4. Le point de vue pragmatique: «Nous avons commis une quantité d'erreurs»
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A l'inverse des opposants fondamentaux, les tenants du pragmatisme imputent pour l'essentiel les difficultés des banques de céréales à certaines erreurs, réparables, au moment de la mise en place, de même qu'à des insuffisances au niveau de la gestion et du suivi (ACOPAM 1987; AFDI/PGP-CMDT/SECAMA 1993; FEER 1990; MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE, PROJET DRDBI 1990).
Misant sur une amélioration de la formation et du perfectionnement, aussi bien pour les gérants de banques de céréales que pour le personnel chargé du suivi et de l'évaluation, on avait voulu, sans toutefois y parvenir, augmenter significativement le nombre des banques de céréales capables de fonctionner. Ce n'est qu'au cours de ces dernières années que l'on a commencé, lentement, à se rendre compte qu'il était impossible, même avec la meilleure des formations, de gérer efficacement une banque de céréales sur la base d'hypothèses de départ fausses.
Aujourd'hui, on considère que le problème majeur ne réside pas tant dans le travail quotidien que dans le cadre socio-économique général. Au cours d'un atelier organisé en 1991 par la F.A.O., et CILSS et ILO/ACOPAM (CILSS-BIT ACOPAM-FAO 1991) et consacré aux banques de céréales au Sahel, les participants ont dressé d'une part un bilan approfondi des expériences faites jusqu'à présent, en se livrant par ailleurs à une analyse des points faibles et en élaborant des recommandations pour les programmes futurs. Une large place a été faite à l'époque à la question du choix du site, ainsi qu'à celle de la rentabilité. Les groupes de travail respectifs étaient alors parvenus aux conclusions suivantes:
- Les banques de céréales ne peuvent pas se substituer à
l'aide sociale au bénéfice de groupes de population
marginalisés.
- Elles ne sont pas en mesure de résoudre les problèmes de
débouchés des régions excédentaires.
- Elles ne peuvent pas, sans le soutien de l'Etat, se charger de
la sécurité alimentaire, et ce en pratiquant le stockage sur
plusieurs années.
- Elles ne sont pas compétitives face aux commerçants
indépendants.
En conséquence, il est déconseillé de choisir des sites dans des régions déficitaires, dont les populations ne disposent que de faibles revenus, de même que dans les régions excédentaires dans lesquelles le problème de la «surcommercialisation» est inconnu. Selon le groupe de travail concerné, ce sont en revanche les régions «à équilibre précaire», notamment les zones reculées, mal raccordées au réseau de communication et où l'on manque du strict nécessaire, qui offrent les meilleures perspectives de développement.
Cette recommandation se heurte tout naturellement en premier lieu à l'opposition des organisations qui centrent leurs activités sur les régions à faible structure et à couches sociales marginalisées. Ces organisations considèrent qu'il est irresponsable d'exclure justement ces groupes cibles des programmes de banques de céréales.
(SOURCE: FALL, A 1991)
Nous avons commis une quantité d'erreurs
Il y a ici un second point critique, corollaire du premier, et que l'on a reconnu au cours de l'atelier comme étant un inconvénient essentiel, à savoir les subventions massives dont bénéficient les banques de céréales, ce que les participants jugent problématique pour plusieurs raisons:
- Ces subventions font en effet croire à une adhésion de la
part de la population, laquelle est cependant davantage
convaincue par le profit apporté à court terme par des fonds
immédiatement octroyés que par l'utilité à long terme d'une
activité capable de s'autofinancer.
- Les exploitants de banques de céréales ne sont pas astreints
à une gestion rentable.
- On observe certaines distorsions de la concurrence, s'exerçant
au détriment du commerce privé.
La proposition du groupe de travail «Economie» vise à réduire fortement les subventions, et notamment à ne pas subventionner les activités courantes. Il faut renoncer dès le départ à la fondation de banques de céréales incapables de survivre sans subventions permanentes. Il faudrait au lieu de cela établir des calculs de rentabilité avant la mise en place et contrôler en permanence la rentabilité en cours d'exploitation.
Du fait que ces deux opérations n'ont pas été pratiquées jusqu'à présent, on a été contraint de recourir à des calculs types non vérifiés.
Une autre recommandation de l'atelier vise à renforcer la flexibilité au niveau de la gestion des banques de céréales. L'observance de directives rigides est inopportune dans la mesure où le cadre économique global dans lequel s'inscrit le fonctionnement des banques de céréales est actuellement en mutation. Soumise aux lois de l'économie de marche, la banque de céréales, entreprise à caractère commercial, doit s'affirmer face à la concurrence.
Les expériences relatées ici permettent de formuler les conditions globales précises dans lesquelles les banques de céréales vont pouvoir fonctionner rentablement. Nous avons résumé ces conditions en sept points essentiels.
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