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6 Champignons et mycotoxines

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6.1 Champignons d'entrepôts
6.2 Mycotoxines
6.3 Ouvrages de référence à consulter

 

On a trop souvent tendance à négliger les dommages causés par les champignons ou à ne leur prêter attention que lorsqu'ils ont pris des proportions alarmantes. Cette attitude est d'autant plus imprudente qu'il ne s'agit pas seulement en l'occurrence des dommages causés en tant que tels, mais du danger, parfois même mortel, que constitue pour la santé des humains et celle des animaux la consommation d'une marchandise infestée, susceptible de renfermer des poisons, les mycotoxines.

La croissance des champignons exige une humidité relative minimale de 65% (ou une activité d'eau de aw = 0,65). Les champignons poussent par ailleurs par des températures comprises entre 10 et 40°C (cf. section 2.2.5). Chaque espèce de champignon possède son optimum climatique spécifique.

6.1 Champignons d'entrepôts

Les champignons rencontrés sur les denrées stockées peuvent être divisés en deux groupes, les « champignons des champs » et les « champignons d'entrepôts ». Dans certains cas, il est impossible d'établir clairement la distinction, du fait que la croissance peut aussi bien commencer dans les champs que pendant le stockage. Les champignons trouvent cependant toujours leur origine dans les champs. Les champignons d'entrepôts regroupent essentiellement les espèces appartenant à l'ordre des Aspergillus, des Fusarium et des Penicillium. La croissance des champignons d'entrepôts est déterminée par les facteurs suivants:

Composition des substances nutritives du grain . Conditions d'humidité et de température . Facteurs biotiques, tels que la concurrence ou la présence d'insectes des produits stockés.

Les champignons d'entrepôts apparaissent beaucoup plus souvent dans les lots infestés par les insectes des produits stockés du fait que les insectes génèrent de l'humidité et répartissent les spores de champignons sur la marchandise. Le tableau ci- dessous montre le taux d'humidité minimum exigé au niveau des céréales par certains champignons des entrepôts.

Espèce de champignon Taux d'humidité relative dans les céréales
Aspergillus restrictus 13,5%
A. glaucus 14%
A. candidus 15%
A. ochraceus 15%
A.flavus 18%
Fusarium spp. 18 - 19%
Penicillium spp. 16,5 - 19 %

Les champignons Se développent lorsque:

•on stocke des céréales qui n'ont pas été suffisamment séchées auparavant
•le grain a été endommagé au cours de la récolte, de la manutention, du battage ou du séchage
•le taux d'humidité augmente durant la période de stockage, ce qui est dû à:
•l'absorption d'humidité ambiante
•l'absorption d'eau de condensation (cf. section 2.2.3)
•aux « hot spots » (cf. section 2.2.3)
•à la pénétration d'eau (défaut d'étanchéité)

Les champignons des entrepôts sont susceptibles d'occasionner les dommages suivants:

•réduction de la valeur nutritive
•décoloration du grain
•diminution du pouvoir germinatif
•calcination de certains grains
•réchauffage de la marchandise stockée pouvant aller jusqu'à l'ignition
•odeur et goût de moisi
•formation de mycotoxines
•création d'un environnement adéquat pour le développement de certaines
espaces d'insectes (= indicateur d'un grain de faible qualité)

Pour éviter les dommages dus aux champignons, il faut observer les consignes suivantes:

-Sécher la marchandise uniformément et aussi rapidement que possible à la
suite de la récolte
-Veiller à ne pas endommager le grain au cours de la récolte, de la manutention, du battage ou du séchage
- Maintenir l'entrepôt frais et sec
-Empêcher la formation d'eau de condensation (maintenir à l'intérieur de l'entrepôt une température aussi constante que possible)
-Contrôler en permanence la marchandise stockée
-Empêcher une absorption d'humidité de la marchandise stockée, qui serait due à une mauvaise aération, de même que les fuites ou autres risques de pénétration de l'humidité dans le magasin.
-Prévenir le développement de populations d'insectes nombreuses (= « hot spots »)
-Procéder à un nouveau séchage des parties de piles présentant un taux d'humidité dépassant le seuil de tolérance.

La recherche scientifique a confirmé les effets fongistatiques de certaines des plantes traditionnellement utilisées par les agriculteurs africains pour protéger le grain stocké contre les moisissures. Un extrait de fruits séchés de Xylopia aethtopica (Annonaccae), ainsi que des semences séchées de Piper guincense (une espèce de poivre) ont même permis de prévenir totalement le développement de Aspergillus flavus. Ces effets ne semblent toutefois pas suffisant fiables au regard des exigences de la lutte pratique contre les champignons.

6.2 Mycotoxines

Les mycotoxines sont des substances métaboliques auxquelles peuvent donner naissance plusieurs espèces de champignons et qui demeurent ensuite à l'état de résidus dans la marchandise stockée. Les mycotoxines peuvent se former 24 heures seulement après que la marchandise stockée ait subi une infestation de champignons. Les optima climatiques qui président au développement de champignons sont rarement les mêmes que ceux qui permettent la formation des mycotoxines. Il existe ici toute une série de facteurs, dont certains demeurent encore inexpliqués, et qui sont susceptibles de déclencher une synthèse mycotoxique; en d'autres termes, seul un examen de laboratoire peut révéler avec certitude si telle ou telle infestation de champignons a effectivement engendré des mycotexines.

Le tableau suivant comporte une liste de quelques- uns des principaux champignons générateurs de mycotoxines et des marchandises infestées:

Espèces de champignons Marchandises infestées
Alternaria alternata riz,sorgho, soja
A. Iongissima riz, sorgho
A. padwickii riz
Aspergillus flavas anacardier, coprah, mais, cacahuète,
sorgho, soja
Fusarium moniliforme mais, sorgho, soja
F. semitectum mais
Penicillium citrinum sorgho, soja

Parmi les mycotoxines identifiées depuis la découverte originelle des aflatoxines, il y a plus de 30 ans, cinq d'entre elles sont particulièrement importantes pour l'agriculture:

- I'aflatoxine (I'aflatoxine B1 est le plus toxique de tous les métabolites fongiques connus)
- le déoxynivalénol (probablement la plus répandue des mycotoxines dans la nourriture)
- la zéaralénone (une substance analogue aux œstrogènes et intervenant au niveau des hormones femelles des mammifères)
- la fumonisine (un contaminateur très courant de l'alimentation, humaine et animale, à base de mais)
- I'ochratexine (apparait principalement en Europe et dans d'autres zones à climat tempéré).

Les mycotoxines constituent un poison violent, aussi bien pour l'homme et pour l'animal Leur consommation provoque des maladies appelées mycotoxicoses, ou encore le cancer. Le tableau suivant fournit un aperçu des mycotoxines, indique les champignons qui les génèrent, les denrées infestées et les risques sanitaires pour l'homme et l'animal:

Champignons générateurs
de mycotoxines et de
toxines
Marchandises Risques pour la santé
Aflatoxine
(Aspergillus flavus,
A. parasitions)
mais,
cacahuète,
semences
d'oléagineux
effets cancérigènes, affections
hépatiques et autres effets dom-
mageables pour l'homme, la
volaille, les porcins et le bétail
Deoxynivalénol
(Fusarium graminearum
et espèces apparentées)
blé,
mais,
orge
toxicoses aiguës chez
l'homme, troubles internes,
inhibition de la croissance
chez les porcs et autres effets
Citrinine
(Penicillim spp.)
céréales affections rénales chez
l'homme et le porc
Fumonisine
(Fusarium monoliforme
et espèces apparentées
)
mais soupçonné de provoquer chez
l'homme le cancer de
I'œsophage, maladies chevali-
nes, porcines et des poulets
Ochratoxine
(Penicillium verrucoum
Aspergillus ochraceous
)
orge,
blé
cancérigène, lésions rénales et
autres effets dommageables
chez le porc et la volaille
Zearalénone
(Fusarium gramineorum
et espèces apparentées)
mais,
blé
peut être cancérigène chez
l'homme, incidences sur la
production porcine

Les marchandises particulièrement menacées d'aflatoxines sont: le maïs, le riz, les noix de cajou, le coprah, les cacahuètes et la plupart des autres denrées à haute teneur en lipides.

Les dangers présentés pour la santé des animaux domestiques sont abondamment illustrés depuis la célèbre maladie « Turkey X », provoquée par des aflatexines, qui tua en Grande- Bretagne en 1960 quelque 100 000 dindes. La connexité entre les mycotoxines et certaines affections humaines n'a toutefois pu être prouvée que pour l'aflatoxine, les toxines du genre Fusarium, l'ochratexine A et quelques autres cas isolés. Ceci tient à des difficultés méthodologiques et ne reflète en aucune manière un risque moindre pour l'homme par rapport aux animaux.

Face à la haute toxicité et aux effets cancérigènes des aflatexines, quelque 60 pays ont publié des règlements concernant la contamination des produits alimentaires et des aliments pour animaux par des aflatoxines. Dans les pays industrialisés, les quantités maximales admissibles (limite maximale de résidus = LMR) sont fixées comme suit:

Marchandise Quantités maximales
d'aflatoxines admissibles (µg/kg)
Alimentation humaine 5 à 30
Aliments pour bébés 5 à 20
Aliments pour bétail laitier et jeune bétail 5 à 20
Aliments pour porcins et volaille 10 à 30
Aliments pour bovins, ovins et caprins 20 à 300

La toxicité des mycotoxines se reflète des seuils admissibles de résidus extrêmement bas. Voici par exemple la LMR du malathion et celle de l'aflatoxine B1 dans l'alimentation humaine, exprimées en mg par kg de grain:

•Malathion 5 - 30 mg/kg
•Aflatoxine B1 0,005 mg/kg

Ceci veut dire que la limite maximale de résidus de l'aflatoxine B1 est de 1 000 à 6 000 fois inférieure à celle du malathion.

Les mycotoxines sont très résistantes et ne peuvent être détruites ni par la cuisson, ni par d'autres procédés quelconques, ce qui implique que les denrées alimentaires infestées doivent être détruites. Le problème n'est pas davantage résolu en mélangeant les denrées infestées à des denrées saines ou en donnant aux animaux les récoltes contaminées, puisque les toxines passent alors dans le lait ou la viande, pour être finalement absorbées par l'homme.

Remarque: La seule possibilité d'éviter la formation de mycotoxines consiste à empêcher la croissance de champignons.

6.3 Ouvrages de référence à consulter

ANONYME (1992) Fungi and Mycotoxins in Stored Products, ACIAR Proceedings No. 36, Canberra

CHRISTENSEN, C.M. & R.A. MERONUCK (1986) Quality Maintenance in Stored Grains and Seeds, University of Minnesota Press, Minneapolis, 138 p.

HIGHLEY, E., E.J. WRIGHT, H. J. BANKS & B.R CHAMP, édit. (1994) Stored Product Protection. Proceedings of the 6th International Working Conference on Stored- product Protection, CAB International, Canberra, volume 2, p. 969- 1083

MULTON, J.L., édit. (1988) Preservation and Storage of Grains, Seeds and their ByProducts, Paris, 1095 p.


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