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6. Evaluation globale et recommandations au niveau de l'assistance-conseil

Table des matières - Précédente - Suivante

6.1 Evaluation d'ensemble des procédés de protection des stocks
6.2 Recommandations en matière d'assistance-conseil

"Les considérations globales, fondées sur une théorie systématique, doivent, au-delà des disciplines spécialisées, être axées sur la problématique réelle. Ceci implique une intégration simultanée des points de vue techniques, économiques, sociologiques et psychosociaux, auxquels doivent venir s'ajouter, dans le cas d'analyses régionales, des aspects relevant de la géographie, de l'économie de marché et des institutions." (DOPPLER, 1991 p. 12).

L'assistance-conseil, dont la mission est d'intervenir selon un plan déterminé et de façon organisée là où il n'est plus possible d'élaborer des solutions autonomes (aux problèmes) propres aux paysans, doit être axée de façon primordiale sur la situation et les besoins des paysans. C'est uniquement en partant de ce principe qu'il sera possible de déterminer l'objectif de l'assistance-conseil et de cerner les conditions nécessaires à sa réalisation (cf. à ce propos ALBRECHT et al. 1987 p. 36 et suiv.).

La base d'une conception d'assistance-conseil exhaustive, agissant dans le domaine de la protection paysanne des stocks, consiste en premier lieu à définir les contenus qui se prêtent particulièrement à une application directe à la petite exploitation agricole, et qui contribuent à apporter une solution aux problèmes de protection des stocks et d'entreposage. Pour cela, il est nécessaire de remplir une condition préalable importante, à savoir une appréciation globale holiste des procédés de protection des stocks. Les thèmes de vulgarisation doivent ensuite être intégrés à un projet de consultation et concrétisés à l'aide de (différentes) méthodes de consultation.

Le travail d'assistance-conseil effectué jusqu'à maintenant en matière de protection des stocks et d'entreposage n'obéissait pas toujours à ce principe. On s'en rend très bien compte au niveau des efforts entrepris en vue de propager les magasins fumigables et le stockage en sacs. Malgré le travail du Service National de la Protection des Végétaux et des organismes de conseil opérant dans le secteur agricole, le stockage en sacs fut très peu appliqué par les paysans (KENKOU 1988); de même, le magasin fumigable n'a jamais été utilisé à l'échelle souhaitée. La tradition de modernité des projets de développement se traduit certes dans de nombreux cas par des innovations, mais une innovation n'est pas toujours nouvelle, pas plus qu'elle n'est forcément meilleure que les méthodes traditionnellement transmises ou les pratiques mises en oeuvre jusqu'alors.

La quintessence de cette étude consiste en premier lieu à élaborer des éléments d'assistance-conseil. Les explications destinées à appliquer ces éléments ne sont que des impulsions susceptibles d'être intégrées au travail de consultation (approche d’assistance-conseil, procédé de vulgarisation) effectué sur place.

6.1 Evaluation d'ensemble des procédés de protection des stocks

6.1.1 Evaluation socio-économique des procédés de protection des stocks
6.1.2 Evaluation socioculturelle des procédés de protection des stocks
6.1.3 Evaluation technique des procédés protection des stocks
6.1.4 Aspects de l'économie nationale des procédés de protection des stocks

Le point de vue holiste implique non seulement l'appréciation des différentes procédés de protection des stocks sous l'angle de leurs avantages économiques. Il requiert également l'intégration et l'évaluation des paramètres socioculturels et techniques, ainsi que des exigences (marché des moyens de production, service conseil) et des répercussions (balance des paiements) sur l'économie nationale.

Les paramètres non économiques n'ont pu être pris en compte dans les calculs modèles, du fait que le modèle repose sur une approche partielle qui fonctionne uniquement avec des grandeurs économiques se prêtant à un recensement quantitatif. Dans le cadre d'une approche holistue, il est essentiel de faire intervenir dans l'appréciation les comportements du paysan en tant qu'"homo oeconomicus", agissant dans son environnement social.

La difficulté consiste d'une part à saisir les paramètres standardisables des grandeurs non économiques qui soient importants pour la pratique, d'autre part à définir l'échelle d'évaluation la plus objective possible qui permette une pondération de ces paramètres. Les paramètres pondérés doivent alors s'intégrer à un modèle d'évaluation en tenant compte des valeurs économiques, ce qui permet de procéder à une appréciation globale des procédés de protection des stocks.

Or les enquêtes réalisées ne satisfont pas à cet objectif. Il convient néanmoins de décrire les paramètres non économiques et de les évaluer (subjectivement) dans une échelle ordinale simple (plus/moins) (tableaux 6.2 à 6.4), un plus (moins) devant alors être considéré comme un critère de jugement positif (négatif) pour les procédés respectifs de protection des stocks.

6.1.1 Evaluation socio-économique des procédés de protection des stocks

L'avantage économique que présente un procédé de protection des stocks constitue une condition préalable nécessaire mais non suffisante à une recommandation dans le cadre de l'assistance-conseil. Un procédé de protection des stocks ne sera adopté par les paysans que si, entre autres, ils sont en mesure de la financer et de fournir le temps de travail requis. C'est pourquoi, pour être adéquate, toute appréciation économique des procédés de protection des stocks exige qu'on y intègre la mobilisation des ressources en capital et en travail, ainsi que d'autres facteurs socio-économiques qu'il est généralement impossible ou difficile d'exprimer en termes quantitatifs.

Besoins en capital

Si l'on veut appliquer des procédés de protection des stocks, la mise à disposition de capacités d'entreposage requiert, dans la mesure où celles-ci doivent être mises en place, un besoin en capital maximal, y compris lorsque la main d'oeuvre paysanne est estimée à 0 FCFA/JT. Aux besoins en capital liés à l'installation de l'entrepôt viennent s'ajouter les dépenses nécessaires pour l'achat des sacs et des palettes dans le cas des procédés de stockage en sacs, et pour l'achat des produits de protection des stocks dans le cas où on applique les mesures correspondantes (tableau 6.1).

Tabl. 6.1 Besoin en capitaux et en travail liés aux procédés de protection des stocks

Procédé (N°)   1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Besoins en capitaux                            
- Construction de (FCFA) 0 0 0 1452 1452 1452 39 525 39 525 0 0 45 325 45 325 972 382
I'entrepôt (FCFA/q) 0 0 0 242 242 242 9 881 9 881 0 0 1511 1511 3 890
- Palettes (FCFA) 0 0 0 0 0 0 0 0 4000 4000 4000 4000 52000
  (FCFA/q) 0 0 0 0 0 0 0 0 133 133 133 133 208
- Sac (FCFA/q) 0 0 0 0 0 0 0 0 250 250 250 250 250
- Produits de protection des stocks (FCFA/q 0 25 125 0 25 125 0 125 0 125 0 125 81
- Emmagasinage (FCFA/q) 236 236 236 236 236 236 236 236 0 0 0 0 0
-pour 6q de maïs (FCFA) 1416 1566 2166 2868 3018 3618 60702 61452 2298 3048 11364 12114 26574
Besoins en main d'oeuvre                            
- Construction de (JT) 0 0 0 5 5 5 3 3 0 0 19 19 120
l'entrepôt (JT/q) 0 0 0 0,82 0,82 0,82 0,75 0,75 0 0 0,63 0,63 0,5
- Préparation (JT/q) 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 1 1 1
- Application (JT/q) 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,1 0,1 0,1 0
- Emmagasinage (JT/q) 0,2 0,2 0,2 0,3 0,3 0,3 0,1 0,1 0 0 0 0 0
-pour 6 q de mais (JT) 1,2 1,2 1,2 7,3 7,3 7,3 5,1 5,1 6,0 6,6 9,8 10,4 9,0

Au moment d'opter pour l'un des 13 procédés de protection des stocks, le paysan qui veut stocker 600 kg de maïs a besoin au départ, dans le cas d'un stockage collectif en petit entrepôt ou en magasin fumigable, sur la base d'une participation aux frais proportionnelle, d'un capital de

- moins de 4 000 FCFA avec le procédé de

* stockage en épis dans l'habitation (procédés n° 1 à n° 3)
* stockage en épis dans le grenier (procédés n° 4 à n° 6)
* stockage en grains dans l'habitation (procédés n° 9 et n° 10)

- env. 12 000 FCFA avec le procédé de

* stockage en grains en petit entrepôt (procédés n° 11 et n° 12

- plus de 26 000 FCFA avec le procédé de

* stockage en grains en magasin fumigable (procédé n° 13)

- plus de 60 000 FCFA avec le procédé de

* stockage en épis en "crib" (procédés n° 7 et n° 8)

Compte tenu des faibles ressources financières de la plupart des exploitations (cf. chapitre 3.2.1), le stockage en "crib" et en magasin fumigable n'est réalisable que par le biais d'un emprunt. Les intérêts exigés pour le crédit sont alors d'une importance déterminante. En revanche, le financement des autres méthodes de stockage requiert relativement peu de capitaux, lesquels peuvent être mis à disposition par les exploitations. L'achat des auxiliaires de stockage, en particulier des produits de protection des stocks, exige relativement peu de capitaux, ceux-ci pouvant là encore être fournis par les exploitations.

Besoins en main d'oeuvre

C'est la construction du magasin fumigable qui exige le plus de main d'oeuvre, au contraire du "crib" qui ne nécessite qu'une main d'oeuvre minimale (tableau 6.2). Si l'on applique toutefois le besoin en main d'oeuvre à un espace de stockage égal à un quintal, le magasin fumigable apparaît alors comme le procédé requérant le moins de main d'oeuvre.

En ce qui concerne le procédé de stockage en grains (procédés n° 9 à n° 13), on constate au moment de l'emmagasinage un besoin en heures de travail beaucoup plus important que dans le cas du stockage en épis (procédés n° 1 à n° 8). Le stockage en sacs exige avant l'emmagasinage un déspathage et un égrenage du maïs En raison de la répartition bimodale des pluies, laquelle permet deux périodes de culture par an, ces travaux tombent à une période de travail déjà intense, au cours de laquelle les champs doivent être préparés pour la prochaine saison de culture. Autrement dit, du point de vue du travail, les procédés de stockage en grains ne peuvent être recommandés qu'aux exploitations disposant d'une main d'oeuvre suffisante après la récolte ou d'un excèdent de trésorerie leur permettant de payer des travailleurs saisonniers. Le changement s'avère particulièrement problématique pour les exploitations qui entreposent de grandes quantités de maïs dans les champs.

6.1.2 Evaluation socioculturelle des procédés de protection des stocks

Les méthodes de stockage et mesures de protection des stocks traditionnelles sont étroitement liées aux normes socioculturelles, aux notions de valeur et aux usages. En admettant que les normes et valeurs sociales évoluent elles aussi au fil du temps, ces changements ne s'opèrent toutefois ni spontanément ni à court terme.

Le contexte socioculturel est important en ce sens que les agriculteurs, d'esprit conservateur, opposent une attitude de scepticisme général à toute innovation, répugnant à remettre en question telle méthode de stockage, telle mesure de protection des stocks traditionnellement transmise, éprouvée depuis des générations. On peut dans ce contexte faire la distinction entre les facteurs socioculturels inhérents à la société d'une part, et ceux qui sont inhérents à l'individu d'autre part.

La conversion à l'un des procédés de stockage en grains (petit entrepôt, magasin fumigable) et/ou la mise en place d'une nouvelle mesure de protection des stocks (produits chimiques) présupposerait un changement (de comportement) dans le domaine socioculturel. Les répercussions seraient particulièrement sensibles au niveau de la fête de famille organisée au moment de l'emmagasinage, des mesures traditionnellement mises en oeuvre pour protéger le maïs, (mesures préventives), ainsi que des rites religieux accompagnant le stockage du maïs, Au centre du paysage socioculturel, on trouve encore d'autres aspects de caractère économique et social, dont les origines se situent dans la structure sociale et dans le contexte culturel (tableau 6.2).

Les différentes mesures de protection des stocks exigent de la part des paysans un goût du risque variable, ainsi qu'un "savoir" faire. lui aussi variable selon les cas. C'est ainsi qu'un procédé impliquant des mesures de protection des stocks au moyen de produits chimiques exige des connaissances beaucoup plus amples (formation) de la part des paysans qu'un procédé sans protection des stocks. C'est le stockage en magasin fumigable (procédé n° 13) qui est lié aux exigences les plus élevées. La construction de l'entrepôt, la surveillance qualifiée du stockage (gestion) et la réalisation d'une fumigation nécessitent une formation poussée.

Il n'est pas possible de juger avec précision de la portée des aspects socioculturels mentionnés. C'est en fin de compte la pondération individuellement variable des valeurs qui détermine dans quelle mesure les différents paramètres interviennent dans la décision en faveur de l'un ou l'autre des procédés de protection des stocks.

Tabl. 6.2: Critères d'évaluation socioculturels des procédés de protection des stocks

Procédé (N°) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Valeurs traditionnelles normes                          
-Fêtes familiales + + + + + + (+) (+) - - - - -
-Mesures de protection traditionnelles + + (+) + + (+) (+) (+) - - - - -
(mesures préventives)                          
- Rites religieux + + + + + + (+) (+) - - - - -
- Entrepôt comme objet de prestige - - - + + + (+) (+) - - - - -
- Adaption de l'entrepôt à la quantité récoltée (-) (-) (-) + + + + + (-) (-) - - -
                         
- Modal hé de commercialisation - - - - - - - - + + + + +
- Risque de vol + + + + + + + + - - - - (-)
- Augmentation incontrôlée + + + + + + + + - - - - -
de la consommation                          
- Stockage dans le champ - - - + + + (+) (+) - - - - -
Capacité d'innovation des paysans                          
- Exigence en matière + (+) - + (+) - (-) - - - - - - - - - - - - -
d'acceptation du risque                          
-Exigence en matière de "savoir faire" + (+) - + (+) - (-) - - - - - - - - - - - - -

Critères d'évaluation: + = positif; (+) = positif dans certaines conditions; - = négatif; (-) = négatif dans certaines condition

6.1.3 Evaluation technique des procédés protection des stocks

L'évaluation technique des procédés de protection des stocks implique d'une part l'évaluation des répercussions spécifiques de la protection des stocks ou de la technique de stockage, d'autre part l'appréciation des aspects touchant à l'environnement (tableau 6.3).

La diminution quantitative des pertes liée aux différents procédés de protection des stocks est proportionnelle à l'efficacité de la lutte contre le coléoptère nuisible Prostephanus truncatus. En fonction de l'efficience des moyens de protection des stocks (cf. chapitre 4 et chapitre 5.3.2.4), depuis la mise en oeuvre des moyens traditionnels jusqu'à la fumigation, on observe une tendance positive croissante de ces deux facteurs.

Le maïs récolté présente souvent un taux d'humidité du grain élevé, ce qui constitue un problème. Avant la mise en sac, il est indispensable (en grenier traditionnel) de ramener ce maïs à un faible taux d'humidité. Outre les exigences précédemment évoquées en matière de capitaux et de main d'oeuvre, des pertes peuvent se produire pendant le séchage (stockage en grenier). Qui plus est, on ne peut exclure totalement le risque de dommages consécutifs à l'humidité (formation de moisissures) survenant à la suite de la formation d'eau de condensation. Autre inconvénient du procédé de stockage en grains: la menace accrue que constituent les rongeurs. Les procédés de stockage dans l'habitation et en petit entrepôt sont les plus concernés par ces risques. De par leur construction (stockage des épis de maïs au-dessus du sol), le grenier traditionnel ainsi que le "crib" offrent la meilleure protection contre ces ravageurs de stocks.

De même, on ne saurait exclure totalement le risque d'apparition d'une certaine résistance aux produits chimiques de protection des stocks. De ce point de vue, l'appréciation des procédés impliquant l'utilisation de produits chimiques de protection des stocks sera donc négative.

Les facteurs significatifs pour l'environnement concernent exclusivement les procédés impliquant l'utilisation de moyens de protection des stocks. Il convient de distinguer d'une part le danger pour la santé des utilisateurs et des consommateurs, d'autre part la menace pour l'environnement (tableau 6.3). Un danger pour l'environnement n'est à craindre que lorsque les moyens de protection des stocks n'ont pas été convenablement appliqués et que le matériau d'emballage des insecticides n'est pas éliminé comme il le devrait (enterré, brûlé).

On ne connaît jusqu'à ce jour aucun cas où l'utilisation des moyens traditionnels aurait mis en péril la santé des utilisateurs et des consommateurs; il est d'ailleurs tout à fait improbable qu'un tel cas se produise. Il en va de même pour les questions touchant à la pollution. L'utilisation de produits chimiques est liée à un danger potentiel pour l'utilisateur, étant donné qu'au moment de l'application, celui-ci est en contact direct avec le produit. En cas de consommation de maïs traité avec des produits chimiques, il n'est pas possible d'exclure un certain risque pour le consommateur. Ce risque est nettement moins important avec les procédés de stockage en épis qu'avec les procédés de stockage en grains. Par comparaison avec les produits chimiques et traditionnels de protection des stocks, la réalisation d'une fumigation représente le plus grand risque potentiel pour l'utilisateur.

Tabl. 6.3: Critères d'évaluation techniques des procédés de protection des stocks

Procèdé(N°) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Facteurs spécifiques de la protection des stocks                          
- Réduction quantitative des pertes - + + + + - + + + + - + + + + + + + + + + + + + + + + + + +
-Efficacité contre P. truncatus - + + + + - + + + + - + + + + + + + + + + + + + + + + + + +
- Séchage avant stockage (+) (+) (+) + + + + + - - - - -
                           
- Problème des rongeurs + + + + + + + + - - - - (-)
- Dommages dus à l'humidité + + + + + + + + - - - - -
- Formation de moissisures + + + + + + + + - - - - -
-Développement des résistances + (+) - + (+) - + - + - + - -
Facteurs touchant à                          
l'environnement                          
- Danger pour la santé                          
* Utilisateurs + (+) - + (+) - + - + - + - -
* Consommateurs + (+) (-) + (+) (-) + (-) + - + - (-)
- Pollution + + - + + - + - + - + - -

Critères d'évaluation: + = positif;; (+) = positif dans certaines conditions; - = négatif; (-) = négatif dans certaines conditions

6.1.4 Aspects de l'économie nationale des procédés de protection des stocks

Il est important de prendre en compte les aspects relevant de l'économie nationale dans la mesure où les différents procédés de protection des stocks représentent des exigences variables vis-à-vis de l'économie générale et où les conséquences pour celle-ci sont également variables. A titre de principales conditions préalables à l'application (L’adoption) des procédés de protection des stocks, il convient de citer, d'une part les exigences vis-à-vis des organisations d'assistance-conseil opérant dans le domaine de la protection des stocks, d'autre part les exigences à l'égard du marché des moyens de production. Les principales retombées sur l'économie générale concernent la disponibilité du mais pour l'ensemble de la population (degré d'autarcie) et les effets sur le budget public (tableau 6.4).

Les procédés de stockage en grains présupposent la disponibilité de sacs ou de produits de protection des stocks. On peut partir du principe que la plupart des paysans n'ont pas de problème à se procurer des sacs, étant donné que le mais en grains est vendu dans des sacs sur les marchés (de mais), même lorsque ceux-ci sont de modeste importance. Les procédés impliquant des mesures chimiques de protection des stocks exigent la mise à disposition d'insecticides. Les produits de protection des stocks doivent être disponibles au bon moment, au bon endroit et en quantité suffisante.

Les méthodes de stockage et mesures de protection des stocks pratiquées jusqu'à maintenant ne requièrent pas d'assistance-conseil, c'est-à-dire qu'elles se passent du personnel et des moyens techniques du service d'assistance-conseil. Si la propagation des procédés comprenant des mesures chimiques de protection des stocks présuppose une formation des conseillers, elle n'exige pas, en revanche, de personnel supplémentaire. Pour les procédés comprenant un stockage en "crib" en petit entrepôt et en magasin fumigable, il faut s'attendre à un besoin en personnel croissant, du fait que ces procédés exigent des conseils supplémentaires au niveau de la construction et de la gestion de l'entrepôt. C'est le stockage en magasin fumigable qui représente le besoin en personnel le plus élevé et qui, sur le plan technique, exige le plus du personnel du service d'assistance-conseil.

L'augmentation de la disponibilité du mais pour l'ensemble de la population est proportionnelle à la réduction quantitative des pertes (ou à l’efficacité de la lutte contre le coléoptère nuisible Prostephanus truncatus) liées aux différents procédés de protection des stocks. La disponibilité du maïs exerce également une influence sur le budget public et la balance des paiements du pays. La réduction des pertes augmentant, la quantité de mais à importer diminue, notamment au cours des années de mauvaise récolte.

Les procédés impliquant une sollicitation accrue du service d'assistance-conseil occasionnent des dépenses supplémentaires pour la rémunération du personnel, L’acquisition des moyens d'assistance-conseil et pour le déroulement logistique (véhicules) de l'assistance-conseil. Ces dépenses viennent donc grever le budget public. Par ailleurs, ce sont précisément les procédés liés à des dépenses d'assistance-conseil élevées qui, du point de vue de la réduction des pertes et, partant, de l'augmentation des recettes à l'exportation du maïs ou de la diminution des dépenses liées à l'importation du mais, peuvent être qualifiés de positifs.

Tabl. 6.4: Critères d'évaluation de l'économie nationale des procédés de protection des stocks

Procedé (N°) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Exigences vis-à-vis de l'assistance-conseil                          
- Dépenses de personnel + + + + + + - - (-) (- ) - - --
-Niveau de formation des conseillers + + (-) + + (-) - -- - -- -- --- ---
Exicences vis-à-vis du marché des moyens de production                          
- Produis chimiques de protection + + - + + - + - + - + - -
des stocks                          
-Sacs + + + + + + + + - - - - -
-Matériaux pour la construction + + + + + + (+) (+) + + (-) (-) --
de l'entrepôts                          
Répercussions sur l'économie                          
nationale                          
-Degré d'autarcie par rapport au maïs - + +++ - + +++ - +++ ++ ++++ ++ ++++ ++++
- Balance de paiement                          
*Importation/Exportation de maïs - + +++ - + +++ - +++ ++ ++++ ++ ++++ ++++
* Importation des moyens de production + + - + + - + - + - + - - -
- Budget public                          
*Importation/Exportation de maïs - + +++ - + +++ - +++ ++ ++++ ++ ++++ ++++
* Dépenses d'assistance-conseil + + (-) + + (-) - -- - -- -- - -- - - -

Crières d'évaluation: + = positif; ( + ) = positif dans certaines conditions; - = négatif; (-) = négatif dans certaines conditions

6.2 Recommandations en matière d'assistance-conseil

6.2.1 Contenus de l'assistance-conseil
6.2.2 Indications relatives aux tâches d'assistance-conseil

Les études réalisées (calculs modèles) et les critères d'évaluation qui en découlent ne permettent pas d'établir un concept intégral d'assistance-conseil en vue de la protection des stocks au Togo (cf. à ce sujet HOFER 1963, PALTI 1981, LAUSMANN 1981). Les résultats de l'étude permettent toutefois de définir des contenus d'assistance-conseil et de donner des indications quant au travail de consultation. Les recommandations faites en la matière sont davantage axées sur les réalisations actuellement possibles que sur celles qui sont souhaitables à l'avenir. Elles se caractérisent par les éléments suivants:

6.2.1 Contenus de l'assistance-conseil

Il est conseillé de renoncer à construire de nouveaux magasins fumigables. Cette méthode de stockage est contestable sur le plan économique, pose des problèmes d'organisation et demande à être remise en question d'un point de vue socioculturel. Le Service National de la Protection des Végétaux devrait (doit) continuer de s'occuper des entrepôts existants. Il ne faut en aucun cas autoriser la distribution de produits de fumigation aux paysans.

Il n'est (actuellement) pas possible de recommander le stockage en "Crib" Il faut tout d'abord examiner si l'on peut réduire très nettement les coûts d'installation (coûts des matériaux). On peut également se demander quelle est l'utilité de mettre en place un procédé de stockage nouveau, inconnu des paysans, qui présente en principe les mêmes avantages et inconvénients que le grenier traditionnel, mais qui est en revanche plus cher.

Bien que le stockage en petit entrepôt semble plus promeneur que le stockage en magasin fumigable, il n'est pas (encore) possible, selon l'état actuel des connaissances, de le recommander. Une phase pilote de construction des petits entrepôts devra aider à élucider les questions encore en suspens.

Le stockage en grains est recommandé pour les exploitations qui, jusqu'alors, stockaient leur maïs dans l'habitation. Au sein de ce groupe d'exploitations, cette forme de stockage du maïs est avant tout recommandée pour le maïs commercial., qui est vendu seulement à l'issue d'une période d'entreposage de plusieurs mois.

S'il est vrai que l'utilisation des moyens de protection des stocks traditionnels peut être qualifiée de positive du point de vue de l'économie, de la main d'oeuvre et de l'écologie, il n'en demeure pas moins que, selon les résultats enregistrés, ces moyens offrent peu de protection contre les ravageurs de stocks. Leur utilisation ne peut donc pas (encore) être recommandée, du fait que leur efficacité dans les conditions rencontrées au Togo n'a pas été étudiée de façon suffisamment approfondie.

L'utilisation de produits chimiques (binaires) de protection des stocks peut être recommandée en corrélation avec les méthodes de stockage traditionnelles (stockage en épis dans l'habitation et le grenier), ainsi qu'avec le stockage en grains (habitation, petit entrepôt), étant donné qu'elle exclut pratiquement les problèmes de résidus et qu'elle n'entraîne pas de charges importantes sur le plan des finances ni de la main d'oeuvre. Plus le coléoptère nuisible Prostephanus truncatus se répandra, plus il sera recommandé de soumettre le maïs stocké à un traitement prophylactique.

6.2.2 Indications relatives aux tâches d'assistance-conseil

Une partie des contenus de l'assistance-conseil a été intégrée au travail d'assistance-conseil du Service National de la Protection des Végétaux. La concrétisation des contenus de l'assistance-conseil peut être accélérée par une intensification du travail d'assistance-conseil de certains groupes de personnes, par une formation des conseillers opérant sur le terrain qui soit axée sur les problèmes et par un certain nombre de mesures d'accompagnement.

Dans le domaine de la protection paysanne des stocks, les femmes constituent un groupe à part, en ce sens qu'elles ont particulièrement besoin de conseils, ceci parce que

Au niveau de la formation des conseillers opérant sur le terrain, les facteurs suivants revêtent une importance toute particulière par rapport à l'utilisation des produits chimiques de protection des stocks:

- recommander l'application des produits les plus efficaces (insecticides binaires)
- éviter l'utilisation des produits interdits
- appliquer les insecticides de manière adéquate
- éliminer correctement le matériel d'emballage des insecticides
- éviter les trop longues périodes d'entreposage des insecticides
- respecter les délais d'attente avant la consommation (notamment en cas de stockage en grains)

Les activités suivantes sont recommandées à titre de mesures d'accompagnement:

  1. Proposer des "boîtes" pour l'application des insecticides en poudre. Cette mesure permet d'améliorer la technique d'application et d'éviter un surdosage ou un sous-dosage.

Cet auxiliaire devrait comporter un système de fermeture (verrouillage demi-tour), une échelle (trait) pour doser la quantité d'insecticide (50 9) à mettre dans le récipient et une perforation uniforme avec des dimensions de trous normées. Les boîtes pourraient être fabriquées au Togo, étant donné qu'il existe un centre de fabrication de ce genre à Lomé.

  1. Proposer des égreneurs de maïs, manuels faciles à fabriquer. Cette mesure pourrait permettre de réduire les besoins en main d'oeuvre pour l'égrenage.

Cet auxiliaire pourrait être fabriqué par les petites entreprises du pays. Selon MIDOHOE (1983, p. 166 et suiv.), il est possible, en fonction des matériaux existants, d'utiliser des tuyaux carrés ou des douilles provenant d'amortisseurs hors d'usage, ou encore de fabriquer dans de la tôle des appareils en forme d'entonnoir. Dans chacun des différents appareils, quatre morceaux coniques d'acier plat sont soudés à des intervalles égaux de manière à pénétrer dans le tuyau.


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