le lait est très sale, il doit être stérilisé, c'est-à-dire chauffé pendant 3 ou 4 secondes à une température de plus de 100 °C. La quasi totalité des micro-organismes présents dans le lait est alors détruite.


Figure 7 - Chaudière bain-marie

· Pour pasteuriser et stériliser des quantités importantes de lait, il faut disposer d'un matériel adapté (pasteurisateur, centrifugeur, refroidisseur, conditionnement adapté) et d'un circuit de distribution du lait, qui ne sont pas à la portée de tous les petits producteurs.

Par contre, pour de petites quantités de lait, on peut appliquer la pasteurisation dite de "la ménagère" qui consiste à chauffer le lait dans une marmite jusqu'à ébullition.

Le matériel employé dépend de l'énergie disponible localement. La chaudière bain-marie est un pasteurisateur très simple: elle fonctionne avec du bois, du charbon de bois ou de la tourbe et peut être fabriquée en briques cuites, pierres et tôles (récupérées dans des fûts).


Figure 8 - Chaudière bain-marie améliorées

Le refroidissement

A la suite de ce traitement par la chaleur, le lait doit être refroidi très rapidement pour éviter qu'il ne s'abîme et que se multiplient des micro-organismes qui se développent entre 10 °C et 40 °C. Pour refroidir le lait chaud, on le transvase dans un bidon propre placé dans un bac à eau froide. Quand la température atteint 40 °C, on retire le bidon de l'eau. (Le refroidissement peut également s'effectuer grâce à la double paroi du pasteurisateur dans laquelle on fait circuler de l'eau froide).

On peut aussi utiliser deux fûts, de la tuyauterie de plomberie de 2 cm de diamètre et une vanne à deux voies; l'eau captée à la source passe des fûts de refroidissement à la réserve d'eau. Cette circulation continue permet un refroidissement rapide.

Le caillage

Le caillage est une coagulation du lait qui provoque sa séparation en un caillé solide et un résidu liquide, le sérum, composé d'eau, de lactose et de sels minéraux.


Figure 9 - Schéma très simplifié de la coagulation du lait

Le caillage lactique

Maintenu à température ambiante, le lait s'acidifie naturellement assez vite. Lorsqu'il atteint une acidité suffisante, le lait coagule spontanément: c'est le caillage lactique. La coagulation du lait, processus assez lent, peut être accélérée par l'introduction de souches sélectionnées de ferments, d'acide ou de présure.

L'acide acétique (le vinaigre), l'acide citrique ou un jus de fruit acide (citron) permettent d'obtenir un caillé assez friable. Ce type de caillé lactique, est souvent consommé tel quel par les populations.

Le caillage avec présure

La coagulation peut aussi être effectuée avec de la présure. On peut utiliser par exemple de la présure extraite de la caillette d'un veau à jeun de moins de six semaines; d'autres extraits d'animaux, comme les porcs et les poules, peuvent également s'employer. Le caillage dit enzymatique, provoque une fermentation différente du fromage, il convient mieux aux fromages frais à consommer rapidement.

· Les présures de caillette se vendent en tablette, en poudre ou en flacon mais il est possible d'extraire soi-même la présure de caillette de veau ou d'agneau. Par exemple, au Sahel, l'estomac des jeunes chevreaux sacrifiés est précieusement conservé et séché. Lors de la fabrication du caillé, on découpe un petit bout de caillette séchée que l'on jette dans le lait entier.

· On peut utiliser de la présure en poudre , comme la présure "ha-la". Pour 100 litres de lait, on prend une cuillerée à soupe de cette poudre et cinq cuillerées de sel propre. la présure et le sel sont versés et mélangés dans 250 ml d'eau propre. La présure est prête à l'emploi.

Dans certaines régions d'Afrique, comme au Nigéria, on utilise les sucs d'une plante, Calotropis procera; mais cet agent coagulant rend le caillé plus friable. Cette pratique pourrait être généralisée si les intéressantes propriétés des sucs de cette adventice étaient mieux connues (cf. encadré page suivante).

DU FROMAGE SANS PRÉSURE

Des chercheurs de la station expérimentale du CIPEA à Debre Berhan (Ethiopie) ont effectué récemment des essais préliminaires pour déterminer les propriétés coagulantes des sucs extraits de différentes parties de la plante Calotropis procera, la quantité de fromage obtenue et la teneur en lipides du petit-lait. Un échantillon de 7,5 kg de matériel végétal de Calotropis procera a été séparé en feuilles, jeunes tiges et tiges plus âgées dont ont été extraits des sucs. Les extractifs ainsi obtenus ont été conservés à12 °C, après la mesure de leur PH.

Des échantillons de lait ont été traités avec diverses quantités extraites de chaque partie de la plante et le temps de coagulation enregistré. Le caillé a ensuite été découpé et le petit-lait draîné du coagulum. Sa teneur en lipides et son poids ont enfin été déterminés.

D'une manière générale, le temps de coagulation diminue avec l'augmentation de la quantité de sucs et les sucs extraits des feuilles donnent de meilleurs résultats que ceux provenant des tiges. La quantité de fromage obtenue va de 180 à 194 g par litre de lait et diminue avec l'augmentation du temps de coagulation.

Le caillé obtenu avec la présure est plus ferme que celui obtenu par acidification spontanée, il donne une meilleure qualité de fromage et il n'y a pas de perte lors de l'égouttage. Par contre, l'extraction du sérum nécessitera souvent un pressage.

La plupart du temps, les deux types de coagulation coexistent et selon la prédominance de l'une ou de l'autre forme, on appelle le caillé obtenu lactique ou avec présure.

Comment réaliser le caillage du lait?

Le lait, refroidi à 40 °C, est versé dans la cuve de fabrication et est à nouveau filtré pour enlever les impuretés.

· Le fromager verse la présure pendant que l'aide-fromager agite le lait. La température du lait est de 36 °C.

La maturation doit se faire entre 32 et 36 °C, zone optimale pour l'action enzymatique de la présure.

A ce moment là, le fromager et son aide plongent les arrêtoirs dans la cuve pour stopper le mouvement tournant du lait. Les arrêtoirs sont retirés quand le lait ne tourne plus. Après 40 minutes, le lait a durci: il est coagulé.

· Le caillage nécessite une cuve en aluminium munie d'un robinet pour l'écoulement du sérum. Le modèle le plus courant, une simple cuve demi-sphérique de 80 cm de diamètre, peut traiter de 50 à 100 litres de lait. Sa forme facilite le travail du lait, surtout lors du décaillage. Les cuves commercialisées sont en résine de polyester ou fibre de verre mais une jatte en terre cuite commandée aux artisans potiers convient tout à fait. Un support en cornière métallique aidera à maintenir la cuve en équilibre.


Figure 10 - Cuve de coagulation

Pour des quantités plus importantes (jusqu'à 500 litres), une cuve plus élaborée sert à la pasteurisation, au refroidissement (avec circulation d'eau froide dans la double paroi) et à la coagulation.


Figure 11 - Tank de pasteurisation servant à la coagulation

Le découpage

Une fois achevée la phase de coagulation, on procède à l'égouttage. Mais, pour certains fromages, comme les caillés-présurés très souples et imperméables, il est nécessaire de les découper d'abord en petits morceaux pour développer les surfaces d'exsudation.

Quand la masse est bien solide, le fromager la découpe à l'aide d'un tranche caillé (cf. figure ci-contre) généralement en acier inoxydable. Le décaillage fractionne le caillé en petits grains blancs. Un liquide jaunâtre s'écoule: le sérum. On arrête le découpage du caillé quand les grains atteignent la taille de grains de café

Le temps pour la découpe est de 7 minutes. La température des grains est de 32 °C à la fin de l'opération.

Ce découpage peut être suivi d'un brassage, qui empêche les grains de caillé de se ressouder et permet un assèchement plus poussé.


Figurés 12 - Différents types de tranche caillé


Figure 13 - Découpage du caillé dans un petit récipient à l'aide d'un couteau


Figure 14 - Découpage du caillé-présuré dans un grand récipient à l'aide d'un tranche-caillé

L'égouttage

Une fois découpé, le caillé s'égoutte dans des moules. Si l'on ne dispose pas de moules tout prêts (en bois, en terre cuite ou en plastique), il est possible de couper des cylindres de 10 cm de hauteur dans des tubes de plastique suffisamment larges, puis de les percer de trous placés en quinconce.


Figure 15 - Différents types de moules

Un des buts de l'égouttage est de contrôler la teneur en eau du fromage. Au cours de cette opération, le caillé se contracte et expulse une partie du liquide qu'il contient: le lactosérum. Celui-ci emporte une partie des éléments solubles (sels, lactose, protéines solubles).

L'égouttage est différent selon le type de fromage que l'on veut obtenir.

· L'égouttage d'un caillé-présuré ne produit qu'une faible déminéralisation du caillé et le lactosérum obtenu contient essentiellement du lactose. De plus, la présence dans le caillé-présuré de sels de calcium en quantité plus importante donne une meilleure cohésion au fromage. Ceci explique que les fromages fabriqués selon ce processus ont des tailles plus importantes (emmental, cantal).

· L'égouttage d'un caillé lactique est rapide mais incomplet car une partie du caillé, très friable, est entraîné avec le lactosérum. Une température élevée, supérieure à 30 °C, favorise l'opération; en dessous de 10 °C, l'égouttage n'est pratiquement pas réalisable.


Figure 16 - Différence d'égouttage entre deux types de caillé

L'égouttage se poursuit pendant 15 à 36 heures selon les types de fabrication et les laits employés. Un lait mixte vache et chamelle, est plus long à s'égoutter. On peut accélérer l'égouttage en pratiquant deux ou trois retournements des fromages dans le moule. Des couvercles en bois posés directement sur le caillé rendent également l'égouttage plus rapide.

· Un plan incliné, par exemple une table inclinée en bois, facilite l'égouttage. On répartit le caillé dans des moules placés sur des tables inclinées équipées en leur partie inférieure d'un dipositif (trou ou gouttière) de récupération du sérum.


Figure 17 - Table de moulage(en bois ou en acier inoxydable)


Figure 18 - Egouttage du caillé et récupération du sérum

Une fois égoutté, le caillé est démoulé puis placé sur des claies en bois pour le manipuler aisément.

Le pressage

L'égouttage peut être renforcé au moyen d'un pressage.

Le sérum est bien entendu séparé du caillé et récupéré.

Lors du pressage, le caillé découpé est placé dans un moule. Le pressage doit être progressif afin d'expulser correctement le sérum résiduel. Faible au début, il devient plus fort une heure après. La durée totale du pressage peut être de douze heures.

· Il existe différentes méthodes de pressage:

- la méthode la plus rudimentaire consiste à poser sur les fromages démoulés un parpaing ou des dalles de béton de 50 x 50 x 8 cm reposant sur une planche de bois. Cette méthode convient aux fromages de taille petite et moyenne;

- la presse à vis verticale est réservée aux gros fromages (de 40 à 50 kg).


Figure 18 - Le pressage par poids (parpaings)

Une fois égouttés, les fromages d'une même fabrication sont pesés au moyen d'une balance ou claie de pesage. Celle-ci est fabriquée en bois et comporte quatre anneaux de fabrication.


Figure 19 - La presse à vis

L'affinage

C'est une opération délicate qui exige des locaux frais et une hygiène stricte de la matière première et des conditions de fabrication.

· On affine le fromage pour deux raisons:

- pour accroître la durée de conservation du produit. Ceci peut être obtenu en séchant le fromage ou en le salant (salage du caillé);

- pour donner davantage de goût au fromage. Ainsi, par exemple, le caillé frais a peu de goût. L'affinage permet au fromage d'acquérir sa personnalité spécifique. Le type de maturation dépend de l'oxygène, de l'humidité, du salage, de l'acidité, des ferments, etc.

· L'affinage peut durer de quelques jours à plusieurs mois, dans des conditions particulières:

- une température assez basse associée à une humidité élevée règlent l'activité microbienne et enzymatique;

- une bonne aération assure les besoins en oxygène de la flore superficielle.

Ceci implique le cantonnement des fromages à affiner dans des zones privilégiées (en altitude par exemple) ou à certaines périodes plus fraîches. Dans les pays tropicaux, les périodes d'affinage sont en général réduites à cause des conditions climatiques. Dans le cas où aucune période de l'année n'est assez fraîche, il faut prévoir une climatisation des locaux.

Le salage et le séchage

· Le sel joue un rôle important dans la fabrication du fromage car il favorise l'égouttage, oriente le développement microbien et relève la saveur de la pâte. Un fromage bien égoutté doit être plus salé qu'un fromage mal égoutté, dont l'eau excédentaire devra être évacuée par la suite.

Le salage peut s'effectuer à sec ou en saumure. Dans le premier cas, on projette du sel fin sur les différentes faces du fromage ou on le roule dans du sel étalé. Dans le deuxième cas, on maintient le fromage pendant deux heures dans un bain d'eau salée à 33 grammes de sel par litre, à température ambiante.

· Le séchage, ou ressuyage, consiste à placer les fromages dans un courant d'air pendant deux à quatre jours, à l'ombre ou au soleil suivant le type de fromage souhaité. Quand un fromage est séché, cette opération s'effectue après l'égouttage, mais elle ne le remplace pas.

Le séchage peut être prolongé. Les Touaregs du Sahara fabriquent ainsi des fromages extrêmement secs qui se conservent plusieurs mois (cf. le chapitre 4 sur les exemples d'activités fromagères). Ces fromages sont tellement secs qu'il est nécessaire de les réduire en poudre pour les consommer. Contrairement aux autres fromages, ils ne sont pas salés (le sel est rare dans ces régions). Le séchage et la conservation sont réalisées uniquement grâce à la chaleur et la sécheresse de l'air.

Le fromage à pâte pressée

Pour réaliser ce type de fromage, il faut le saler, ce qui déclenche son mûrissement, puis le faire sécher pendant trois jours et enfin l'affiner en cave pendant 20 jours. Pendant cette période, le fromage prend sa forme, sa taille et son goût définitifs.

Dans certains cas, les fromages sont préalablement saumurés dans des bacs réservés à cet effet.


Figure 20 - Saumurage dans un bac et séchage sur claies

Les fromages à affiner sont stockés dans la cave sur des claies en bois ou des étagères. La température doit être fraîche: 12 à 16 °C, jamais plus. L'air doit rester humide; il faut donc jeter de l'eau tous les matins sur le sol de la cave. Les fromages sont retournés et frottés tous les jours sur les faces et les côtés.

Voir figures page suivante.


Figure 21 - Claies en bois pour l'affinage des fromages


Figure 22 - Etagères pour l'affinage des fromages

Le conditionnement

Un bon conditionnement doit être léger, hygiénique, solide et de manipulation facile. Il ne doit pas coûter trop cher à l'achat et à l'entretien. Une solution simple: des caisses en bois dans lesquelles les fromages reposent sur un fond garni de feuilles séchées. Ils doivent être aérés et ne pas être empilés les uns sur les autres.

Des caisses en bois propres suffisent pour le transport des fromages.


Figure 23 - Caisse en bois servant au transport des fromages

Il faut faire particulièrement attention au conditionnement des fromages affinés. Ils constituent un produit fragile qui, placé dans de mauvaises conditions de conservation et de manipulation, est susceptible de se dégrader très rapidement.

Les micro-fromageries «clé en main»

En réalité, il existe très peu de fromageries artisanales construites entièrement localement. Raison essentielle: les équipements de base sont quasi inexistants dans la plupart des pays.

C'est pourquoi des constructeurs d'équipement proposent des micro-laiteries constituées d'équipements peu sophistiqués (tanks de ferme, bassines, bains-marie pour la pasteurisation, système de conditionnement en kit) pour un prix n'atteignant pas les 200 000 FF.

La capacité de traitement de ces micro-laiteries est de 200 litres par jour soit une fabrication de 80 kg de fromage par jour. Elles utilisent soit du lait collecté localement soit du lait reconstitué (poudre de lait écrémé additionné quelquefois de lait local).

Le matériel proposé, conçu pour une installation simplifiée, ne comprend pas le local, ni les systèmes d'alimentation en eau et électricité ou d'évacuation des eaux usées. L'eau chaude est obtenue par chauffage au gaz à feu nu.

L'équipement de base comprend:

- des bassines de 100 litres;
- des bidons à lait de 20 litres;
- un bain-marie pour la pasteurisation;
- un bac pour le refroidissement du lait en bidon;
- une remplisseuse à main;
- un tank de refroidissement;
- des moules simplifiés en inox;
- des tables de travail et divers supports.

En option: un chauffe-eau électrique et une étuve pour la fabrication de yaourts.

Ces micro-laiteries permettent de fabriquer les produits suivants:

- du lait fermenté caillé (à partir de lait local ou reconstitué) conditionné en pots plastique avec couvercles et remplis à la main;

- du fromage blanc, type queso blanco, présentant de bonnes qualités de conservation et des possibilités d'affinage éventuel.

Le procédé prévoit la pasteurisation du lait local à 65 °C pendant 30 minutes.

Garantir une production de qualité

La qualité de la production fromagère est un élément déterminant du succès de toute unité de fabrication, artisanale ou industrielle. A tous les niveaux de la chaîne, depuis la collecte du lait jusqu'à la livraison des produits aux commerçants, il est indispensable de respecter strictement les règles d'hygiène et les procédés de fabrication. Les mauvaises manipulations, l'inattention et le manque d'hygiène aboutissent inévitablement à une production dégradée. Le consommateur refusera alors d'acheter les produits ou bien il faudra les brader à bas prix. Comme les petites fromageries fonctionnent toujours avec des marges bénéficiaires faibles, les conséquences économiques peuvent être désastreuses et même provoquer la faillite de l'entreprise.

Le lait, un produit fragile

La composition du lait

Le lait est un aliment liquide complet, très nourrissant, réunissant à lui seul tous les composants
nécessaires à l'alimentation humaine. Dans 100 kg de lait, il y a 37 kg d'eau et 13 kg de matières sèches.

· Les principaux constituants solides du lait sont la matière grasse, les protéines et le lactose. Leur concentration varie selon les races des animaux producteurs, de leur alimentation et de l'environnement.

Outre des minéraux et des vitamines, le lait contient trois types de composants essentiels à l'homme:

- les lipides (matières grasses);
- les protéines);
- les glucides (sucre, lactose).


Figure 23 - Composition chimique du lait

· La matière grasse est composée d'un mélange d'acides gras saturés ou non. Constituant le plus variable du lait, la matière grasse se trouve en suspension dans le lait sous forme de minuscules gouttelettes (globules gras) et forme une émulsion (huile dans l'eau).

· Les protéines se répartissent en deux groupes principaux: les protéines de la caséine, qui représentent 80 % des protéines totales, et les séroprotéines, minoritaires (20 %), mais qui possèdent une valeur nutritive plus élevée que les premières.

· Le lactose est un sucre disaccharide qui se présente sous forme de solution et qui est généralement le principal élément solide du lait.

Les composants secondaires du lait sont constitués par les sels, les enzymes, les vitamines et les oligo-éléments. Sa richesse en calcium et en phosphore font du lait un aliment très adapté à la croissance des jeunes enfants.

Pourquoi le lait se détériore-t-il?

· Le lait est un aliment dont la durée de vie est très limitée. En effet, son Ph, voisin de la neutralité, le rend très facilement altérable par les micro-organismes et les enzymes. Sa richesse et sa fragilité en font un milieu idéal où de nombreux micro-organismes comme les moisissures, les levures et les bactéries se reproduisent très vite. Ses vitamines et ses matières grasses peuvent se transformer sous l'influence de la lumière, de l'oxygène, du cuivre, de l'échauffement.

Il est déconseillé de boire du lait non bouilli, ou chauffé à température insuffisamment élevée, et de manger des produits réalisés avec ce type lait car ils peuvent contenir des agents pathogènes, responsables de maladies la brucellose par exemple.

Exposé à l'air et maintenu à température ambiante, le lait s'acidifie et perd rapidement qualités, goût, odeur et texture.

· Les moisissures se développent d'autant plus facilement que le milieu est humide et acidulé. Ce sont elles que l'on aperçoit sur la surface du beurre et du fromage. Pour le fromage, on peut y remédier en le couvrant de plastique ou de cire. Il faut noter toutefois que certaines moisissures sont sélectionnées pour la fabrication de quelques fromages, comme le Roquefort ou le Camembert.

· Il faut distinguer deux types de bactéries qui se développent dans le lait: les bactéries utiles et les bactéries, pathogènes, qu'il convient d'éliminer.

Les bactéries - présentes dans le lait caillé, le yaourt, les fromages - augmentent la quantité d'acide lactique du lait en lui donnant un goût aigrelet (parfois recherché).

Cette acidification du lait frais, provoque une coagulation spontanée appelée caillage; le lait ainsi caillé est souvent consommé tel quel. L'augmentation d'acidité empêche un certain temps la prolifération d'autres bactéries nocives.

Il faut cependant se méfier car cette protection est de courte durée. Des bactéries nocives se développeront rapidement dans le lait caillé et le rendront impropre à la consommation.

Le lait doit donc impérativement être conservé et protégé des détériorations naturelles. Pour cela, différentes techniques sont possibles.

Comment conserver le lait?

· La conservation par le froid

A température ambiante, le lait frais se conserve 5 heures en moyenne sans aucune préparation. Pour conserver le lait frais pendant 3 ou 4 jours, il est nécessaire de le maintenir à une température voisinant les 4 °C, dans un récipient propre et fermé.

Les traitements thermiques

Un traitement par la chaleur (traitement thermique) permet de conserver le lait plus longtemps, de quelques jours à quelques mois. Ce traitement thermique détruit en partie (pasteurisation) ou en totalité (stérilisation) les micro-organismes responsables de l'altération du lait. Pasteurisation ou stérilisation sont obligatoires avant toute transformation du lait. Ils ont pour objectif la stabilisation et la décontamination du lait.

La pasteurisation permet de détruire une partie des germes, non sporulés, présents dans le lait frais. On élimine ainsi un certain nombre de bactéries capables de provoquer des fermentations indésirables lors de la fabrication du fromage.

A la suite de ce traitement par la chaleur, le lait doit être refroidi très rapidement pour éviter les altérations physico-chimiques trop importantes et le développement des micro-organismes qui se développent entre 10 et 40 °C.

La pasteurisation ne détruit qu'un certain nombre de germes (dont les germes pathogènes responsables de certaines maladies comme la brucellose et la tuberculose). Les formes sporulées résistent et le lait pasteurisé se conserve moins longtemps que stérilisé.


La pasteurisation et la stérilisation

Lait frais ou lait en poudre?

La transformation du lait en fromage permet de pallier les irrégularités de la production laitière, souvent saisonnière. Elle permet d'absorber les excédents de la production et de garantir une consommation et une vente de produits dérivés du lait tout au long de l'année. Les producteurs peuvent ainsi stabiliser et augmenter leurs revenus.

Raisonner en terme de filière lait-fromage

Mais l'activité d'une petite fromagerie peut aussi être gênée par l'irrégularité de l'approvisionnement en lait. En fait, le développement d'une activité fromagère et de la production laitière vont de pair. Elles s'entrainent motuellement, et c'est au niveau de la filière lait-fromage qu'il faut raisonner. De même, la création de petites unités artisanales de transformation du lait a aussi un impact positif sur le développement des activités de transport, en amont et en aval, de distribution et de commercialisation.

Si la création de petites fromageries peut être un facteur important de développement de toute la filière, cela ne veut pas dire pour autant qu'une fromagerie doive fonctionner exclusivement avec du lait frais local. L'utilisation de poudre de lait peut être une nécessité pour garantir la régularité de l'approvisionnement. Il s'agit alors de combiner l'utilisation de lait frais et de lait en poudre, en augmentant progressivement la part acquise auprès des éleveurs de la région.

Une logique en deux phases

En Afrique, notamment sahélienne, beaucoup de laiteries et de fromageries, emploient de la poudre de lait pour faire tourner leur installation. Cette poudre de lait importée coûte souvent moins cher que le lait local; sa qualité est homogène et standardisée. Ce choix a souvent été critiqué car il constituerait un obstacle à l'écoulement de la production locale.

L'analyse du fonctionnement de différentes fromageries montre que le recours partiel et temporaire à la poudre de lait n'est pas forcément un obstacle au développement de la production laitière locale, bien au contraire.

· Au démarrage d'une micro-fromagerie, la poudre de lait permet de produire un fromage de qualité constante, sans difficulté d'approvisionnement. Lorsque la fromagerie fonctionne bien, elle peut alors susciter l'intérêt des éleveurs qui cherchent à y vendre une partie de leur production.

A cette étape le lait local, de qualité souvent peu homogène, peut être transformé en lait caillé.

· Dans un deuxième temps, à condition qu'il y ait un suivi des éleveurs (amélioration de l'alimentation du troupeau, sélection d'espèces, soins vétérinaires), il est possible d'obtenir petit à petit un approvisionnement en lait local régulier, de meilleure qualité. La poudre de lait importée peut alors être progressivement remplacée par le lait local.

· Dans la pratique, cette deuxième phase n'est pas toujours mise en place, soit parce qu'il n'y a pas de possibilité d'effectuer un suivi efficace des éleveurs, soit parce que les responsables de la fromagerie jugent plus simple de continuer à fonctionner avec de la poudre de lait. Il est donc très important, lorsqu'on monte un projet de petite fromagerie, de programmer effectivement cette seconde phase de passage au lait local, et de la mettre en oeuvre. Même si c'est parfois plus difficile que de se contenter de fonctionner à la poudre de lait, c'est une condition importante de l'insertion réelle de la fromagerie dans le tissu économique local.

L'exemple de la laiterie de Mopti

La laiterie de Mopti au Mali fournit un bon exemple de complémentarité réussie entre la poudre de lait et le lait local.

La laiterie de Mopti a été construite en juin 1988 avec la participation financière et technique de la région française Franche Comté. L'atelier installé est de confection française, il peut traiter 2 000 à 2 300 litres par jour.

L'équipement est composé d'un pasteurisateur, d'une chambre froide, d'une écrémeuse manuelle et d'une machine à conditionner les fromages sous forme de berlingots. Cependant sa production n'a jamais dépassé 1000 litres/jour.

Le lait est conditionné en 1/4 litre afin que le prix de vente unitaire soit adapté au faible pouvoir d'achat de la population. Il s'agit de lait local et non pas de lait en poudre.

D'autre part, la laiterie a conclu un accord avec l'ODEM (Organisation locale de développement de l'élevage) de limitation de la quantité de lait qu'elle traite, afin de ne pas concurrencer la vente du lait cru par les éleveurs sur le marché local.

Les produits laitiers vendus sont tous pasteurisés. Le lait pasteurisé est exclusivement réalisé à partir de lait local.

Le lait caillé est produit à partir de lait en poudre et d'huile de beurre. Il est très apprécié par la population locale.

La fromagerie souhaite progressivement diminuer le recours à la poudre de lait et se fournir davantage auprès des éleveurs, afin de favoriser le développement local d'une filière lait à activité régulière et croissante.

La formation du personnel: une étape indispensable

Si l'on veut garantir la qualité du produit final et respecter les règles de fabrication et d'hygiène, il faut que le fromager les ait lui-même correctement comprises et assimilées. La formation peut être très brève, mais elle est toujours indispensable.

La formation, son contenu et sa durée, dépendent bien sûr du type de fromage à produire, de la taille et du niveau de technicité des matériels et équipements utilisés. La formation doit ainsi être plus complète et plus longue dans le cas de production de fromages affinés.

Par exemple, la fromagerie du Burundi, qui produit du fromage à pâte molle pressée (cf. le chapitre 4 sur les exemples de fromagerie) a formé ses fromagers pendant plusieurs mois. En effet, suivant les saisons, les techniques à employer varient légèrement (séchage, affinage). Par contre, un ou deux jours de formation suffisent lorsqu'il s'agit de fabriquer du fromage blanc à partir de poudre de lait, comme dans le cas de la laiterie de Mopti.

En plus des procédés techniques et des règles d'hygiène, il est nécessaire de donner au fromager une formation technique sur la maintenance et l'entretien du matériel. Ce savoir-faire est en effet indispensable s'il l'on veut éviter des arrêts de production fâcheux pour la rentabilité de l'unité et pour son image de marque.

Les thèmes de formation

Les thèmes de formation suivants doivent être abordés, de façon plus ou moins approfondie selon les cas:

- les différentes étapes et opérations de la fabrication du fromage;

- l'hygiène et la propreté (du bâtiment, des équipements, des vêtements, des mains), indispensables à l'obtention de produits de qualité;

- le contrôle de la qualité du lait;

- le contrôle et l'éducation du coup d'oeil;

- l'entretien et la maintenance de certaines machines.

Dans le cas d'une fromagerie qui emploie plusieurs personnes, une formation de base du responsable en gestion est nécessaire afin d'assurer un suivi de l'approvisionnement et de la commercialisation des produits de la laiterie-fromagerie.

Comment remédier aux accidents de fabrication?

Même si le fromager a été bien formé, il peut arriver des incidents de fabrication, qu'il faut rapidement identifier et contrecarrer. Voici une liste succincte des accidents de fabrication les plus courants, ainsi que la façon d'y remédier.

· Gonflement de surfaces du fromage en contact avec les planches:

- Agent responsable: une bactérie, le "pseudo acidifiant coliforme"; ce gonflement intervient tardivement (8 jours après la fabrication).

- Solution apportée: retournements délicats et nombreux du fromage.

La vente du fromage se fait à 17-,20 jours, après ce laps de temps, le fromage se creuse.

· Gonflement des tranches:

- Agent responsable: des levures en grande quantité dues à une manque d'hygiène: pollution de la presse, des moules, des toiles et parfois de la saumure.

- Solution apportée: grand nettoyage à l'eau bouillante trois fois de suite à une heure d'intervalle.

· Affaissement du fromage:

- Agent responsable: la maturation a été mal conduite ou le pressage a été inefficace. La saumure est mal entretenue (marque de sel, salissures...).

- Solution apportée: refaire un ferment propre, égaliser le caillé dans les moules de façon à obtenir un pressage homogène sur tous les fromages. Rajouter du sel à la saumure.

· Surface creusée :

- Agent responsable: trop de thermophiles (bactéries qui se développent et résistent à des températures élevées) et pas assez de mésophiles (à températures moyennes). Le levain est épuisé.

- Solution apportée: ajouter au levain une petite dose de fromage blanc et de yaourt.

· Les moisissures:

- Agent responsable: manque d'hygiène, matériel pollué. Les moisissures se devéloppent dans les trous du fromage.

- Solution apportée: désinfection du local (murs, sols, matériels).

· Trous de moulage, rainures:

- Agent responsable: différence de température dans le fromage lors du moulage, grain coiffé, grain trop asséché, moule trop froid.

- Solution apportée: faire tremper le moule dans le sérum encore tiède, remplir le moule en une seule fois.

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