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5. Conclusions

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Au terme de la première phase de ce projet, des résultats techniques satisfaisants ont été obtenus grâce à une collaboration active entre utilisateurs/consommateurs, chercheurs et constructeurs.

Le suivi des unités placées en conditions réelles d'utilisation a montré que si les unités à caractère commercial s'avèrent rentables avec une bonne gestion, il n'en est pas de même des unités villageoises où le niveau d'activité est encore très bas à cause précisément du coût des prestations qui oblige les consommateurs à faire un choix entre le décorticage et la mouture.

Fig. 7: Minidécortiqueuse CIS III (Sismar BP 3214 Dakar)

Fig. 8 Evolution du prix de revient du décorticage mécanique en fonction des quantités décortiquées annuellement au niveau des 9 sites pilotes.

Le niveau d'appropriation d'une technologie étant fonction de son utilité réelle pour les cibles concernées, mais également de son coût d'acquisition et d'utilisation ainsi que des modalités de l'acquisition, il convient de mettre l'accent sur ces derniers aspects, notamment:

- la réduction notable du coût de l'équipement (diminution de la fiscalité, fabrication en grandes séries,...);
- la mise en place de circuits de maintenance et de distribution;
- l'activation d'un crédit mieux collé aux réalités.

Fig. 9: Evolution comparée des principales composantes du prix de revient du décorticage mécanique en fonction des quantités traitées au niveau des sites pilotes.

D'autre part, en vue de faciliter l'utilisation de I'équipement, il faudrait entreprendre des études en vue de:

- définir un ensemble de paquets technologiques pour la transformation des céréales en milieux rural, semiurbain et urbain;

- déterminer les conditions techniques, économiques et sociales permettant une meilleure utilisation de ces ensembles.

De telles études, tout en complétant les travaux antérieurs dans ce domaine, contribueraient à la résolution du problème général que constitue la valorisation des céréales locales au Sénégal et dans les autres pays du Sahel.

Tableau No 1 Coûts spécifiques de décorticage mécanique (F.CFA/kg)

Sites Cout total Amortissement Entretien réparations Carburant lubrifiants Meunier Coût hors amortissement (couts variables) Valeur relative amortissement (%)
Baila 41,6 33,0 2,5 4,0 2,1 8,6 79,33
Bamba tialene 19,2 13,8 1,1 3,0 1,3 5,4 71,87
Bignona 12,9 6,6 1,1 2,8 2,4 6,3 51,16
Hamdallaye tessan 41,2 33,0 2,0 4,1 2,1 8,2 80,10
Kartiack 56,0 47,1 2,7 4,1 2,1 8,9 84,11
Keur samba kane 15,8 9,2 1,1 3,2 2,3 6,6 58,23
Khandiar 13,5 7,8 0,9 2,2 2,6 5,7 57,78
Lambaye 34,7 27,5 1,5 3,4 2,3 7,2 79,25
Mont-Rolland 34,7 27,5 1,3 3,7 2,2 7,2 79,25

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Les entreprises porteuses de dynamique d'innovation dans le domaine de la valorisation des céréales au Sahel: les expériences menées au Burkina, au Mali et au Sénégal

Jean-Pierre Ouedrago
Comité Permanent interEtats de Lutte Contre Sècheresse dans le Sahel (CILSS)

Abstract

Innovating enterprises in cereal processing in the Sahelian zone: Burkina, Mali, and Senegal experiences.

Experiments implemented by the regional programme entitled "Promotion of local Cereals in Sahel" (PROCELOS) are described to illustrate how the appropriate size of processing equipment and the appropriate manufacturing firms have been identified locally.

Industrial units, mini-mills, and custom-mills are filling specific needs according to market sizes, milled products, and consumer income. Increases in urban populations and in numbers of young peuple must be taken into account together with new food habits and economics when the building of a new mill in envisaged.

1. Introduction

Les chercheurs se posent la question de savoir quels axes devraient emprunter l'effort de la recherche dans le domaine agro-alimentaire ? Quels types d'unités sont réceptifs à l'innovation ou même porteurs de dynamique d'innovation.

Les expériences suivies par le programme PROCELOS dans trois pays du Sahel: Burkina, Mali et Sénégal devraient pouvoir éclairer la démarche à suivre pour la recherche de réponses aux interrogations ci-dessus. Il convient auparavant de rappeler les objectifs visés par le programme PROCELOS et les limites de son action. ce programme réagit face à l'envahissement des marchés ouest africains par des céréales importées en appuyant le secteur de la transformation agro-alimentaire dans la diffusion de produits modernes à base de céréales locales; pour le PROCELOS, le désir des consommateurs urbains de diversifier leur alimentation l'emporte sur leur recherche de produits alimentaires importés Si ce besoin de diversification était satisfait par les produits locaux, cela se traduirait en parts de marché gagnées sur les céréales importées. Dès lors, il convient de fabriquer et mettre sur le marché des produits à base de céréales locales, répondant à leurs exigences en matière de goût et de prix pour répondre à ce besoin de diversification. L'action du PROCELOS est également sous-tendue par la volonté politique des Décideurs des neuf pays membres du CILSS de valoriser leurs productions céréalières.

L'alimentation des villes en Afrique sub-saharienne constituera un défi dans les années à venir, que le secteur agro-alimentaire ne pourra relever sans l'apport de la recherche et le recours à l'innovation. Dans des pays comme le Burkina et le Mali, l'accroissement de la productivité sur le mais dans certaines zones fertiles est en grande partie bloqué par l'incapacité du secteur agroalimentaire à représenter un débouché sur et conséquent pour ce produit

2. Constats: Les experiences menees dans certains pays du Sahel

Depuis le début des années 80, les pays sahéliens ont connu le lancement de plusieurs initiatives dans le secteur de la transformation agro-alimentaire. De nouveaux équipements pour le nettoyage, le décorticage et la mouture des céréales ont été mis au point 11 en a résulté la mise sur le marché de plusieurs produits finis de 1ére transformation: brisures, semoules et farines réalisées de façon mécanique et non plus manuelle.

Concernant les types d'unités de transformation mises en place, le Sahel en plus des unités artisanales, a vu se monter des industries de grande taille, para-étatiques ou appartenant a des groupes étrangers. Dernières nées de la filière, les unités semi-industrielles se situent à mi chemin entre l'artisanale et l'industrielle. La miniminoterie s'apparente à la première de par sa taille modeste et sa production limitée; en revanche elle emprunte à la grande industrie, son système de production qui va de l'achat de la matière première à la vente aux consommateurs de produits finis: semoules, brisures ou farines.

Pour apprécier l'évolution intervenue ces dernières années, nous nous référerons souvent à l'attitude des consommateurs vis-avis des différents produits présentés sur le marché. En effet le consommateur est le destinataire final de ces produits. Il sanctionne à la fois la qualité du produit et l'approche marketing suivie par l'entreprise, en achetant massivement moyennement ou très faiblement le nouveau produit.

L'examen de cette évolution sera mené en distinguant les trois types d'unités de transformation retenus cidessus et en analysant leur aptitude à favoriser l'innovation.

2.1 Les Industries

Au Mali, au Sénégal et au Burkina, les Grands Moulins sont équipés pour transformer les céréales locales particulièrement le maïs. Les Moulins SENTENAC (Sénégal) sont les seuls à ce jour à fournir le marché en sachets de semoule et farine de mil, vendus essentiellement par l'intermédiaire de grossistes qui écoulent ces produits à travers leurs réseaux de détaillants ou dans les super marchés. Les Grands Moulins du Burkina transforment épisodiquement du mais pour approvisionner les consommateurs finaux ou la brasserie moderne en brisures et farines. Les Grands Moulins du Mali ne procèdent à aucune transformation de céréales locales.

Exception faite du Sénégal, les autres expériences quoique bénéficiant de soutiens politiques n'ont pas répondu aux attentes. Les meuniers se plaignent du coût élevé de la matière première qui réduit d'autant leur marge sur la vente des céréales transformées. Il convient de signaler également que les grandes Minoteries bénéficient souvent de monopole sur le blé et ont de ce fait tendance à rapprocher la marge sur le mais, à l'importante marge réalisée sur le blé grâce au monopole.

L'expérience réalisée par les Moulins SENTENAC demande à être consolidée, car jusque la cette structure a bénéficié de subventions octroyées par le gouvernement et les bailleurs de fonds à partir des fonds de contrepartie de l'aide alimentaire. Les Autorités sénégalaises ont décidé de réduire progressivement cette subvention. Il convient donc de suivre de près cette expérience car sa poursuite dépendra de la rentabilité de l'opération d'innovation qui a consisté à lancer des produits traditionnels, réalisés et conditionnés de façon moderne.

L'expérience des Moulins SENTENAC au Sénégal conduit à se poser la question suivante: les pays du Sahel ont-ils intérêt à protéger voire même subventionner leur secteur agro-alimentaire moderne naissant ?

La réponse à cette question est souvent esquivée sous la forme de réponses "idéologiques" toutes faites: "Toute subvention est nuisible car elle fausse le fonctionnement du marché". Les sahéliens ne pourront pas indéfiniment faire l'économie d'une recherche de réponse à cette question. Les pays dont la stratégie industrielle prévoit un développement du secteur agroalimentaire ou agro-industriel devront à notre sens prévoir des mesures d'accompagnement incluant probablement le recours à diverses formes d'appui.

Les unités industrielles dans leur ensemble souffrent de problèmes d'approvisionnement en matière première. Ces minoteries rencontrent des difficultés à garantir les milliers de tonnes dont elles ont besoin pour éviter de tourner en dessous de leur capacité ou de connaître des ruptures de stock: la production de céréales est une activité saisonnière tandis que la transformation est permanente.

La seconde difficulté qui entrave le succès de l'opération transformation des céréales locales par les grandes industries porte sur l'approche marketing. Il est apparu lors d'une rencontre organisée par le PROCELOS à Bamako (Mali) en décembre 1990, que les minoteries avaient tendance comme les autres unités de transformation à négliger l'aspect marketing de la transformation. Les produits mis au point n'ont de ce fait pas toujours rencontré l'assentiment des consommateurs. L'effort entrepris par les Moulins SENTENAC pour placer le consommateur à l'origine de toute action de création et de lancement de produit, explique le taux de pénétration actuel de leurs sachets de semoule et farine, dans la ville de Dakar. Même si le sachet de farine de mil, ne contient après tout que de la farine de mil, aliment traditionnel par excellence, il importe cependant de le promouvoir car pour le consommateur il s'agit tout de même d'un nouveau produit Les minoteries refusent assez souvent de supporter des frais «supplémentaires" pour la promotion du mais; ces frais sont qualifiés de supplémentaires, à cause du rapprochement qu'elles font avec le blé qui lui "se vend tout seul".

L'expérience sénégalaise a conduit à la constitution d'un panel de consommateurs et d'un panel de distributeurs des produits céréaliers transformés. Ces panels facilitent l'instauration d'un dialogue régulier entre l'usine de production, les consommateurs et les distributeurs. Un tel dialogue représente à son tour un facteur déterminant dans tout processus d'innovation.

En résumé on peut retenir que les Grands Moulins disposent sur le plan technologique des moyens nécessaires pour réaliser ou intégrer des innovations mais qu'ils n'ont pas souvent su transformer ces innovations en succès commerciaux, parce que le consommateur n'a pas toujours été au centre de leurs stratégies de développement des nouveaux produits. De par leur taille, les minoteries ont la capacité de produire d'importantes quantités et peuvent honorer des marchés de 3000 à 4000 tonnes. Elles ont donc pour principal souci d'améliorer la pureté du produit (éliminer tout le son lors du décorticage) et le délai de conservation. La grande taille des minoteries constitue un avantage: possibilité d'honorer des marchés importants (ex: l'aide alimentaire) et de réaliser des économies d'échelle. Cependant cette taille exige la mise en place d'une véritable politique commerciale pour l'approvisionnement continu de l'usine en matière première et pour le fonctionnement d'un circuit de distribution performant Ce double constat conduit tout naturellement les minoteries à se montrer plus réceptives à l'innovation et à rechercher elles mêmes des procédés et des méthodes plus performantes. Certains Grands Moulins disposent même en leur sein de laboratoire de technologie alimentaire et de contrôle permanent de la qualité. Mais les grandes minoteries croient-elles aux céréales locales ? Le principal frein à l'innovation est à rechercher dans le caractère virtuel ou solide de cette foi aux céréales locales.

2.2 Les unités semi-industrielles

Les mini-minoteries ont été créées au Mali et au Sénégal sous forme de projets, financés par des bailleurs de fonds. Ces unités tout comme les grandes minoteries s'approvisionnent en matière première, la transforment et fournissent des sachets de semoule, farine ou brisure aux consommateurs. Compte tenu de la faiblesse du tonnage produit (moins de 200 tonnes par mois) les économies d'échelle sont faibles. Ces entreprises sont de ce fait en concurrence directe avec les moulins artisanaux qui s'adressent à la même clientèle sous des formes plus souples et moins impersonnelles.

Suivant les donateurs initiateurs des projets de miniminoteries, les unités ont été confiées, soit à des groupements de paysans soit à des gérants recrutés, plus ou moins bien encadrés, dans les deux cas.

Quel que soit le mode de gestion, les mini-minoteries ne parviennent pas à s'imposer définitivement comme entreprise à part entière de transformation des céréales. Elles dépassent difficilement le stade de projet et semblent pâtir de la conception plutôt théorique de leur mode de fonctionnement En effet les concepteurs de la mini-minoterie ont cherché de façon théorique à combler à la fois les insuffisances relevées du côté de la grande minoterie et celles du moulin artisanal. Les miniminoteries pour l'instant ont du mal à trouver leur créneau. Elles ont besoin de réaliser encore des progrès sur la qualité des produits, sur l'identification des groupes cibles intéressés par leurs produits. L'appui de la recherche pour les unités semi-industrielles devraient en priorité porter sur la qualité des produits et sur la réduction du coût de la transformation. C'est à ce prix que les semi-industrielles pourraient trouver un créneau différent de celui des moulins de quartier. Les miniminoteries gagneraient plutôt à adapter leurs produits aux besoins des collectivités, des restaurants, des grossistes vendeurs de farines ou brisures et des entreprises agro-alimentaires. Un tel marché demande un respect de normes que l'unité artisanale n'est pas en mesure de satisfaire.

Ce type de structure serait alors plus réceptif à l'innovation technologique, même s'il a tendance à attendre que l'innovation soit conçue et financée par l'initiateur du projet Cette attitude passive remonte à la conception et à l'installation des mini-minoteries.

Ce frein à l'innovation peut être levé dans les années a venir s'il y a un développement de mini-minoteries financées et gérées par des opérateurs privés et que se développe un secteur agro-alimentaire consommateur intermédiaire des brisures, semoules et farines de céréales locales: les unités qui procèdent à une deuxième transformation de ces produits de base en produits précuits, biscuits, aliments vitaminés ou amidon, auront besoin de produits répondant à des normes très précises que seules les grandes minoteries et les semi-industrielles seront en mesure de fournir.

La mini-minoterie souffre de sa petite taille qui l'oblige à procéder à des achats fréquents toute l'année sur le marché exposant la structure aux variations de prix de grande amplitude de la matière première. Alors que cette variation ne peut être immédiatement répercutée sur le prix de vente aux consommateurs. Pour réduire de telles tensions, certaines mini-minoteries acceptent durant une période de l'année de travailler comme prestataires de service devenant ainsi des moulins de quartier.

2.3 Les Moulins artisanaux

Beaucoup de bailleurs de fonds, d'ONG, d'hommes politiques, de migrants, de fonctionnaires ou d'opérateurs économiques ont contribué à la diffusion des moulins dans les villages ou les quartiers urbains par l'achat et l'installation de moulins dans leurs familles, villages ou quartiers. Cependant les propriétaires de moulins et meuniers ont rarement bénéficié de l'encadrement adéquat. Les moulins ont la particularité de fonctionner exclusivement en prestation de service: le meunier attend que la ménagère se présente avec des céréales à décortiquer ou à moudre. Il existe cependant des moulins ambulants qui recherchent la cliente désireuse de transformer ses céréales; les moulins ambulants se rendent principalement dans les brasseries traditionnelles (bière de mil) pour y transformer en brisures le sorgho rouge malté.

Le moulin artisanal a l'avantage de pouvoir conserver des relations humaines entre meuniers et clientes. Les ménagères ont la possibilité d'exiger la finesse désirée et de pouvoir disposer en permanence de "produits frais". Le moulin artisanal ne travaillant qu'en prestation de service, n'est pas tenu de faire face aux problèmes de conservation et peut transformer par vole humide pour les clientes qui le désirent

Cependant le moulin villageois ou de quartier est incapable d'honorer un marché quel qu'il soit.

La multitude des sources de financement constitue aussi le point faible de cette filière artisanale car elle aboutit dans certaines zones à une installation anarchique d'un nombre important d'unités. Le marché n'ayant pas suivi une telle évolution, la concurrence sauvage qui s'installe entre meuniers entraîne souvent la faillite de nombreux moulins.

Les moulins artisanaux sont des prestataires de service et ne fonctionnent que lorsqu'un client se présente. L'appui de la recherche pourrait consister à réduire les "temps morts" en étudiant la possibilité pour ces unités de fournir plusieurs types de services: transformation de toutes céréales mais aussi de certains produits agricoles avec un équipement de base auquel il suffirait de fixer des accessoires appropriés pour passer d'un produit à un autre. La recherche renforcerait la rentabilité de ces unités en créant des moulins artisanaux "polyvalents', tout comme les "robots ménagers". A condition que les chercheurs s'emploient à promouvoir une technologie adaptée, une technologie intermédiaire: il importe en effet que la fabrication des accessoires et le fonctionnement du moulin de type nouveau, soient parfaitement maîtrisés par les artisans métallurgistes.

Les unités artisanales appartiennent assez souvent à des opérateurs économiques, des fonctionnaires ou des ONG, dont l'objectif premier n'est pas de s'enrichir véritablement à partir de ces moulins. Ceux-ci ont pour principaux objectifs de réduire la pénibilité du travail de transformation, de constituer des emplois et une source de revenus. Il en résulte que le propriétaire n'a souvent pas de contact direct avec la clientèle et peut donc difficilement appréhender les besoins et plaintes des femmes qui viennent au moulin. La gestion du moulin est empreinte d'un certain conservatisme qui constitue le frein majeur à l'innovation. Les meuniers artisanaux ne sont pas tous convaincus de la nécessité de suivre les dépenses et recettes du moulin et de rechercher le prix de revient du kilogramme moulu.


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