Le cahier des charges du système de séchage pour la filière envisagée, abordé en fin de première partie, permet d'opérer une présélection des types de séchoir à retenir. Il permet en effet d'écarter de l'analyse ceux qui ne répondent pas correctement aux attentes du projet. L'élaboration du cahier des charges constitue une phase importante dans la conception du projet, car elle clarifie les objectifs visés.
Il faut cependant encore préciser quel type de séchoir devra finalement être retenu, et ses caractéristiques précises (dimensions, matériaux...).
Ce choix dépend de deux familles de critères:
- des critères d'ordre technique: le séchoir doit satisfaire aux exigences requises pour un séchage adapté au produit traité, aux quantités à traiter, et au terrain (en particulier l'ensoleillement, le degré hygrométrique de l'air...);- des critères d'ordre économique: le séchoir doit satisfaire, et mieux que d'autres séchoirs envisageables sut le plan technique, les exigences économiques de l'activité (rentabilité financière en premier lieu, mais aussi souvent sur un plan équivalent qualité du produit et régularité de la production).
Ces éléments du choix sont présentés ici de façon relativement linéaire. Les éléments techniques qui permettent de préciser les options envisageables sont exposés en chapitre V, après une présentation des notions de base sur les mécanismes physico-chimiques qui interviennent dans le séchage (chapitre IV). Le chapitre VI présente pour sa part les caractéristiques des principaux types de séchoirs actuellement bien éprouvés dans les pays en développement.
Les réponses apportées aux exigences techniques et une bonne connaissance des modalités de la production (organisation du travail, activités en amont et en aval du séchage...), abordées au chapitre VII, sont les paramètres sur lesquels on peut asseoir une analyse économique, dont les principes sont exposés au chapitre VIII.
Précisons enfin que cette partie a été rédigée dans le souci de la rendre accessible au plus grand nombre. Les principes physiques qui interviennent dans le séchage, ainsi que les calculs théoriques de dimensionnement de certaines grandeurs, sont relativement complexes. Ils ne sont traités dans cette partie que de façon simplifiée.
Certaines informations doivent de ce fait être considérées avec prudence, en particulier au chapitre V. Elles correspondent en effet parfois à des « raccourcis » qui permettront au lecteur de se faire une idée des ordres de grandeur du dimensionnement d'un projet de séchage, sans avoir à passer par des formulations trop complexes, mais ne peuvent en aucun cas s'y substituer. L'exposé détaillé de ces formulations est proposé en troisième partie.
Sécher un produit consiste à éliminer une grande partie de l'eau qu'il contient de façon à permettre sa bonne conservation. Il existe plusieurs procédés pour éliminer celte eau. Le procédé le plus aisé à mettre en uvre dans les PED, et présenté dans cet ouvrage, repose sur l'entraînement de l'eau en surface du produit par l'air environnant (vent, convention libre ou forcée par ventilateur) réchauffé au préalable. Le produit sec doit avoir une teneur en eau finale suffisamment faible de façon à ce que les micro-organismes, moisissures, levures et bactéries, ne puissent pas se développer.
Le premier paragraphe précise les altérations majeures qui interviennent lors d'une dégradation d'un produit alimentaire. Cela permet de bien préciser les raisons pour lesquelles le séchage présente un « caractère conservateur », et d'introduire la notion de traitements complémentaires, éventuellement nécessaires, abordés plus en détail au chapitre VII.
Les quatre paragraphes suivants traitent le cas du séchage par l'air environnant lorsque le produit n'est pas lui-même échauffé par une autre source de chaleur, comme c'est le cas pour le séchage solaire direct. Dans ce dernier cas, les grands principes décrits restent valables; mais certaines particularités sont précisées en paragraphe 6. Le dernier paragraphe enfin expose les critères qui permettent de définir la fin d'un cycle de séchage. Un résumé des points qui conditionnent fortement la pratique du séchage termine ce chapitre.
Les produits destinés à l'alimentation humaine présentent une grande diversité dans leur forme, leur taille, leur homogénéité et leur composition biochimique. Ces caractéristiques conditionnent l'évolution du produit et donc induisent des contraintes dans les possibilités et le choix de traitements de conservation.
COMPOSITION BIOCHIMIQUE DES ALIMENTS
Tout composé biologique est constitué de molécules et d'assemblages moléculaires pouvant être regroupés en plusieurs familles. Ce sont:
- l'eau;- les lipides (ex: huiles, graisses...);
- les protéines;
- les glucides (ou sucres);
- les éléments minéraux et les vitamines.
Toute différence de composition entraîne une évolution différente du produit.
La table de la page suivante indique la composition moyenne de quelques produits représentatifs. On peut voir sur cette table que la composition des produits végétaux (fruits et légumes) diffère très sensiblement de celle des produits carnés (viandes et poissons): teneur en eau et en glucides plus élevée, teneur en protéines et en lipides plus faible. C'est pourquoi on distingue ces deux groupes d'aliments. Le comportement des produits végétaux est très différent de celui des produits carnés.
On s'aperçoit aussi que dans ces deux grands groupes, certains produits différent nettement.
Aliment |
% eau |
% protéines |
% lipides |
% glucides |
%minéraux |
Légumes frais | | | |
| |
Tomate |
93 |
1 |
0,3 |
4,6 |
0,6 |
Haricot vert |
89 |
2,4 |
0,2 |
8,4 |
0,5 |
Fruits frais |
| | | | |
Orange |
87 |
1 |
0,2 |
9,8 | |
Mangue |
81 |
0,4 |
0,1 |
17,5 | |
Banane |
75 |
1,4 |
0,5 |
20 | |
Chataîgne 52 |
4 |
2,6 | |
42 |
|
Viandes mi-grasses | | | |
| |
Boeuf, mouton |
60 |
17 |
20 |
0,5 |
1,3 |
Porc |
55 |
16 |
25 |
0,5 |
1,2 |
Viandes maigres | | | |
| |
Cheval |
75 |
21 |
2 |
1 |
1 |
Poulet |
70 |
21 |
8 |
- |
1,4 |
Poisson maigre (colin) |
80 |
17 |
2* |
- |
1,6 |
Poisson gras (thon) |
60 |
26 |
31* |
- |
1,6 |
* Taux élevé de lipides très fortement oxydables (= lipides insaturés).
Source: C. Alais. G. Linden, « Biochimie alimentaire », Éd. Masson, 1991.
Ainsi les fruits ont une teneur en eau plus faible que celle des légumes mais contiennent beaucoup plus de glucides.
De même la chair de poisson se différencie des viandes par un taux élevé de lipides qui s'oxydent très facilement, etc.
Les conséquences de ces différences de composition sont abordées ci-après.
ALTÉRATION DU PRODUIT
Le maintien de l'intégrité des tissus, leur fonctionnement nécessitent de l'énergie. La mort de l'animal ou la « récolte » du végétal vont empêcher les apports d'énergie. On assiste alors à une modification de leur physiologie qui provoque une dégénérescence des tissus. Ainsi vont apparaître les premiers problèmes de conservation.
D'autres phénomènes interviennent également. Certains apparaissent spontanément, suite aux modifications physiologiques des tissus et sont par la suite favorisés ou défavorisés en fonction des traitements et des conditions de stockage du produit.
C'est le cas:
- des altérations microbiennes;- des réactions d'oxydation des lipides;
- des réactions de brunissement enzymatique.
D'autres phénomènes, comme le brunissement non enzymatique abordé plus loin, sont essentiellement dus aux traitements thermiques subis par les aliments.
Avant d'aborder plus en détail les problèmes spécifiques au séchage, il est important d'avoir une connaissance globale de ces phénomènes car ils entrent également en jeu dans le choix de traitements d'appoint adaptés à la nature de l'aliment.
Évolution physiologique
L'ampleur et la rapidité des modifications physiologiques du produit après la récolte du végétal ou la mort de l'animal sont fonctions de chaque type d'aliment. La dégénérescence entraîne une perte de la valeur alimentaire du produit (critères de goût [organoleptiques], hygiéniques, nutritifs et d'aptitude aux traitements technologiques...).
Comportement physiologique des végétaux après récolte
Après « récolte », le végétal ne va plus recevoir ni eau ni nutriments et la photosynthèse s'arrête. On assiste à une diminution de sa masse, à une production de chaleur et à la libération d'eau à la surface du produit. Le produit a tendance à se flétrir et offre un terrain favorable aux proliférations microbiennes. L'intensité du phénomène est lice à l'activité métabolique du végétal: elle est limitée dans le cas des végétaux en état de dormance (graines, tubercules, pommes, agrumes...) qui peuvent donc se conserver assez longtemps. En revanche, cette activité est très élevée pour la plupart des fruits et légumes qui, sans traitement, vont s'altérer assez vite.
Comportement physiologique des produits animaux: viandes et poissons
Les modifications physiologiques les plus importantes atteignent surtout les muscles. À la mort de l'animal, l'arrêt de la circulation sanguine va priver le muscle d'un apport en oxygène et en molécules énergétiques. Dans un premier temps, le muscle va mobiliser ses substances de réserve. Avec l'épuisement des réserves énergétiques, les fibres musculaires sont dans l'incapacité de se relaxer: le muscle va se durcir. Sa qualité diminue. On peut limiter ce phénomène en maintenant le produit carné entre 15 et 20°C.
Toutefois, après plusieurs jours, selon les conditions ambiantes, le produit carné perd de sa rigidité et s'attendrit: cette étape est favorable au développement microbien et aux réactions biochimiques d'altération.
Cas particulier du poisson: À cause de la composition et de la structure particulière du muscle de poisson, la rigidité puis l'attendrissement interviennent plus rapidement que dans le cas des viandes. Le poisson est ainsi rapidement exposé aux réactions d'altération et au développement microbien. C'est l'un des produits animaux les plus difficiles à conserver.
Altérations microbiennes
Les altérations microbiennes sont sans doute le facteur le plus limitant de la conservation des aliments. Elles modifient le goût et les caractéristiques hygiéniques de l'aliment. On distingue trois grands groupes de micro-organismes:
- les bactéries;- les levures;
- les moisissures.
Ces micro-organismes sont naturellement présents sur les aliments mais peuvent être également apportés par des agents extérieurs (vent, sol, eau, insectes, manipulations de l'homme...).
Si les levures et les moisissures sont essentiellement responsables d'altérations du goût du produit, beaucoup de bactéries peuvent être extrêmement nocives pour l'homme, voire mortelles. L'ampleur des altérations ou de la nocivité de l'aliment dépend en grande partie du nombre de microbes qu'il contient. Or la population microbienne croît extrêmement vite. Quand les conditions sont favorables, 100 bactéries peuvent donner naissance à 3 millions de bactéries en moins d'une demi-journée!
D'une manière générale, les milieux les plus favorables au développement microbien sont constitués par des milieux liquides ou à forte humidité, riches en sucres, maintenus à des températures comprises entre 20 et 50°C. On comprend dès lors, compte tenu de l'effet de l'humidité, l'intérêt du séchage pour la conservation des aliments.
Les micro-organismes peuvent être partiellement détruits:
- par des agents chimiques spécifiques;- par la chaleur, par des températures de produit supérieures à 65°C: pour un temps donné de maintien à température, plus la température sera haute, plus le taux de destruction sera élevé.
Pour une température donnée, plus le temps de maintien à température sera important, plus le taux de destruction sera élevé.
La croissance microbienne est d'autant plus limitée que:
- la présence d'eau non liée fortement au produit (et donc susceptible d'être facilement utilisée par la population microbienne) est faible dans ce produit;- la température du produit est basse.
Remarques:
1. Le dernier point n'est pas en contradiction avec le fait que de hautes températures permettent d'éliminer les microbes: pour des gammes de température inférieures à 50-60°C, plus la température est élevée, plus les microbes sont actifs. En revanche, une température plus élevée les détruit.2. Le premier facteur de limitation de la croissance microbienne mentionné ci-dessus fait appel à la notion d'activité de l'eau, plus ou moins liée au produit. Ce terme sera défini plus en détail par la suite. Nous conservons pour la suite de cette section l'idée que l'activité de l'eau dans un produit mesure le degré de liberté de mouvement de l'eau dans le produit. Elle est égale à 1 lorsque l'eau est totalement libre dans le produit, comme de l'eau liquide ordinaire, et très faible lorsqu'elle est « accrochée » à la matière sèche du produit par de très fortes liaisons électrochimiques.
Evolutions biochimiques
Il existe trois grands types de réactions biochimiques:
Oxydation et dégradation des lipides
Les lipides vont s'oxyder, donnant un mauvais goût de rance et abaissant la qualité nutritionnelle de l'aliment. Ce phénomène est influencé par divers facteurs:
- le degré d'instauration des lipides: plus les lipides sont insaturés plus l'aptitude à l'oxydation est forte;- la température: plus la température du produit est basse, plus l'oxydation est favorisée;
- l'oxygène, la lumière, le sel, le sang et certains métaux (fer, cuivre...) favorisent le rancissement;
- l'activité de l'eau dans le produit influence l'oxydation des lipides qui est minimale quand cette activité est comprise entre 0,2 et 0,4 (pour la commodité de l'exposé, la définition de l'activité de l'eau a été reportée à la section suivante);
- les protéines, les phosphates ou certains composés chimiques ont une action antioxydante vis-à-vis des lipides.
Le bruissement enzymatique
Caractérisé par l'apparition de pigments bruns du fait de réactions enzymatiques, il n'intervient cependant que pour les produits végétaux. Parfois recherché (dattes...), il est en général indésirable à cause de la couleur qu'il donne au produit.
Il est favorisé par l'oxygène, par un pH compris entre 5 et 7 et par les manipulations qui blessent le produit (chocs, épluchage, parage...). Il est limité par les faibles teneurs en eau dans le produit, les traitement thermiques à température de produit supérieure à 65°C (blanchiment, pasteurisation...), les pH bas et par l'acide ascorbique.
Les réactions de Maillard (ou bruissement non enzymatique)
Ces réactions, encore appelées brunissement non enzymatique, interviennent essentiellement sous l'action de traitements thermiques. Elles sont caractérisées par l'apparition de pigments bruns ou noirs et par des modifications du goût et de l'odeur de l'aliment.
Elles sont par exemple en partie responsables de la transformation du sucre en caramel, de la croûte dorée du pain, de la couleur, du goût, de la saveur des pommes frites ou des viandes rôties...
Elles peuvent cependant aussi modifier le goût d'un aliment jusqu'à le rendre inconsommable. Selon les aliments et les habitudes culinaires d'une population, elles peuvent donc être recherchées ou non.
En général, elles constituent plutôt un facteur limitant pour la conservation des aliments déshydratés. Elles abaissent également leur valeur nutritionnelle.
Il est à noter que ces réactions se déroulent en deux phases principales:
- une phase pendant laquelle il y a production et accumulation de composés réactifs;- une phase de brunissement sous l'action de ces composés accumulés.
Le brunissement non enzymatique se produit en général lors du traitement thermique, de manière plus ou moins rapide (quelques minutes à plusieurs heures) selon la sévérité du traitement. Toutefois, à cause de la possibilité d'accumulation de composés réactifs, un brunissement non enzymatique peut se révéler et s'intensifier au fil des jours et des mois qui suivent le traitement, alors qu'il n'était pas visible tout de suite après.
Les réactions de Maillard sont favorisées par:
- les glucides (sucres) et les protéines;- pour une durée de traitement donnée, plus la température du produit est élevée, plus ces réactions sont importantes. Pour une température de produit donnée, plus le temps de traitement est grand, plus les réactions de Maillard seront favorisées; le seuil de température à partir duquel la vitesse de ces réactions s'accélère est de l'ordre de 50-60°C;
- l'activité de l'eau (entre 0,5 et 0,7) et le pH (entre 1 et 7);
- certains métaux (fer et cuivre...);
- l'acide ascorbique et autres acides organiques.
L'anhydride sulfureux est le seul inhibiteur (1) efficace.
(1)Inhibiteur: substance permettant de bloquer ou de ralentir une réaction chimique.
DÉTERMINER LA QUANTITÉ D'EAU À ÉVACUER
On fait pour cela appel à une grandeur physique, la teneur en eau, appelée aussi degré d'humidité. C'est un paramètre fondamental du séchage. Il s'agit du rapport entre la masse d'eau dans le produit et la masse totale de ce produit, qui est la somme de la masse d'eau et de la masse de matière sèche qu'il contient.
Remarque:
Il ne faut pas confondre la matière sèche, qui est ce qui reste lorsque le produit a perdu la totalité de son eau (obtenue par un long séjour en étuve) et le produit sec, qui est le produit final après séchage et qui contient encore un peu d'eau.
La quantité d'eau à évacuer du produit peut être déterminée à partir:
- de la quantité de produit que l'on désire sécher;- de la teneur en eau initiale, avant le séchage (c'est une caractéristique du produit, indiquée sur les « fiches produit ». À titre indicatif, elle est de 95 % pour la tomate et de 20 % pour le blé);
- de la teneur en eau finale. Cette dernière est une norme technique, en grande partie caractéristique du produit. Elle précise le niveau d'humidité du produit considéré à atteindre pour garantir sa conservation sur une longue période. Elle est elle aussi indiquée sur les « fiches produit », pour des conditions standard de stockage. À titre indicatif, elle est de l'ordre de 10 % pour la tomate et de 16 % pour le blé.
Remarque:
La teneur en eau finale recommandée dépend cependant aussi des conditions de stockage. En particulier, il peut être souhaitable de procéder à un séchage plus sévère que celui qui est recommandé sur les « fiches produit », dans le cas d'un stockage en air relativement humide. Il sera en effet alors parfois nécessaire de prévoir une éventuelle ré-humidification du produit, du fait de cette humidité de l'air ambiant, lors du stockage sur une longue période.
À titre d'exemple de calcul, cherchons à déterminer la quantité d'eau à extraire de 20 kg de bananes, déjà épluchées et préparées, pour un séchage efficace. Selon les données de la « fiche produit » de la banane en page 45, la teneur en eau initiale de ce produit est de 72 %, et la teneur en eau finale recommandée est de 15 %. On procède dès lors comme suit.
Le poids de matière sèche contenue dans les 20 kg de banane est de: (1 -0,72) x 20 = 5,6 kg, et le poids de l'eau contenue dans les mêmes 20 kg de banane fraîche est de: 0,72 x 20 = 14,4 kg. La matière sèche n'étant pas éliminée lors du séchage, il en reste toujours 5,6 kg en fin de séchage. Cette matière sèche doit représenter 100 % - 15 % de la masse de banane séchée, si on veut respecter les recommandations de la « fiche produit ». Le poids de banane séchée obtenue est donc de: 5,6/(1 - 0,15) = 6,6 kg et le poids de l'eau restant dans ce produit séché est de: 6,6 - 5,6 = 1 kg.
On peut ainsi facilement calculer deux grandeurs importantes dans un même temps:
- la quantité de produit élaboré qui sera obtenu à partir d'une quantité donnée de matière première préparée (ici 6,6 kg de banane sèche pour 20 kg de banane épluchée et préparée). Ce calcul ne suffit cependant pas pour calculer l'approvisionnement nécessaire en matière première: il faut encore évaluer les pertes et déchets issus du tri et de la préparation du produit, ou utiliser les rapports produit sec/produit frais fournis dans les «fiches produit »;- la quantité totale d'eau à extraire de cette matière première pour obtenir le produit final désiré (on a dans le cas précédent 14,4 kg d'eau dans la banane sèche, et il doit en rester 1 kg à la fin du séchage, soit 13,4 kg à enlever)
La première donnée est utile pour calculer la rentabilité économique de l'opération, pour estimer le rapport « matière élaborée/matière première ». La deuxième donnée est d'importance première pour le dimensionnement du séchoir, puisqu'elle conditionne fortement les paramètres du séchage (température et débit de l'air, durée du séchage).
De façon générale, la quantité d'eau à évacuer d'une quantité donnée de produit est d'autant plus grande:
- que cette matière première est en quantité importante: les deux quantités sont proportionnelles;- que le degré d'humidité initial du produit est élevé: pour un même degré d'humidité final de 15 %, il faudra enlever deux fois moins d'eau dans un produit à teneur initiale de 75 % plutôt que de 85 %, et trois fois moins pour un produit à teneur initiale de 65 %;
- que le degré d'humidité final requis est faible.
NOTION DE DISPONIBILITÉ DE L'EAU
L'eau contenue dans un produit animal ou végétal est plus ou moins «disponible ». Cette « disponibilité » varie pour un même produit en fonction de sa teneur en eau. Toutes les parties d'un même produit n'ont pas le même comportement vis-à-vis de l'eau. Un fruit mûr ne se comporte pas comme un fruit vert. Cela varie aussi d'un produit à l'autre, suivant sa composition biochimique: certaines structures ou molécules retiennent l'eau plus que d'autres. Cette « disponibilité » apparente est quantifiée par une grandeur physique: l'activité de l'eau du produit. Celle-ci se définit par rapport à un état de référence qui est celui de l'eau pure, pour laquelle l'activité est égale à 1.
L'activité de l'eau d'un produit est toujours inférieure ou égale à 1. Lorsque l'eau contenue dans un produit a une activité proche de 1, elle s'évapore comme de l'eau pure à l'air libre. Par analogie, on dit que ce produit contient de l'eau libre. C'est le cas de produits organiques très hydratés. Lorsque l'activité de l'eau d'un produit est inférieure à 1, cela signifie que les constituants du produit fixent partiellement l'eau et diminuent ainsi sa capacité à se vaporiser. On parle alors d'eau lice, plus ou moins fixée au produit par absorption.
Un produit alimentaire contient en général dans le même temps plusieurs sortes d'eau: de l'eau libre, des eaux faiblement liées et des eaux fortement liées, ces dernières étant retenues aux molécules de matière sèche par des forces relativement importantes. Le graphique ci-dessous en fournit une illustration dans le cas d'un maïs.
Les proportions d'eau plus ou moins adsorbée dépendent de chaque produit. Pour les produits les plus hydratés tels la plupart des fruits et légumes, une partie importante de l'eau sera sous forme d'eau libre, en surface du produit ou dans des « poches », et de l'eau faiblement adsorbée, retenue par capillarité dans les tissus du produit. Pour les produits les plus secs, et selon leur texture et leur composition chimique, une part plus importante de l'eau sera fortement adsorbée par le produit (cas de la plupart des céréales).
Un produit qui ne contiendrait que de l'eau dite « du premier type », très fortement liée au produit par des forces électrochimiques (liaisons de Van Der Waals) serait très fortement protégé des risques de dégradation: l'eau est si fortement liée à la matière sèche que les microbes ne peuvent en disposer pour leur développement. D'autre part, cette eau a perdu une part de ses caractéristiques physico-chimiques, car elle partage partiellement ses électrons avec la matière sèche.
POUR ÉVAPORER L'EAU IL FAUT DE L'ÉNIERGIE
L'eau existe sous différentes formes: solide, liquide, gazeuse. La transformation d'une forme en une autre, encore appelée changement d'état, absorbe ou fournit de l'énergie suivant le cas.
Dans l'eau liquide, les molécules sont liées entre elles par des forces qui les empêchent de se séparer. Lorsqu'on chauffe l'eau, mais que l'apport de chaleur reste modéré, les molécules s'agitent de plus en plus, mais ces forces ne sont pas rompues. Lorsque l'eau s'évapore, ces forces sont rompues et les molécules se séparent. Pour rompre ces forces, il faut fournir un apport conséquent de chaleur, c'est-à-dire d'énergie.
Lors du séchage, l'eau libre se comporte comme de l'eau pure: il suffit pour la vaporiser de relativement peu d'énergie (de l'ordre de 2 400 KJ/kg d'eau libre). En revanche, lorsque l'eau contenue dans un produit a une activité nettement inférieure à 1, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit d'eau liée, des forces la maintiennent davantage au produit. L'évaporation de cette eau est de ce fait plus difficile et demande plus d'énergie.
Au cours du séchage, c'est d'abord l'eau libre qui va être évaporée, puis l'eau de plus en plus liée. La quantité d'énergie nécessaire pour vaporiser la même quantité d'eau augmente donc au cours du séchage. Le dernier gramme d'eau évaporée coûte beaucoup plus d'énergie que le premier.
Ceci est un point important pour comprendre que le séchage n'est pas une opération homogène dans le temps, mais doit plutôt être considéré comme une succession de phases assez différentes, sur lesquelles il sera nécessaire de revenir après avoir précisé la façon dont se font les échanges d'eau entre le produit et l'air.
LE POUVOIR ÉVAPORATOIRE DE L'AIR
Dans le séchage par entraînement, l'air est avant tout chargé d'évacuer la vapeur d'eau en surface du produit. L'évaporation de cette eau a nécessité de la chaleur provenant uniquement de l'air, au dessus du produit (cas du séchage indirect), ou provenant, en supplément, du rayonnement solaire frappant le produit (cas du séchage direct).
L'air à l'état naturel contient de l'eau sous forme de vapeur invisible. Cette quantité d'eau est variable (selon le climat local, les mouvements d'air dans l'atmosphère, la présence de grands lacs, de nuages...). Sa capacité maximale à absorber de l'eau est par contre totalement déterminée par sa température et la pression. Par exemple, 1 m³ d'air, à la pression atmosphérique, et à 26°C, ne peut contenir plus de 24,5 g de vapeur d'eau. Au-delà, la vapeur d'eau se condense en fines gouttelettes: c'est le brouillard. On dit alors que l'air est à saturation d'eau.
On définit par « pouvoir évaporatoire » de l'air sa capacité à absorber de l'eau placée à son contact, mesurée en grammes d'eau supplémentaires qu'il peut absorber, par mètre cube d'air, jusqu'à atteindre la saturation d'eau.
Deux paramètres sont introduits pour quantifier les proportions entre l'air sec et la vapeur d'eau contenue dans cet air:
- l'humidité absolue (teneur en eau), qui s'exprime en grammes d'eau par kg d'air sec. Par exemple si elle est de x = 10 g/kg d'air sec, dans 1,01 kg d'air on a 1 kg d'air sec et 10 g de vapeur d'eau.- l'humidité relative (degré qui s'exprime en pour cent (%). Cette valeur précise le niveau d'humidité absolue de l'air par rapport au niveau d'humidité absolue maximal qu'il pourrait avoir, compte tenu de la température de l'air et de la pression. Elle permet donc de connaître le niveau de saturation de l'air en eau.
Pour une humidité relative de l'air de 100 %, celui-ci ne peut plus absorber d'eau sans que celle-ci ne se condense en buée ou gouttelettes. Son pouvoir évaporatoire est alors nul. Plus le degré d'humidité relative de l'air s'éloigne de cette valeur, plus l'air dispose d'une capacité d'absorption de nouvelles quantités d'eau, et plus son pouvoir évaporatoire est fort.
Lorsque l'air est réchauffé, son humidité relative diminue (bien que son humidité absolue reste la même). Son pouvoir évaporatoire augmente donc. On comprend dès lors l'intérêt de réchauffer l'air qui sera utilisé pour le séchage.
Le tableau ci-contre fournit les ordres de grandeur du pouvoir évaporatoire de l'air pour différents niveaux de sa température et de son degré d'humidité relative (d° hygrométrique) qui se présentent pour l'air ambiant. Les pouvoirs évaporatoires d'airs portés à plus haute température sont précisés au chapitre suivant.
La capacité de l'air à enlever l'eau du produit se détermine normalement de façon plus complexe, sur la base de la lecture du « diagramme de l'air humide ». Ces éléments seront abordés en troisième partie, plus théorique.
Le pouvoir évaporatoire, tel que défini ci-dessus, permet de préciser la vitesse de séchage dans les premières phases de l'opération. L'air en sortie du séchoir peut en effet être relativement proche de son niveau de saturation en eau tant qu'il y a de l'eau libre dans le produit, ce qui est le cas au début du séchage. De la sorte, et pour ce début de séchage, le pouvoir évaporatoire exprime, en première approximation, la quantité d'eau extraite du produit par nombre de mètres cubes d'air ayant traversé le séchoir. Pour affiner cette approximation, il faut par la suite tenir compte de ce que l'air ne sortirait du séchoir à saturation que si:
- les échanges d'eau à la surface air/produit étaient parfaits, ce qui n'est pas le cas dans la réalité;- tout l'air passait un temps suffisant au contact direct du produit pour se charger totalement en eau, ce qui n'est pas non plus le cas (de l'air passe près des parois et relativement loin du produit et n'a pas le temps, lors de sa progression dans le séchoir, d'accumuler toute l'eau dont il peut se charger).
Pouvoir évaporatoire de l'air en grammes d'eau par mètre cube d'air
Froid et sec: la Sibérie Chaud et sec: le Sahara
Humidité relative |
Température de l'air en °C | |||||||
|
10 |
15 |
20 |
25 |
30 |
35 |
40 |
45 |
10 | | |
| | |
8,2 |
9,2 |
9,9 |
20 | | |
| |
6 |
7,3 |
8 |
8,6 |
30 | | |
|
5 |
5,6 |
6,2 |
6,6 |
6,9 |
40 |
2,7 |
3,2 |
3,7 |
4,2 |
4,6 |
5,1 |
5,5 |
6,1 |
50 |
2,2 |
2,6 |
3 |
3,4 |
3,7 |
3,9 |
4,1 | |
60 |
1,8 |
2,1 |
2,3 |
2,6 |
2,9 |
3,1 | | |
70 |
1,3 |
1,5 |
1,7 |
2,1 |
2,1 | | |
|
80 |
0,9 |
1 |
1,1 |
1,2 | | |
| |
90 |
0,5 |
0,5 |
0,7 | | |
| | |
Froid et humide: l'Irlande
Chaud et humide: Amazonie
(d'après « Le séchage solaire des plantes aromatiques et médicinales », SOLAGRO, GEFOSAT, ARCHIMED, 1989)
L'approximation première ne fournit donc ici qu'un ordre de grandeur par excès de la capacité de l'air à enlever l'eau du produit. Cette surestimation peut être de l'ordre de 10 (contact air/produit très efficace et peu d'air « inutile », mal focalisé sur le produit dans le séchoir) à 50 %.
Comme il a déjà été mentionné, le séchage se produit d'autre part en plusieurs phases, et les « règles du jeu » sont plus difficilement calculables lorsqu'il n'y a pas d'eau libre ou très peu liée dans le produit.
Quel que soit le mode de séchage solaire (naturel, direct ou indirect), les produits agro-alimentaires subissent trois périodes de séchage de durée variable suivant les caractéristiques de l'a* et du produit. La vitesse de séchage, exprimée en kg d'eau extrait par heure, la température du produit et l'humidité de l'air évoluent dans le temps de façon très distincte selon ces phases.
PÉRIODE DE MISE EN TEMPÉRATURE DU PRODUIT (PHASE I)
La première phase (vitesse de séchage croissante) est courte, éventuellement inexistante, et correspond à la montée en température du produit jusqu'à atteindre une température d'équilibre, lorsque le produit reçoit autant de chaleur de l'air qu'il doit en fournir à l'eau lors de sa vaporisation. Cette température d'équilibre ne s'atteint pas tout de suite, puisque le produit avait au départ du séchage une température plus basse, et qu'il existe une inertie thermique. La vitesse de séchage sera croissante puisque l'échange d'eau entre le produit et l'air sera d'autant plus efficace que le produit sera réchauffé.
PÉRIODE DE VITESSE DE SÉCHAGE CONSTANTE (PHASE II)
La deuxième phase, à vitesse constante, correspond à l'évaporation de l'eau libre (activité de l'eau = 1) en surface du produit, sans cesse renouvelée par de l'eau venant de l'intérieur du produit (en partie similaire au phénomène de transpiration). La température du produit reste constante.
Du point de vue de l'évolution des températures, on peut comparer les phases I et II aux phases du chauffage d'une casserole d'eau: la température de l'eau monte dans un premier temps puis se stabilise lorsque l'eau bout (à 100°C sous pression atmosphérique). Il est important de noter que l'analogie s'arrête là et qu'il ne faut pas confondre la vaporisation et l'ébullition. Ce n'est pas en effet, dans le cas du séchage, une ébullition de l'eau à l'intérieur du produit qui provoque sa vaporisation. C'est plutôt un jeu « subtil » de lutte d'influence entre le produit et l'air dans l'attraction de cette eau. 100°C n'est pas une température de séchage recommandée!
En phase II, la vitesse de séchage est constante tant que les caractéristiques de l'air et sa vitesse de passage sur le produit sont constantes. Cette vitesse de séchage peut être accélérée soit en réchauffant davantage l'air avant son arrivée sur le produit (ce qui provoque une augmentation du pouvoir évaporatoire de l'air), soit en augmentant la vitesse de circulation de l'air au niveau du produit (ce qui augmente le débit d'air, donc la quantité d'air susceptible d'emporter avec lui de l'eau du produit en un temps donné).
Remarque:
Le choix d'augmenter ou non la vitesse de séchage dépendra:
· du rythme de production nécessaire pour rentabiliser l'activité;· du coût des options d'accélération de la vitesse de séchage;
Le choix d'augmenter cette vitesse par augmentation de la température de l'air ou par augmentation de son débit dépendra, entre autres choses:
- des coûts relatifs de chaque option. Par exemple: augmenter la surface de captage de l'énergie solaire ou introduire une source supplémentaire de réchauffement de l'air (gaz) pour la première option, et choisir un ventilateur plus puissant ou une cheminée solaire plus haute pour augmenter le débit d'air pour la deuxième;- des contraintes associées à chaque produit, qui conditionnent la gamme de températures de séchage admissibles (sans risque d'altération du produit).
Précisons que ces deux options sont liées. On peut augmenter la température de l'air en diminuant le débit d'air. L'air restera alors plus longtemps en phase de réchauffement avant d'arriver sur le produit. Mais la vitesse de séchage n'augmentera pas pour autant. Au contraire, elle diminuera: l'impact de la diminution du débit d'air sera plus fort que l'impact du réchauffement de l'air. Dans le même ordre d'idée, une augmentation du débit d'air sans modification de l'apport d'énergie pour le chauffage de l'air conduit à une diminution de température (L'air restera moins longtemps en phase de réchauffement), qui affectera l'efficacité de cette option.
· des risques de dégradation du produit encourus (cf. paragraphe suivant «Actions du séchage sur la qualité du produit alimentaire »).
Toutefois, la phase II est une phase qui présente un risque de dégradation spécifique du produit: le croûtage.
Le croûtage: un problème spécifique du séchage à éviter absolument Ce phénomène est spécifique à la phase II du séchage après extraction de l'eau libre du produit. Origine et manifestation: Le croûtage est dû à la capacité limitée de diffusion de l'eau dans le produit. Si la capacité évaporatoire: de l'air est très forte, l'eau va s'évaporer plus vite à la surface du produit qu'à l'intérieur: la surface deviendra dure et sèche. Elle empêchera la diffusion ultérieure de l'eau contenue dans le produit. Le comportement du produit au séchage sera alors similaire à celui qu'il a normalement en phase finale, présentée ci-dessous, sans pour autant que l'humidité du produit diminue. Dans certaines conditions, le croûtage peut survenir très rapidement, en quelques minutes. Or, c'est un phénomène qu'il faut à tout prix chercher à éviter car il a une grande incidence sur les altérations du produit (voir ci-dessous). Facteurs favorables au croûtage: Le risque de croûtage est d'autant plus grand que l'humidité de l'air au niveau du produit est faible, que la vitesse de circulation de l'air sur le produit est élevée et que le produit est épais. Prévention et résorption du croûtage: Dans le cas de séchoirs artisanaux, le suivi de l'humidité en sortie de séchoir permet de limiter les risques de croûtage. D'une manière générale, dès que l'humidité relative de l'air en sortie descend en dessous de 60 % en phase Il, il y a risque de croûtage. Toutefois, cette valeur est à déterminer pour chaque type de séchoir et de produit. Le suivi de la température du produit à l'aide d'une sonde de contact (cf. troisième partie, chapitre X) permet d'affiner la connaissance du comportement du produit pour un type de séchoir donné. Un léger croûtage peut souvent être résorbé en interrompant le
processus de séchage avant qu'il ne soit irréversible, pour laisser le temps à
l'eau contenue à l'intérieur du produit de réhumidifier la surface. On peut
également disposer le produit quelques heures dans une atmosphère à forte
humidité relative (90-95 %). |
PÉRIODE DE RALENTISSEMENT DU SÉCHAGE (PHASE III)
La troisième phase (ralentissement de la vitesse de séchage) correspond à l'évaporation de l'eau liée. L'eau libre, qui migrait de l'intérieur vers l'extérieur du produit pour être alors transformée en vapeur d'eau, a complètement disparu en fin de phase II. Ne reste plus dans le produit que l'eau liée, plus « accrochée » au produit. L'eau ne s'évapore plus à la surface du produit mais à l'intérieur de celui-ci. Un front d'évaporation s'enfonce vers le cur du produit. La vapeur d'eau est ensuite évacuée en surface par l'air. Plus le front s'éloigne de la surface extérieure du produit, plus le transfert d'eau est difficile.
Par ailleurs, l'eau faiblement liée au produit, et donc la plus facile à extraire, s'évapore le plus vite. Au cours de cette phase de séchage, l'eau à éliminer du produit est de plus en plus liée, et de plus en plus difficile à évaporer.
Un troisième facteur intervient parfois pour expliquer le ralentissement de la vitesse de séchage à mesure que l'on approche de la fin de l'opération. Les corps solubles, transportés en surface par le mouvement de l'eau, obstruent les pores du produit et il se forme parfois une croûte à sa surface, qui gêne le transfert de l'eau vers l'air extérieur.
Dans cette phase, et si débit d'air et température d'arrivée de l'air restent les mêmes qu'auparavant, la température du produit augmente et tend à devenir égale à la température d'arrivée de l'air. En effet, l'air fournit un flux de chaleur constant au produit, alors que l'effet refroidissant de l'évaporation de l'eau contenue dans le produit s'estompe (du fait d'une moindre vitesse de cette évaporation). Si on poursuivait le séchage jusque à disparition complète de l'eau dans le produit, celui-ci n'aurait plus de source de refroidissement (la vaporisation de son eau), et sa température deviendrait celle de son milieu ambiant, c'est-à-dire la température de l'air d'arrivée. Elle peut alors dépasser largement la température admissible du produit au-delà de laquelle se produisent des altérations profondes de sa qualité. Il faut donc impérativement contrôler cette augmentation de température pour ne pas dépasser la température maximale admissible par le produit, afin d'éviter la dégradation du produit.
Lors de cette phase, une température de l'air chaud légèrement inférieure de quelques degrés à cette température maximale permet de garantir cette sécurité tout en optimisant la vitesse d'évaporation.
Remarquons enfin que la détermination de la vitesse de séchage ne peut plus se faire sur les mêmes bases qu'en phases I et II (multiplication du débit d'air par la différence de taux d'humidité relative entre un air saturé d'eau et l'air à l'arrivée sur le produit). En effet, du fait des difficultés rencontrées dans l'extraction l'eau liée, l'air de sortie du séchoir n'est plus chargée d'eau à sa pleine capacité (saturation).
ALLURES DE SÉCHAGE
Selon les produits, d'importantes variations peuvent exister dans les durées respectives de ces trois phases. Dans le cas des produits à particules ou à feuilles, la phase I est quasiment inexistante. La phase Il n'existe pas toujours. Enfin, la phase III peut être divisée en plusieurs périodes.
Les évolutions en cours de séchage de paramètres tels que la masse d'eau dans le produit, sa température ou la vitesse du séchage, sont propres à chaque produit. Elles sont déterminées expérimentalement en laboratoire, en séchage continu, et sont représentées sous forme de courbes appelées allures de séchage. Les trois courbes présentées ci-contre fournissent un exemple type d'allures de séchage.
INFLUENCE DE LA TAILLE ET DE LA DISPOSITION DU PRODUIT LORS DES TROIS PHASES
En règle générale, quelle que soit la phase de séchage, on a intérêt à augmenter la surface d'échange air/produit (petits morceaux, étalement sans que les morceaux se touchent, couches minces...). Ceci présente plusieurs avantages qui seront précisés par la suite, au chapitre V][I. Ne sont présentés ici que les avantages qui ont trait aux mécanismes décrits dans les trois phases du séchage:
- une telle mesure permet de diminuer la durée de la première phase: plus les morceaux sont petits et en couche mince, plus le produit atteindra rapidement la température à partir de laquelle le séchage est efficace (moindre inertie thermique);- en deuxième phase, l'évaporation s'effectue en surface du produit, et est d'autant plus rapide que la somme des surfaces de contact entre l'air et le produit est élevée et que l'air peut accéder facilement à toutes ces surfaces. D'autre part, le risque de croûtage du produit, évoqué plus haut, est nettement amoindri lorsque les morceaux de produit sont de petite taille;
- en troisième phase, l'élimination de l'eau en profondeur dans le produit sera d'autant plus facile que le front d'évaporation reste proche de la surface (donc que les morceaux sont de taille réduite).
PHASE I |
PHASE II |
PHASE III |
La chaleur de l'air sert surtout à chauffer le produit (T
augmente). L'évaporation augmente progressivement. |
Le produit est chaud et cède son eau libre à vitesse constante. Le
refroidissement du produit par la vaporisation de son eau compense exactement la
chaleur qu'il reçoit de l'air: la température du produit reste constante. |
Toute l'eau libre est évaporée. L'extraction de l'eau est plus
difficile et la vitesse du séchage diminue. Le rythme de vaporisation de l'eau
n'est plus suffisant pour compenser, par refroidissement, l'apport de chaleur
par l'air: la température du produit augmente. |
De telles mesures sont cependant parfois difficiles à prendre. C'est le cas pour le séchage des céréales, qui sont traitées en couche épaisse. Les produits séchés en couche épaisse ont en effet un comportement complexe. Si on décompose la couche épaisse en une succession de couches minces, on constate que seule la couche d'entrée a le comportement d'une couche mince (vitesse de séchage constante, puis ralentissement).
En effet, l'air se charge d'humidité et se refroidit au fur et à mesure qu'il traverse la couche épaisse. Quand la couche d'entrée amorce sa phase de ralentissement, l'air qui la traverse en sort moins saturé d'eau. Alors commence le séchage à vitesse constante de la couche suivante. Ainsi progresse peu à peu le front de séchage, de l'entrée vers la sortie. L'application de la théorie suppose donc de décomposer la couche épaisse en une succession de couches minces. D'où des calculs complexes, qu'il faut valider par l'expérimentation.
Une autre conséquence directe de la spécificité du séchage en couche épaisse est que l'air de séchage ne doit pas être porté à une température supérieure à la température maximale admissible par le produit: les premières couches du produit sont très vite en phase III du séchage.
L'effet du séchage sur la qualité du produit alimentaire est abordée successivement sous deux angles: l'évolution de sa population microbienne, et l'évolution de ses caractéristiques gustatives et nutritionnelles.
ACTION DU SÉCHAGE SUR LES MICRO-ORGANISMES
Les traitements de conservation sont d'autant plus difficiles que la population microbienne est élevée. Si certains traitements peuvent permettre de réduire cette population, ils ne peuvent en aucun cas atteindre la stérilité totale.
En revanche, tous les traitements de conservation doivent empêcher le développement des micro-organismes avant qu'ils ne soient trop nombreux.
Parmi les traitements qui stabilisent la population microbienne, on peut citer des traitements chimiques (acidification, salaison, sucrage, inhibiteurs chimiques...) et des traitements physiques (froid, stérilisation, déshydratation...).
Les conditions les plus propices au développement des micro-organismes se situent aux fortes activités de l'eau du produit (0,8) et dans une gamme de température comprise entre 20 et 50°C.
Pour la conduite du séchage, il faut:
· éviter que l'air de sortie du séchoir soit trop humide (80-95 %) car cela indique qu'une partie au moins du produit se situe dans une atmosphère humide propice au développement microbien: le produit ne doit pas rester plus d'une demi-journée en début de séchage à de tels taux d'humidité relative de l'air;· essayer d'arriver rapidement à de faibles activités de l'eau dans le produit; cependant, il existe deux obstacles majeurs à une telle conduite.
- Il peut se produire un croûtage du produit aux allures de séchage rapide: la surface sera dure et sèche. Elle empêchera la diffusion de l'eau contenue à l'intérieur du produit. L'intérieur de l'aliment restera donc à de fortes teneurs en eau et ne sera pas stable microbiologiquement.- Un séchage rapide est en général lié à des températures de l'air assez élevées (jusqu'à 70-80°C). Cela peut entraîner en phases II et III des modifications du goût indésirables. Ce risque est amplifié par le phénomène de croûtage s'il survient (cuisson, réactions de brunissement).
Remarque:
Pour des raisons techniques ou économiques, il peut être intéressant:
· d'effectuer un préséchage rapide permettant de stabiliser le produit quelques jours puis, ultérieurement, un séchage complémentaire pouvant être plus lent et permettant de descendre à de très faibles teneurs en eau;· d'effectuer un cycle de séchage complexe quand le séchoir est régulable.
Exemples: En phases I et II, séchage rapide à température élevée à condition que:
- la température du produit reste inférieure à la température maximale admissible par le produit (on préconise une température d'arrivée de l'air de 10° supérieure à cette température maximale);- l'humidité relative de l'air après passage sur le produit reste comprise entre 60 et 80 % pour éviter le croûtage d'un côté et le développement microbien de l'autre.
En phase III, séchage à température réduite pour que la température du produit reste inférieure à la température critique de brunissement non enzymatique.
Dans des conditions particulièrement défavorables (conditions climatiques défavorables, produit particulièrement altérable, mauvaises conditions de stockage, etc.) il est recommandé d'utiliser un traitement anti-microbien d'appoint spécifique (précisé au chapitre VII).
Les produits qui doivent être le plus surveillés sont les viandes et surtout les poissons à cause du terrain favorable qu'ils offrent au développement des microbes pathogènes (entraînant des maladies).
ACTION DU SÉCHAGE SUR LES TRANSFORMATIONS DU GOUT DU PRODUIT
Ces transformations sont inévitables mais selon la composition de l'aliment et les paramètres du séchage, certaines réactions vont être favorisées tandis que d'autres vont être limitées. L'essentiel est de savoir quelles réactions vont constituer le facteur prédominant d'altération afin de mieux cibler les caractéristiques que doit avoir le traitement de conservation.
Les réactions d'oxydation des lipides
Au point de vue de la conduite du séchage, elles seront limitées par un séchage:
- à haute température (le croûtage et le risque de brunissement non enzymatique étant des facteurs limitants);- mené à l'abri de la lumière (le séchage solaire direct est donc à éviter pour les produits les plus sujets à ces réactions);
- conduit à des activités de l'eau dans le produit entre 0,2 et 0,5.
Parmi les produits pour lesquels ces réactions peuvent être un facteur limitant, on peut citer:
- les produits à forte teneur en lipides et surtout en lipides insaturés (viande de porc, de volaille, poissons - surtout les poissons gras -, pommes de terre...);
- les produits présentant une grande surface d'échange par rapport à leur volume, à condition que la teneur en lipide soit suffisamment élevée: produits poreux, farine de poisson.... En effet, quand l'eau s'évapore, elle va faciliter le contact et la diffusion de l'oxygène dans l'aliment et donc le rancissement.
Ces réactions peuvent être limitées par des prétraitements employant des antioxydants et par un conditionnement adapté (cf. chapitre VII).
Le bruissement enzymatique
Le séchage mené jusqu'à des activités de l'eau inférieures à 0,4 va limiter l'action des enzymes. Cependant, ce bruissement peut intervenir très rapidement (quelques dizaines de minutes pour certains produits). C'est pourquoi un prétraitement permettant de stopper ces réactions dès le début du procédé de conservation est souvent souhaitable (ex: blanchiment).
Les produits concernés sont essentiellement des fruits (bananes, abricots, pommes...) et quelques légumes (pommes de terre...).
Les réactions de Maillard (ou réactions non enzymatiques)
Les produits les plus concernés par les réactions de Maillard sont les fruits et les produits carnés. Elles seront d'autant plus favorisées que le produit est acide, riche en acide ascorbique (vitamine C), en glucides et en protéines.
Ces réactions seront d'autant plus limitées que le séchage permettra d'abaisser rapidement l'activité de l'eau, en dessous de 0,5 dans la mesure du possible, et que la température du produit reste inférieure à la température «critique » de 50-55°C. Cette température est à préciser et à adapter en fonction du produit.
Un séchage à basse température ne limite pas forcément le brunissement non enzymatique car le temps de séchage est en général plus élevé. Le produit reste plus longtemps à des niveaux d'humidité favorisant à la fois les réactions de Maillard et le développement microbien. De plus, l'oxydation des lipides (du fait d'un séchage à basse température) peut également être un facteur limitant.
Un séchage rapide à haute température reste donc préférable tant que la température du produit reste inférieure à la température « critique ».
Rappelons que le brunissement non enzymatique peut se révéler au cours du stockage sur un produit apparemment « sain » juste après séchage. Pour les fruits, l'emploi d'anhydride sulfureux avant ou après séchage peut s'avérer intéressant pour ralentir ces réactions.
Autres conséquences du séchage
On peut citer:
- une perte assez limitée des composés aromatiques;- une modification de la pigmentation et de la texture du produit;
- une perte en vitamines notamment en vitamines A et C, limitée par un séchage indirect;
- une conservation de la quantité de sels minéraux.
Les éléments de la théorie du séchage solaire indirect présentés plus haut sont valables pour le séchage solaire direct ou pour le séchage au soleil, avec quelques modifications.
En effet, le produit est alors chauffé non seulement par l'air, mais aussi directement par le soleil. On applique donc la théorie précédente, mais en considérant une température fictive, résultat de l'échauffement du produit. Cette température fictive est difficile à calculer.
Sa détermination repose sur la connaissance de trois paramètres:
- le flux solaire arrivant sur le produit;- la surface de produit exposée;
- le coefficient d'absorption du flux solaire par le produit; il dépend de l'état de surface du produit (couleur, lisse ou rugueux) et du comportement de cette surface aux différentes longueurs d'onde du rayonnement solaire. Il semble que l'absorption du rayonnement soit plus forte en fin de séchage, ce qui renforce la contrainte de la température maximale admissible par le produit en phase III, puisque c'est encore un facteur qui tend à augmenter la température du produit.
Dans la pratique, on la déduit des observations. Le pouvoir séchant de l'air est donc plus fort dans le cas du séchage solaire direct que dans le cas du séchage solaire indirect. Le séchage est alors plus rapide, ce qui peut présenter des avantages. Cependant, le séchage solaire direct présente aussi des risques, que l'on peut éviter en prenant certaines précautions:
Risques |
Précautions |
- Le produit peut être dégradé en phase III du séchage, par un
échauffement excessif. |
- En fin de séchage, couvrir partiellement le produit où le
capteur quand le soleil est au plus haut. |
Le séchage d'un produit doit être mené jusqu'à obtention de la teneur en eau recommandée pour son stockage sur le long terme. Il existe plusieurs méthodes envisageables pour savoir quand ce stade est atteint.
· Analyse de la teneur en eau d'échantillons du produit. C'est la méthode la plus fastidieuse. Elle consiste à retenir quelques produits témoins dans chaque lot de séchage et analyser leur teneur en eau régulièrement en cours du séchage.Cette démarche peut être nécessaire pour analyser le comportement d'un séchoir pilote, mais n'est pas compatible ni avec les attentes des petits producteurs, ni avec les contraintes de production des plus gros.
· Suivi de l'évolution du degré d'humidité relative de l'air en sortie de séchoir. La teneur en eau du produit et l'humidité relative de l'air en sortie de séchoir sont liées par des relations qui sont précisées en troisième partie. Pendant la phase II, l'humidité relative de l'air dans le séchoir doit être assez élevée (environ supérieure à 60 %). Quand on approche de la phase III, l'humidité relative va avoir tendance à chuter. La mesure de l'humidité relative de l'air en sortie de séchoir peut donc fournir des indications sur le degré de séchage obtenu.
· Suivi de l'évolution du poids du produit. On a montré dans le premier paragraphe comment le poids du produit et sa teneur en eau sont liés. Une méthode simple consiste donc à relever le poids d'un échantillon de produit avant séchage et à effectuer des pesées régulières de cet échantillon vers la fin de la phase II de séchage. On stoppera le séchage lorsque le poids du produit sera en correspondance avec la teneur en eau finale recommandée.
· Analyse des caractéristiques externes du produit. Les caractéristiques extérieures de certains produits dépendent fortement de leur teneur en eau. Il suffit alors de procéder dans un premier temps à l'analyse de produits séchés disposant de la teneur en eau recherchée, et observer les caractéristiques de ces produits. On pourra par la suite, sans avoir à réaliser de mesures, arrêter le séchage lorsque le produit aura ces mêmes caractéristiques. Ce critère peut être, par exemple: on peut arrêter le séchage lorsque le produit a une consistance élastique, est souple, de couleur brun doré, et que les morceaux ne se collent pas ensemble (cas établi pour une variété de mangue). Par mesure de prudence, il convient cependant de réaliser de temps en temps une analyse pour surveiller la teneur en eau des produits finis.
· Pour les petites productions et pour des séchoirs à comportement relativement stable, on pourra parfois se contenter de se rappeler la durée de séchage nécessaire dans les conditions d'ensoleillement et d'humidité de l'air présentes, sur la base d'une expérience accumulée suffisante.
Les principaux éléments théoriques mentionnés qui conditionnent la pratique du séchage sont les suivants:
· La présence d'eau dans un produit alimentaire est l'un des principaux facteurs de sa dégradation potentielle, par multiplication des micro-organismes. De façon à disposer de produits séchés de bonne tenue dans le temps, il est nécessaire d'abaisser la teneur en eau jusqu'à un niveau caractéristique, en premier lieu, du produit lui-même, et dont la valeur standard est fournie dans les « fiches produits ».· L'abaissement de la teneur en eau doit être d'autant plus élevée que l'on envisage de stocker le produit dans une atmosphère humide ou chaude (chez le producteur, le commerçant ou le consommateur).
· La teneur en eau initiale du produit étant elle-même une caractéristique du produit, il est facile de déterminer la quantité d'eau que l'on doit extraire à partir de:
- la quantité totale de produit que l'on envisage de traiter par cycle de séchage;- la teneur en eau initiale du produit;
- sa teneur en eau finale recommandée.
· L'eau est associée au produit de différentes façons. Une partie de cette eau n'est pas véritablement retenue par lui et se comporte comme de l'eau ordinaire (eau libre). Elle s'évapore de ce fait relativement facilement au contact de l'air extérieur, tant que ce dernier peut accroître sa teneur en humidité.
· L'évaporation de cette eau libre est suffisamment facile pour que l'air qui circule dans le séchoir ai tendance à se charger du maximum d'eau qu'il peut contenir. Cette quantité maximale dépend directement des paramètres de température et de l'air. On peut donc déterminer, en première approximation, les relations qui existent entre débit d'air, température de l'air, degré hygrométrique et vitesse de séchage, du moins tant qu'il reste de l'eau libre dans le produit (la vitesse de séchage est alors donnée, en première approximation, par le débit d'air que multiplie son pouvoir évaporatoire). Dans deuxième temps, il faut tenir compte de ce que les échanges de masse et de chaleur ne sont pas parfaits. La première estimation n'est de ce fait qu'une estimation par excès de cette vitesse. Mais cette surestimation peut parfois atteindre 50 %.
· Lorsque toute l'eau libre, qui est la plus rapide à s'évacuer du produit, a disparu, le séchage devient plus difficile car l'eau qui reste dans le produit lui est attaché par des forces qu'il faut vaincre. Cette dernière phase du séchage est à contrôler tout particulièrement, car le produit a tendance à s'échauffer. Si sa température dépasse un maximum admissible, précisé sur les « fiches produit », la dégradation de la qualité du produit devient très probable. Il ne faut cependant pas chercher à diminuer trop la température de séchage dans cette phase. Le séchage est en effet d'autant plus efficace que la température de l'air est élevée.
· Ce contrôle de la température en fin de séchage doit être particulièrement prononcé dans le cas d'un séchage solaire direct, car le produit s'échauffe du fait de son contact avec l'air chaud, mais aussi du fait de son réchauffement direct par le soleil.
· Le séchage est, pour chacune de ses phases, d'autant plus efficace que le produit est découpé en petits morceaux, étalé sans que les morceaux se touchent et en couches minces.
· La fin du séchage peut se déterminer par plusieurs méthodes, mais est dictée en premier lieu par l'obtention de la teneur finale en eau du produit recommandée pour sa conservation sur le long terme.
La conception et le dimensionnement d'un séchoir sont des problèmes délicats. D'une part les éléments théoriques à prendre en compte sont parfois complexes, d'autre part ils n'apportent pas toutes les réponses, pour plusieurs raisons:
- certains mécanismes, comme l'efficacité du transfert de masse et de chaleur entre le produit et l'air, l'efficacité d'un capteur solaire, ou les résistances au passage de l'air, sont connus dans leur principes, mais difficiles à transcrire avec précision dans la pratique;- il existe de nombreuses variétés de chaque produit. Chacune peut réagir différemment des autres dans le processus de séchage. Et on ne peut pas, en l'état actuel des connaissances, délivrer une fiche technique pour chacune d'elles;
- le mode opératoire du séchoir dépendra d'habitudes et d'attentes socioculturelles diverses. Ce mode opératoire doit être intégré dans la conception du séchoir lui-même;
- la conception du séchoir repose aussi sur des critères autres que techniques. Il y a bien entendu les critères d'ordre économique (abordés au chapitre VIII). Mais d'autres interviennent, comme la disponibilité locale en matériaux pour l'élaboration du séchoir ou pour sa maintenance, et le savoir-faire des artisans.
On peut donc difficilement proposer des règles précises de dimensionnement de séchoir qui permettraient de répondre à une demande particulière dans un environnement spécifique.
Cela étant dit, il faut considérer que, pour la gamme de séchoirs abordée dans ce document (séchoirs au plus semi-industriels), peu d'entre eux coûtent plus de 3000 FF. C'est le prix d'une journée de travail d'un expert expatrié...
Les options envisageables pour faciliter la diffusion des séchoirs en pays en développement sont de ce fait limitées. On pourrait:
- développer des « séchoirs types », sur le principe du « clé en main », sur la base de modèles éprouvés dans des conditions données d'environnement et d'utilisation. Mais on contraint alors le futur utilisateur à se restreindre au type et à la gamme de production et au contexte pour lesquels ils ont été déclarés fiables. Compte tenu du faible nombre de séchoirs types et de la faible variation dans l'usage de chacun d'eux, cela limite les choix. Les principaux séchoirs qui répondent à des exigences de fiabilité sont exposés au chapitre VI;- former des experts qualifiés locaux, dont on peut penser qu'ils coûteront moins cher qu'un expatrié. C'est l'un des objectifs de ce document d'y contribuer. Il faudra cependant attendre encore quelques années pour qu'ils soient en nombre suffisant, et qu'un marché du séchoir se développe suffisamment pour que leurs bureaux d'études soient rentables;
- attendre encore quelques années que la gamme de séchoirs éprouvés soit plus étendue et/ou que l'on soit en mesure de suggérer leurs modifications envisageables pour répondre à tel ou tel besoin dans tel ou tel environnement;
- utiliser quelques principes physiques simples pour dimensionner soi-même un séchoir, ou modifier soi-même les dimensions de séchoirs existants, au risque probable d'obtenir un séchoir inadapté, non fonctionnel, irréalisable ou trop coûteux.
Le choix de cette dernière option n'appartient ni à l'auteur, ni à l'éditeur de cet ouvrage, mais au concepteur qui accepte les risques encourus d'obtenir un séchoir qui ne fonctionne pas, ou plus souvent d'avoir par la suite à consacrer du temps à tester lui-même et améliorer au fur et à mesure le séchoir ou son mode d'utilisation.
L'objectif de ce chapitre est d'apporter le maximum de précisions sur les relations qui interviennent dans le dimensionnement, sans pour autant proposer des indications chiffrées sur les redimensionnements envisageables de tel ou tel type de séchoir existant. Ces relations sont le plus souvent présentées de façon simplifiée, pour être accessibles au plus grand nombre, et n'indiquent que des ordres de grandeur. Les aspects les plus complexes, dont la compréhension reste nécessaire pour une bonne maîtrise des procédures de dimensionnement, sont abordés dans la troisième partie.
Ce chapitre a aussi pour objectif de compléter les éléments de compréhension du séchage qui ont été développés au chapitre IV, en se concentrant maintenant sur le séchoir lui-même.
Les principaux éléments requis pour l'analyse sont:
- le rythme de la production de produit sec que l'on envisage;- le temps que le produit frais peut passer sans se dégrader, en stockage amont et dans le séchoir, tant que son humidité n'est pas encore assez réduite;
- le rythme d'enlèvement de l'eau du produit, qui résulte de ces contraintes et des caractéristiques du produit;
- la température de l'air envisagée pour le séchage;
- le débit d'air circulant dans le échoir;
- la vitesse de l'air que cela suppose;
- la puissance du ventilateur requis, le cas échéant, pour fournir cette vitesse à l'air;
- la puissance thermique nécessaire pour extraire l'eau du produit au rythme envisagé;
- le dimensionnement des capteurs qui transmettent la puissance solaire à l'air;
- la puissance thermique d'une source d'énergie complémentaire, le cas échéant.
Dans la pratique des calculs de dimensionnement technique, de nombreuses étapes se réalisent conjointement. La température d'arrivée de l'air sur le produit et le débit de l'air dans le séchoir, par exemple, sont liés par des relations qui empêchent de les traiter séparément. La présentation est ici relativement linéaire, mais les éventuels nécessaires « allers-retours » seront précisés en temps voulu.
Les questions à se poser lors du dimensionnement technique d'un projet, 24 au total, sont présentées sur deux sections:
- Rythme de production, température de séchage, débit d'air et énergie requise;- Production de l'énergie requise.
1. Quel produit veut-on sécher, quels sont les objectifs?
Ce point n'est rappelé ici que pour mémoire: la réponse a été apportée dès le début de la procédure, lors de l'élaboration du cahier des charges du projet.
2. Quelle quantité de produit frais le séchoir doit-il pouvoir traiter en moyenne par jour?
Cela dépend des circonstances. Si la personne qui s'engage dans une activité de séchage alimente son unité à partir de sa propre production, et n'envisage pas d'acheter le produit frais à d'autres producteurs parce que cela lui reviendrait trop cher, il doit se poser deux premières questions:
- quelles sont les périodes de l'année où le produit est disponible, et en quelles quantités?- doit-on chercher à sécher toute la production qui ne peut pas être vendue en frais à un bon prix?
Des éléments méthodologiques pour répondre à ces questions sont précisés par la suite. Dans le cas d'un entrepreneur qui prévoit d'acheter au moins une partie des produits frais, le problème du dimensionnement est posé en termes similaires, mais plus complexes. Cela est discuté plus loin.
Le calendrier de récolte
Un calendrier de récolte/approvisionnement prévisionnel pour la campagne de séchage de référence va permettre une première estimation de la capacité de production du séchoir à retenir.
C'est un tableau prévisionnel de récolte par espèce (produit) et pour une échelle de temps prédéfinie (hebdomadaire, tous les dix jours, tous les mois...).
Le débit de récolte/production journalière va varier durant la saison et passer par un ou plusieurs maxima. Deux options peuvent alors être envisagées:
- traiter la totalité de la récolte de produit frais; il faudra alors retenir un séchoir capable d'absorber ces « pics de récolte », ce qui impose de caler son rythme de production sur le débit de produit frais en période de pointe;- ne traiter qu'une partie du produit frais; on peut alors retenir un séchoir de capacité de production adapté au débit journalier moyen de produit frais (par exemple).
L'intérêt relatif de ces options extrêmes dépend des circonstances.
Si les « pics de récolte » sont nombreux et/ou de durée importante et/ou si le produit est bien valorisé par le séchage, la première option est souhaitable pour ne pas perdre des opportunités de vente. Si par contre il n'y a qu'un pic de récolte de durée modeste (une semaine par exemple) et dont l'amplitude dépasse largement le niveau moyen de la production sur les autres moments de la période de récolte, la deuxième option devient préférable. Il est en effet difficile d'amortir un investissement important s'il n'est utilisé à capacité normale qu'une semaine par an.
Si le produit envisagé peut être stocké avant le séchage sans risque de dégradation pendant un temps suffisant, on pourra davantage étaler dans le temps les pics d'approvisionnement du séchoir en produits frais. On aura de même, de toutes façons, intérêt à répartir les récoltes dans le temps, en étalant les semis et/ou en adoptant plusieurs variétés, voire plusieurs produits ayant des périodes de maturité différentes.
Le rapport de parage
Pour transformer le calendrier des récoltes en calendrier des approvisionnements du séchoir en produit frais, il faut aussi connaître les rapports de « parage » entre le produit frais récolté et le produit frais prêt à sécher. Il s'agit de connaître les pertes par prélèvement de la peau, du noyau, des os, des matières grasses, des arêtes... et par découpage (en filets, dés, lamelles, rondelles...) suivant le produit à sécher.
Exemple:
Calendrier prévisionnel d'approvisionnement en mangues (objectif de production: 4,7 tonnes de mangues séchées)
Mois |
avril |
mai |
juin |
juillet |
août |
sept. |
oct. |
Total |
Amélie (T) |
3,2 |
10,5 |
5,8 | | |
| |
19,5 |
Kent (T) | |
2,3 |
7 |
9 |
2,3 | | |
20,6 |
Brooks (T) |
| | |
3,8 |
10,5 |
12,8 |
3 |
30,1 |
Total matière première |
3,2 |
12,8 |
12,8 |
12,8 |
12,8 |
12,8 |
3 |
70,2 |
Pulpe enclayée (T) |
1,3 |
5,1 |
5,1 |
5,1 |
5,1 |
5,1 |
1,2 |
28,1 |
Eau enlevée (T) |
1,1 |
4,3 |
4,3 |
4,3 |
4,3 |
4,3 |
1,0 |
23,4 |
Mangue séchée produite |
0,9 |
0,9 |
0,9 |
0,9 |
0,9 |
0,9 |
2,7 |
4,7 |
Le cas d'un séchage de produits frais achetés à d'autres producteurs
Si l'entrepreneur qui élabore un projet de séchage prévoit d'acheter au moins une partie de la matière première auprès d'autres producteurs, les termes du problèmes sont modifiés dans deux directions opposées:
- il n'y a plus de limite a priori à son approvisionnement en produit frais, tant qu'il consent à en payer le prix;- la contrainte forte est par contre ce coût de l'approvisionnement.
Il devra par exemple analyser:
- les capacités de la zone dans laquelle il se situe à satisfaire les objectifs de production de produit sec qu'il envisage;- les périodes de l'année où le produit frais devient trop cher pour son activité;
- les coûts du transport (et sa faisabilité) de la matière première s'il la fait venir d'autres zones de production.
Certains de ces éléments seront repris au chapitre VIII, sur l'évaluation économique des projets, avec les problèmes de localisation d'une activité de séchage.
Autres déterminants du rythme de la production de produits secs
En premier lieu, l'argument les avantages comparatifs d'une vente du produit frais plutôt que du produit sec n'intervient pas que pour l'entrepreneur décrit ci-dessus. Il intervient aussi pour l'agriculteur qui envisage de se lancer dans le séchage à vocation commerciale. Il devra toujours se demander s'il est plus rentable de vendre le produit frais ou de le sécher. Si c'est le cas à certaines périodes de l'année, cela peut modifier l'estimation du rythme de production de produit sec, puisqu'alors la matière première sera disponible en quantité plus réduite.
D'autre part, le séchage peut être tributaire des conditions climatiques (cas du séchage solaire notamment). Il faut donc prévoir que le rythme de séchage sera plus faible à certaines périodes, du fait d'une moindre performance du séchoir lorsque l'air est plus humide ou lorsque l'ensoleillement est moindre. Si la dégradation des conditions climatiques se produit lors de périodes de pics de récolte du produit frais, il faudra éventuellement soit prévoir un surdimensionnement du séchoir, soit une possibilité d'énergie d'appoint.
Enfin, il faut aussi tenir compte des possibilités d'évolution de l'unité de séchage. Il peut par exemple être intéressant de pouvoir augmenter la production de l'unité après une première période d'essai, sans avoir à investir dans un nouveau séchoir mieux adapté aux nouveaux objectifs.
En résumé, il est plutôt conseillé de surdimensionner au début la capacité de séchage pour faire face aux pointes de production, à des conditions climatiques défavorables, et se conserver une marge de manuvre pour une éventuelle expansion de l'activité à l'avenir.
3. De quel temps d'attente dispose-t-on avant un séchage suffisant pour éviter que le produit frais ne commence à se dégrader?
Le rythme de production d'une unité de séchage est donné par la division de la quantité de produit frais traité à chaque cycle de séchage par la durée de ce cycle (incluant le temps de chargement et de déchargement du séchoir, ainsi que les « temps morts »). On peut donc fournir le même rythme de différentes manières (durée de cycle plus courte et moins de produit traité à chaque cycle, ou durée de cycle plus longue et plus de produit traité à chaque cycle). Pour de nombreux produits alimentaires, une contrainte forte pèse sur la durée du cycle de séchage: le séchage doit être suffisamment rapide pour que le produit atteigne vite un état d'humidité où il est préservé des risques de dégradation. À titre indicatif, on considère que la durée de séchage de la tomate ne doit pas dépasser trois jours. C'est parmi les légumes le plus difficile maintenir longtemps avant un séchage suffisant (risques de moisissure). Parmi les fruits, les plus sensibles de ceux qui sont usuellement séchés sont la mangue et l'abricot. Les viandes, mais surtout les poissons, sont particulièrement sensibles à des durées trop longue d'attente.
La durée pendant laquelle le produit reste sujet au développement microbien n'est pas le seul paramètre qui influe sur le risque de dégradation du produit avant son séchage total. Cela est aussi fonction de:
- la température du produit pendant le séchage (le développement microbien est le plus intense pour les températures comprises entre 30°C et 55°C. Au-delà de 65°C, le risque est limité);- l'activité de l'eau du produit: le risque de: dégradation est très élevé pour les produits présentant une activité de l'eau de plus de 0,9; il est fort de 0,9 à 0,75, limité entre 0,75 et 0,6, et pratiquement inexistant en dessous de 0,6;
- la variété du produit considéré;
- la population microbienne initiale;
- la qualité du parage;
- etc.
Remarque:
À durée identique, le temps passé dans le séchoir compte beaucoup plus que le temps passé en stockage amont: les microbes se développent beaucoup plus facilement aux températures élevées (du moins, tant que l'on n'atteint pas une température de « stérilisation thermique » qui les tue).
4. Quelle quantité d'eau doit-on enlever du produit?
La question de la quantité d'eau à extraire selon les produits a déjà été abordée au chapitre précédent. La méthode de calcul est reprise ici sous une forme plus mathématique.
La masse d'eau à extraire correspond à ce qu'il faut retirer du produit pour le faire passer d'une teneur en eau initiale donnée, caractéristique du produit frais et indiquée sur les « fiches produit », à une teneur en eau finale donnée, fournie par une norme technique assurant la conservation du produit considéré, elle aussi fournie dans les « fiches produit ». La relation qui s'établit entre ces termes s'écrit:
(en kg d'eau par kg de produit
frais à sécher)
avec:
- m i: teneur en eau initiale du produit frais (en %);- m f: teneur en eau finale du produit séché (en %);
- M e: quantité d'eau à extraire du produit (en kg);
- M i quantité à sécher de produit frais après parage (en kg), le parage étant l'opération initiale de retrait de la peau et des déchets du produit frais.
Remarque:
La teneur en eau, ou degré d'humidité, du produit définie ici est appelée teneur en eau en base humide, car elle est le rapport de la masse d'eau contenue dans le produit sur la masse totale du produit (masse de sa matière sèche et de son eau). On utilise parfois dans les calculs une teneur en eau dite « en base sèche », qui est le rapport de la masse d'eau sur la seule masse sèche du produit. La conversion entre ces deux teneurs, en base humide et en base sèche, est rapide:
et
avec:
- m: teneur en eau en base humide (la plus courante, utilisée ici);
-X: teneur en eau en base sèche.
5. Quelle doit-être la durée du séchage?
Elle dépend de plusieurs facteurs:
- le premier facteur, et sans doute le plus déterminant, est le rythme de la production de matière sèche, déterminé au point 2. Le rythme de la production s'exprime comme la quantité de produit frais à traiter à chaque cycle de séchage divisée par la durée de ce cycle. Il doit correspondre à la capacité de production envisagée, à un éventuel loger surdimensionnement près. Pour chaque grand type de séchoir, la quantité de produit frais traitée par cycle s'inscrit dans une gamme précise (par exemple, la charge d'une claie, la charge d'un chariot ou de deux chariots selon le type de séchoir). Il devient dès lors facile d'estimer la durée de séchage qui correspond aux objectifs de production;- le deuxième facteur est la contrainte d'une durée suffisamment faible pour éviter les risques de dégradation du produit, avant qu'il n'atteigne un degré suffisant de séchage pour le préserver du développement microbien (durée maximale abordée au point 3.) ci-dessus;
- le troisième facteur est une contrainte opposée sur la vitesse d'enlèvement de l'eau, qui ne doit pas être trop rapide si on veut éviter les problèmes de croûtage, phénomène qui intervient lorsque l'eau quitte trop rapidement l'intérieur du produit. Cette contrainte n'est néanmoins pas vraiment déterminante pour la durée du séchage: pour une même vitesse d'enlèvement d'eau, le risque de croûtage sera bien moindre si le séchage se produit avec un air plus humide mais à débit plus élevé, plutôt qu'avec un air très sec et à débit faible. La mangue est un fruit qui présente des risques élevés de croûtage au séchage. La durée minimale de séchage sans risque de croûtage obtenue sur séchoir à gaz type tunnel pour ce produit est de l'ordre d'une quinzaine d'heures.
Pour les deux derniers points, la recherche expérimentale permet d'établir des allures de séchage pour atteindre en un temps minimum un produit séché aux qualités prédéfinies (humidité finale, qualités de goût et d'apparence, caractéristiques microbiologiques).
Dans la pratique, on retiendra plutôt les éléments suivants:
- la durée doit être, pour chaque type de séchoir envisageable dans l'étude de dimensionnement, déterminée en fonction du rythme de production envisagé et de la capacité de chargement de ce type de séchoir en produits frais;- si cette durée est trop élevée, par rapport à la durée maximale admissible d'attente d'un séchage suffisant, il faudra prévoir soit un séchoir de moindre capacité dans la gamme envisagée, mais dimensionné pour sécher plus rapidement (si une telle modulation est possible), soit un prétraitement de conservation plus sévère, soit une modification des objectifs de production, soit un abandon de ce type de séchoir pour la suite de l'étude technique;
- le risque de croûtage peut être éliminé par d'autres moyens (débit d'air plus élevé avec un air plus humide, obtenu soit en humidifiant la chambre de séchage dans des proportions raisonnables, soit par un recyclage de l'air de sortie, plus humide mais non totalement saturé d'eau).
6. Quelle est la vitesse d'enlèvement de l'eau du produit?
On peut, sur la base des données des points 4. et 5., faire une estimation de la vitesse d'enlèvement de l'eau du produit:
en kg d'eau enlevée par heure,
avec:
- V em: vitesse d'enlèvement de l'eau (en kg/h);- M e: masse d'eau à extraire (en kg);
- T s: durée idéale du séchage pour le produit considéré (en heures).
Remarque: La vitesse d'enlèvement V em est indicée « m », car il s'agit d'une vitesse moyenne sur la totalité du séchage. On a vu au chapitre précédent que le séchage s'effectue en plusieurs phases distinctes. En particulier, l'enlèvement de l'eau est beaucoup plus difficile en phase finale du séchage (phase III), car l'eau restante dans le produit en est plus solidaire, et donc la vitesse d'enlèvement de l'eau plus faible. Une lecture plus détaillée des courbes d'allure de séchage doit permettre de mieux préciser les teneurs en eau à chaque début et fin d'une phase de séchage, ainsi que leurs durées respectives. On peut alors calculer sur cette base des vitesses moyennes d'enlèvement de l'eau pour chacune des phases, et affiner ainsi les calculs.
7. Quelle doit être la température de l'air à son arrivée sur le produit?
À titre de rappel d'éléments du chapitre précédent: le passage de l'air sur le produit provoque d'autant plus d'évaporation que l'air a été au préalable réchauffé. La température de l'air à l'arrivée sur le produit à sécher doit être:
- la plus élevée possible, pour garantir un séchage rapide en phases I et II, où le produit est encore « fragile », et pour le rendre efficace en phase III, où l'autre facteur d'enlèvement d'eau, le débit d'air, est peu influent;- telle que la température du produit ne dépasse pas sa température maximale admissible, fournie sur les « fiches produit ».
La température du produit est peu éloignée de la température de l'air à l'arrivée sur le produit en phase III du séchage, car alors il y a peu d'évaporation pour contribuer à son refroidissement. En phases I et II par contre, elle sera moins élevée pour la raison inverse, sauf éventuellement dans le cas où le produit est exposé directement aux rayons du soleil (cas du séchage solaire direct) et où le débit d'air est faible, car alors le produit s'échauffe aussi du fait de cette source de chaleur.
De façon générale, et à défaut de disposer des courbes d'allure de séchage du produit considéré, on recommandera de retenir une température de l'air à l'arrivée sur le produit de 10°C au dessus de la température maximale admissible par le produit lors des phases I et II, et légèrement inférieure à cette température maximale pour la phase III.
8. Quel est le pouvoir évaporatoire de l'air ?
À titre de rappel d'éléments du chapitre précédent: le pouvoir évaporatoire de l'air, qui mesure la quantité maximale d'eau que peut emporter un mètre cube d'air lors de son contact avec un produit humide, dépend:
- de la densité de vapeur d'eau déjà contenue dans l'air ambiant, avant son entrée dans le séchoir;- des conditions de pression (ici: pression atmosphérique, dont les fluctuations sont d'effet totalement négligeable);
- de la température à laquelle est porté l'air.
Sa valeur, pour un taux d'humidité relative donné et une température donnée de l'air, peut être fournie en première approximation par le tableau 3 ci-contre. Pour les températures et degrés d'humidité intermédiaires, il faudra soit procéder à des interpolations des données de ce tableau, soit adopter l'approche plus complexe d'une lecture du diagramme enthalpique de l'air humide, présentée en troisième partie, chapitre IX.
Rappel: Lorsqu'on porte l'air d'une température donnée à une autre plus élevée par apport de chaleur, comme c'est le cas pour le séchage, l'humidité absolue de l'air ne change pas (l'air contient toujours la même quantité de vapeur d'eau). En revanche, son humidité relative n'est pas la même; elle est plus faible. L'humidité relative de l'air qui arrive sur le produit après avoir été réchauffé n'est donc pas l'humidité relative de: l'air extérieur.
Tableau 1: Teneur en eau de l'air (ou humidité absolue), en fonction de sa température et de son humidité relative (en grammes d'eau par kg d'air sec)
Humidité |
Température de l'air en °C | |||||||
relative en % |
20 |
30 |
40 |
50 |
60 |
70 |
80 |
90 |
10 |
1,0 |
2,5 |
4,5 |
8,0 |
12,5 |
20,0 |
32,0 |
48,0 |
20 |
2,5 |
4,5 |
8,5 |
15,5 |
27,0 |
42,5 |
63,5 |
100,0 |
40 |
5,5 |
9,5 |
18,0 |
31,5 |
53,0 |
88,5 | | |
60 |
8,5 |
16,5 |
30,0 |
50,5 |
83,0 | | |
|
80 |
12,0 |
22,5 |
40,0 |
68,5 |
118,0 | |
| |
Tableau 2: Teneur en eau maximale (d saturation) d'un air, en fonction de sa température initiale et de son humidité relative initiale, lorsqu'il se charge d'eau sans apport ni perte d'énergie extérieure (en grammes d'eau par kg d'air sec)
Humidité |
Température de l'air en °C | |||||||
relative en % |
20 |
30 |
40 |
50 |
60 |
70 |
80 |
90 |
10 |
5,5 |
9,5 |
13,5 |
18,5 |
25,0 |
34,5 |
48,0 |
67,0 |
20 |
6,5 |
11,0 |
16,5 |
24,5 |
37,5 |
54,0 |
75,0 |
116,0 |
40 |
9,0 |
15,0 |
23,0 |
37,0 |
61,0 |
97,0 | | |
60 |
11,0 |
19,5 |
33,0 |
54,0 |
88,0 | | |
|
80 |
13,0 |
23,0 |
42,0 |
71,0 |
120,0 | |
| |
Tableau 3: Pouvoir évaporatoire de l'air, en fonction de sa température et de son humidité relative (en grammes d'eau par kg d'air sec): différence « Tableau 2 - Tableau 1 »
Humidité |
Température de l'air en °C | |||||||
relative en % |
20 |
30 |
40 |
50 |
60 |
70 |
80 |
90 |
|
4,5 |
7,0 |
9,0 |
10,5 |
12,5 |
14,5 |
16,0 |
19,0 |
20 |
4,0 |
5,5 |
8,0 |
9,0 |
10,5 |
11,5 |
12,0 |
16,0 |
40 |
3,5 |
4,5 |
5,0 |
5,5 |
8,0 |
8,5 | | |
60 |
2,5 |
3,0 |
3,0 |
3,5 |
5,0 | | |
|
80 |
1,0 |
1,5 |
2,0 |
2,0 |
2,5 | | |
|
9. Quelle quantité d'eau du produit peut-on retirer avec un mètre cube d'air?
Le cas simple
À titre de rappel, si l'échange de vapeur d'eau entre le produit et l'air était parfait et concernait la totalité de l'air circulant dans le séchoir, l'air pourrait se charger d'autant d'eau qu'il peut en contenir tant que subsiste de l'eau libre dans le produit, c'est-à-dire lors des phases I et II.
La quantité d'eau du produit que peut retirer un mètre cube d'air serait, dans un cas parfait, relativement facile à calculer. Elle correspondrait exactement au pouvoir évaporatoire d'un mètre cube d'air, dont les données sont fournies au point 8. (au coefficient de masse volumique près pour la conversion kg/m³).
Les problèmes
Le calcul de la quantité d'eau que l'on peut extraire du produit par mètre cube d'air utilisé lors du séchage est en fait plus complexe pour trois raisons.
a) Il existe en fait un continuum entre l'eau libre et l'eau fortement lice dans le produit. L'eau du produit en phase II est partiellement liée au produit, ne serait-ce que par les tensions de capillarité, et ne se comporte donc pas comme une eau totalement libre (et de moins en moins à mesure que le séchage progresse). Même si l'échange d'eau entre l'air et le produit était parfait, l'air ne peut pas se charger d'autant d'eau qu'il le pourrait en passant au-dessus d'un récipient rempli d'eau (totalement libre donc), et l'humidité relative de l'air en sortie de séchoir ne peut donc jamais atteindre 100 %.b) À mesure que l'on entre dans la phase III du séchage, l'eau restante dans le produit lui en est de plus en plus solidaire. L'activité de l'eau décroît peu à peu. Or, l'activité de l'eau dans le produit détermine les règles de l'équilibre de l'eau entre le produit et l'air: plus l'activité de l'eau est faible, plus le produit offre une résistance à ce que l'air s'« empare » de cette eau, et moins l'air peut en emporter. De ce fait, plus le séchage progresse, moins l'air sort du séchoir chargé d'eau. À l'extrême, si on poussait le séchage au point qu'il n'existe quasiment plus d'eau dans le produit, l'air ne sortirait pas du séchoir avec plus d'eau au mètre cube qu'en y entrant.
c) Par ailleurs, les échanges d'eau entre le produit et l'air présentés aux points a) et b) sont des principes de base qu'il faut moduler au regard de plusieurs considérations:
- l'isolation thermique n'est jamais parfaite entre le séchoir et l'extérieur, de ce fait l'air se refroidit avant d'arriver sur le produit (donc dispose d'un moindre pouvoir évaporatoire);- il y a des pertes d'énergie du fait des frottements de l'air dans le séchoir, d'autant plus élevées que la vitesse d'écoulement de l'air est grande (on verra plus loin que les « pertes de charge » sont proportionnelles au carré de cette vitesse);
- l'équilibre de la vapeur d'eau entre le produit et l'air n'a pas le temps de se réaliser totalement. Plus la vitesse de circulation de l'air est importante, moins c'est le cas puisque cela limite le temps de contact de l'air avec le produit. Il faudrait en effet d'une part laisser à l'eau du produit du temps pour migrer correctement de l'intérieur vers l'extérieur du produit. Il faudrait d'autre part laisser à l'air le temps de récolter l'eau arrivée en surface du produit. Il faudrait enfin laisser à l'air qui ne passe pas à proximité immédiate du produit le temps de se charger de l'eau dont l'air plus proche s'est chargé, permettant à ce dernier de se recharger de nouveau, etc.
Pour résoudre le problème, on adopte une approximation pour traiter les points a) et b), et une approche plus empirique pour traiter le point c).
Premier niveau d'approximation
De façon à traiter le problème de la diminution de l'activité de l'eau dans le produit à mesure que le séchage progresse, qui influe sur l'humidité relative de l'air en sortie de séchoir, on procédera en première approximation comme suit:
- l'air sort à un niveau proche de la saturation en début de séchage;- l'air sort en phase finale du séchage avec une humidité relative qui est celle qui correspond à l'équilibre air/produit lorsque l'eau de ce dernier a atteint un niveau d'activité qui le rend propre à la conservation. Cette humidité relative se lit sur le diagramme de sorption-désorption du produit, qui sera présenté dans la troisième partie, chapitre IX;
- on considère à titre d'approximation que l'humidité relative de l'air de sortie du séchoir est, en moyenne sur la durée du séchage, la moyenne de ces deux humidités relatives extrêmes, soit:
avec:
- H rm: humidité relative de l'air à la sortie du séchoir, en moyenne sur la durée totale du séchage (en %);- H rs humidité relative de l'air à la sortie du séchoir, à la fin du séchage (paramètre fourni sur les courbes de sorption-désorption);
- 100: humidité relative de l'air à la sortie du séchoir, en début de séchage (saturation d'eau: 100 % d'humidité relative).
On peut, connaissant ainsi la valeur de l'humidité relative en sortie de séchoir, en moyenne pendant le séchage (H rm), déterminer l'humidité absolue x m (ou teneur en eau moyenne) à laquelle elle correspond, compte tenu de la température moyenne de l'air en sortie de séchoir, à partir du tableau 1 de la page 121. Si l'échange d'eau entre l'air et le produit était parfait lors du séchage, la quantité d'eau enlevée en moyenne pendant le séchage par un mètre cube d'air pourrait s'écrire:
rair · (x m - x a), exprimée en grammes d'eau par mètre cube d'air ayant circulé dans le séchoir, avec:
-rair masse volumique de l'air sec: 1,2 kg/m 3;- x m: teneur en eau de l'air en sortie de séchoir, en moyenne sur la durée du séchage, en gramme par kilogramme d'air sec;
- x a: teneur en eau de l'air, à l'entrée du séchoir, en grammes par kilogramme d'air sec.
Second niveau d'approximation
Si on ne dispose pas de la courbe de sorption-désorption du produit pour déterminer le niveau de l'humidité relative de l'air en sortie de séchoir en fin de séchage (H rs), on pourra dans la majorité des cas faire l'approximation suivante.
En fin de séchage, l'eau résiduelle dans le produit est une eau très fortement liée au produit, et un mètre cube d'air circulant dans le séchoir ne peut emporter que très peu d'air. Donc, si on fait l'approximation qu'un mètre cube d'air peut emporter l'équivalent du pouvoir évaporatoire de l'air, rapportée au mètre cube d'air, en début de séchage, et quasiment 0 en fin de séchage, on peut exprimer en approximation plus sommaire encore que la première, que si les échanges d'eau entre l'air et le produit étaient parfaits, un mètre cube d'air emporterait en moyenne: 1/2 x r air x e air avec:
- r air: masse volumique de l'air sec (1,2 kg/m 3 en première approximation aux températures usuelles de séchage);- e air: pouvoir évaporatoire de l'air de séchage (en gramme par kg d'air sec), obtenu par interpolation des données du tableau 3 de la page 121.
Cette approximation n'est valable que pour les produits très secs en fin de séchage.
L'approche empirique
Les échanges d'eau entre l'air et le produit dans le séchoir n'étant pas parfaits, on introduit un coefficient correcteur appelé rendement de séchage.
Ce rendement noté s dépend de nombreux facteurs évoqués ci-dessus (point c). Il dépend donc de ces faits:
- de la nature du produit;- de son humidité relative (et donc du degré de séchage atteint);
- du séchoir envisagé lui-même.
À titre indicatif, les « fiches séchoirs » présentées dans le chapitre VI exposent l'ordre de grandeur du rendement de séchage de chaque grand type de séchoir, pour un cycle complet de séchage dans ses conditions usuelles d'utilisation.
La formulation
En s'en tenant à la première approximation, la quantité d'eau que peut extraire un mètre cube d'air, en moyenne sur la durée du séchage, s'écrira:
avec:
- q se: quantité d'eau extraite en moyenne par un mètre cube d'air (g/m 3);- r air: masse volumique de l'air sec: 1,2 kg/m 3;
- x m: teneur en eau de l'air en sortie de séchoir, en moyenne sur la durée du séchage, en gramme par kilogramme d'air sec (déterminée ci-dessus);
- x a: teneur en eau de l'air, à l'entrée du séchoir, en grammes par kilogramme d'air sec;
- h s: rendement de séchage.
Le calcul détaillé par phases
Le rendement dépend de l'activité de l'eau dans le produit, différente à chaque étape du séchage, et dont dépend aussi le degré d'humidité relative de l'air en sortie de séchoir.
La connaissance précise de l'allure de séchage conseillée pour le type de produit à sécher permettrait de déterminer la proportion d'eau à extraire pour chaque phase, donc de connaître de manière plus précise le fonctionnement du séchoir. Cependant, les allures de séchage sont encore mal connues pour la plupart des produits tropicaux.
10. Quel débit d'air doit-on avoir dans le séchoir?
Le débit d'air moyen dans le séchoir doit être tel qu'il permet l'évacuation de l'eau du produit à la vitesse moyenne V em évaluée au point 6.
Cette vitesse d'évacuation est d'autre part déterminée par le produit « débit d'air x eau enlevée en moyenne par mètre cube d'air ». En reprenant la formulation du point 9., on a:
d'où:
avec:
- D s: débit d'air recherché (en m 3/h);- V em: vitesse d'enlèvement de l'eau (en kg/h);
- M e: masse d'eau à extraire (en kg);
- T s: durée idéale du séchage pour le produit considéré (en heures);
- r air: masse volumique de l'air sec: 1,2 kg/m 3;
- x m: teneur en eau de l'air en sortie de séchoir, en moyenne sur la durée du séchage, en gramme par kilogramme d'air sec;
- x a: teneur en eau de l'air, à l'entrée du séchoir, en grammes par kilogramme d'air sec;
- h s: rendement de séchage.
11. Ce débit peut-il être fourni sans équipement annexe (cheminée solaire, ventilateur)?
On considère que, de façon générale, si le débit d'air nécessaire est inférieur à 20 m 3/h, le séchage pourra être assuré de façon naturelle, par les mouvements de convention de l'air chaud. Les mouvements de convention sont cependant alors très complexes et dépendent de nombreux paramètres. Il n'est de ce fait souvent pas possible de savoir exactement quel sera le débit de l'air dans le séchoir sans une expérimentation.
On peut seulement dire que le débit sera d'autant plus grand:
- qu'est grande la hauteur qui sépare l'entrée d'air de la sortie d'air;- qu'est importante la différence de température entre l'air qui entre et l'air qui sort;
- qu'est faible la vitesse de l'air au niveau des entrées et sorties et du produit. En effet, plus cette vitesse est faible, moins les frottements sont importants: on peut diminuer la vitesse, et donc les frottements, sans diminution du débit, en dimensionnant largement les entrées et sorties (système de « venturi »). On ne surdimensionnera pas cependant la chambre de séchage elle-même, sinon une partie importante de l'air passera trop loin de la zone d'échange d'eau avec le produit pour s'en charger efficacement.
Compte tenu des incertitudes, il se peut que la durée de séchage devienne trop importante. Il peut alors être souhaitable de mieux garantir une circulation de l'air adéquate en l'assistant.
On peut l'aider soit en accentuant les causes de la convention naturelle (une différence de température de l'air entre deux points), soit en « forçant » la circulation de l'air par un moyen mécanique. On parle ainsi de convention naturelle pour des systèmes tels que le système « sans rien » (ci-dessus) ou la cheminée solaire, et de convention forcée dans les autres cas (ventilateurs). Le choix dépend du compromis élaboré entre le coût de ces équipements et un rythme de séchage plus élevé.
Au-delà du seuil critique de débit d'air de 20 m 3/h, potentiellement accessible en convention naturelle, il faudra de toutes façons envisager d'aider l'air à circuler dans le séchoir par de tels équipements périphériques.
12. Une cheminée solaire est-elle appropriée?
Pour un débit d'air nécessaire situé entre 20 et 60 m 3/h, une cheminée solaire peut fournir l'aide nécessaire pour la circulation de l'air. Le mode de dimensionnement d'une cheminée solaire requiert des calculs complexes qui ne seront précisés qu'en troisième partie.
Le principe d'une cheminée solaire est relativement simple. Elle est comme une cheminée ordinaire, mais constituée d'un matériau qui capte la chaleur fournie directement par le soleil et en transmet une partie à l'air. L'air qui est en haut de la cheminée, et qui a reçu de la chaleur supplémentaire, est donc plus chaud que l'air situé à l'entrée de cette cheminée. Selon les principes de base de la thermodynamique et le principe d'Archiméde, l'air situé en haut est moins dense que l'air situé en bas, et l'air subi dans la cheminée une poussée vers le haut, du fait d'une pression différentielle sur l'air (« terme moteur »).
Cette pression (ou « terme moteur ») est donnée par:
(en Pascal (Pa))
avec:
- Dmc: différentiel de pression entre le bas et le haut de la cheminée en Pa;- r 1 est la masse volumique de l'air en bas de la cheminée (kg/m 3);
- r 2 est la masse volumique de l'air en haut de la cheminée (kg/m 3);
- H est la hauteur de la cheminée (m);
- g est l'accélération de la pesanteur (» 10 m/s 2).
En première approximation, le rapport p1/p2 des masses volumiques de l'air est donné par le rapport « température de sortie/température d'entrée », si les températures sont exprimées en degrés Kelvin (t degrés Celcius = 273 + t degrés Kelvin).
Précisons que, contrairement aux cheminées ordinaires qui sont droites, une cheminée solaire fonctionne mieux si elle est penchée, de façon à présenter le maximum de surface d'exposition aux rayons du soleil. Le calcul de l'angle d'inclinaison optimal de la cheminée sera précisé dans la troisième partie XXX.
Malgré les multiples efforts de recherche, les cheminées solaires se sont révélées peu adaptées à l'extraction de l'air de séchage. Elles nécessitent des dimensions conséquentes pour être efficientes. L'efficacité des systèmes de convection naturelle est en effet limitée par la limite de vitesse imposée par les résistances à l'écoulement de l'air, appelées pertes de charges, dans les différents éléments du séchoir. Ces pertes de charge sont présentées par la suite.
13. À partir de quand doit-on envisager d'installer un ventilateur?
Au delà d'un débit d'air de 60 m3/h, un ventilateur s'impose. En deçà de cette valeur, cela dépendra du compromis entre le coût des options (convention naturelle, cheminée solaire ou ventilateur), le rythme de production recherché et sa régularité (le ventilateur étant la seule option qui garantisse un débit d'air donné quelles que soient les circonstances).
14. Quelle sont les composantes du dimensionnement du ventilateur à installer?
Les deux composantes essentielles du dimensionnement d'un ventilateur sont:
- le débit d'air recherché;- les frottements divers de l'air, qui freinent le mouvement, appelés « pertes de charge ».
Dans le cas purement imaginaire où les molécules d'air ne subiraient aucun frottement, ni à l'amont ni à l'aval du ventilateur, la puissance de celui-ci pourrait n'être que celle nécessaire pour fournir à chaque molécule son énergie cinétique (1/2 mV 2).
L'énergie cinétique de l'air ne représente en fait qu'une très faible partie de l'énergie qu'il faut fournir. L'essentiel est constitué de l'énergie perdue dans les frottements:
- le frottement des particules d'air contre les autres particules d'air, d'autant plus important que l'écoulement de l'air est « turbulent », c'est-à-dire que les différentes molécules n'ont pas des trajets parallèles les uns aux autres (et donc risquent plus de se « choquer »);- le frottement des particules d'air sur la surface du produit à sécher;
- le frottement des particules d'air le long des parois du séchoir.
C'est de loin le premier type de frottement qui est le plus important. Mais il est pour beaucoup occasionné par les déformations des trajets de l'air lorsque celui-ci contourne un objet (le produit, les parois du séchoir et des claies, la grille du ventilateur...), qui provoquent les « turbulences » dans l'écoulement de l'air. Ces pertes de charge sont d'autant plus fortes que la vitesse d'écoulement de l'air est importante. Elles sont, en première approximation, proportionnelles au carré de cette vitesse.
15. Comment calculer les pertes de charge?
Le cas du séchage en couche mince
Les pertes de charge sont malheureusement très difficiles à calculer dans ce cas. Elles sont certes proportionnelles au carré de la vitesse de l'air, mais dans quelles proportions?
Dans le cas du séchage en couche mince (produit étalé sur une claie), le produit ne crée qu'une partie des pertes de charge, et c'est l'ensemble produit-claies-séchoir et ses interférences avec les flux d'air qu'il faut analyser. Pour les séchoirs de type artisanal ou semi-industriel, on ne pourra pas pousser l'étude au point de sophistication requis (calculs de l'écoulement par éléments finis...). On devra le plus souvent se contenter des indications des constructeurs pour les grands types de séchoirs existants.
Le cas du séchage en couche épaisse
Paradoxalement, c'est dans le cas du séchage en couche épaisse (produit en vrac), comme pour les céréales, fèves, etc., que le calcul est le plus simple. Les pertes de charge lors du passage de l'air dans le produit représentent en effet alors l'essentiel des frottements de l'air.
Elles peuvent être dès lors estimées lorsque l'on connaît la résistance qu'oppose un mètre d'épaisseur du produit au passage de l'air pour une vitesse d'écoulement donnée.
La perte de charge dans le produit s'écrit dans ce cas:
en Pa
avec:
- r a masse volumique de l'air (Pa = 1,2 kg/m 3);- w: résistance à l'air du produit (en m);
- d: épaisseur de la couche (en m);
- V p: vitesse de l'air à travers le produit (en m/s).
La résistance à l'air du produit est un paramètre propre au produit, donnée ci-dessous pour les principaux produits séchés couramment en couche épaisse. Elle dépend essentiellement de quatre facteurs:
- la forme du produit;- ses caractéristiques de surface (rugueux, lisse...);
- le volume de vides dans un mètre cube de produit en vrac;
- le volume moyen de ces vides.
Résistance (w) par un produit en vrac au passage de l'air (en m-1)
Riz paddy |
60 000 |
Maïs en grain |
33 000 |
Fèves de cacao humide |
60 000 |
Fèves de cacao sèche |
27 000 |
Arachides |
10 000 |
Arachides en coques |
2 500 |
Épis de mais |
1 500 |
Dans la pratique du séchage en couche épaisse, il faut une vitesse de l'air de l'ordre de 0,1 m/s pour que l'échange air/produit soit correct. Pour obtenir cette vitesse, la surface de l'entrée d'air du bac de séchage (S bc) et l'épaisseur de la couche (d) doivent être:
,
(d en m)
où:
- m i est la masse de produit à sécher (en kg);- r p est la densité du produit à sécher (en kg/m 3);
- V p est la vitesse de l'air à travers le produit (fixée à 0,1 m/s
- D s est le débit souhaité (en m 3/h) déjà calculé;
- 3600: conversion heures/secondes.
16. Quelle doit-être la puissance du ventilateur?
La puissance fournie par le ventilateur doit être le produit du débit de l'air par les pertes de charge. La puissance électrique du ventilateur nécessaire est cette puissance, à un coefficient de rendement du ventilateur près:
, en W
avec:
- D s débit recherché en m 3/h;
- DP t: pertes de charge totale en Pascals;
- h vent: rendement du ventilateur (d'après indications du fournisseur);
- 3600: conversion heures/secondes.
Sachant que les pertes de charge (DP t) sont, pour un séchoir donné, fonctions du carré de la vitesse de l'air, donc du débit, la puissance électrique est proportionnelle au débit à la puissance trois. Ainsi, chaque fois que le débit double, la consommation électrique est multipliée par huit!
17. Quelle doit-être la vitesse de rotation du ventilateur?
On peut tracer la courbe des pertes de charges du séchoir en fonction du débit (courbe en gras sur le tableau). Les constructeurs de ventilateurs fournissent parfois les courbes de fonctionnement de leurs ventilateurs pour différentes vitesses de rotation. Chacune de ces courbes donne, pour chaque débit, la valeur des pertes de charges auxquelles peut s'opposer le ventilateur.
Dans l'exemple fourni sur le graphique ci-dessus, on veut assurer un débit D s en s'opposant à des pertes de charges DP t, on voit que le ventilateur dispose d'une puissance suffisante et que sa vitesse nominale sera de 1000 t/mn.
18. Comment limiter les pertes de charge?
Il faut veiller à limiter le plus possible les pertes de charge (les frottements de l'air) dans le séchoir:
- en convention naturelle, pour rendre cette convention la plus facile possible;- en convention forcée, pour limiter le coût de l'investissement dans un ventilateur puissant et les coûts de l'électricité.
Les actions envisageables pour limiter les pertes de charge ont cependant toutes un coût, et c'est en définitive lors de l'évaluation économique des intérêts respectifs des différentes options que l'on pourra déterminer s'il vaut mieux investir dans des mesures de réduction de pertes de charge, dans une cheminée solaire plus importante, un ventilateur plus puissant, etc.
Hormis la vitesse de l'écoulement de l'air (qui est en partie imposée par les choix de production), les pertes de charge dépendent du choix du type de ventilateur, de l'installation d'éléments tels qu'un diffuseur, de l'architecture du séchoir et de la nature de l'absorbeur de chaleur.
Critères de choix d'un ventilateur
Cf. schéma page suivante.
Remarque: Au-dessus de 3 kW de puissance, l'alimentation électrique doit être triphasée.
Le lignes de flux sont rejetées sur les parois du conduit. Il y a beaucoup de turbulences.
Les lignes de flux redeviennent rapidement parallèles à la conduite.
Ventilateur axial |
Ventilateur centrifuge |
Avantages | |
- coût moins élevé |
- moins de bruit |
Caractéristiques | |
- alimenté uniquement en courant alternatif |
- débits de 500 à 50 000 m 3/h |
Dans les deux cas, il est conseillé de séparer le moteur du flux d'air (transmission par courroie).
Un diffuseur en aval du ventilateur permet parfois d'utiliser un ventilateur plus petit
L'air qui traverse le ventilateur a une vitesse élevée à sa sortie. En revanche, l'air qui se situe juste à l'arrière du ventilateur, mais au dessus, en dessous ou sur le côté, ne l'a pas traversé et circule à vitesse réduite. Il se crée de nombreux frottements entre ces deux airs de vitesses distinctes, ainsi que des turbulences, qui peuvent entraîner des pertes de charge élevées. Un diffuseur (ou divergent) tel celui représenté ci-dessous et placé à l'aval du ventilateur permet d'éviter les frictions entre l'air de sortie du ventilateur et l'air avoisinant en créant une séparation physique entre eux.
Le diamètre du ventilateur étant D, la longueur L du divergent doit être au moins égale à 1,5. D et l'angle de paroi du divergent doit être compris entre 7 et 15°.
Le divergent permet de plus une meilleure homogénéisation du flux d'air qui est turbulent en sortie de ventilateur.
L'architecture du séchoir
De nombreuses pertes de charge ne peuvent être évitées, en particulier celles qui sont induites par la présence du produit sur le chemin de l'air (ou alors on remet en cause l'intérêt du séchage). En revanche, la forme du séchoir peut être étudiée de façon à présenter des profils aérodynamiques dans le sens de l'écoulement de l'air.
Pour les gammes de séchage envisagées, il faut cependant réaliser que la construction d'un séchoir disposant de formes complexes pour bien épouser le mouvement de l'air peut revenir cher. Le choix ne pourra donc être fait qu'au terme d'une évaluation économique de l'intérêt de cet effort, et d'une analyse des capacités locales de construction et/ou réparation d'un tel séchoir. Dans la pratique, on se contentera surtout d'éviter les cheminements de l'air trop tortueux, sauf s'ils sont prévus pour améliorer l'efficacité du séchage: par exemple, un système de chicanes pour focaliser l'arrivée d'air sur le produit provoque des pertes de charge supplémentaires, mais permet d'améliorer la qualité de l'échange d'eau entre le produit et l'air (donc le rendement du système).
Parmi les pertes de charge importantes à contrôler, se trouvent celles occasionnées par le grillage de protection sur la prise d'air extérieure à l'amont du ventilateur. Ce grillage est impératif pour éviter l'introduction de corps étrangers dans le séchoir (insectes, feuilles, brindilles...), mais ne devra pas être d'un maillage trop fin. Les trous de ce maillage devront avoir une superficie d'au moins 5 mm 2 à 1 cm 2, selon l'importance du débit d'air.
La nature de l'absorbeur de chaleur
L'absorbeur de chaleur sera abordé plus loin. C'est un matériau inclus dans le capteur solaire, dont la fonction est d'absorber la chaleur émise par le soleil, afin de la restituer à l'air et ainsi de le réchauffer.
Il existe plusieurs sortes de capteurs. Le graphique en page ci-contre présente les pertes de charge en fonction du débit d'air pour deux capteurs: un capteur à absorbeur poreux (l'air passe à travers un matériau poreux chauffé par le soleil au sein du capteur) et un capteur à absorbeur lisse (l'air circule au-dessus du matériau absorbeur).
La conclusion à tirer de ce graphe quant à l'emploi d'un absorbeur poreux ou d'un absorbeur lisse n'est cependant pas immédiate. Parce que l'air passe dans de multiples pores du premier, l'échange de chaleur entre l'absorbeur et l'air est plus efficace que dans l'autre cas (pour un même débit d'air): l'absorbeur est mieux refroidi par l'air à qui il transmet sa chaleur, et les fuites thermiques sont donc moindres, d'où un meilleur rendement du séchage. Le choix final passe donc par un compromis qui dépend pour une grande part du débit envisagé.
19. Quelle est l'énergie requise par la seule évaporation de l'eau?
Avant d'atteindre la chambre de séchage, l'air doit être élevé à la température maximale admissible par le produit. L'énergie nécessaire à l'élévation de température d'un kilogramme de l'air utilisé est déterminée par la différence d'énergie contenue dans un kilogramme d'air entre l'état final et l'état initial. Les énergies contenues dans l'air à ces deux étapes sont appelées enthalpies de l'air. En fonction du débit, on peut alors déterminer la puissance nécessaire pour atteindre ce niveau de température.
avec:
- D s: débit d'air (en m 3/heure);- h s et h a: énergie contenue dans l'air à l'entrée et en sortie du séchoir (en kJ/kg d'air sec);
- P n: puissance nécessaire pour le séchage (en kW);
- r air = 1,2 kg/m 3: masse volumique de l'air;
- 3600: conversion heures/secondes.
Approximation
La détermination des enthalpies de l'air, en entrée et en sortie du séchoir, s'effectue par la lecture du diagramme humide de l'air, qui est exposé dans la troisième partie. Elle fait appel à des notions et définitions trop complexes pour apparaître ici.
On peut cependant proposer une première approximation de la différence d'énergie de l'air entre l'entrée et la sortie, en supposant que les pertes thermiques sont minimes. Cette différence d'énergie correspond alors à l'énergie qu'il a été nécessaire de fournir pour porter l'air d'une température initiale (température extérieure généralement, sauf dans le cas d'un recyclage d'air) à la température de séchage.
On écrira alors la puissance nécessaire de la façon suivante:
avec:
- P n' puissance nécessaire en première approximation;- Cr air: chaleur massique de l'air (en J/kg/°C);
- T 2: température de séchage (à l'arrivée sur le produit) (en °C);
- T 1: température de l'air utilisé pour le séchage, avant son chauffage (en °C);
- D s: débit d'air (en m 3/h).
La chaleur massique de l'air, à pression atmosphérique, évolue peu en fonction de la température (du moins pour les gammes de température envisagées).
On retiendra: Cr air: 1030 J/kg/°C.
On peut affiner cette estimation en évaluant la chaleur nécessaire pour porter l'eau contenue dans l'air de la température de départ à la température de séchage. Mais dans la majorité des cas, elle est négligeable ou faible (sauf cas d'un air recyclé): l'air extérieur a très rarement une teneur en eau supérieure à 40 grammes par kilogramme (valeur obtenue à 100 % d'humidité relative et température de 35°C). À titre indicatif, la chaleur massique de l'eau est approximativement de 4 200 J/kg/°C sur la plage de températures envisagées. Dans le cas extrême d'une teneur en eau de 40 g/kg d'air sec, l'erreur sur la première estimation est donc de 17 %.
On cherchera surtout à améliorer cette approximation de la puissance nécessaire par une évaluation des pertes de chaleur de l'air par les parois du séchoir.
L'énergie nécessaire est pour sa part:
- P n: puissance nécessaire en kW;- t s durée du séchage en heure;
- E n: énergie nécessaire en kWh.
20. Quelle énergie doit-on fournir à l'air?
Mais toute l'énergie fournie à l'air d'entraînement ne sert pas uniquement à sécher le produit. Une partie est dissipée sous forme de pertes thermiques (dans les parois du capteur, de la chambre de combustion, dans l'échangeur thermique s'il existe....). On introduit la notion de rendement thermique ( h therm) qui est lié à la différence de température et au débit souhaités.
en kWh
Seule l'expérimentation peut donner des informations précises sur ce rendement.
PRINCIPE DU CAPTEUR SOLAIRE À AIR
Les séchoirs solaires peuvent avoir des formes très diverses, les éléments de captation du rayonnement solaire aussi.
En séchage solaire, on utilise le plus souvent, pour des raisons de coût et de mise en uvre, des capteurs « à air », ce qui signifie que c'est l'air qui transporte la chaleur du capteur vers le produit à sécher.
Un capteur à a* associe en général un absorbeur et une couverture transparente.
L'absorbeur doit convertir en chaleur la plus grande partie possible du rayonnement solaire, en réfléchir vers l'avant ou en transmettre vers l'arrière le moins possible. En pratique, un corps métallique recouvert de peinture noire convient très bien.
La couverture a pour rôle de canaliser sur l'absorbeur l'air qui entre froid dans le capteur et doit en sortir chaud. Elle doit aussi protéger l'absorbeur et servir d'isolant thermique.
Elle joue enfin un rôle d'effet de serre: l'énergie réémise par l'absorbeur est partiellement conservée dans le capteur du fait de la couverture. Cela tient aux propriétés de certains matériaux utilisés en couverture d'être transparents à la lumière visible mais opaques aux infrarouges. L'énergie qui entre sous forme de lumière visible est donc plus ou moins « piégée » une fois qu'elle a été transformée en chaleur (rayonnement infrarouge). Ci schémas page ci-contre.
LA COUVERTURE PIÈGE LE RAYONNEMENT
Le matériau de couverture idéal doit:
- être transparent au rayonnement;- absorber ou réfléchir les infrarouges;
- isoler l'air chaud du capteur de l'air ambiant;
- être durable;- être solide;
- supporter la chaleur;
- être bon marché.
Aucun produit ne réunit toutes ces qualités. Il faut faire des choix en privilégiant certains critères, en fonction de la situation et des buts de l'opération.
· La transparence:
les verres et matières
plastiques transmettent 80 à 90 % du rayonnement tant que l'angle d'incidence de
celui-ci est inférieur à 45-50°. Au-delà, le taux de transmission décroît
très vite. Certaines matières plastiques jaunissent ou blanchissent à l'usage:
leur transparence diminue.
· L'absorption - réflexion des infrarouges: le verre est le matériau le plus efficace de ce point de vue. Il absorbe 82 % des infrarouges et n'en réfléchit de 18 %, n'en transmettant quasiment aucun. Les plastiques ont des comportements très divers: le polyéthylène de 0,15 mm d'épaisseur laisse passer 73 % des infrarouges, tandis que l'acétate de 0,10 mm n'en laisse passer que 20 %. Les autres films plastiques se situent entre ces deux extrêmes.
· L'isolation: elle a, en ce qui concerne le séchage solaire, peu d'importance. Les mesures susceptibles de l'améliorer ne sont pas justifiées économiquement. Il faut surtout placer le capteur à l'abri du vent.
· La durabilité: le verre est le matériau le moins sensible au vieillissement. Parmi les plastiques, les plus résistants sont les acryliques (Plexiglas).
· La résistance mécanique: le verre, fragile sous sa forme ordinaire, est plus résistant lorsqu'il a été trempé (verre Sécurit). Les films plastiques sont sensibles aux déchirures (le Tevlar et le Mylar moins que les autres). Leur fragilité peut être réduite si on les colle sur un grillage textile ou autre. Le polycarbonate est particulièrement résistant aux chocs. Les stratifiés polyester ont une tenue mécanique excellente. Les matériaux alvéolaires sont très rigides dans le sens des alvéoles.
· La résistance à la chaleur: tous les matériaux se dilatent à la chaleur. Il faut donc prévoir du jeu dans le montage, spécialement pour le verre (sinon il cassera). La plupart des films plastiques s'affaisse rapidement. Le polycarbonate alvéolaire en revanche a une excellente tenue thermique.
· Le prix de revient: il faut l'évaluer par rapport à la durabilité du produit: un film bon marché qu'on doit remplacer chaque saison revient très cher.
La tableau ci-contre présente les principales caractéristiques de quelques matériaux.
Propriétés des différentes couvertures transparentes
Matériau |
Verre ordinaire |
Verre trempé |
Verre armé |
Polyester armé de fibre de verre |
Policarbonate double paroi |
Polypropylène double paroi |
Polymétacrylate double paroi (acrylique) |
Polyéthylène |
Transmission rayonnement solaire sous incidence normale % |
86/91 |
86 (4 mm) |
72 |
83 |
80 |
65 |
83 |
85 (75) |
Transmission rayonnement thermique % |
3 |
3 |
3 |
6 |
6 |
»10 |
6 |
70 (30) |
Transparent (P) Translucide (L) |
P |
P |
P |
L |
L |
L |
L |
L |
Épaisseurs standard disponibles |
3 à 6 mm |
4 à 8 mm |
6 mm |
1 mm |
4 à 16 mm |
4 mm |
8 à 16 mm |
0,1 à 0.3 mm |
Température maximale d'utilisation |
200°C |
200°C |
200°C |
70°C |
100°C+ |
»60°C |
90°C |
60°C |
Résistance au fa |
bonne |
bonne |
bonne |
mauvaise |
moyenne |
mauvaise |
mauvaise |
très mauvaise |
Poids kg/m 2 |
(e = 4 mm) 11 |
(e = 4 mm) 11 |
(e = 6 mm) 6 |
(e = 1 mm) 1,5 |
(e = 6 mm) 1,2 |
(e = 4 mm) 0,7 |
(e = 16 mm) 5 |
(e = 1 mm) 0,17 |
Longévité (durée au-delà ans de laquelle transmission rayonnement
solaire = 90% de la valeur initiale) |
100 ans + |
100 ans + |
7-10 ans |
6 ans |
»2 ans |
15 ans+ |
1 à 3 ans |
|
Règle de pose |
masticage |
masticage |
masticage |
agrafage |
profil spécial ou |
profil spécial ou |
profil spécial ou mastic+baguettes |
agrafe |
Outils |
diamant, martelette, couteau à mastic |
diamant, martelette, couteau à mastic |
diamant, martelette, couteau à mastic |
agrafage clouage |
scie |
scie, mastic + baguettes |
scie, mastic + baguettes |
ciseaux agrafeuse |
Coût(2) |
* |
** |
** |
* |
* |
** |
** |
0 |
(1) Les valeurs entre parenthèses correspondent au polyéthylène traité UV, d'après B. Yanda.
(2) Bon marché: 0; moyennement cher: *; coûteux: **.
L'ABSORBEUR CAPTE LA CHALEUR ET RÉCHAUFFE L'AIR
Son rôle est d'absorber la plus grande partie possible du rayonnement solaire. Un absorbeur est donc d'autant meilleur que son taux d'absorption est élevé. Il devra toujours être peint en noir ou foncé. La peinture (choisie mate de façon à réfléchir le moins possible les rayons du soleil) doit résister à la chaleur pour ne pas contaminer les aliments en se décomposant, ni en altérer le goût. L'absorbeur doit aussi communiquer sa chaleur à l'air qui circule dans le capteur.
En règle générale, l'efficacité du capteur solaire sera d'autant meilleure que:
- la surface de contact entre l'air et l'absorbeur est importante (surface globale, mais aussi état de surface: un corps rugueux offre davantage de surface de contact qu'un corps lisse pour une même taille);- la vitesse de l'air est importante, pour deux raisons: (a) il se crée alors des turbulences dans la zone d'échange de chaleur entre l'absorbeur et l'air, et davantage de molécules d'air peuvent rentrer en contact avec lui et (b) l'absorbeur est davantage refroidi par l'air, ce qui diminue d'autant les pertes thermiques par diffusion de la chaleur de l'absorbeur à travers l'isolant (qui ne l'est jamais totalement) ou le cadre du capteur.
D'un autre côté, ces paramètres tendent à augmenter les pertes de charge dans le système, qui sont d'autant plus élevées que l'écoulement de l'air se fait avec des turbulences (augmentation des frottements air/air) et que la vitesse est rapide (frottements proportionnels au carré de la vitesse).
On a déjà évoqué (section précédente, point 18.) les avantages et inconvénients des absorbeurs poreux par rapport aux absorbeurs lisses. Le choix de l'absorbeur (poreux ou lisse) n'est pas immédiat.
Dans la pratique, et sauf pour des vitesses de l'air particulièrement élevées, l'absorbeur poreux est celui qui permet d'utiliser le ventilateur le moins puissant pour une même performance au séchage: les pertes de charge sont plus élevées, mais le séchage peut se faire à moindre débit d'air, compte tenu d'une meilleure efficacité de l'échange de chaleur entre l'absorbeur et l'air. Cela dit, si l'efficacité des absorbeurs poreux est indéniable quand la circulation de l'air est forcée par un ventilateur, ce n'est pas le cas en circulation naturelle pour deux raisons:
- le débit et la vitesse de l'air sont plus faibles, de sorte que les échanges de chaleur avec un absorbeur lisse sont eux aussi efficaces;- les pertes de charge dans l'absorbeur poreux empêchent les mouvements de convection de l'air de se produire de façon optimale.
L'efficacité d'un capteur dépend beaucoup de son orientation et de son inclinaison. L'idéal serait qu'il soit toujours perpendiculaire aux rayons du soleil, ce qui supposerait un capteur orientable. Les capteurs étant le plus souvent fixes, on cherchera à orienter et incliner le plan du capteur de façon à ce qu'il soit perpendiculaire aux rayons du soleil de midi pour la période de séchage. On trouvera en bibliographie les sources pour une méthode de choix de l'orientation (MM. Vauchon et Puiggali, Université de Bordeaux I).
Mentionnons qu'une autre condition essentielle de l'efficacité des capteurs est l'homogénéité des flux d'air dans l'absorbeur, pour éviter les passages préférentiels d'air. L'intérêt d'un absorbeur poreux est en effet de multiplier les probabilités que chaque molécule d'air rentre en contact avec lui, ce qui ne sera pas le cas si se présente une brèche par laquelle l'air s'engouffre sans avoir le temps de prendre la chaleur de l'absorbeur.
L'ISOLATION LIMITE LES PERTES
L'isolation est destinée à limiter les pertes de chaleur par les côtés et l'arrière de l'absorbeur. Elle n'est pas toujours nécessaire en pays chaud (en zone très chaude, au sol très sec et sableux par exemple). Si elle est nécessaire, on a intérêt à utiliser ce qui est disponible localement: polystyrène de récupération, journaux, cartons, sable, etc.
Mais ces matériaux doivent toujours être secs pour conserver tout leur pouvoir isolant et éviter les dommages à la structure. Ils doivent être soit changés régulièrement, soit pouvoir être nettoyés, pour des raisons sanitaires évidentes. Le polystyrène est à ce titre un matériau avantageux.
Placer une feuille métallique réfléchissante entre absorbeur et isolant diminue les pertes. Il faut enfin éviter tout « pont thermique »: il suffit qu'un matériau de petite taille mais dans lequel la chaleur se diffuse rapidement soit en contact avec l'absorbeur pour que l'isolation soit mauvaise (discontinuités dans l'isolation, par exemple vis métalliques).
L'assemblage des différentes parties du capteur doit se faire en respectant les valeurs de la deuxième figure page suivante. La distance couverture-absorbeur doit être de 3 à 4 cm pour minimiser le transfert de chaleur de l'absorbeur vers la couverture. La valeur de l'intervalle caisson/isolant-absorbeur dépend du type de séchoir. Quand le capteur est séparé de l'enceinte de séchage, il doit être de 5 à 15 cm pour favoriser un bon échange absorbeur-air tout en limitant les pertes de charges. Une vitesse minimale de 3 m/s est alors requise, ce qui suppose l'emploi d'une cheminée solaire ou plutôt d'un ventilateur.
Lorsque le capteur et l'enceinte ne font qu'un, la surface de séchage impose la distance caisson-absorbeur.
Lorsque le capteur est séparé de l'enceinte de séchage, il faut respecter les valeurs ci-dessus.
LA COURBE DE RENDEMENT D'UN CAPTEUR
Pour évaluer l'efficacité d'un capteur à collecter l'énergie solaire, à la transformer en chaleur après absorption et à chauffer l'air le traversant, on définit le rendement thermique d'un capteur selon le même principe que pour le séchoir entier comme suit:
avec G N: éclairement global reçu par mètre carré de capteur (W/m 2).
La puissance thermique utile totale du capteur est celle qui a permis de transmettre à l'air sa chaleur pour passer de la température T 1 à l'entrée du capteur à la température T 2 en sortie de capteur. On retrouve donc une expression similaire à celle déjà utilisée ci-dessus lors de l'approximation de la variation d'enthalpie de l'air dans le séchoir:
avec:
- E u: puissance thermique utile par m 2 de capteur (en W/m 2);- Cr air: chaleur massique de l'air (en J/kg/°C);
- T 2: température de séchage (à l'arrivée sur le produit) (en °C);
- T 1: température de l'air utilisé pour le séchage, avant son chauffage (en °C);
- D s: débit d'air (en m 3/h);
- A: superficie totale de captage des rayons solaires (en m 2).
On rappelle: Cr air = 1030 J/kg/°C, peu dépendant de la température pour la gamme envisagée pour le séchage.
Le rendement du capteur ainsi exprimé est peu différent du rendement thermique du séchoir complet. La seule différence est que le rendement du séchoir doit intégrer les pertes thermiques à l'intérieur de la chambre de séchage, et les pertes dues aux interactions entre le produit à sécher et l'air.
Le rendement d'un capteur dépend de ses caractéristiques intrinsèques, mais aussi du débit de l'air. Une courbe importante est la courbe de rendement du capteur en fonction du débit, rapporté au mètre carré de capteur. Cette courbe est définie pour un capteur donné; le graphe ci-dessous en fournit un exemple.
La lecture de ce type de courbe fournit plusieurs indications.
· Pour un type de capteur donné, et connaissant le débit d'air souhaité pour le séchage, on a tout intérêt à choisir la surface de capteur qui offre un bon rendement, c'est-à-dire de l'ordre ou au-delà de 20 m 3/h/m2 pour le type de capteur considéré ci-dessus. Si on envisage de fournir un débit d'air de 90 m 3/h dans la chambre de séchage, il faudra retenir au maximum une surface de captage des rayons solaires de 6 m 2.· Pour ce type de capteur et pour la gamme des débits d'air rapportés au m 2 de capteur de plus de 20 m 3/h/m2, le rendement thermique du capteur est quasiment constant. De la sorte, débit d'air rapporté au mètre carré de capteur et gain de température de l'air dans le capteur sont alors intimement liés. Dans ce cas, le débit d'air que multiplie le gain de température reste en effet relativement constant, pour une irradiation solaire donnée. Cela s'explique par le fait que le capteur fonctionne alors à son régime nominal, et que l'énergie fournie à l'air est totalement proportionnel a l'irradiation solaire. Soit le système porte moins d'air à une température plus élevée, soit il porte plus d'air à une température moins élevée, par unité de temps. Cette remarque est importante à deux titres.
· Elle permet de simplifier les calculs de dimensionnent en considérant un rendement du capteur constant dans sa plage d'utilisation « efficace » (ici 50%).
· Elle permet de réaliser que la manipulation d'un paramètre du séchage peut entraîner des effets parfois inattendus. Par exemple, il se peut que l'utilisateur d'un séchoir s'aperçoive que le séchage se produit trop rapidement, ou à température trop forte. Si, pour limiter le rythme du séchage, il diminue le débit d'air (« moins j'envoie d'air chaud, moins je provoque d'évaporation »), mais que ce débit reste supérieur à 20 m3/h/m2 pour le séchoir envisagé ici, il risque d'obtenir les résultats inverses de ceux qu'il escomptait. Le rendement thermique du capteur sera en effet le même que précédemment, donc l'apport de chaleur pour le séchage sera le même, et la température aura augmenté, et non diminué. Cette augmentation de la température sera vite préjudiciable au produit, puisque le séchage doit se faire à une température proche de la température maximale admissible. En revanche, si l'utilisateur réduit le débit d'air à des proportions telles que, rapporté au mètre carré de captage, celui-ci ne représente plus que 5 m 3/h/m2, alors il obtiendra l'effet escompté d'une réduction du rythme de séchage, du fait d'une forte baisse dans le rendement du capteur, donc de l'énergie fournie pour le séchage pour un niveau donné de l'ensoleillement.
ÉLÉMENTS DE DIMENSIONNEMENT
Reprenons les questions associées au problème du dimensionnement du séchoir.
21. Le séchage peut-il être réalisé directement par la seule exposition du produit au soleil?
Pour les puissances nécessaires au séchage supérieures à 0,3 ou 0,7 kW par mètre carré de claie (selon la zone considérée, et son ensoleillement en particulier), le séchage direct par les seuls rayons du soleil ne suffira pas. Il faudra alors envisager un système de capteurs solaires à air, voire un système d'échauffement de l'air à l'aide d'un combustible fossile. C'est pour le moment dans le cadre d'un séchoir solaire fonctionnant uniquement avec un capteur solaire que nous nous plaçons.
On supposera, suite aux développements de la partie précédente « La courbe de rendement d'un capteur », que le capteur du séchoir solaire sera dimensionné de telle façon que son rendement soit optimal (surface de captage telle que le débit d'air souhaité rapporté à la surface de captage soit supérieur à 20 m 3/h/m2 pour le type de capteur envisagé dans l'exemple ci-dessus).
22. Quelle est la surface de captation nécessaire?
La surface de captation nécessaire pour obtenir la puissance nécessaire au séchage qui a été exposée au point 19. de la section précédente, est donnée par:
avec:
- A: surface de capteur (en m 2);- P n: puissance nécessaire au séchage (en kW);
- G n: puissance de rayonnement disponible (en kW/m 2);
- h c: rendement du capteur solaire, pouvant varier de 0,4 à 0,6 selon le capteur, si on admet qu'on l'utilise à sa capacité nominale (sinon moins).
23. Quelle élévation de température permet la surface de captation A?
C'est là une question annexe, dans la mesure où, en théorie, les calculs précédents ont conduit à déterminer la surface du capteur précisément pour une température de séchage optimale (de l'ordre de la température maximale admissible, avec une marge de sécurité supplémentaire en phase III du séchage).
On en fournit la réponse pour deux raisons:
- dans les cas simples, la totalité du calcul du dimensionnement ne sera pas effectuée;- l'ensoleillement évolue dans le temps, et le séchoir n'est généralement pas à« géométrie variable »: il ne peut pas s'adapter aux fluctuations climatiques. Connaître les relations entre la température de séchage, la température de l'air ambiant, le débit d'air, la surface de captage et le niveau d'ensoleillement permet ainsi de mieux savoir comment réagir à de telles fluctuations.
Il suffit de reprendre la formule du rendement thermique du capteur indiquée ci-dessus d'une part, et de la puissance utile d'autre part.
On obtient:
avec:
- Cr air: chaleur massique de l'air (en J/kg/°C) = 1030 J/kg/°C;- T 2: température de séchage (à l'arrivée sur le produit) (en °C);
- T 1: température de l'air utilisé pour le séchage, avant son chauffage (en °C);
- D s: débit d'air (en m 3/h);
- A: superficie totale de captage des rayons solaires (en m 2);
- h capt: rendement thermique du capteur;
- G n: irradiation solaire moyenne (en W/m).
Une telle expression peut être utile pour contrôler rapidement si la température de séchage sera bien ou non de l'ordre de la température maximale admissible. On pourra, selon les cas, augmenter le débit d'air pour diminuer la température, ou le diminuer dans le cas contraire (rappel pour ces cas contraires: diminution de débit dans des proportions telles que le capteur reste dans sa plage de fonctionnement nominal, sinon la température peut au contraire chuter, du fait d'une forte baisse du rendement du capteur). Une autre mesure pour limiter la température (par exemple dans les périodes de trop fort ensoleillement) peut être de couvrir une partie des capteurs dans une proportion proche de celle du « surensoleillement » épisodique.
24. Comment aborder le cas des séchoirs hybrides?
Nous avons vu que dans certaines conditions (mauvaises conditions climatiques, capacité et rythme de séchage élevés...), il est nécessaire de faire appel à une source énergétique complémentaire à l'énergie solaire. Ces séchoirs sont dénommés séchoirs hybrides.
La puissance totale est alors:
, avec:
- P u: puissance du système d'appoint (chaudière, fourneau, échangeur électrique) en kW;- h a: rendement global du système d'appoint incluant le rendement de la production de chaleur (chaudière) et le rendement de transfert de la chaleur à l'air (échangeur).
L'énergie d'appoint requise pour l'opération de séchage est:
(en kWh) où t s est
le temps de séchage (en h).
Si l'appoint est électrique, on peut calculer directement le coût en énergie d'une opération de séchage. Si l'appoint est un combustible, la masse de combustible nécessaire (en kg) est donnée par:
(m en kg, E a en kWh)
où PCI = Pouvoir calorifique inférieur du combustible (en kWh/kg).
Le graphique ci-dessous précise les équivalences de pouvoirs calorifiques pour les différents combustibles envisageables.
(Source: René Massé « Le butane et le kérosène en chiffres », Éd. GRET, Paris, 1990)
On tiendra compte des remarques suivantes:
- le PCI ou propane est de 12,7 kWh/kg;- les rendements de combustion de ces différentes sources d'énergie varient, pour des installations artisanales ou semi-industrielles de 50 % (pour les combustibles solides) à 80 % (pour les combustibles liquides).
Récapitulatif de la méthode de dimensionnement
|
Données de base |
Produits: |
- humidité initiale-finale |
Air ambiant: |
- température sèche et humide |
Conditions de séchage imposées par la filière amont et aval.
|
- masse de produits à sécher |
La technologie du séchage amélioré appliqué aux produits alimentaires est relativement récente dans de nombreux pays en développement. Le développement d'un séchoir nécessite de nombreux efforts:
- adaptation aux caractéristiques climatiques locales;- adaptation, dans la mesure du possible, aux matériaux locaux;
- adaptation aux compétences locales dans la fabrication des séchoirs;
- adaptation aux produits traités;
- adaptation aux besoins (quantité, apparence du produit...);
- adaptation aux exigences de l'utilisateur du séchoir;
- etc.
Les séchoirs qui sont ici présentés ont fait l'objet de nombreux tests pour les rendre adaptés à des situations relativement précises, mais qu'on rencontre suffisamment souvent qu'ils soient aptes à assurer une large diffusion à l'avenir.
Plusieurs types de séchoirs sont présentés: à convection directe ou indirecte, à convection forcée. Trois modèles tout fossile à gaz sont présentés parce qu'ils permettent la réalisation de produits séchés de qualité, même pendant la saison humide.
L'évolution actuelle des séchoirs artisanaux tend vers des processus mixtes (pré-séchage rapide en séchoir tout fossile, finition en séchage solaire amélioré) ou vers des séchoirs hybrides solaire/tout fossile. Alors qu'en Europe des systèmes performants de séchoirs hybrides (solaire/gaz notamment) sont fonctionnels, peu de réalisations sont encore opérationnelles en PED mis à part quelques prototypes. Pourtant, cette conception mixte se justifie économiquement avec des temps de retour sur l'investissement normaux (5 à 10 ans) pour une unité artisanale visant un produit de qualité.
Parmi les séchoirs présentés, on peut aussi faire la distinction entre séchoir à une seule fournée (système « batch »), semi-continu (les fournées se suivent, on peut enfourner des produits humides en remplacement de certaines claies où les produits sont suffisamment secs). Les systèmes continus (tapis roulant...) sont essentiellement des applications industrielles ne se justifiant que sur des tonnages conséquents.
Les fiches comprennent une partie descriptive où le lecteur trouvera les éléments essentiels pour cerner l'usage du séchoir (fonctionnement, caractéristiques, durée de vie, historique, références) et une partie donnant des éléments de performance de séchage en vue d'une comparaison avec d'autres systèmes.
Ces fiches ont pour but de donner au concepteur les informations basiques nécessaires à son étape d'analyse et de sélection du séchoir convenant à son cas. Elles ne suffisent en aucun cas pour réaliser le modèle présenté. Pour chacun, des plans précis et des guides de fabrication sont disponibles auprès des organismes mentionnés en référence dont les adresses figurent en annexe 7. Les paramètres techniques mentionnés dans ces fiches sont définis ci-dessous.
Consommation spécifique du séchoir (C s en kWh/kg d'eau extrait)
Dans la conception d'un séchoir polyvalent (plusieurs types de produits à sécher), on a coutume d'utiliser la quantité d'eau à extraire par période de temps donné.
Pour connaître la facture énergétique, la connaissance de la « consommation spécifique » donne la quantité d'énergie à fournir associée à cette quantité d'eau à extraire. Cette valeur est bien sûr une valeur moyenne sur la durée de l'opération de séchage et sur une campagne de séchage où les conditions climatiques et les caractéristiques du produit varient. En particulier, l'énergie à fournir par kilogramme d'eau à extraire est plus élevée en phase III du séchage.
N.B. Pour les séchoirs à convection forcée, on tient compte de l'énergie électrique consommée par le ventilateur dans l'expression de la consommation spécifique.
Rendement énergétique global (REG en %)
Il est défini comme le rapport entre l'énergie nécessaire à la vaporisation de l'eau libre, appelée chaleur latente de vaporisation de l'eau, et la consommation spécifique définie précédemment.
Lv = 0,65 kWh/kg eau (à 60°C, à la pression atmosphérique).
Dans une phase expérimentale, on ne peut se contenter de ce terme global. Il est nécessaire de travailler sur les caractéristiques de l'air à l'entrée et en sortie. On calcule alors la différence d'enthalpies pour connaître l'énergie ayant participé au séchage du produit (cf. troisième partie). On peut ainsi définir l'efficacité du séchage séparément du rendement d'échauffement de l'air d'entraînement.
Liste des neuf séchoirs présentés
· Fiche A
Séchage traditionnel amélioré
· Fiche B Séchoir cadre NRI/Tropical Wholefood
· Fiche C Séchoir coquillage GERES/GRET
· Fiche D Séchoir banco CEAS/ATESTA
· Fiche E Séchoir solaire tunnel type Hohenheim
· Fiche F Séchoir toiture à craies GERES (1)
· Fiche G Séchoir gaz type armoire CEAS
· Fiche H Séchoir semi-continu ITDG
· Fiche I Séchoir tunnel à gaz type Cartier (2)
(1)
Ce modèle a été retenu, bien qu'il ne
soit pas destiné au séchage de produits alimentaires, pour son principe très
fonctionnel éprouvé en Europe et pouvant s'adapter à des systèmes mixtes.
(2)Ce modèle a été mis en place au Burkina Faso pour le séchage des mangues sans traitement (sec et mi-cuit) d'après le savoir technologique développé pour le séchage du pruneau en France.
FICHE A: Séchage traditionnel amélioré
Il nous a paru intéressant, compte tenu de l'importance de l'activité concernée, de présenter une fiche générale sur l'amélioration des pratiques traditionnelles sans la mise en place d'un outil technologique.
Cette amélioration réside en trois points:
1. La préparation et le traitement des produits à sécher pour limiter les pertes.2. Une meilleure exposition du produit à l'air chaud ou au soleil et une meilleure protection vis-à-vis des agents extérieurs (insectes, rongeurs...).
3. Un conditionnement/stockage permettant une conservation plus longue.
1. Les pré-traitements, qui permettent d'éviter et de repousser toute contamination du produit et d'améliorer le séchage, sont abordés dans le détail au chapitre suivant.2. Beaucoup de pratiques persistent consistant à étaler directement le produit à sécher sur la terre battue, le sable, la paille. Des systèmes simples permettent d'éloigner le produit de ces sources d'infestation.
3. Le conditionnement, ainsi que les conditions de stockage, seront abordés au chapitre suivant, et ont une portée générale quel que soit le type de séchoir utilisé.
Des critères de fin de séchage simples doivent être établis dans le cas du séchage traditionnel amélioré, car il est difficilement envisageable de procéder à des tests compliqués pour ce type de séchage. On pourra opter pour un critère de caractéristiques extérieures du produit (c): fin du chapitre IV).
FICHE B: Séchoir cadre NRI
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: NRI-Tropical Wholefood |
HISTORIQUE |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Le séchoir est composé d'un cadre en bois dur recouvert d'une toile plastique transparente en polyéthylène. La base du cadre est composée de bâtons de papyrus recouverts d'une toile en polyéthylène noir. L'ensemble du cadre repose à 1 m du sol, sur quatre pieds en bois tendre. Les dimensions du cadre (L x 1 x h) sont de 4,3 x 1,5 x 0,75 m. Le cadre peut contenir deux étages de six claies soit une surface de séchage de 10 m 2. Système d'aération: Deux ouvertures de 20 x 400 cm sont ménagées sur la base et le haut du cadre. Elles sont recouvertes d'une moustiquaire en nylon pour protéger le produit de l'attaque des insectes. L'air frais rentre par le bas. L'air chaud et humide sort par le haut. Capacité: 2 à 3,5 kg de produit frais/m 2 de claie soit 20 à 35 kg de produit frais par séchoir Approvisionnement du séchoir: Par fournée. Deux battants situés sur un des grands côtés du cadre permettent d'introduire les claies dans le séchoir. Matériaux: Bois dur et bois tendre, toile plastique en
polyéthylène transparent, toile en polyéthylène noir. tamis en nylon pour les
claies et les entrées et sorties d'air. |
RÉALISATION: facile. Utilise des matériaux disponibles
localement. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Ouganda |
Pays: Ouganda |
Saison sèche |
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) 20/30 |
|
Ensoleillement journalier (kWh/m2) |
4 à 6 |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
35/80 |
Température dans le séchoir (°C) |
Gain de 15°C/35 à 45 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
2,1 environ |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
30 |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
36 |
Débit de produit frais par cycle (kg) |
20 à 35 |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Réalisation simple. Facteurs défavorables · Entretien de la couverture plastique peut poser des problèmes de coût et de disponibilité dans certaines régions. |
SYNTHÈSE · Séchoir solaire direct à vocation artisanale. Convection naturelle. Paramètres de séchage peu réglables. |
FICHE C: Séchoir coquillage GERES/GRET
USAGE: domestique |
RÉFÉRENCES: GRET, GERES |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Sénégal, Burkina Faso, Mali
|
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Il est composé de deux cônes métalliques reliés par une charnière. Il est conçu pour protéger les aliments des insectes et de la poussière. Diamètre: 70, 90 et 110 cm selon les modèles. Surface de séchage: 0,5; 1,4 ou 2,2 m 2. Système d'aération: La circulation d'air par convection naturelle est faible (quelques m 3/h). Cela contribue à la montée en température de l'air et à l'efficacité du séchoir en fin de séchage. Capacité: Environ 5 kg de produit frais/m 2 de claie en saison sèche soit 2,5 à 10 kg de produit frais selon les modèles de séchoir. La capacité de chargement est réduite par ciel couvert. Chargement: Opération discontinue ou semi-continue (claie de finition dans le bas du séchoir). Matériaux: Tôle 10/10, fers de 6 et 8 mm de diamètre et cornières, claie avec tamis en fibre de verre, grillage galvanisé maille fine, peinture noire mate, antirouille. Séchoir coquillage GERES/GRET |
RÉALISATION: Le séchoir coquillage est réalisable à partir de matériaux disponibles localement. Toutefois une attention particulière doit être portée au respect précis des plans par les artisans afin de conserver des performances du séchoir. DURÉE DE VIE: Matériel robuste: la durée de vie est estimée à dix ans. L'entretien du séchoir est très limité: il est lié au renouvellement du tamis des claies et de la peinture noire des tôles (doit résister aux UV, couche antirouille recommandée). COUT DE FABRICATION: de 130 à 440 FF selon la capacité. COUT D'ENTRETIEN: 30 FF par an environ. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Burkina Faso Utilisateurs: familles, coopératives, groupements de femmes. Produits séchés: fruits (mangues), légumes (tomates, oignons, gombo, légumes feuilles), produits céréaliers (fonio, farine), viandes, poissons. Destination: autoconsommation et vente locale. Période d'utilisation: période de production couvrant la
saison sèche: de décembre à juin. Utilisation du séchoir en fin de saison
pluvieuse pour le séchage des feuilles et du gombo: de septembre à octobre. |
|
Saison sèche | |
Pays: Burkina Faso. Produit: mangue. |
Ciel clair |
Ciel nuageux |
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) |
25/33 | |
Ensoleillement journalier (kWh/m 2) |
6,0 |
4,0 |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
15/50 |
40/80 |
Température dans le séchoir (°C) |
Gain de 10 à 20°C | |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
1,5 | |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
40 | |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
36 |
60 |
Débit de produit frais par cycle (kg) |
10 |
10 |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Réalisable a partir de matériaux disponibles localement. Facteurs défavorables · L'efficacité du séchage est fortement liée a la qualité de fabrication et au respect des plans du séchoir: une formation et un suivi temporaire des artisans est souhaitable. SYNTHESE · maîtrisable Séchoir solaire indirect a vocation domestique. Convection naturelle. Paramètres de séchage peu régulables. Un de mieux adaptés actuellement au séchage des aliments en zone sahélienne. |
FICHE D: Séchoir banco CEAS/ATESTA
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: CEAS, ATESTA |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Burkina Faso |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Il est constitué d'un bâti en briques de terre stabilisée appelée banco (6,2 x 2,5 m), de 5 arceaux de bois qui surmontent le bâti, d'une couverture en film transparent (14 x 3,4 m) fixée sur les arceaux, de 8 claies de 1,5 m 2 chacune disposée à environ 1 m du sol sur un même plan horizontal. La hauteur du séchoir est variable dans le sens de la longueur: 1,90 m pour la plus petite hauteur (avant du séchoir) et 2,40 m pour la plus grande (arrière du séchoir). Système d'aération: · Air frais: 4 entrées par l'avant et 4 entrées sur les faces latérales. Elles sont protégées par une grilla en acier galvanisé (maillage fin). · Air humide: une sortie sur l'arrière du séchoir, a 2 m du sol environ. Débit d'air non ajustage dépendant des conditions climatiques sur le site: entre 100 et 140 m 3/h environ. Capacité: 10 kg de produit frais/m 2 de claie soit 120 kg de produit frais par séchoir. Chargement du séchoir: A partir des faces latérales du séchoir. Opération discontinue. Matériaux: Banco, ciment, acier galvanisé, claies en bois,
cardes nylon, tamis en nylon de type moustiquaire. |
RÉALISATION: construit avec des matériaux locaux. Couverture plastique de préférence importée (dure trois fois plus longtemps que celles fabriquées dans le pays). DURÉE DE VIE : plusieurs années. Renouvellement de la couverture plastique tous les deux ou trois ans. Le tamis en nylon des claies constitue également une pièce d'usure. COUT DE FABRICATION : 6 400 FF environ. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Burkina Faso. Utilisateurs: coopératives, groupements de femmes., « privés ». Produits séchés: mangues. Destination: exportation en Europe, vente locale. Période d'utilisation: période de production couvrant la saison sèche (mars-avril) et le début de la saison humide (mai-juin). Mode d'utilisation: le chargement du séchoir se fait en
discontinu. Comme le produit est destiné à l'exportation, un prétraitement au
soufre est effectué essentiellement pour éviter le brunissement et le
développement de moisissures sur le produit. |
Pays: Burkina Faso. |
Saison sèche |
|
|
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) |
25/40 |
Ensoleillement journalier (kWh/m2) |
6,0 |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
15/70 |
Température dans le séchoir (°C) |
Gain de 10 à 20°C |
Consommation spécifique du séchoir (Cs) (kWh/kg d'eau extrait)
|
2,1 |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
30 |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
36 à 60 |
Débit de produit frais par cycle (kg) |
120 |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Réalisable avec des matériaux locaux. Facteurs défavorables · Entretien de la couverture plastique peut poser des problèmes de coût et de disponibilité dans certaines régions. |
SYNTHÈSE · Séchoir solaire direct à vocation artisanale. Convection naturelle. Paramètres de séchage peu régulables. |
FICHE E: Séchoir solaire tunnel type Hohenheim
USAGE: domestique |
RÉFÉRENCES: Université de Hohenheim |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Europe, Afrique, Asie |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Une rigole de 10 cm de profondeur est ménagée dans la face supérieure d'une dalle horizontale en béton armé (L*1: 30 x 1,9 m). La dalle est recouverte d'une couche de liège de 20 mm. Sur le liège, il a une autre couche de béton de 10 mm. La rigole est surmontée d'une couverture plastique. On peut distinguer deux parties distinctes: la zone de chauffe (10 m), en avant de laquelle est placé un ventilateur et là zone de séchage proprement dite (20 m). Système d'aération: Ventilateur radial (70 W max., 1400 tr/mn). Débit d'air ajustable (0-1 360 m 3/h). - Air frais aspiré, filtré et refoulé vers la zone de chauffe puis de séchage par le ventilateur. L'air circule en dessous et au-dessus du produit. Zone de chauffe: La rigole est peinte en noir et surmontée d'une feuille de polyéthylène (épaisseur = 0,2 mm) fixée à la dalle grâce à un profilé de serrage. Surface utile de capteur: 18,6 m 2. Zone de séchage: Sur la rigole, des baguettes de 20 x 20 mm permettent de disposer un grillage métallique couvert d'une moustiquaire en nylon. La rigole est surmontée d'une couverture plastique polyéthylène de 0,2 mm fixée d'un côté à la dalle grâce à un profilé de serrage, de l'autre côté à un tube d'enroulement avec manivelle. Surface utile de séchage: 40 m 2. - Capacité: 15 à 20 kg de produit frais/m 2 soit 600 à 800 kg au total. Matériaux: Béton, acier (fer en T, fer cornière, tiges...),
tôle galvanisée, bois, liège, film plastique en polyéthylène, tamis en nylon.
|
RÉALISATION: nécessite le travail de trois artisans pendant vingt jours. Ventilateur importé. DURÉE DE VIE: estimée à plus de dix ans pour le bâti, à deux ou trois ans pour la couverture plastique. COUT DE FABRICATION: 12 000 FF environ. COUT D'ENTRETIEN: 80 FF/an. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Maroc. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES (suite)
Pays: Maroc |
Abricots |
Raisins |
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) |
15/38 |
10/38 |
Ensoleillement journalier (kWh/m 2) |
7,7 |
4,2 |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
25/80 |
24/100 |
Température dans le séchoir (°C) |
65 |
60 |
Débit d'air du ventilateur (m 3/h) |
1 050 |
900 |
Puissance du ventilateur: consommation moyenne (kW) |
0,04 |
0,04 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
1,8 |
1,8 |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
35 |
35 |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
48 |
150 |
Débit de produit frais par cycle (kg) |
600 |
800 |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Réalisable en grande partie avec des matériaux disponibles localement.. Coût limité de fabrication et d'entretien. Faible consommation électrique du ventilateur. Facteurs défavorables · Entretien de la couverture peut poser des problèmes de coût et de disponibilité dans certaines régions. |
SYNTHÈSE · Séchoir artisanal. Convection forcée. Paramètres de séchage partiellement régulables. |
FICHE F: Séchoir toiture à cries GERES
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: GERES |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Mali |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Le séchoir solaire comporte: Une zone de chauffe constituée d'une toiture solaire à air adaptée au bâtiment existant. Elle est composée, depuis la face extérieure du toit: d'un absorbeur en tôle galvanisé ondulée, d'une couche d'air circulant (8 cm d'épaisseur), d'une tôle ondulée galvanisée, isolée en sous-face par de la mousse phénolique (2 cm d'épaisseur). La surface de captation est de 85 m 2. Une chambre de séchage constituée en tôle 10/10, recouverte d'un isolant en plaque d'épaisseur 2 cm. 6 chariots comportant 20 claies de séchage peuvent y être introduits ce qui représente une surface de séchage de 60 m 2. Dimensions intérieures L*1*h: 1,95 x 1,65 x 2,90 m. Capacité journalière: 5,5 kg de craie humide/m 2 de claie soit 330 kg au total. Un système d'aération par ventilation forcée: Aspiration de l'air humide du séchoir par un ventilateur double débit piloté manuellement (3 kW max., 4 000 ou 8 000 m 3/h) et situé à l'extérieur. Vitesse de circulation d'air: 1 m/s à l'entrée du séchoir,
6 m/s à la sortie. |
RÉALISATION: nécessite les compétences d'une entreprise locale expérimentée dans la réalisation de toitures métalliques. DURÉE DE VIE: le séchoir est toujours en service. COUT DE FABRICATION: en 1987: 120 000 FF environ, dont 95
000 FF de matériaux et travaux locaux (capteur toiture à 80 FF/m 2)
et 21 000 F d'équipements importés (ventilateur, isolation thermique). |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Utilisateurs: Union malienne des aveugles. Remarque: le faible rendement énergétique global peu élevé
s'explique par le choix d'un capteur toiture rustique et bon marché. Le
rendement d'un tel capteur est environ 30 % moins élevé que celui de
capteur-toitures performants. La légitimité d'un tel choix est économique et
pratique: coût trois à quatre fois plus faible, entretien limité. |
Pays: Mali. |
Produit: craie |
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) |
[17-26] [32-40] |
Ensoleillement journalier (kWh/m 2) |
[5-6] |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
[12-60] [40-90] |
Température dans le séchoir (°C) |
[50-60] |
Débit d'air du ventilateur (m3/h) |
8 000 |
Puissance du ventilateur (consommation moyenne) (kW) |
2,2 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
3* |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
20 |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
9 |
Débit de produit frais par cycle (kg) |
330 |
* dont 4 % environ en électricité. |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Entretien limité et coût de fabrication pouvant être amorti en un an. Facteurs défavorables · Réalisation pouvant s'avérer délicate. |
SYNTHÈSE · Séchoir solaire à vocation artisanale. Convection forcée. Régulation partielle des paramètres de séchage. |
FICHE G: Séchoir gaz type armoire CEAS
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: CEAS |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Burkina Faso |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Le séchoir est constitué par un bâti en briques (dimensions L*1*h: 2,3 x 1,1 x 2,2); deux cellules de séchage concomitantes, pourvues chacune d'une entrée d'air, d'un brûleur et d'une gaine de séchage recevant 10 claies de 0,7 m 2 chacune. Système de chauffe: Brûleur domestique à rampe. Système d'aération: Entrée d'air par le bas, à l'avant du séchoir. Débit d'air ajustable: 250 m 3/h maximal. Capacité: 6,5 kg de produits frais/m 2 de claie soit 46 kg de produits frais par cellule. Chargement du séchoir: Frontal, après ouverture de la porte
d'accès à la gaine de séchage. Matériaux: Banco, acier, claie en bois avec tamis en corde
ou de type moustiquaire. |
RÉALISATION: peut facilement être construit en fonction de la disponibilité locale des matériaux. DURÉE DE VIE: inconnue mais matériel solide. La moustiquaire des claies doit être changée tous les ans environ. COUT DE FABRICATION: 4 000 FF environ. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Burkina Faso. Utilisateurs: coopératives, groupements de femmes, << privés ». Produits séchés: fruits (surtout des mangues), légumes (oignons, gombo). Destination: exportation en Europe, vente locale. Période d'utilisation: période de production couvrant la saison sèche (décembre-avril) et le début de la saison humide (mai-septembre). Mode d'utilisation: le chargement du séchoir se fait en
discontinu. Comme le produit est destiné à l'exportation, un prétraitement au
soufre est effectué essentiellement pour éviter le brunissement et le
développement de moisissures sur le produit. |
Produit: mangues |
Saison humide |
Températures: minima/maxima, moyenne (°C) |
[24-28] [31-39] |
Humidité relative: minima/maxima, moyenne (%) |
[32-60] [60-95] |
Température dans le séchoir (°C) |
60 à 65 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
1,8 à 2,2 |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
30 a 35 |
Durée d'un cycle de séchage (h) |
18 |
Débit de produit frais par cycle (kg/cycle) |
46 x 2 cellules |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Facilement réalisable, utilise des matériaux locaux. Facteurs défavorables · Existence de passages préférentiels d'air sur les côtés de la cellule de séchage entraînant une hétérogénéité de séchage. |
SYNTHÈSE · Séchoir à gaz à vocation artisanale. Convection naturelle. Régulation possible des paramètres de séchage (réglage de l'entrée d'air, du débit de gaz). |
FICHE H: Séchoir semi-continu ITDG
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: ITDG |
HISTORIQUE
Zone d'implantation: Amérique latine (Pérou, Colombie,
Cuba...), Asie (Inde, Bangladesh...) |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Le séchoir est composé: - d'une cellule de séchage en acier non oxydable (dimensions L*1*h = 140 x 120 x 220 cm) recevant 15 claies de 0,8 m 2 chacune. Elle est conçue de manière à pouvoir charger et retirer les claies en semi-continu; Système de chauffe: Brûleur au gaz ou au fioul de puissance maximale 60 kW. L'air frais est chauffé par l'intermédiaire d'un échangeur de chaleur dans le cas d'un chauffage au fioul. Système d'aération: Entrée d'air chaud par le bas, à l'arrière de la cellule. Débit d'air fixé à 2 800 m 3/h. Capacité: 3,75 kg de produit frais/m 2 de claie soit 45 kg de produit frais par cellule. Approvisionnement du séchoir: Frontal. Une par une, les claies sont introduites par le haut de la cellule de séchage et retirées par le bas après séchage. Opération semi-continue: une claie toutes les 12 minutes environ. Matériaux: Plaques et barres d'acier galvanisé, bois dur et
bois tendre, claies en bois dur avec tamis en nylon (mailles fines). |
RÉALISATION: délicate, réalisable en partie selon la disponibilité des matériaux et le savoir-faire technique local. DURÉE DE VIE: inconnue mais matériel solide. La moustiquaire des claies doit être changée tous les ans environ. COÛT DE FABRICATION: 30 000 FF environ. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Guatemala. |
Produit: plantes aromatiques/ médicinales | |
Température moyenne (°C) |
18 |
Humidité relative moyenne (%) |
60 |
Température dans le séchoir (°C) |
50-55 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
> 2,4 * |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
26 |
Temps de passage moyen du produit (h) |
3 à 4 |
Débit moyen de produit frais par heure (kg/h) |
20 |
* Consommation du ventilateur inconnue. |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Régulation de la température de séchage au niveau du brûleur: permet de sécher en saison humide et d'adapter la température de chauffe au produit séché. Facteurs défavorables · Construction plus difficile que la plupart des séchoirs fonctionnant en discontinu. |
SYNTHÈSE · Séchoir à gaz à vocation artisanale. Convection forcée. Régulation des paramètres de séchage. |
FICHE 1: Séchoir tunnel à gaz type Cartier
USAGE: artisanal |
RÉFÉRENCES: GERES |
HISTORIQUE Zone d'implantation: Europe, Turquie, Afrique |
CARACTÉRISTIQUES DU SÉCHOIR Description générale: Le séchoir est composé: - d'un bâti en briques cuites (L *1* h: 4,6 x 2,2 x 2 m). Les briques du toit sont soutenues par des barres métalliques en T de 5 x 2,4 cm; Système de chauffe: Un brûleur torche (puissance moyenne: 40 kW) incorporé dans un foyer avec pare-flamme. Système d'aération: Il est constitué de: - 1 moteur électrique (220 V, triphasé); Système de contrôle et de régulation: Le séchoir est conçu de manière à assurer la sécurité de l'installation (contrôle de flamme, protection électrique, etc.) et la régulation des paramètres de séchage (régulation automatique de la température, contrôle de l'humidité dans le séchoir). Capacité: 1 à 2 chariots de 32 claies chacun. 8 kg de produit frais/m 2 de claie soit 130 kg de produits frais par chariot. Approvisionnement du séchoir: Par fournée ou en semi-continu. Matériaux: Bâti et portes: briques cuites, ciment, fers en
T, tôles plates de 2 mm d'épaisseur, fers carrés de 3 cm de côté, isolant.
Chariots: roulettes folles, fers cornière et fers plats de 2 cm. Claies: bois
dur pour le cadre, moustiquaire nylon ou en acier non oxydable pour le tamis
|
RÉALISATION: assez facile. Un respect scrupuleux des plans par un maçon compétent est indispensable. Système de ventilation et de chauffe en général importés. DURÉE DE VIE: plusieurs dizaines d'années pour le bâti, les systèmes de chauffe et de ventilation. Le tamis des claies représente le matériel d'usure. COUT DE FABRICATION: 65 000 FF dont 38 000 FF de matériel
importé. |
CONDITIONS D'UTILISATION ET PERFORMANCES Pays: Burkina Faso. Utilisateurs: coopérative. Produits séchés: mangue, papaye, banane. Destination: marché national et exportation en Europe. Période d'utilisation: d'avril à octobre pour les mangues. Mode d'utilisation: par fournée. Aucun prétraitement n'est
actuellement employé lors du séchage des mangues. |
Produit: mangues | |
Température moyenne (°C) |
25-34 |
Humidité relative moyenne (%) |
60-98 |
Température dans le séchoir (°C) |
50-70 |
Consommation spécifique du séchoir (C s) (kWh/kg d'eau
extrait) |
1,5 * |
Rendement énergétique global (REG) (%) |
40 |
Temps de passage moyen du produit (h) |
18 |
Débit moyen de produit frais par heure (kg/h) |
8 |
* Dont 0,25 kWh/kg d'eau extrait dus à la consommation du
ventilateur. |
CAPACITÉ DE DIFFUSION Facteurs favorables · Entretien limité. Durée de vie de plusieurs dizaines d'années. Facteurs défavorables · Investissement de départ important. |
SYNTHÈSE · Séchoir à gaz à vocation artisanale. Convection forcée. Régulation des paramètres de séchage. |
Les chapitres précédents nous ont permis de cerner les différents éléments techniques à prendre en compte pour la mise en place d'une activité de séchage qu'elle soit de dimension domestique, artisanale ou semi-industrielle.
Après ces étapes de diagnostic pour choisir et dimensionner l'outil de séchage, il reste à concevoir et à dimensionner les équipements annexes ainsi que les locaux en correspondance. Des règles d'hygiène, de fonctionnalité, de situation géographique sont alors à prendre en compte. Il faut aussi s'attacher à gérer correctement une unité de séchage pour assurer la pérennité de la nouvelle structure avec les emplois ainsi générés. Ces éléments vont intervenir dans le calcul de la rentabilité économique de l'activité, et doivent donc être appréhendés au préalable
Nous allons donc aborder maintenant les aspects relatifs à la conduite d'une unité de séchage.
Pour une activité domestique destinée essentiellement à l'autoconsommation et au marché de proximité, le problème sera surtout de bien s'organiser pour parvenir à sécher le stock des produits frais suivant les impératifs journaliers (excédents non vendus en frais au marché, produits récemment récoltés...). Il s'agira aussi d'améliorer la qualité du produit (propreté, qualité nutritionnelle, conservation...).
Pour une unité artisanale ou semi-industrielle, il faut optimiser la fonctionnalité du système, c'est-à-dire adapter l'organisation des bâtiments, le rythme du travail, le respect des délais, des quantités et de la qualité en accord avec l'attente du marché potentiel (respect des commandes, maximisation de la productivité...). Les recommandations de ce chapitre s'adresse particulièrement à ce niveau d'activité. Elles ont été distinguées en deux parties: concevoir et dimensionner les infrastructures d'une unité de séchage, et gérer les différentes étapes de production et de commercialisation.
La définition préalable de l'outil de séchage et de la filière de transformation dans lequel il s'inscrit sous-entend la connaissance du processus (procédé) de séchage en soi. Mais ce n'est pas la seule étape du processus complet. Quel que soit le produit et le type de séchoir envisagés, il faudra toujours concevoir et gérer les étapes amont (avant séchage) et les étapes aval (après séchage).
LE TRI DES PRODUITS FRAIS
Cette opération constitue la première intervention au sein de l'unité après l'arrivée de la matière première. Elle peut se décomposer en deux étapes:
- la première à l'arrivée de la matière première et avant le stockage initial, en fonction de différents critères (variétés, calibres, degré de maturité...);- la deuxième au moment du dé stockage qui écarte les produits inexploitables pour la transformation, souvent à cause du pourrissement.
Pour les niveaux de production envisagés (artisanal à semi-industriel), cette opération est essentiellement manuelle. Le poste de travail correspondant reste donc une activité humaine qui demande une formation précise en rapport au cahier des charges du produit, et une rigueur constante. Une erreur de tri se répercute sur chaque étape ultérieure avec une baisse de qualité et une perte de temps. En particulier, un produit altéré et soumis au pourrissement peut contaminer ses voisins, lors du stockage avant séchage, et éventuellement pendant et après le séchage.
Des critères simples de détermination de l'état de fraîcheur seront adoptés.
LE LAVAGE DES PRODUITS
Le lavage est nécessaire, quel que soit le produit à sécher, afin de garantir une hygiène constante pour limiter tout développement de micro-organismes. Une eau de lavage chlorée (dosage à 100 ppm) est préconisée avec un trempage de quelques minutes suivi d'un rinçage à l'eau propre.
LA PRÉPARATION DES PRODUITS
Suivant le produit à traiter, il existe une grande diversité de préparations. Elles sont souvent rattachées aux usages et goûts locaux. Un compromis est à rechercher entre la présentation finale et la facilité de séchage (épaisseur minimale, grande surface exposée à l'air d'entraînement, simplicité de disposition dans la chambre de séchage...).
Au cours de cette opération, trois facteurs sont à prendre en compte:
- l'hygiène;- le taux de déchets;
- l'homogénéité de la préparation.
Le produit étant mis à nu, débarrassé généralement de sa peau protectrice, il est alors très sensible à l'altération microbienne.
Outre la propreté des outils et supports mis en uvre, la rapidité et la précision sont de rigueur afin de limiter les risques de perte par dégradation du produit, soit parce que le temps d'attente avant l'enclayage aura été trop long, soit parce que le produit n'aura pas été suffisamment nettoyé (restes de peau, de saletés...), soit parce que l'eau utilisée était elle-même infestée.
Le responsable a le choix entre un fort recours à la main-d'uvre pour limiter les charges d'investissement et la compétence des employés requise, ou le recours à une unité de parage très mécanisée pour accroître la productivité de l'opération. Le deuxième choix est rarement opportun dans les pays en développement compte tenu d'un coût salarial réduit et du fait que, pour certains produits tropicaux, il n'existe pas encore d'outillage de parage (découpe) automatisé.
Néanmoins, le personnel chargé de la préparation devra disposer d'outillage simple, robuste et adapté:
- couteaux aiguisés et adaptés à ôter la peau (type économe, Gaudillet), en acier inoxydable;- tambours rotatifs de pelage pour produits non meurtrissables (pommes de terre, carottes...);
- instruments de découpe (tranchoirs, fils à découper, tamis...).
LE PRÉTRAITEMENT DU PRODUIT À SÉCHER
Le prétraitement représente un intérêt notable, même pour des activités de séchage traditionnel de taille modeste, et mérite qu'on lui consacre une place importante. Il permet de modifier la structure du produit en vue de faciliter le séchage, d'éviter la contamination microbienne avant et en première (voire deuxième) phase de séchage (forte activité de l'eau), de limiter les réactions biochimiques ultérieures.
Le cahier des charges du produit fini imposera le type de pré-traitement. Bien sûr, s'il s'agit d'aborder le marché avec un label « produit écologique », tout prétraitement sera limité à l'usage de produits naturels (vinaigre, jus de citron, blanchiment à l'eau simple, salage, sucrage...). Ces produits étant généralement moins efficaces que les produits chimiques, il faudra alors être d'autant plus vigilant sur l'hygiène et la rapidité de séchage. Après une phase d'expérimentation, cette étape permet de proposer une gamme variée de produits et d'affiner les paramètres du séchage. Comme le séchage lui-même, elle apporte une réponse pour améliorer la conservation et la qualité finale du produit fini.
Généralités
On n'abordera ici que les prétraitements ayant pour but la conservation du produit, soit en augmentant sa durée de conservation, soit en limitant la durée du séchage. Le tableau de la page suivante en donne un aperçu.
Les composés de nature chimique peuvent être utilisés par fumigation, saupoudrage, trempage en solution plus ou moins concentrée. Chaque procédé a ses avantages et ses inconvénients:
- le saupoudrage, bien que très facile à réaliser, est, si possible, à éviter: il nécessite de plus grandes quantités de composés pour un résultat au mieux équivalent;- le trempage de l'aliment dans une solution diluée en additif permet de contrôler la quantité de composé qui se dépose sur le produit. Il permet également une adsorption homogène de l'additif donc une plus grande efficacité de ce dernier. Cependant, cette méthode nécessite une eau propre et une connaissance de la cinétique d'adsorption du composé sur l'aliment concerné;
- la fumigation est facile à réaliser mais elle peut poser des problèmes de dosage de la quantité d'additif à utiliser et des problèmes d'adsorption homogène du composé sur l'aliment.
PROCÉDÉ ET COMPOSÉ |
Développement microbien |
Oxydation des lipides |
Réactions de Maillard |
Brunissement enzymatique |
Diminution de l'Aw |
Autres effets |
Produits concernés |
Blanchiment |
--- (B. L, M)* |
| | | |
séchage ultérieur plus rapide |
légumes sauf oignons et ail |
Fumage |
-- (B. L, M) |
-- | | |
| |
produits camés |
Fermentation |
-- (1) (B. L, M) |
-- | | |
|
produits carnés |
|
NaCl (salage) |
-- (B. L, M) |
+ | |
- |
+++ |
risque de réhumidification du produit |
produits carnés (2) |
Sucrage |
--- (4) (B, L, M) |
|
+++ | |
+++ |
risque de réhumidification du produit |
fruits |
SO2 et sulfite |
-- (B. M) |
-- |
-- |
- |
+ | |
fruits/légumes |
Phosphates |
-- |
--- | |
- |
+ |
augmente la tendreté |
viandes |
Acide acétique (vinaigre) |
--- (B. L) |
|
+ |
- |
+ |
diminue le pH |
produits carnés |
Acide propinique |
---(M) | |
+ |
- |
+ |
diminue le pH |
fruits/légumes |
Acide sorbique |
---(B. L) |
|
+ |
- |
+ |
diminue le pH |
produits carnés/fruits |
Acide citrique |
- |
- |
+ | | |
diminue le pH |
viandes rouges/ |
|
en synergie |
en synergie |
+ |
--- |
+ | |
fruits/légumes |
Acide ascorbique |
---(M, L) |
- |
+ |
--- |
+ |
diminue le pH |
|
- limite faiblement
-- limite
--- limite fortement
+ favorise faiblement
++ favorise
+++ favorise fortement
M = moisissures
L = levures
B = bactéries
(1) La fermentation favorise le développement d'espèces microbiennes utiles et limite le développement des espèces indésirables.
(2) Pour le salage des produits carnés sensibles à l'oxydation des lipides, utiliser un sel le plus pur possible (NaCl), et éviter le gros sel marin.
(3) Le brunissement enzymatique des fruits est limité par trempage dans un bain d'eau légèrement salée.
(4) Le sucrage limite le développement microbien en abaissant l'activité de l'eau du produit. Il faut pour cela utiliser des doses suffisamment élevées de sucre sous peine de favoriser au contraire le développement des micro-organismes (voir paragraphe à cet effet).
Le choix du conservateur doit donc être fonction:
- de chaque aliment et des altérations qui vont être susceptibles de limiter sa conservation. va pas utiliser d'antioxydant pour sécher des haricots verts car l'oxydation des lipides n'est pas un facteur limitant pour la conservation de ce produit;- des conditions de stockage et de la durée de conservation désirée;
- de son efficacité;
- de sa facilité d'emploi dans un contexte socio-économique donné;
- de sa toxicité (1).
(1)Certains composés ou prétraitements d'emploi délicat et pouvant menacer directement la santé humaine ont volontairement été omis (nitrates, antioxydants de synthèse...).
Parfois, certains conservateurs peuvent avoir une action complémentaire ou synergique. Dans tous les cas, pour chaque conservateur et pour chaque produit, il est nécessaire de connaître avec précision le contexte et les limites d'emploi du conservateur (consulter les normes officielles).
Quelques prétraitements couramment employés
Le blanchiment
Le blanchiment ou précuisson (surtout pour les légumes et les viandes) permet d'attendrir les produits, d'en fixer les couleurs, d'éliminer les gaz intercellulaires responsables de réactions d'oxydation et de détruire les enzymes pouvant provoquer des détériorations. Le blanchiment à l'eau bouillante, plus simple, est préférable au blanchiment à la vapeur. L'incorporation future ou simultanée d'additifs est favorisée. Ainsi l'eau peut être additionnée de soufre sous forme de sel de métabisulfite de potassium (5 g/l) ou d'acide citrique (3 g/l).
La sulfuration
Elle est utilisée pour les fruits et légumes. Elle est surtout employée pour favoriser la conservation de la couleur du produit en limitant le brunissement. Elle a également une action anti-microbienne. Après séchage, la teneur en soufre résiduelle dans le produit ne doit pas dépasser 1000 ppm (en partie par million soit 1 g/kg de produit sec). Le soufrage peut se faire soit par fumigation, soit par trempage.
· Le soufrage fumigation:
Le principe consiste à brûler du soufre solide (en poudre) dont les fumées vont imprégner la surface des produits à sécher. Pour cela, on dispose les produits frais découpés dans une enceinte (soufroir) qui doit être hermétique, une fois la combustion entamée. En moyenne, un dosage de 5 à 6 g de SO 2/kg de produit frais permet une imprégnation de 700 à 900 ppm de soufre par kg de produit sec en 2/3 heures.
Pour chaque cycle, il faut doser précisément la quantité de soufre en fonction de la masse de produits frais et du type de produit. Le dosage approximatif et systématique à la petite cuillère souvent préconisé pour sa simplicité est à proscrire.
La fumigation a pour principal inconvénient de ne pas donner une imprégnation homogène du soufre sur le produit. Elle a toutefois l'avantage d'être facile à mettre en uvre, de se faire par voie sèche pour un coût relativement faible.
· Le soufrage par trempage au métabisulfite:
Le trempage des produits en solution à base de soufre est une alternative à la méthode précédente. Il s'agit de tremper un lot de produits pendant 10 à 30 minutes dans une solution aqueuse concentrée en métabisulfite de potassium ou de sodium de 3 à 9 g/l (1g/l de K 2S2O5 équivaut à 500 ppm SO 2 1 g/l de Na 2S2O5 équivaut à 660 ppm de SO 2)
Cette méthode permet une grande souplesse d'utilisation en faisant varier les ratios concentration/temps d'immersion et volume de solution/masse de produit frais. Elle a l'avantage d'une imprégnation homogène.
L'immersion en solution peut paraître paradoxale avant le séchage des produits, mais elle permet de travailler en semi-continu avec la chaîne de découpe, ce qui évite l'attente à l'air libre. L'ajout d'acide citrique à 3 g/l (1 gr équivalent à 20 ml de jus de citron) a un effet synergique avec le métabisulfite. Pour éviter la fuite de substances du produit, on peut ajouter du sucre ou du sel à la solution.
Le sucrage par trempage
Pour les fruits, il existe une technique qui consiste à tremper les produits dans une solution fortement concentrée en sucre. La différence de concentration entre les deux milieux provoque une migration de l'eau vers la phase la plus concentrée, en l'occurrence du produit vers l'eau sucrée. On obtient ainsi une déshydratation du produit accompagnée d'un sucrage. Ainsi la pomme trempée pendant 6 heures à 50°C dans une solution sucrée (60 g de sucre/100 g de solution) permet:
- d'enlever 40 g d'eau par 100 g de produit frais;- de sucrer le produit à raison de 10 g de sucre en plus par 100 g de produit frais.
Ce procédé est très utilisé en Asie du Sud-Est pour les fruits semi-confits mais il nécessite un blanchiment préalable. En Afrique, plusieurs contraintes limitent l'utilisation de ce procédé à l'échelle artisanale. Le coût du sucre est parfois élevé et oblige à un recyclage des sirops dont la gestion est souvent difficile (stockage au froid, inversion du saccharose).
Le salage pour les viandes et les poissons
Il empêche, par diminution de l'activité de l'eau du produit, la prolifération microbienne. Deux méthodes de salage sont possibles: en saumure ou à sec.
· Le salage en saumure:
Le produit est plongé dans l'eau salée (environ 100 g de sel/litre) pendant une durée de plusieurs jours qui dépend du produit.
· Le salage à sec:
Le produit est frotté et recouvert de sel. Il est ainsi protégé de l'air ambiant par une enveloppe. L'action du sel est plus lente qu'en saumure car il n'agit qu'après dissolution dans l'eau exsudée par le produit. Avant le séchage, il faut retirer l'excès de sel.
Le fumage pour les viandes et les poissons
Il permet un séchage par entraînement et une action spécifique de la fumée par la production de composés antiseptiques, d'arômes et de couleurs particuliers. Le fumage peut se faire à chaud ou à froid.
· Le fumage à chaud:
Température des fumées: entre 60 et 100° C. Dans ces conditions, les produits subissent également une cuisson. Ce procédé relativement violent provoque une certaine dénaturation des protéines et la destruction de quelques vitamines.
· Le fumage à froid:
Température des fumées: inférieure à 30°('. La perte en eau est moins importante que dans le cas du fumage à chaud et la conservation des produits ne dépasse pas une semaine. Ce procédé évite le croûtage et permet une bonne pénétration de la fumée dans les produits.
Les opérations de fumage, pratiquées de manière traditionnelle, nécessitent un contrôle fréquent de la fumée. De plus, les consommations de bois sont très importantes, ce qui contribue à la détérioration du potentiel forestier, phénomène d'autant plus grave que de nombreuses régions sont déjà touchées par la crise du bois de feu.
LES CLAIES
Le séchage à entraînement par air chaud nécessite de disposer les fruits et légumes prêts à sécher sur des claies introduites dans le séchoir. La configuration des claies est fonction du dimensionnement du séchoir (notamment par rapport à la vitesse de l'air).
Un dimensionnement de l'ordre de 0,8 m 2 par claie est recommandé pour une meilleure homogénéité du séchage. En tout état de cause, les claies ne devront pas dépasser 1,5 m 2 pour des questions de manipulation et de durabilité. Si le support couramment utilisé est en bois, il doit être de bonne qualité et traité pour éviter son gauchissement (déformation) en milieu humide. La propreté des claies est un facteur d'hygiène et l'emploi d'une toile amovible permet un nettoyage fréquent sans altérer le support. Pour le séchage ventilé de plantes ou de feuilles, on utilise des caissons où la hauteur de produit est fonction du débit d'air.
Passons maintenant aux opérations en « aval », après le séchage.
LE TRI APRÈS SÉCHAGE
Le tri après séchage constitue la dernière sélection avant le conditionnement et la consommation. En fonction du cahier des charges visuelles imposé au produit (forme, texture, couleur), certains produits hors normes vont être évacués. Comme les unités de séchage en régions chaudes (autres qu'industrielles) n'ont généralement pas les moyens de contrôler en laboratoire la qualité du produit, notamment bactériologique, la responsabilité de retirer les produits douteux revient au personnel affecté. En effet, si le séchage n'a pas été totalement homogène (c'est rarement le cas), certains produits plus humides et infestés peuvent contaminer les autres ultérieurement.
LE STOCKAGE AVAL
Dernier maillon de la chaîne au sein de l'unité, une bonne conservation du produit sec passe par un stockage dans un endroit propre à l'abri de l'humidité et de la lumière. Compte tenu des conditions difficiles en régions chaudes et humides, il faut tenir compte, lors d'un entreposage prolongé, d'une possible ré-humidification. D'un point de vue formel, ce phénomène doit être étudié à partir des conditions hygrométriques prévues lors du stockage et de la courbe de sorption du produit. La teneur en eau finale du produit après séchage fournit la valeur d'activité de l'eau du produit à respecter. À cette valeur correspond un degré d'hygrométrie de l'air en équilibre avec le produit. Si elle est maintenue au-delà de cette consigne, il y aura ré-humidification du produit. Dans la pratique, et à défaut de pouvoir procéder à de telles analyses, on cherchera à:
- augmenter légèrement les exigences de séchage, de façon à mieux se prémunir de risques de ré-humidification préjudiciables;- améliorer les conditions de stockage, notamment par un emplacement adéquat dans les bâtiments (cf. plus loin);
- porter sur l'emballage du produit les instructions de stockage que doivent respecter les consommateurs;
- apporter un soin particulier au conditionnement du produit (protection contre l'air ambiant).
Un produit correctement entreposé doit conserver une bonne tenue de ses qualités visuelles, odorantes et gustatives. Il n'existe pas de normes relatives à la durée limite de conservation. En règle générale, le produit doit pouvoir se conserver un an.
LE CONDITIONNEMENT
Pour la plupart des produits secs, notamment fruits et légumes, le conditionnement en vrac, dans de grands récipients, ne doit être que temporaire (quelques heures) en attendant un emballage adapté.
Le problème de la reprise en eau lors du stockage est fonction de la perméabilité du contenant. Le sachet plastique reste le mode de conditionnement le plus utilisé. Celui en polyéthylène de 50 à 100 microns a l'avantage d'être souvent fabriqué localement, ce qui facilite son approvisionnement. Il n'a cependant pas les qualités de protection contre l'air et l'eau qu'offre le sachet en polypropylène, qu'il faut importer.
Le choix du matériau utilisé pour le conditionnement dépend dans la pratique:
- de la nature de l'aliment;- des conditions de stockage et de manutention (température, humidité, détériorations physiques possibles...);
- des propriétés protectrices du matériau;
- de sa facilité d'emploi;
- de sa disponibilité et de son coût sur les marchés locaux.
Protection offerte par divers matériaux d'emballage convenablement fermés
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Protection des aliments contre... | |||||||
Type d'emballage |
Perforation Écrasement |
Lumière |
Air |
Humidité |
Odeur |
Insectes |
Rongeurs |
Micro-organismes |
Boîtes |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
Verre (bouteille) Bocal |
E-M |
E (verre coloré) |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
Papier Sac |
F |
M |
F |
M |
F |
F |
F |
M |
Sachet |
F |
M |
F |
F |
F |
F |
F |
F |
Carton |
M |
E |
F |
F |
F |
F |
F |
M |
Bois (caisse) |
E |
E |
F |
F |
F |
F |
F |
M |
Poterie |
E-M |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
E |
Papier d'aluminium |
F |
E |
E |
E |
E |
M |
F |
M |
Films plastiques |
F |
F |
E |
E-M |
E-M |
F |
F |
M |
Bac de plastique |
F |
M |
E |
E |
E |
M |
F |
M |
E = Protection élevée
M = Protection moyenne
F = Protection faible
Source: « Conditionnement. Manuel de technologies du cycle alimentaire n° 7. », UNIFEM, New York 1993, 52 p.
Enlever les produits des plateaux et les mettre dans un grand récipient très propre. On recouvre ensuite ce récipient d'un morceau de tissu propre ou d'un filet protégeant les produits des poussières et insectes. On remue les produits deux à trois fois par jour. On les laisse huit à dix jours dans le récipient.
On introduit les produits dans les récipients dans lesquels ils sont stockés. Ces récipients doivent être entièrement secs. Il faut aussi protéger les produits des insectes et de la saleté.
Les récipients usuels sont: le pot en pierre; le pot d'argile ou métallique, gourde sèche, sac en papier ou tissu; des bocaux en verre, une boîte métallique avec couvercle étanche bien ajusté.
Scellage des récipients: une fois le couvercle fixé, on l'entoure d'un épais anneau de tissu (2,5 cm) que l'on a baigné dans de la parafine ou de la cire d'abeille. On enroule l'anneau pendant que la parafine est chaude, en s'assurant que tout l'espace entre le récipient et le couvercle est rempli.
Si on a mis les produits séchés dans des sacs en papier ou en tissu, on met ces sacs dans un plus grand récipient. On scelle le grand récipient, une fois qu'il est rempli de sacs.
Le graphe de la page ci-contre résume ces différentes composantes amont et aval d'une activité de séchage.
Ce rapide aperçu va nous permettre de présenter la conception d'une unité artisanale ou semi-industrielle:
- organisation et dimensionnement des locaux;- choix du site.
L'organisation des locaux de l'unité constitue un problème à considérer dès l'étude préalable de faisabilité d'une activité de séchage. Cela conditionne la qualité du produit et la performance de l'unité. Les objectifs à retenir dans la conception d'une activité sont les suivants:
- hygiène du travail (limitation des risques de contamination du produit);- fonctionnalité (facteur de productivité et de qualité).
La répartition d'une unité en trois zones: la conception d'un bâtiment de séchage doit, quelle que soit sa taille, pouvoir se dissocier en trois zones pour répondre aux différents états du produit traité:
- une zone de travail de la matière première;- une zone de séchage qui contient le séchoir et des « espaces tampon »;
- une zone de travail de la matière sèche.
Cette répartition a l'avantage de pouvoir cloisonner physiquement les zones pour y appliquer des règles de travail spécifiques en fonction de l'étape de l'élaboration du produit.
Le schéma de principe présenté page suivante est un exemple de bâtiment au Burkina Faso qui illustre bien ce concept et permet de préciser chaque zone spécifique.
LA ZONE DE TRAVAIL DE LA MATIÈRE PREMIÈRE DITE « ZONE HUMIDE »
Cette zone est la première et certainement la plus importante de l'unité. Elle regroupe les opérations multiples en amont du séchage qui concernent le produit à l'état frais (facteur d'hygiène prépondérant).
Selon les types et les quantités de produit, le stockage, le tri amont et le lavage peuvent se faire à l'extérieur (cas décrit dans l'exemple). Le stockage devra néanmoins être fait sous un appentis s'il y a des risques de pluie.
Le produit arrive ensuite dans la première pièce pour être préparé au séchage (épluchage, eviscérage...). La vulnérabilité du produit à ce stade oblige à la plus grande rigueur dans la conception des locaux:
- prévoir une protection face au milieu extérieur, source de contamination microbienne en limitant et protégeant les ouvertures (contre les insectes, les animaux, la poussière...);- prévoir une évacuation facile des déchets vers l'extérieur par une trappe prévue uniquement à cet effet;
- prévoir que le nettoyage des sols et des murs doit être facile, parce que fréquent: surface enduite contre la poussière, inclinaison du sol pour un nettoyage à grande eau.
La surface de cette pièce qui accueille le personnel et le matériel de préparation doit être précisément calculé en fonction:
- de l'organisation de ce poste (quantité de produit, durée quotidienne de traitement);- de la productivité du personnel qui, avec le point précédent, détermine le nombre de postes de travail;
- du besoin d'espace pour bien isoler la matière fraîche et les déchets courants;
- de la place prise par le matériel (tamis, tables et chaises).
Pour une entreprise de petite taille, cette pièce pourra contenir si besoin les opérations de prétraitement, qui mobilisent une surface supplémentaire.
LA ZONE DE SÉCHAGE QUI CONTIENT LE SÉCHOIR
Le produit traité en zone humide est maintenant prêt pour le séchage. Il faut pour cela « enclayer » le produit (le disposer dans le séchoir). Il est préférable de ne pas réaliser cette opération dans la zone humide pour limiter à la fois les risques de contamination (hygiène) et d'encombrement gênant pour la circulation (fonctionnalité).
La zone de séchage commence donc par un espace tampon, antichambre du séchoir, la salle d'enclayage. Rappelons que les séchoirs doivent être installés à l'abri du vent.
La conception de la zone de séchage est tributaire du type de séchoir prévu. Entre autres, il faut tenir compte:
- de la disposition des entrées/sorties « air » du séchoir dans le bâtiment pour faciliter l'arrivée d'air frais et éviter l'évacuation d'air humide dans la zone de séchage et les risques de condensation de la vapeur d'eau;- de la disponibilité de l'énergie de chauffage de l'air, qui, dans le cas d'énergies fossiles comme le gaz, le bois, le fuel doit être stockée à proximité et facile à acheminer;
- du nombre d'entre/sortie « produit » dans le séchoir. La solution est d'avoir une sortie du produit sec différente de l'entrée du produit humide pour une meilleure distinction spatiale des zones, qui facilite l'aménagement des locaux;
- de l'espace nécessaire de circulation autour du séchoir fonction de la dimension des claies voire des chariots mobiles (dimension des portes, angles morts);
- de l'isolation des murs du séchoir, notamment ceux qui donnent sur l'extérieur (contre l'humidité).
Remarque: Dans le cas de l'installation d'un séchoir solaire avec rayonnement direct, le séchoir est construit à l'extérieur, indépendant du bâtiment. Cette configuration pose le problème du contact de la matière fraîchement épluchée avec l'air ambiant extérieur au moment où elle est la plus sensible aux risques microbiologiques. Il convient de prendre le maximum de précautions pour diminuer les risques (distances courtes, surface au sol propre, abri voire tunnel de passage).
Dans notre exemple, le séchoir est à l'intérieur du bâtiment. L'accès est alors direct à partir de la pièce d'enclayage, qui permet le cas échéant d'entreposer chariot et claies.
LA ZONE DE TRAVAIL DE LA MATIÈRE SÈCHE DITE « ZONE SÈCHE »
Une fois sec et stabilisé, le produit doit pouvoir être déclayé rapidement. Afin de respecter le parcours « physiologique » du produit, il convient de ne pas utiliser la même pièce que pour l'enclayage. Par conséquent, la zone sèche commence par une pièce tampon similaire à celle avant l'entrée en séchoir. Ce sera le lieu pour réaliser un premier tri aval.
Au-delà, la salle de conditionnement est la dernière pièce où le produit sera travaillé avec si nécessaire une transformation secondaire (broyage...) pour répondre au cahier des charges du client. La conception de cette pièce est semblable à celle de préparation dans la zone humide, hormis la contrainte de nettoyage à grande eau.
Une fois emballé, le produit doit être stocké jusqu'à l'expédition. Cette opération doit répondre à des exigences qui se traduisent dans la conception de la pièce de stockage. Le produit sec peut être stocké plus de six mois dans ce même endroit. Il convient de conserver cette pièce propre (protection de l'extérieur) et la moins sensible possible au variations climatiques saisonnières (pièce à l'abri du rayonnement solaire et de l'humidité, forte inertie thermique: murs épais, éventuellement isolés, non orientés au soleil si possible). Le projet de bâtiment, ou sa localisation dans un bâtiment déjà existant, devra tenir compte de ces contraintes.
PIÈCES ANNEXES ET RÈGLES GÉNÉRALES
En plus des pièces dites « techniques », l'aménagement du bâtiment peut comprendre, selon la taille de l'unité:
- un local pour le personnel;- un bureau pour la direction de l'unité.
Le premier permet aux ouvriers de se préparer aux activités de l'unité, le second est nécessaire pour une gestion ordonnée des activités de l'unité.
Parmi les commodités à prendre en compte dès la conception de l'unité, les éclairages, la ventilation et les arrivées de l'eau dans chaque pièce doivent être correctement dimensionnés et situés dans un souci de confort de travail et d'hygiène.
ENVIRONNEMENT DU BÂTIMENT
Dans notre exemple, une partie des activités se déroule à l'extérieur, comme le stockage amont, le tri amont ou le lavage de la matière première. Pour chacune de ces opérations, au même titre que celles à l'intérieur, leur emplacement devra être conçu en fonction de plusieurs niveaux de contraintes:
- dimensionnement de l'espace nécessaire;- protection minimum du milieu extérieur;
- respect de la répartition en trois zones.
Par exemple: l'aménagement de l'aire de stockage se fera avec le souci d'une bonne conservation du produit pendant l'entreposage avec si nécessaire la construction d'un hangar et de bacs pour une répartition selon le degré de maturité.
L'accès immédiat au bâtiment est aussi un élément à prendre en compte dans la gestion d'une unité.
Par exemple: chemin impraticable en saison des pluies, voie unique d'entrée/sortie sont des exemples de problèmes qui peuvent entraver la bonne marche de l'unité s'ils ne sont pas intégrés avant le démarrage de l'activité.
Enfin, et même si cela peut paraître évident, rappelons que les bâtiments doivent être éloignés de tous lieux de contamination microbienne (latrines, points d'eau stagnante, lieux de stockage des déchets...).
L'exécution de toutes ces recommandations peut paraître fastidieuse et surtout onéreuse lorsque l'on sait que le niveau d'aménagement d'une unité dépend généralement des moyens financiers mobilisables par le promoteur auprès d'une banque, sous forme de crédit. Mais, à l'échelle artisanale ou semi-industrielle, cette approche trouve sa justification pour deux raisons majeures:
- la durée de vie d'un bâtiment est suffisamment longue pour amortir l'investissement initial sur une longue période;- la charge financière d'amortissement des investissements périphériques du séchoir (bâtiment, outillage...) est souvent très faible par rapport aux charges variables annuelles d'exploitation. Les efforts consentis ne représentent qu'une faible part dans le résultat d'exploitation. Ne pas les consentir peut être une erreur de gestion. Ce sera le cas si, du fait de locaux trop petits ou d'outils inadaptés au rythme de production, la productivité du travail, la productivité du séchoir et la qualité du produit final s'en ressentent. Si les investissements périphériques d'une unité de séchage représentent 10 % des charges annuelles de l'exploitation, il suffit qu'une réduction de 50 % de l'investissement consenti sur ce poste entraîne un surcoût de plus de 5 % sur l'ensemble de l'activité pour que ce soit là un mauvais choix
Les facteurs susceptibles de contrarier les objectifs « qualité » et « rentabilité » d'une activité de séchage sont nombreux. Il peut s'agir de conditions climatiques, mais aussi de facteurs liés à la gestion des ressources humaines.
Pour faire face aux facteurs impondérables, le promoteur d'une activité de séchage doit pouvoir analyser le fonctionnement de cette activité. Dès le démarrage de son unité, des méthodes de suivi de: gestion propre à chaque phase de l'opération sont nécessaires.
LA PLANIFICATION DE L'APPROVISIONNEMENT EN MATIÈRE PREMIÈRE
Cette étape va conditionner systématiquement la suite des opérations. Un retard imprévu de l'arrivage en matière première et la plupart de l'activité est bloquée. Une mauvaise qualité de cette matière première se répercute directement sur la qualité du produit fini et sur la rentabilité de l'unité (baisse de la demande).
La difficulté à ce niveau réside dans la capacité à planifier l'approvisionnement. Au niveau domestique, le choix est souvent guidé par l'utilisation des surplus de production invendus, ou l'achat en petite quantité de produits frais au cours le plus bas. L'approvisionnement peut donc être relativement aléatoire.
À l'échelle artisanale ou industrielle par contre, il faut élaborer une véritable stratégie d'approvisionnement en matière première. L'objectif d'obtenir la matière première au prix le plus bas n'est pas suffisant, il faut plutôt raisonner en terme de coût global d'un approvisionnement en temps opportun en matière première, et intégrer cette donnée dans le calcul du prix de revient final. Cette approche permet d'intégrer le coût du transport et le surcoût des pertes en amont et de remarquer que cette étape peut représenter entre 15 et 20 % des charges dans une unité semi-industrielle. À ce stade, il faut pouvoir distinguer deux cas, pour un même niveau de production:
- un approvisionnement peu fréquent, mais en grosses quantités. Lorsque l'unité de séchage est éloignée des lieux de récolte, il est parfois nécessaire de faire venir la matière première par camion de tonnage conséquent plutôt que de procéder à de multiples voyages avec à chaque fois des quantités réduites transportées. L'économie sur les coûts de transport alors réalisée peut être importante. Cela présuppose cependant des capacités de stockage suffisantes en amont du séchage, un tri « amont » relativement sévère et une capacité de séchage de l'unité adéquate pour traiter la totalité du chargement reçu avant sa dégradation;- un approvisionnement plus fréquent. Il convient lorsque la matière première disponible est proche. La sélection n'en est que plus facile, mais le coût est souvent élevé: mobilisation d'un responsable en permanence pour des transports répétés.
Par ailleurs, l'éloignement n'est pas le seul facteur qui joue sur la qualité du produit. L'expérience a prouvé qu'il valait mieux un transport de 300 km sur une route goudronnée de bonne qualité avec un véhicule disposant de bons amortisseurs que 30 km sur un chemin chaoteux, provoquant une dégradation très rapide du produit frais malmené par le transport.
LE STOCKAGE/DÉSTOCKAGE DE LA MATIÉRE PREMIÉRE
Avec l'entassement des produits, le problème se pose souvent d'une maturation incontrôlée en cours de stockage, qui peut aller jusqu'au pourrissement.
La gestion quotidienne du stock de matière première est un facteur prépondérant dans la réussite d'une activité de séchage. Outre la sélection, chaque jour, des produits à préparer, le suivi quantitatif du stock à l'aide d'une simple fiche d'entrée/sortie permet la planification de l'approvisionnement. Après quelques temps, et l'expérience aidant, cela permet de calculer avec justesse les quantités nécessaires afin d'éviter les ruptures de stocks tout en limitant les pertes (surplus, déchets).
LA PRÉPARATION DU PRODUIT
À ce stade, il faut pouvoir suivre l'évolution du produit au cours de la préparation (taux de déchets) et l'organisation du travail (nombre d'ouvriers, temps de travail par opération unitaire).
LE CHARGEMENT DU SÉCHOIR
C'est l'occasion de peser les quantités de matière à sécher par claie ou par charriot, afin de respecter les charges nominales de produits qui conditionnent les performances du séchoir.
Que ce soit des claies, un tapis roulant ou des caissons (pour les plantes), la qualité du séchage va dépendre de la densité de chargement du produit dans le séchoir. En séchage par lots, une surcharge des claies (à titre indicatif: supérieure à 10 kg/m 2 pour les fruits et légumes) peut perturber le séchage (modification des vitesses d'air, saturation en humidité) jusqu'à provoquer l'apparition de moisissures.
Pour chaque produit, il est nécessaire de déterminer la densité optimale de chargement qui devra être respectée pour chaque cycle de séchage. Par exemple, dans le cas d'un séchage par claies, une pesée systématique du produit frais à déposer par claie devra être effectuée.
MAÎTRISE DU SÉCHAGE
Au stade artisanal ou semi-industriel, obtenir un produit fini conforme au cahier des charges (qualité, homogénéité, prix de revient) nécessite la maîtrise de tous les paramètres du séchage.
Cette maîtrise du séchage est fonction de l'outil de production mais aussi de la conduite par l'opérateur. La diversité des séchoirs présentés au chapitre précédent illustre la difficulté à établir des réglés générales. À chaque séchoir correspond un mode d'intervention. Selon le degré de technicité du séchoir, l'utilisateur pourra agir sur certains des paramètres physiques qui influencent le séchage: Température de séchage (Ts), Humidité Relative de l'air (HRs), Débit d'air (Da).
Dans le cas du séchage naturel voire du séchage solaire amélioré (direct ou indirect), la maîtrise du séchage reste très limité. Le flux et l'échauffement de l'air sont directement fonctions du rayonnement solaire, ce qui laisse peu de place à la régulation par l'utilisateur. Ce type de séchage est donc à réserver plutôt aux activités domestiques mettant en jeu de faibles quantités sans autres contraintes.
Au stade artisanal ou semi-industriel, l'utilisation d'un système de séchage aussi simple (et peu coûteux) que les précédents se justifie rarement face aux risques encourus sur le produit fini (problème de qualité et d'homogénéité, qui peuvent nuire à l'image de la société auprès de ses clients). Il sera rappelé au prochain chapitre que:
- le séchoir le moins cher n'est pas obligatoirement le plus rentable pour une entreprise;- le séchoir le plus rentable sur le plan strictement financier n'est pas obligatoirement le plus recommandé s'il ne permet pas une bonne qualité homogène du produit, et une production régulière (ou du moins en temps voulu par le client).
Au-delà de la conception du séchoir et des caractéristiques du produit, il est nécessaire d'acquérir l'expérience qui donne le savoir-faire. De nombreux facteurs influent sur le résultat final parmi lesquels:
LA TEMPÉRATURE DE CONSIGNE DE SÉCHAGE (TC)
Elle est établie pour chaque produit, en fonction de la phase de séchage et de la température maximale admissible par le produit (cf. chapitre V). Cette température ne doit pas être dépassée au risque de provoquer une dégradation de la qualité du produit (brûlures, brunissement, croûtage...).
C'est pourquoi un séchage de qualité ne peut se maîtriser qu'avec un contrôle assidu de la valeur de la température de séchage pendant le cycle de déshydratation.
Le type de thermomètre et sa position par rapport au flux d'air détermine la représentativité de la valeur mesurée. Pour cela, on emploiera plutôt des thermomètres - type sonde - (thermocouple ou à résistance au platine) et la prise de température se fera généralement, juste avant l'arrivée sur la première claie. Les protocoles et appareils de mesure seront exposés dans le détail en troisième partie.
LA PERMUTATION DES CLAIES
Au cours du séchage, l'air se charge en humidité au fur et à mesure qu'il traverse des produits. Il est donc logique qu'au cours d'un même cycle, les produits les « premiers servis » en air sec, c'est-à-dire les plus proches de l'arrivée d'air chaud, sèchent plus vite que les derniers. Dans les séchoirs de type « Batch » (séchage statique par opposition au système semi-continu ou continu), pour remédier à l'hétérogénéité de ce type de séchage, l'utilisateur est obligé de permuter régulièrement les claies.
En moyenne, sur un séchoir armoire, il faut une permutation de haut en bas, toutes les 3 à 4 h pour un cycle de 24 à 36 h. Le système de chicanes permet de travailler par étage (lot de 3 à 4 claies quasi homogènes), mais l'expérience a prouvé qu'il fallait tout de même numéroter les claies pour ne pas s'y perdre. Pour un séchoir tunnel à chariot utilisé en batch, la contrainte est moins lourde puisqu'il faut permuter les chariots seulement une fois en cours de séchage, vers la fin de la phase II.
LE TAUX DE SÉCHAGE
La valeur finale de la teneur en eau du produit est importante, car elle caractérise le degré de séchage (très sec, sec, humidité intermédiaire). Arrêter le séchage au moment voulu permet d'éviter le sur séchage qui dégrade le produit (durcissement) ainsi que le gaspillage d'énergie et de temps.
Il n'existe pas de système de mesure en continu de cette teneur en eau. En unité artisanale, une méthode expérimentale consiste à préparer et isoler quelques échantillons (3 minimum) calibrés (masses de produit connu). Disposés correctement dans le séchoir, ils serviront en fin de séchage de lots «témoin ». On pourra calculer la teneur en eau du produit à chaque pesée de ces échantillons (au moment des permutations par exemple).
En effet, connaissant la teneur en eau et le poids initiaux de l'échantillon, on en déduit la teneur finale (calcul exposé sur un exemple au chapitre IV, et rappelé au chapitre V sous forme mathématique). Lorsque les lots sont homogènes, les pesées précises et un carnet de relevé mis à jour, on obtient un résultat satisfaisant. (cf. chapitre X).
LE CONTRÔLE DE LA TEMPÉRATURE DE SORTIE ET LA RÉGULATION DU DÉBIT D'ENTRÉE
Au fur et à mesure de l'opération de séchage, l'air de sortie devient de moins en moins saturé en vapeur d'eau. Ceci abaisse le rendement énergétique. Il est alors possible d'opter pour un système à recyclage d'air où une partie de l'air humide de sortie est conservée afin d'utiliser au mieux l'énergie fournie à l'air pour le séchage. En effet, même si cet air est plus chargé d'eau que l'air extérieur (s'étant chargé de l'eau du produit), il peut disposer d'un meilleur pouvoir évaporatoire puisqu'il a, lui, été déjà réchauffé.
Sans un tel système il faudra veiller, lorsque c'est possible, à moduler le couple débit d'air/puissance de chauffe au fur et à mesure du séchage (en fonction du degré d'humidité du produit).
Dans un séchoir armoire à gaz, cette régulation manuelle permet une diminution de 20 % de la consommation de gaz pour atteindre en moyenne 2,5 kwh/kg d'eau extrait. Ces efforts ne permettent pas d'empêcher un rendement très mauvais, lorsqu'il faut enlever les derniers grammes d'eau, pour lesquels on met en jeu environ 10 kwh/kg d'eau!
TRI/CONDITIONNEMENT
Il est utile à ce stade de mesurer le taux de produits hors normes, qui ne peuvent être commercialisés selon le cahier des charges clients. Si ce taux reste important (soit à titre indicatif: 10 % par rapport à la sortie séchoir) après la phase d'expérimentation, il faudra rechercher la cause entre l'outil de séchage, la matière première et la conduite des activités.
S'il faut modifier le système, il est toujours utile de procéder à une évaluation économique sommaire des différentes options qui se présentent.
On peut avoir, par exemple, à choisir entre:
- acheter une matière première plus chère, mais de meilleure qualité ou plus apte au séchage;- consacrer davantage d'attention (donc de main-d'uvre) au tri en amont du séchage;
- investir dans une amélioration du séchoir;
- se contenter d'éliminer les produits hors normes lors d'un tri plus prononcé en aval du séchage;
- conserver le système et son mode de fonctionnement en l'état et accepter de vendre moins cher un produit final de moindre qualité;
- etc.
STOCKAGE AVAL
Le suivi des stocks de produits finis est prépondérante dans la gestion de l'activité. À ce stade, il est même recommande de faire un suivi dans le temps de la qualité des produits par lot (cycle de séchage...) de façon à déceler d'éventuels défauts et en rechercher les causes.
L'intérêt de l'évaluation économique
Afin de réaliser le choix définitif, après examen et dimensionnement du séchoir, il faut se donner des règles d'évaluation économique pour réaliser le meilleur choix. Cela permet d'une part de vérifier que le projet techniquement identifié répond bien aux exigences économiques que l'on s'est fixé, d'autre part de vérifier que ce projet est bien le plus intéressant parmi toutes les options de séchage qui satisfont aux critères techniques et aux objectifs de production.
Ces exigences seront différentes selon les objectifs poursuivis.
LE CAS DU SÉCHAGE POUR LA CONSERVATION SANS OBJECTIF DE VENTE MARQUÉ
S'il s'agit essentiellement d'assurer une meilleure conservation des aliments produits localement, sans objectif particulier de les vendre, il faudra veiller à ce que le projet final satisfasse bien, et mieux que d'autres, les attentes de l'utilisateur en termes de services rendus par le séchoir. On comparera en particulier les coûts de chaque option et leurs avantages respectifs.
Les coûts et avantages à considérer ne se limitent pas aux seuls aspects monétaires. C'est du reste ce qui distingue une analyse économique d'une analyse purement financière. Certains coûts peuvent être non monétaires, comme ce peut être le cas du travail pour le séchage, si cette activité ne rentre pas en concurrence avec une autre activité rémunérée. Dans le cas du séchage pour l'autoconsommation, la plupart des avantages envisageables seront non monétaires:
- amélioration de la durée de vie du produit alimentaire;- amélioration de sa qualité (par rapport à un séchage traditionnel par exemple);
- amélioration de ses caractéristiques hygiéniques;
- moindre temps consacré à cette activité qu'avec d'autres systèmes de séchage;
- esthétique et fonctionnalité particulières de tel ou tel séchoir.
Un critère d'ordre financier pourra être inclu à l'analyse, si l'utilisateur prévoit d'utiliser occasionnellement ce séchoir pour commercialiser de petites quantités de produit séché sur les marchés.
Dans un tel cas d'usage non commercial d'un séchoir, et sauf si le séchoir est fourni gracieusement par un donateur qui ne veut « payer » que pour des types bien définis (par lui) de services rendus par le séchoir, ce sera à l'utilisateur de se prononcer sur la façon de comparer les différentes options techniques envisageables au regard de critères multiples et souvent non quantifiables.
CAS DU SÉCHAGE POUR UNE PRODUCTION DE TYPE COMMERCIAL
Si l'objectif principal assigné au projet est la production d'aliments séchés pour un marché, les règles de la comparaison seront modifiées au profit de critères essentiels dans ce cas, tels que la rentabilité strictement financière de l'opération. L'évaluation économique devra néanmoins toujours inclure des critères qui ne sont qu'indirectement financés ou pas du tout.
· La régularité de l'approvisionnement et l'homogénéité de la qualité du produit élaboré sont des critères qui ne sont pas directement monétaires, mais peuvent le devenir bien vite... si du fait de manque de régularité dans la qualité ou dans la fourniture du produit au client, celui-ci réduit ses commandes. Un tel critère peut conduire à choisir finalement un séchoir qui, bien que moins rentable qu'un autre pour un même niveau de production, respecte mieux les contraintes imposées par la clientèle.· L'incertitude sur les performances du séchoir est aussi un critère important. Un tel critère peut conduire à l'abandon d'une option de construire un séchoir nouveau, adapté aux conditions spécifiques d'usage envisagé, et estimé plus performant que d'autres à cet égard, pour un séchoir peut-être moins performant, peut-être moins rentable, mais déjà éprouvé de longue date, et dont on cannaît avec plus de certitude le comportement dans la réalité.
· L'incertitude sur les paramètres du calcul de la rentabilité financière peut aussi influencer fortement le choix final. Il peut exister une forte incertitude sur le prix de la matière première (N'y a-t-il pas de risques de mauvaise récolte pour les années à venir, ou d'augmentation de la demande qui risqueraient de rendre plus difficile l'approvisionnement à des prix relativement bas à l'avenir?), ou sur le prix de vente du produit final (Est-on garanti de pouvoir écouler la production au prix que l'on a estimé? Quel est le rythme de développement de la concurrence?). La prise en considération d'un tel critère peut induire un choix a priori « sous-optimal » de séchoir: moindre niveau d'investissement pour limiter les risques, ou moindre niveau de production initiale, de façon à «voir venir ».
· L'adaptabilité du séchoir aux contraintes locales, de fabrication, d'utilisation, d'entretien, a été abordée lors de l'élaboration du cahier des charges, mais elle doit être reconsidérée plus en détail au moment du choix final du type de séchoir à implanter, lorsque les paramètres précis du choix technique sont disponibles.
· Lorsque la personne qui envisage de monter ou d'agrandir une unité de séchage a d'autres activité (par exemple la production agricole), elle devra par ailleurs évaluer si le surplus de travail sur le séchage posera un problème de concurrence entre les diverses activités qu'elle exerce. Cette concurrence s'exprimera, selon les circonstances, soit en termes d'incompatibilités dans l'emploi du temps, soit en termes de manque à gagner à se consacrer plus à une activité qui, pour les moments requis, rapporte moins qu'une autre. Dans tous les cas, cela peut induire des modifications dans le choix du projet.
UNE ÉVALUATION ÉCONOMIQUE APPROFONDIE NE PEUT SE FAIRE QU'EN CONNAISSANCE DES PARAMÈTRES ESTIMÉS EN AMONT DANS LA PROCÉDURE
Une évaluation économique doit toujours clore la conception d'un projet de séchage. C'est une règle d'or, même si pour les investissements les plus modestes et les problèmes les plus simples elle ne doit pas obligatoirement être très sophistiquée. Elle devra être menée pour s'assurer que le projet est:
- intéressant sur le plan économique (un exemple d'une telle évaluation est présenté dans la section suivante);- plus intéressant que d'autres projets envisageables sur le plan technique (un exemple de comparaison économique entre deux options est présenté dans la section suivante).
L'évaluation économique approfondie prend place en fin de processus. Ce n'est que lorque les paramètres du système de séchage sont identifiés (caractéristiques physiques, organisation de l'activité clans son ensemble...) que l'on peut véritablement estimer les paramètres qui doivent être pris en compte dans l'analyse économique (coût du séchoir, main-d'uvre, approvisionnement...), et donc faire cette analyse.
Cela dit, cela ne doit pas cantonner l'analyse économique à la fin du processus, pour au moins deux raisons.
La première est que les résultats de l'analyse économique peuvent conduire à réexaminer les objectifs et les choix techniques. Il se peut que l'analyse économique montre que les solutions envisagées ne sont pas si intéressantes qu'elles pouvaient le paraître. Il peut être alors nécessaire de revenir (presque) au point de départ du processus, en formulant autrement le projet. Ce nouveau projet passera à son tour par une phase de dimensionnement physique et de réflexion sur l'organisation de l'activité, et sera à nouveau « testé » par l'évaluation économique. C'est un processus itératif.
La deuxième raison, pour ne pas fixer de façon trop rigide la position de l'évaluation économique en fin de conception du projet, est qu'il est fortement recommandé d'en effectuer une première, sommaire, au début du processus (en même temps que l'élaboration du cahier des charges).
Cette évaluation économique sommaire, et son intérêt, sont précisés dans le paragraphe ci-dessous.
L'ÉVALUATION ÉCONOMIQUE SOMMAIRE EN DÉBUT DU PROCESSUS DE MONTAGE D'UN PROJET
Éviter de se lancer dans une étude technico-économique détaillée si quelques considérations simples permettent de conclure à un manque d'intérêt du projet
La définition complète d'un projet de séchage nécessite, on l'a vu tout au long de cette première partie, un effort important de réflexion pour répondre à de multiples questions:
- quel produit?- quel volume de production?
- selon quel échéancier?
- quel séchoir?
- quelle unité de séchage?
- quel mode d'organisation de l'activité?
- etc.
Cet effort de réflexion ne sera engagé que si l'on a a priori l'idée que le projet envisagé peut présenter un intérêt économique au sens large. Une évaluation économique simplifiée et sommaire peut aider à se faire une idée à ce sujet.
Un exemple d'évaluation économique sommaire peut être le suivant: un entrepreneur, qui n'est pas producteur lui-même, envisage d'implanter une unité de séchage dans une zone de production du produit envisagé.
Les paramètres dont il dispose avant une étude plus détaillée sont les suivants:
- la matière première s'achète entre 50 et 75 FCFA/kg (1);- il faut 10 à 15 kg de matière fraîche pour produire 1 kg de produit sec;
- le prix de vente du produit séché se situe entre 1 750 et 2 500 FCFA/kg.
(1)100 FCFA = 1 franc français = 0,2 dollar américain (août 1995).
Dans le cas le plus favorable qui se présente à lui, le produit est vendu à 2 500 FCFA/kg, la matière première achetée à 50 FCFA/kg, et le rendement du séchoir est de 10 kg de produit frais pour 1 kg de produit séché. La différence entre prix de vente et prix d'achat, rapportés au kilogramme de produit élaboré, est donc de: 2 500 - 10.50 = 2 000 FCFA/kg. Dans le cas le plus défavorable par contre, elle n'est que de: 1750 - 15.75 = 675 FCFA/kg
Ce que suggèrent ces données, c'est que si les coûts unitaires du séchage, hors l'achat de la matière première, reviennent à plus de 675 FCFA/kg, il existe un risque que l'opération ne soit pas rentable. L'évaluation économique sommaire en début de montage du projet permet ainsi, même si elle doit être remise en cause par la suite, de savoir à l'avance s'il est nécessaire d'engager une analyse technico-économique poussée. Dans le cas présent, et compte tenu des gammes de coûts du séchage, il est légitime de poursuivre l'analyse: de nombreux séchoirs offrent la possibilité de sécher à un coût unitaire moindre que cette limite, pour un volume de production suffisant, du moins.
Exemple d'évaluation économique préalable sur un cas concret Au Niger, l'oignon séché traditionnellement, le gabou, s'achète à 100 FCFA/kg. L'oignon obtenu par la technique du séchage solaire, de meilleure qualité, doit être vendu à 400 FCFA/kg pour que l'activité soit rentable. Après une mini-étude sur les marchés locaux, le « consommateur moyen » s'estime prêt à acheter l'oignon solaire, mais à 200 FCFA/kg seulement. Il y a donc en première analyse incompatibilité entre le prix de revient et le prix que l'acheteur est prêt à payer. Avant d'abandonner le projet, il faudra tout de même évaluer les
impacts d'une campagne de promotion du produit nouveau, et regarder s'il
n'existe pas une clientèle «aisée » qui acceptera de payer un prix
plus élevé pour bénéficier de la meilleure qualité du produit. Il faudra de plus
une filière adéquate pour accéder à cette clientèle (vente dans les magasins
d'alimentation par exemple, plutôt que vente dans la rue ou sur un marché de
quartier). |
Quelques estimations rapides permettent d'orienter dès le début l'analyse technico-économique vers les solutions les plus adaptées
Des évaluations économiques sommaires peuvent être réalisées pour apporter des éléments de réponse à d'autres questions que celle de savoir si le projet sera rentable. On peut par exemple s'interroger sur le degré de qualité du produit qu'il faut atteindre, qui déterminera partiellement le choix du séchoir. De façon à illustrer ce propos, reprenons le cas d'école précédent et supposons que deux techniques de séchage ont été identifiées, permettant de mieux préciser les coûts unitaires et les prix de vente probables:
- une première technique, relativement traditionnelle, permet d'obtenir un produit séché de qualité modeste au coût unitaire d'élaboration estimé, avant une analyse plus précise, entre 400 à 500 FCFA par kg de produit séché; le prix de vente d'un tel produit a été estimé entre 1 750 et 1 900 FCFA/kg;- une deuxième technique, plus élaborée, permet de toucher une clientèle plus exigente avec un produit de meilleur qualité, mais pour un coût unitaire d'élaboration plus élevé, évalué a priori entre 600 et 700 FCFA/kg Le prix de vente probable est par contre situé dans une fourchette plus élevée que précédemment: 2 400 à 2 500 FCFA/kg.
Pour un rendement de 1/13e et un prix de la matière première de 60 FCFA/kg (hypothèses moyennes compte tenu des fourchettes d'estimation), le bénéfice unitaire pour la première technique est dans le meilleur des cas de:
1 900 -13.60 - 400 = 720 FCFA/kg. Le bénéfice unitaire pour la deuxième option est dans le pire des cas de: 2400 - 13.60 - 700 = 920 FCFA/kg. Cette évaluation rapide permet à l'entrepreneur de savoir, malgré l'incertitude de départ sur les données exactes du problème, que c'est davantage vers un séchage de bonne qualité qu'il devra s'orienter, et donc diriger les analyses technico-économiques dans ce sens.
Cf. l'encadré de la page suivante.
Premières « analyses de sensibilité »
Dans les premières étapes d'une analyse de projet, les incertitudes sont encore grandes. Certaines pourront être levées au cours de l'étude, d'autres non. Par exemple, l'incertitude climatique ne peut pas être contrôlée. Des analyses rapides de sensibilité visent à fournir des ordres de grandeur de l'effet des incertitudes de telle ou telle variable sur les résultats économiques du projet. Elles peuvent de ce fait être très utiles dès le début de l'étude, pour permettre de mieux identifier les paramètres les plus importants pour la réussite économique du projet.
Exemple d'un tel type d'évaluation économique sommaire sur un cas concret: Dans la zone Ouest-sahélienne, les mangues arrivent à maturité d'avril à septembre. La saison des pluies débute à la mi-juillet et le séchage solaire devient alors difficile. Il n'est donc possible que d'avril à mi-juillet, ce qui laisse peu de temps pour assurer le volume de production nécessaire pour rentabiliser l'investissement, d'au moins 30 000 FCFA pour le seul séchoir. Cette évaluation économique sommaire permet d'orienter les études technico-économiques: - soit vers un séchoir plus cher, mais polyvalent, qui permettra de sécher d'autres produits le reste de l'année (bananes, ananas, légumes...); Le choix final dépendra de nombreux autres facteurs, en
particulier le volume de la production envisagée, dont dépendra en partie la
possibilité de recourir à un investissement important. Sur le projet AFDI-AJAC
au Sénégal par exemple, c'est vers la première solution que l'on s'est orienté.
Dans le cas d'un projet à Orodara au Burkina Faso, qui sera décrit par la suite,
c'est vers la deuxième. |
Ce propos est illustré ici en reprenant l'exemple précédent. On se place dans une hypothèse médiane: tous les paramètres du problème sont supposés se situer au milieu de leurs positions extrêmes, a l'exception du paramètre sur lequel porte l'analyse de sensibilité. Considérons le problème de la sensibilité du bénéfice unitaire du séchage à une fluctuation de prix de la matière première. Pour cela, on se place dans l'hypothèse où:
- le rendement du séchage s'établit à 12,5 kg de matière fraîche pour 1 kg de produit sec (moyenne des extrêmes estimés: rapports de 1 à 10 et de 1 à 15);- le prix de vente du produit est de 2 450 FCFA/kg (hypothèse moyenne entre 2 400 et 2 500 FCFA/kg si on considère que l'entrepreneur a déjà fait le choix d'une option technique visant à une bonne qualité du produit final, tel que motivé par les résultats présentés ci-dessus);
- le coût unitaire de l'élaboration du produit final est de 650 FCFA/kg (moyenne sur la fourchette de coûts estimés pour la deuxième option technique de séchage: 600 et 700 FCFA par kg de produit élaboré).
L'analyse sommaire de la sensibilité de l'activité aux fluctuations du prix des matières premières est dès lors simple.
Le bénéfice par kilogramme de produit séché est de 2 450 - 12,5.50 - 650 = 1 175 FCFA/kg si le prix de la matière première est à 50 FCFA/kg.
Il est de 2 450 - 12,5.75 - 650 = 862,5 FCFA/kg.
La différence de bénéfice reste acceptable. Cela suggère que le projet en cours de conception a des chances de résister à des fluctuations des prix de la matière première, du moins dans la fourchette estimée. L'exemple présenté plus loin pour une comparaison économique de projets, et tiré d'un cas concret, montre qu'un projet peut être parfois beaucoup plus sensible à de telles fluctuations.
L'AFFINEMENT DES ESTIMATIONS À MESURE QUE PROGRESSE L'ANALYSE
En début d'analyse, les estimations sont naturellement imprécises. Les conclusions qui pourront en être dégagées n'auront d'intérêt que si elles sont vraiment pertinentes:
- une activité ne pourra être véritablement considérée comme a priori rentable que si elle l'est dans le pire des cas envisageables;- un choix de séchoir ne pourra être véritablement considéré comme a priori meilleur que d'autres que si c'est le cas dans la situation la plus défavorable pour lui, relativement aux autres.
Ces incertitudes ne seront probablement plus du même ordre de grandeur à un stade plus avancé de la réflexion sur le projet.
· On aura alors mieux évalué le prix d'achat de la matière première:- après une analyse plus approfondie des prix de cette matière première aux différentes périodes de l'année;- après une analyse comparative des opportunités de s'approvisionner à partir de productions locales ou de faire transporter le produit frais depuis d'autres zones (supposées moins chères), ou de modifier la localisation de l'unité pour se rapprocher de ces dernières zones;
- après avoir éventuellement analysé l'opportunité de passer des contrats d'approvisionnement avec les producteurs locaux (par exemple: achat garanti à 60 FCFA/kg sur toute 1 année, mais avec obligation pour le fournisseur de délivrer la matière première même aux périodes où les commerçants lui proposent un prix plus élevé).
· On aura mieux évalué le rendement de séchage lorsque l'on disposera d'une idée plus précise du type de séchoir à envisager.
· On aura mieux évalué le prix de vente du produit final, après:
- une étude de marché plus approfondie permettant d'évaluer le prix que le consommateur serait prêt à payer pour l'acquérir;- une analyse du coût de l'« accès » à cette clientèle (transport du produit fini, éventuelle campagne de promotion, qui prend en charge et à quel coût la commercialisation?...);
- une analyse comparative de l'intérêt qu'il y a à produire un produit de haute qualité (donc à prix de vente potentiellement élevé) ou de qualité plus modeste, sachant que les coûts unitaires de l'élaboration seront plus élevés dans le premier cas.
LES PRINCIPAUX PARAMÉTRES DE L'ÉVALUATION
Les différentes étapes préalables à une évaluation économique détaillée ont permis de définir les nombreux paramètres qui lui sont nécessaires. L'évaluation est résumée ici à l'analyse de la rentabilité financière par commodité pour le lecteur.
Au terme de l'élaboration du cahier des charges, d'un dimensionnement technique du séchoir et d'une analyse des investissements et activités en amont et en aval du séchage à réaliser, on dispose, en théorie, des données listées ci-dessous.
Pour le séchoir choisi
- sa consommation énergétique par kg de produit séché;- son coût initial;
- les frais d'entretien par kg de produit séché;
- le temps de l'amortissement souhaité de cet investissement (généralement 5 à 10 ans pour des investissements lourds, 3 à 6 mois pour de petits équipements), et les charges du crédit.
Pour le produit
- le prix d'achat du kilogramme de produit frais;- le rendement du séchage, en termes de kilogrammes de produit frais nécessaires pour produire un kilogramme de produit sec (en tenant compte du tri, des pertes, de la préparation, de la perte de poids due à l'évaporation de l'eau...);
- le prix de vente du kilogramme de produit séché;
- les divers coûts annexes (intrants, emballages) rapportés au kg de produit séché.
Les équipements annexes
Le coût est généralement constitué ici par l'amortissement et les charges du crédit du bâtiment et de ses infrastructures. Il est aussi composé de l'amortissement de l'ensemble de l'outillage qui dure plus longtemps qu'une année, et le cas échéant du coût des informations (expertise technique, enquêtes de marchés...). Les coûts sur ce poste seront ventilés entre les « frais annexes » pour le petit matériel et l'amortissement des équipements lourds.
La masse salariale
Il s'agira de définir le coût de chaque poste rapporté au kg de produit séché. On pourra noter un surcoût lié à un séchoir nécessitant plus de manipulation ou une spécialisation de la main d'uvre.
Les frais annexes
- frais de gestion courante (hors remboursement du crédit, déjà comptabilisé plus haut);- frais de commercialisation;
- impôts, taxes diverses.
LES PRINCIPAUX INDICATEURS FINANCIERS UTILISÉS
Les outils financiers les plus élaborés, tels le bénéfice actualisé ou le taux de rentabilité interne ne sont pas présentés ici: l'usage de tels instruments de mesure des performances économiques ne se justifie, et ne s'impose, que pour des unités de séchage de taille conséquente. Dans ce cas, de bonnes compétences en gestion seront de toutes façons requises.
Les indicateurs présentés sont les outils simplifiés les plus courants à l'échelle artisanale ou semi-industrielle.
Le bénéfice, qu'il soit rapporté à l'activité annuelle ou rapporté au kilogramme de produit séché, s'écrit comme la différence des recettes et des coûts annuels, rapportés ou non à ce kilogramme de produit final:
Bénéfice = Recettes - Coûts, soit:
Bénéfice = Recettes - (Coût annexe + Coût énergie + Coût amortissement + Coût crédit + Coût salaires + Coût matières premières et intrants )
Le coût d'un investissement, rapporté à l'année, comprend le coût de l'amortissement et le coût du crédit.
Le coût d'amortissement se calcule, de façon simplifiée, en divisant l'investissement initial par le nombre d'années de vie de l'équipement concerné (le bâtiment, le séchoir...). Il mesure la somme qu'il faut « mettre de côté »chaque année pour assurer un renouvellement de l'équipement au terme de sa vie, ou la somme qu'il faut débourser chaque année pour rembourser le principal du capital emprunté.
Les équipements n'ayant pas tous la même durée de vie, il faut faire les calculs pour chaque gamme d'investissement (investissements à 3 ans, à 5 ans, à 10 ans...). Le coût total de l'amortissement est la somme des coûts d'amortissement de chaque équipement spécifique.
Le coût du crédit est soit un coût réel, un coût d'opportunité. Si l'entrepreneur a fait un emprunt pour monter son unité de séchage, c'est un coût réel, le versement des annuités au taux d'intérêt fixé. Si l'entrepreneur a utilisé des fonds propres, il lui faudra évaluer, le cas échéant, ce que cet argent lui aurait rapporté s'il avait été utilisé d'une autre façon (placement financier par exemple). Il arrive que ce coût du crédit soit porté directement dans les « frais annexes ». Dans le cas d'une évaluation économique visant à comparer des projets, il est préférable de la considérer séparément, de façon à bien faire ressortir ce qui constitue les coûts de l'investissement lui-même.
Il faut enfin préciser qu'une partie des coûts annexes dépendent du bénéfice lui-même (impôt sur le bénéfice par exemple). Selon les cas à traiter, deux bénéfices peuvent être calculés pour des usages et significations différents: un bénéfice avant imputation des taxes et impôts, et un bénéfice après.
Le prix de revient est le coût de production du kilogramme de produit sec. Il ne permet pas de déterminer le prix de vente de ce produit, qui dépend en premier lieu des décisions des consommateurs. Il permet par contre de connaître le prix de vente minimal en dessous duquel le produit sera vendu à perte.
Le temps de retour d'un investissement est, en première approximation, le nombre d'années nécessaires à un remboursement intégral de l'investissement. Soit, de façon simplifiée:
Temps de retour = Total investissement / (Bénéfice annuel net total + Coût d'amortissement annuel total)
Le calcul du temps de retour est surtout utile lorsque l'on n'envisage pas d'amortir l'investissement sur toute sa durée de vie. Compte tenu des coûts élevés de l'emprunt dans certains pays en développement, il peut en effet être préférable de faire un emprunt au plus court terme possible. Le temps de retour fournit alors une indication sur la durée minimale de l'emprunt à contracter. Cette dernière devra cependant être plus grande:
- pour se prémunir des risques de non-paiement dans les temps, si la rentabilité de l'activité n'a pas été in fine celle escomptée;- pour disposer de marges de trésorerie suffisantes;
- pour dégager un revenu monétaire dès le début de l'activité (pour une durée de crédit égale au temps de retour, tout le bénéfice sera consacré au remboursement du crédit dans les premiers temps).
EXEMPLES D'ÉVALUATION ÉCONOMIQUE SUR DES CAS CONCRETS
Les deux exemples fournis dans ce paragraphe illustrent le calcul du bénéfice d'un projet de séchage, et son usage. Ils sont tous deux extraits de cas concrets d'entreprises au Burkina Faso. Dans le premier cas, l'évaluation a pour but de vérifier l'intérêt économique d'une amélioration précise des conditions de production, et ne comporte donc pas de « variantes techniques ». Dans le deuxième cas, l'objectif est non seulement de vérifier la rentabilité financière, mais aussi de déterminer laquelle de deux options techniquement envisageables est la plus pertinente sur le plan financier.
Le budget prévisionnel de l'entreprise artisanale de Koalba au Burkina Faso
L'unité de Koalba est une entreprise familiale qui s'est engagée dans l'activité de séchage des mangues en 1993 avec l'appui du CEAS (2). Koalba a exporté un peu moins d'une tonne en 1993 et 2,8 tonnes en 1994. Cette expérience encourageante pousse aujourd'hui Koalba à envisager une amélioration de son unité. En effet, des problèmes se posent au niveau de l'hygiène des locaux de préparation et de l'insuffisance des équipements. Après avoir trouvé des solutions techniques, l'entreprise dresse un budget prévisionnel pour vérifier la validité du projet. Le plan de production prévoit une augmentation de 10 à 12 tonnes à partir de la troisième année ce qui explique l'accroissement des recettes mais aussi des charges proportionnelles (cf. le tableau de la page ci-contre).
(2)Ci adresse en annexe.
L'unité de Koalba vend en Europe les mangues de premier choix à un prix de 4 000 FCFA/kg Le deuxième choix est commercialisé localement à un prix de 2 000 FCFA. L'emballage est différent suivant la destination du produit. À l'exportation les sachets ont une plus grande c contenance et sont de meilleure qualité que ceux destinés au marché local. ]Leur coût est donc plus élevé (70 FCFA contre 40 FCFA), mais cela est largement compensé par la différence de prix de vente.
Koalba adhère au Cercle des sécheurs. Cette structure regroupe l'ensemble des unités de séchage et assure l'approvisionnement et la commercialisation des produits. Le coût de l'adhésion s'élève à 240 FCFA/kg de produit séché.
En milliers de FCFA |
Année I |
Année II |
Année III |
Recettes |
38 880 |
38 880 |
46 656 |
Exportation |
34 560 |
34 560 |
41 472 |
Vente intérieure |
4 320 |
4 320 |
5 184 |
Charges |
31011 |
30 862 |
35 542 |
Mangues |
8 100 |
8 100 |
9 720 |
Emballage exporté |
2 764 |
2 764 |
3 317 |
Emballage vente int. |
540 |
540 |
648 |
Soufre |
324 |
324 |
388 |
Gaz |
2 268 |
2 268 |
2 721 |
Main d'uvre |
2 330 |
2 330 |
2 330 |
Divers et imprévu |
1 080 |
1 080 |
1 296 |
Entretien |
432 |
432 |
518 |
Frais CDS |
2 592 |
2 592 |
3 1 10 |
Transport en Europe |
8 640 |
8 640 |
10 368 |
Amortissement crédit |
1 493 |
1 493 |
1 493 |
Frais financiers |
447 |
298 |
149 |
Bénéfice |
7 868 |
8 017 |
11 113 |
Enfin, le crédit contracté pour l'achat des séchoirs, du matériel et l'aménagement du bâtiment d'un montant de 4 479 000 FCFA sera remboursé sur trois ans avec un taux de 10 %. Les annuités comprennent le remboursement du capital constant sur les trois ans (1 493 000 FCFA) et les intérêts dégressifs que l'on retrouve dans le compte frais financier du budget prévisionnel.
(D'après Charles Yvan Tougouma, coordinateur du Cercle des sécheurs, Burkina Faso).
Le cas d'une comparaison de deux options techniques pour deux rythmes de production envisagés
Le deuxième exemple est extrait d'une étude comparative entre deux séchoirs gaz pour établir un comparatif économique entre les différentes versions. Les coûts sont actualisés à l'année 1995.
Ces séchoirs sont le séchoir gaz CEAS et le séchoir tunnel type Cartier. L'entreprise concernée est située à Orodara, toujours au Burkina Faso.
Hypothèses de base
On se place dans le cadre de la production de mangue séchée à Orodara (Burkina Faso) et destinée au marché national. Nous allons réaliser une simulation économique à partir de deux hypothèses de production: 5 et 10 tonnes/an de mangue séchée.
Hypothèses technico-économiques concernant les deux séchoirs
· Hypothèses communes aux deux séchoirs:- le rendement de séchage de la mangue est de l'ordre de 15: il faut approximativement 15 kg de matière première à maturité pour obtenir 1 kg de mangue séchée;- la matière première est achetée 15 FCFA/kg;
- la mangue séchée est revendue à 2 500 FCFA/kg;
- les deux types de séchoir fonctionnent par cycles de 18 heures, 20 jours par mois pendant 6 mois (période de maturité de la mangue locale);
- on suppose qu'ils produisent le même taux de déchets (13 % de la production);
- on suppose également qu'ils nécessitent le même nombre d'employés:
8 ouvriers + 2 cadres dans le cas de l'option 5 T/an,12 ouvriers + 2 cadres pour l'option 10 T/an.
· Hypothèses spécifiques au séchoir gaz CEAS:
- consommation de gaz: 0,6 kg de gaz/kg de mangue séchée/cellule de séchage;- capacité de production: environ 9 kg de mangue séchée/cycle de séchage/cellule;
- coût d'une cellule équipée: 400 000 FCFA;
- option 5 T/an: 5 cellules nécessaires soit un coût de 2 000 000 FCFA;
- option 10 T/an: 10 cellules nécessaires soit un coût de 4 000 000 FCFA;
- durée d'amortissement: 5 ans.
· Hypothèses spécifiques au séchoir tunnel type Cartier:
- consommation de gaz: 0,45 kg de gaz/kg de mangue séchée/cellule de séchage;- capacité variable de production de la même cellule: jusqu'à 90 kg de mangue séchée/cycle de séchage/cellule;
- coût d'une cellule équipée: 6 500 000 FCFA;
- durée d'amortissement: 10 ans.
Évaluation économique des deux séchoirs
Les résultats de cette simulation sont présentés de façon simplifiée dans les tableaux suivants. Nous retiendrons deux paramètres essentiels:
- le temps de retour de l'investissement;- le bénéfice prévisionnel cumulé après dix ans d'exploitation.
· Option 5 T/an:
Charges:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier | ||
|
Quantité |
Charges annuelles d'exploitation (FCFA) |
Quantité |
Charges annuelles d'exploitation (FCFA) |
Intrants, dont: |
|
2 518 750 |
|
2 518 750 |
Matière première |
86 250 kg |
1 293 750 |
86 250 kg |
1 293 750 |
Utilités, dont: |
|
1 070 000 |
|
1 005 000 |
Gaz |
3 450 kg |
1 035 000 |
2 588 kg |
776 250 |
Electricité du ventilateur |
0 kWh |
0 |
1 944 kWh |
194 400 |
Personnel |
10 p/mois |
1 185000 |
10 p/mois |
1 185000 |
|
* 6 mois |
|
* 6 mois |
|
Frais généraux |
|
720 000 | |
720 000 |
Total charges |
|
5 493 750 |
|
5 428 750 |
Investissements:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier | ||||
|
Quantité |
Coût total (FCFA) |
Temps d'amortissement |
Quantité |
Coût total(FCFA) |
Temps d'amortissement |
Bâtiment de séchage |
80 m 2 |
450 000 |
10 ans |
80 m 2 |
450 000 |
10 ans |
Séchoir |
5 |
2 000 000 |
5 ans |
1 |
6 500 000 |
10 ans |
Équipements annexes, petit matériel et instrumentation |
|
1 186 000 |
2 à 5 ans selon le matériel | |
1 186 000 |
2 à 5 ans selon le matériel |
Total des investissements (FCFA) | |
9 636 000 |
| |
12 136 000 |
|
Bilan:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier |
Temps de retour de l'investissement |
3 ans |
4 ans |
Bénéfice cumulé après dix ans d'exploitation |
12 316 000 FCFA |
10 891 000 FCFA |
· Option 10 T/an:
Charges:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier | ||
|
Quantité |
Charges annuelles (FCFA) |
Quantité |
Charges annuelles (FCFA) |
Intrants dont: |
|
5 037 500 |
|
5 037 500 |
Matière première |
172 500 kg |
2 587 500 |
172 500 kg |
2 587 500 |
Utilités dont: |
|
2 105 000 |
|
1 781 000 |
Gaz |
6 900 kg |
2 070 000 |
5 176 kg |
1 552 000 |
Électricité du ventilateur |
0 kWh |
0 |
1 944 kWh |
194 400 |
Personnel |
15 p/mois |
1 665 000 |
15 p/mois |
1 665 000 |
|
* 6 mois |
|
* 6 mois |
|
Frais généraux |
|
720 000 | |
720 000 |
Total charges |
|
9 527 500 |
|
9 203 500 |
Investissements:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier | ||||
|
Quantité |
Coût total (FCFA) |
Temps d'amortissement |
Quantité |
Coût total (FCFA) |
Temps d'amortissement |
Bâtiment de séchage |
50 m 2 |
450 000 |
10 ans |
80 m 2 |
4 450 000 |
10 ans |
Séchoir |
5 |
4 000 000 |
5 ans |
1 |
6 500 000 |
10 ans |
Équipements annexes petit matériel et instrumentation |
|
1 186 000 |
2 à 5 ans selon le matériel | |
1 186 000 |
2 à 5 ans selon le matériel |
Total des investissements (FCFA) | |
9 636 000 |
| |
12 136 000 |
|
Bilan:
|
Séchoir gaz CEAS |
Séchoir tunnel type Cartier |
Temps de retour de l'investissement |
2 ans |
2 ans |
Bénéfice cumulé après dix ans d'exploitation |
40 790 000 FCFA |
44 446 000 FCFA |
Commentaires
· Les charges:
Pour chacune des options de production - 5 T ou 10 T -, les charges en intrants, personnel et frais généraux sont les mêmes pour les deux séchoirs. Les différences entre les deux séchoirs pour le total des charges s'expliquent donc par le poste énergie. Toutefois, malgré une consommation spécifique de gaz plus faible pour le séchoir tunnel, l'écart dans le, coût des charges énergétiques est réduit par le coût élevé du kWh électrique nécessaire pour le fonctionnement de son ventilateur.
· Les investissements:
De même, du fait des hypothèses précédemment formulées, les différences entre les deux séchoirs concernant le montant des investissements s'expliquent uniquement par le type de séchoir choisi. Le séchoir tunnel n'est en effet pas modulable comme le séchoir CEAS.
On s'aperçoit alors que l'option de production 5 T/an est particulièrement défavorable au séchoir tunnel: le coût du séchoir tunnel, dimensionné pour une production de 10 T/an, devient trop important lorsque rapporté à une production de seulement 5 T/an. En revanche, dans le cas, de l'option de production 10 T/an, l'écart de rentabilité entre les deux types de séchoirs devient insignifiant.
On retiendra que plus un séchoir est utilisé au maximum de sa capacité, plus il devient intéressant en termes économiques.
· Synthèse:
Pour les deux types de séchoir, on s'aperçoit qu'une production seulement deux fois plus élevée permet de diminuer le temps de retour des investissements, et peut permettre d'obtenir un bénéfice cumulé quatre fois plus important après dix ans d'exploitation.
· Une option de production 5 T/an destinée au marché local est désavantageuse pour le séchoir tunnel: celui-ci est surdimensionné, nécessite un investissement beaucoup plus élevé pour obtenir un bénéfice cumulé après dix ans d'exploitation un peu plus faible que le séchoir gaz CEAS.Dans le cas de l'option de production 5 T/an, le choix se porterait sur le séchoir gaz CEAS.
· L'option 10 T/an devient par contre favorable au séchoir tunnel: même temps de rentabilisation de l'investissement, bénéfice cumulé après dix ans d'exploitation un peu plus élevée.
Dans le cas de l'option 10 T/an, le choix peut se porter sur l'un ou l'autre des séchoirs.
· Dans un contexte différent - exemple: prise en compte de la qualité du produit pour la détermination du prix de vente, prix du gaz plus élevé, production à l'export -, le choix pourrait se porter sur le séchoir tunnel, même dans le cas d'une hypothèse de production de 5 T/an. Le même type de raisonnement peut être tenu entre les séchoirs solaires et les séchoirs gaz.
Il n'existe pas de séchoirs sur lequel le choix puisse s'effectuer de manière systématique.
Conclusion
Le choix d'un séchoir ne peut être fait a priori uniquement sur la base des performances énergétiques et sur le coût d'investissement. Il faut également tenir compte des paramètres clés déterminant ce choix: contexte géoclimatique et socio-économique du pays et perspectives d'évolution de ces paramètres.
Enfin, il est absolument nécessaire d'utiliser un séchoir au maximum de ses capacités et, chaque fois que cela est possible, de maximiser la production.
Remarques complémentaires sur ce cas d'évaluation
· Dans cet exemple, le bâtiment est le même pour les deux régimes de production simulés (5 et 10 tonnes par an). On part ici du principe que, quel que soit le choix de rythme de production, l'entrepreneur restera dans ses locaux. Un local de 80 m 2 peut cependant ne pas être très bien adapté à une production de 10 tonnes par an (une surface de 180 m 2 est conseillée). Il peut donc être utile pour l'entrepreneur de poursuivre la simulation en estimant les pertes de productivité de l'unité qui résulteront de locaux trop exigus. Si les pertes estimées apparaissent plus élevées que le surcoût d'un amortissement de locaux plus grands, il peut être intéressant pour lui d'envisager un déménagement pour réaliser dans de bonnes conditions matérielles et économiques une production de 10 tonnes par an de produit sec.· Le calcul de la rentabilité dépend de l'estimation que l'on se fait de la durée de vie des équipements lourds. Elle doit donc être estimée avec le maximum de précision. Il faut aussi toujours s'assurer que la comparaison de deux options n'ayant pas la même durée de vie n'est pas trop fortement biaisée en utilisant des instruments financiers simplifiés. En toute rigueur, seul un bénéfice actualisé (non présenté ici) permet de comparer correctement des projets de durée de vie différente.
· Le prix de la matière première n'est parfois pas un paramètre déterminant de la rentabilité d'un projet. Dans le cas présent, ce n'est pas le cas. Une analyse de sensibilité montre en particulier qu'il suffit que le prix de la mangue fraîche passe de 15 à 30 FCFA/kg pour que le projet cesse d'être rentable, pour les deux options techniques et les deux rythmes de production. L'entrepreneur à Orodara dispose d'une situation avantageuse, car il se situe dans une zone où la mangue est abondante, et éloignée des marchés, de sorte qu'il peut s'approvisionner à très bon marché en mangues fraîches. Mais il faut garder en mémoire que le prix au producteur de la mangue fraîche peut aller jusqu'à 200 FCFA/kg dans certaines zones (pour un prix de vente sur le marché de l'ordre de 400 FCFA/kg De tels écarts suggèrent que l'entreprise n'est peut-être pas bien protégée des fluctuations du prix de la matière première, et qu'il lui faudra peut-être à l'avenir se reconvertir dans le séchage d'autres produits.
LE CAS PARTICULIER DU SÉCHEUR-AGRICULTEUR
Les performances économiques d'une unité de séchage peuvent, on vient de le voir, être très sensibles au coût de l'approvisionnement de la matière première. Dans le cas d'une personne réalisant des activités de séchage à but commercial, mais étant par ailleurs producteur du produit frais envisagé, la question se pose de savoir quel est ce coût. Doit-on le considérer comme nul, appliquer le prix au producteur moyen sur la zone...? Cela dépendra fortement des circonstances.
· Si cette personne dispose d'une production propre suffisante pour approvisionner le séchoir, plusieurs cas se présentent:- s'il peut vendre la totalité de ses surplus en frais, il devra porter leur prix de vente comme coût de la matière première pour le séchage (c'est un « coût d'opportunité »);- s'il dispose de surplus qu'il ne peut pas vendre en frais, par exemple parce qu'il est trop éloigné des marchés ou que la route est impraticable en cette période, et si ce surplus n'a pas été produit intentionnellement (il est lié aux aléas climatiques, mais le producteur n'a pas cherché au départ à disposer d'un surplus), il pourra considérer dans son évaluation économique que le coût de la matière première est nul, aux coûts de récolte près;
- s'il dispose de surplus qu'il ne peut pas vendre en frais et qu'il a intentionnellement cultivés pour l'approvisionnement de son séchoir, il devra retenir le coût de production agricole de ces surplus comme coût de l'approvisionnement en matière première. Ce coût n'est pas obligatoirement monétaire, si par exemple le surplus de travail que cela occasionne ne représente pas une perte monétaire du fait d'une concurrence avec d'autres activités économiques. Mais cela représentera quand même un coût (le travail supplémentaire, au moins).
· Si cette personne ne produit pas, et n'a pas l'intention de produire à l'avenir lui-même la totalité de la matière première dont il a besoin pour le séchage, il devra considérer comme coût de l'approvisionnement complémentaire le prix consenti par les autres producteurs de la zone, ou le prix additionné des coûts de transport de produits frais qu'il fait acheminer depuis d'autres zones. Le coût de la part de l'approvisionnement qu'il assure lui-même est défini par les règles précédentes.
Remarque:
Les surplus occasionnels « non intentionnels » dont peut bénéficier un producteur agricole-sécheur ne représentent d'ordinaire qu'un faible volume: de 10 % à 30 % de sa production pour l'autoconsommation. Ils pourront être beaucoup plus élevés lors d'années particulièrement favorables sur le plan climatique, et nuls les mauvaises années.
Ce surplus moyen (10 à 30 %) provient de ce qu'un producteur qui ne veut assurer que son autoconsommation cultive cependant généralement un peu plus que ce dont il a besoin pour l'alimentation de sa famille, de façon à se prémunir des fluctuations de rendements et pertes agricoles, associées notamment aux aléas climatiques. Ce comportement face au risque est, en règle générale, d'autant plus marqué que les aléas sont importants et que l'agriculteur dispose de faibles réserves financières. Une part importante des pertes après récolte s'explique ainsi: le producteur ne peut évaluer qu'à l'étape ultime de sa production agricole si l'année a été bonne ou non. S'il n'envisage aucun usage pour les surplus d'une année, et que personne ne s'en porte acquéreur, il ne les récoltera probablement même pas.
Pour les unités de séchage de taille conséquente (plus de 10 tonnes par an de produit séché, à titre indicatif), il faudra toujours se poser la question de savoir où implanter l'activité. Les coûts et la possibilité du transport sont en effet des données qui influent parfois très fortement sur la rentabilité économique de l'activité.
Cette question de la localisation reçoit ici une place relativement importante pour cette raison, mais aussi pour une autre: le séchage n'est pas seulement un moyen de conserver plus longtemps un produit alimentaire. C'est aussi, sous certaines conditions exposées par la suite, un moyen d'obtenir un produit commercialisable dont les caractéristiques rendent son prix de vente peu sensible à l'éloignement des marchés. Le séchage peut alors constituer une source de revenus monétaires dans des zones où la commercialisation de produits frais est quasiment impossible, du fait des coûts de transport et des risques de dégradation lors du trajet qui pèsent sur ces derniers.
La promotion de ce type de projets peut ainsi constituer un volet important du développement économique des régions les plus marginales, parce que les plus éloignées des centres de l'activité économique.
LES PARAMÈTRES DU PROBLÈME
Le choix de localisation va déterminer les besoins de transport, à l'amont de la chaîne première), et à l'aval (produit élaboré).
Doit-on se localiser plutôt à proximité des zones de production du produit frais ou à proximité du marché? Et dans le premier cas, dans une zone de production conséquente où l'approvisionnement est garanti, ou une zone de moindre importance, mais où les prix du produit frais sont moins élevés?
Plusieurs aspects sont à analyser conjointement.
Le coût économique de l'acheminement des matières premières depuis des zones éloignées de l'unité de séchage
Le premier élément à considérer est le tarif du transport. Le tarif à la tonne-kilomètre (tonne de produit transportée, rapportée au kilomètre roulé) évolue en Afrique de l'Ouest de 30 FCFA/tonne-kilomètre pour une route goudronnée bien entretenue à 150 FCFA/tonne-kilomètre pour une piste de mauvaise qualité (en ordres de grandeur, pour un produit moyen et en francs CFA d'avant la dévaluation). Pour des pistes rurales de bonne tenue ou des routes goudronnées mal entretenues, l'ordre de grandeur est de 60 FCFA/tonne-kilomètre. Pour des produits tels que les fruits et légumes, ces ordres de grandeur doivent être augmentés de 30 % à 50 % (conditionnement et remplissage dans le camion plus difficiles). Cela signifie que transporter un kilogramme de tomates sur 300 kilomètres par une route de qualité moyenne revient approximativement à 25 FCFA. À titre de comparaison, on se rappellera que dans le cas précédent, une augmentation de 15 FCFA par kilogramme de mangues fraîches pouvait réduire à néant la marge bénéficiaire de l'entreprise d'Orodara au Burkina Faso.
Le deuxième élément des coûts d'acheminement de la matière première, et qui peut avoir plus d'implications sur les résultats économiques de l'entreprise, est la dégradation du produit au cours du transport. Si les routes sont particulièrement cahoteuses, il peut suffire d'un trajet de quelques dizaines de kilomètres pour rendre le produit frais, malmené, impropre à sa conservation, quel que soit l'efficacité de son séchage par la suite. Le coût économique de l'approvisionnement est alors beaucoup plus élevé, puisqu'au coût du transport lui-même s'ajoute le coût d'achat d'une matière première qui sera éliminée en grande partie au premier tri.
Le troisième élément à considérer dans l'évaluation des coûts de cet acheminement est la durée du transport. Si les conditions de circulation sont difficiles, deux à trois jours, voire plus, peuvent devenir nécessaires pour acheminer le produit frais jusqu'à l'unité depuis des zones de production distantes de seulement une centaine de kilomètres. Si on ajoute à cette durée la durée du stockage amont, avant que la totalité du chargement du camion puisse être traitée et le temps passé par le produit dans le séchoir avant qu'il ne soit « hors de danger », il peut s'être écoulé plus d'une semaine. Le produit sera alors sans doute impropre à la conservation.
La sécurité de l'approvisionnement
Une unité de séchage doit fonctionner au maximum de ses capacités si on veut pouvoir amortir convenablement ses frais fixes. L'approvisionnement doit donc être régulier, ou le stock de matière première suffisant pour assurer une relative autonomie. Dans le cas du séchage de produits fiais qui se dégradent rapidement (c'est généralement le cas), ce stock ne peut malheureusement pas être très élevé, le produit devant être au plus vite séché. La régularité des livraisons de matière première doit donc être, à une ou deux journées près, parfaite. C'est parfois loin d'être possible en période de relative impraticabilité des pistes, en saison des pluies dans de nombreux pays.
Le coût de l'acheminement du produit élaboré jusqu'aux marchés
· Le coût du transport s'applique aussi bien aux intrants qu'au produit final.· Le produit élaboré est beaucoup moins sensible aux chocs subis lors du trajet que ne l'est le produit frais. Il faudra toutefois s'assurer qu'il en est de même pour le conditionnement du produit, ce qui peut-être un élément important lorsque l'on vise une clientèle haut de gamme. Le produit peut par ailleurs s'altérer du fait de dommages non mécaniques induits par le transport, par exemple s'il a été trempé accidentellement au cours du trajet.
· Il n'existe que peu de risques de dégradation du produit séché du fait d'une trop longue durée de transport, excepté du fait d'une exposition prolongée aux intempéries ou du fait de la poussière du voyage (ce qui peut être aisément contrôlé par un bon conditionnement du produit et une bonne protection du chargement).
La régularité de l'expédition du produit élaboré vers les marchés
Certaines filières de commercialisation, la filière d'exportation en particulier, sont très exigeantes quant au respect des délais de livraison du produit fini. Un retard de livraison du fait de mauvaises conditions de circulation peut nuire à l'image de l'entreprise.
La proximité de services annexes
À l'exception de la matière première, il existe peu d'intrants de production de l'activité de séchage qui exigent un approvisionnement régulier tout au long de l'année (la majeure partie des produits de traitement peuvent être stockés sur de longues périodes).
Il peut en revanche s'avérer utile de disposer à proximité de l'unité de services annexes, tel un artisan capable de réparer rapidement un dégât occasionné sur le séchoir, un garagiste pour l'entretien-réparation des moyens de transport, ou parfois simplement un téléphone qui fonctionne...
La mobilité du séchoir
Dans certains cas, le problème ne sera pas de choisir la bonne localisation d'une nouvelle unité de séchage, mais d'évaluer l'opportunité de modifier la localisation d'une unité préexistante. Ce peut être le cas si, par exemple, l'entrepreneur s'aperçoit, l'expérience aidant, que la localisation de l'unité n'est finalement pas la meilleure. Ce peut être aussi le cas si l'entrepreneur, après une période de « montée en puissance » de son activité de séchage, entreprend d'augmenter son volume de production et que cela n'est plus compatible avec, par exemple, le volume de la matière première disponible localement.
À moins de décider d'abandonner purement et simplement le séchoir actuel et d'en construire un nouveau sur le nouveau site envisagé, il faudra se poser la question de savoir si le séchoir, ou du moins ses parties les plus coûteuses, peut être transporté.
Les motivations de l'entrepreneur à changer de localisation ou des personnes appelées à suivre l'unité dans le cas de son implantation dans une autre zone
Quand bien même l'analyse montrerait l'intérêt de localiser le séchoir dans une zone qui n'est pas la zone de résidence de l'entrepreneur, celui-ci peut avoir de multiples et bonnes raisons de s'en tenir à une localisation de l'unité sur son lieu actuel de résidence:
- le séchage peut n'être qu'une des activités de cette personne;- il peut y avoir un attachement à un lieu, à des personnes, ou une simple réticence à la migration;
- etc.
Dans la mesure où l'appréciation de ces derniers éléments appartient en propre à la personne concernée, il ne sera présenté ici que les arguments qui permettent de mieux préciser les choix de localisation à faire, indépendamment de l'aptitude à la mobilité des personnes.
LES ÉLÉMENTS DU CHOIX
Le simple énoncé, non exhaustif, des paramètres qui peuvent intervenir dans un choix de localisation, suggère la complexité du problème, et la nécessité d'y répondre avec des nuances. La diversité des situations qui se présentent en zone rurale dans les pays en développement est telle qu'il n'est pas possible de fournir une réponse adaptée à chaque cas précis avant de le connaître dans le détail. Il est cependant utile de présenter ici quelques arguments relativement théoriques. Ils serviront de support à la réflexion plutôt que de réponse toute faite. De façon à contourner la difficulté qui consiste à traiter tous les cas concrets qui peuvent se présenter, ce paragraphe sera centré sur des « cas d'école » purement fictifs, mais où l'intéressé pourra retrouver certaines caractéristiques du problème auquel il est confronté.
Pour l'instant, on n'a besoin que d'une donnée: le rendement du produit au séchage est de 15 kilogrammes de produit frais pour produire un kilogramme de produit sec.
Premier cas d'école
Je me situe dans un « pays imaginaire » représenté sur le schéma ci-dessous où il y a:
- un marché (une ville, un port à l'exportation...) où sont tous les clients du produit sec;- une zone de production du produit frais appelée « zone A », située à 300 kilomètres du marché, et reliée par une route goudronnée de bonne qualité à celui-ci;
- une autre zone de production du produit frais appelée « zone B », est située à 100 kilomètres du marché et relié à celui-ci par une piste de mauvaise qualité.
On considère d'autre part que le prix au producteur du produit frais est le même dans les deux zones, et que le produit ne peut être cultivé que dans ces deux zones.
En supposant que les coûts du transport sont ceux que l'on observe en moyenne en Afrique de l'Ouest, on cherche à savoir où implanter l'unité de séchage: dans la zone A, dans la zone B. ou à proximité immédiate du marché?
Il suffit pour cela de faire le calcul de la somme des coûts du transport du produit frais et du produit sec rapportés à un kilogramme de produit fini dans les trois cas de localisation.
Pour une localisation en zone A, le produit frais est disponible à coût de transport nul; le coût de transport total est donc celui du produit fini jusqu'au marché: 300 km x 0,025 FCFA/km, soit 7,5 FCFA par kilogramme de produit sec. Il en est de même pour une localisation dans la zone B. mais le coût de transport doit tenir compte des tarifs plus élevés sur une piste de mauvaise qualité, soit: 100 km x 0,150 FCFA/km = 15 FCFA/kg de produit sec.
Pour une localisation en proximité du marché, le transport du produit fini est négligeable, mais il faut faire venir la matière première depuis la zone A (plus proche sur le plan des coûts de transport, bien que plus éloignée géographiquement). Pour produire un kilogramme de produit fini, il faut 15 kilogrammes de produit frais. Le coût du transport est donc de: (15 x 300 km) x 0,025 FCFA/km = 112,5 FCFA par kilogramme de produit sec.
On peut tirer deux remarques de ce cas d'école:
- la distance géographique n'est pas le seul paramètre qui intervienne dans les coûts du transport. La qualité des infrastructures de transport importe tout autant. Ici, l'option « localisation en zone B » induit des coûts de transport deux fois plus élevés que pour la zone A, alors que cette zone est trois fois plus proche du marché;- l'option d'une localisation à proximité du marché ne se justifie pas dans ce cas d'école: cela coûte quinze fois plus cher en coûts de transport par rapport à une localisation en A, sans compter les risques de dégradation du produit frais transporté sur 300 kilomètres.
Deuxième cas d'école
On suppose maintenant qu'il existe une troisième zone de production, appelée « zone C », en proximité du marché.
On suppose de nouveau que le prix au producteur pour le produit frais est le même dans les trois zones. La réponse est alors immédiate: c'est à proximité du marché, en zone C, qu'il faut s'implanter (coûts de transport négligeables pour le produit frais comme pour le produit sec).
Troisième cas d'école
Conservons le cas des trois zones A, B et C. Supposons maintenant que les prix au producteur du produit frais sur les trois zones sont déterminés par des règles de marché simplifiées où:
- il existe un prix de marché en C du produit frais de 50 FCFA/kg;- les marges de la commercialisation sont de 15 FCFA/kg;
- les prix proposés aux producteurs par les commerçants dans les trois zones sont égaux au prix de marché, diminué des marges de commercialisation et des coûts de transport du produit frais de chaque zone jusqu'au marché.
Quelle est alors la localisation la plus rentable?
Il suffit dans ce cas de calculer la somme du coût de l'achat de la matière première dans chacune des trois zones, et le coût de transport du produit fini depuis ces trois zones.
Le prix du produit frais en A est calculé par: prix d'achat - marges de commercialisation - coûts de transport, soit: 50 - 15 - (300 x 0,025) = 27,5 FCFA par kilogramme de produit frais.
Son prix en zone B est de: 50 - 15 - (100 x 0,15) = 20,0 FCFA par kilogramme de produit frais.
Son prix en zone C est de: 50 - 15 = 35,0 FCFA par kilogramme de produit frais.
Il faut 15 kilogrammes de produit frais pour produire un kilogramme de produit sec. Le coût total de l'approvisionnement en produits frais et d'écoulement du produit fini est donc de:
- 300. 0,025 + 15 x 27,5 = 420 FCFA par kilogramme de produit sec pour l'option « zone A »;- 100. 0,150 + 15 x 20,0 = 315 FCFA par kilogramme de produit sec pour l'option « zone B »;
- 0. 0 + 15 x 3 5,0 = 525 FCFA par kilogramme de produit sec pour l'option « zone C ».
Dans ce cas d'école, c'est en zone B. la plus éloignée du marché du point de vue des coûts de transport, que la localisation de l'unité de séchage est la plus intéressante sur le plan économique. Cela s'explique par le fait que, dans le cas traité, c'est la zone où le séchage entre le moins en concurrence avec la vente de produit frais.
Le rapport avec la réalité
Les données des deuxième et troisième cas d'école, pour extrêmes qu'elles puissent paramètre les unes par rapport aux autres en ce qui concerne la «géographie des prix », n'en ont pas moins leur équivalent dans la réalité. Dans un contexte national de surproduction de produits maraîchers, c'est le cas au Burkina Faso en ce moment, le prix des produits maraîchers est au plus bas pendant les périodes de récolte. Le déséquilibre entre offre et demande est à ce moment tel que les prix au producteur sont très faibles, même dans les zones les plus proches des villes. Les unités de séchage se développent donc assez naturellement plutôt à proximité des marchés, puisque les inconvénients sont réduits et les avantages nombreux (en particulier, présence à proximité d'une production suffisante pour garantir l'approvisionnement du séchoir, proximité des services annexes et du marché). Mais il faut tout de même, dans ce cas précis, conserver à l'esprit qu'il peut ne s'agir que d'une situation temporaire.
Dans d'autres pays où la production de produits maraîchers pour le marché est stabilisée de longue date (cas du nord Nigeria dans la zone sahélienne par exemple), la réalité se rapprochera bien plus des hypothèses du troisième cas d'école. Ce dernier n'est en effet pas si éloigné de la réalité que la simplicité de ses hypothèses semble le suggérer. L'exemple de la formation dans l'espace des prix du mil au Mali, fourni ci-dessous, en est une illustration.
Formation spatiale des prix d'un produit alimentaire Le cas du mil au Mali Les différences de prix du mil sur les marchés du Mali sont
relativement spectaculaires. En considérant les données hebdomadaires des prix
de marché du mil, mises en moyennes corrigées des variations saisonnières sur la
période début 1991- début 1995, on s'aperçoit que le prix du mil est de 45
FCFA/kg sur les marchés ruraux de l'Ouest du Mali, qui est la principale zone de
surplus de cette céréale dominante au Mali, atteint 55 FCFA/kg sur le marché de
San, 60 FCFA/kg sur le marché de Ségou, et 75 FCFA/kg sur le marché de Bamako. À
l'exception d'une marge supplémentaire de 5 FCFA/kg sur le marché de Bamako, ces
différences de prix moyens sur les marchés s'expliquent totalement par les
différences de coût de transport jusqu'à Bamako, capitale du pays et principal
marché final pour le mil. |
Dans le cas d'un produit alimentaire et d'un pays pour lesquels les offres, demandes et prix sont relativement stabilisés, il apparaît a priori préférable d'implanter les unités de séchage au-delà de la zone où cette activité entre en concurrence avec la commercialisation de produits frais. Un certain nombre d'éléments doivent être pris en compte pour moduler cette première appréciation:
- un entrepreneur dynamique n'aura peut-être pas envie de s'installer dans une zone très reculée (le choix lui appartient);- le manque de proximité de services annexes peut devenir une contrainte majeure pour le bon fonctionnement de l'unité;
- le volume de production de surplus alimentaires n'est pas élevé dans les zones éloignées des consommateurs de ces surplus (les marchés urbains ou à l'exportation); peut alors se poser un problème d'approvisionnement en quantités suffisantes de matière première pour le séchage. L'entrepreneur sera alors peut-être amené à proposer dans cette zone des prix d'achat du produit frais incitatifs pour augmenter la production de la zone (tout dépend ici de la taille de l'unité qu'il a envisagé, de savoir si les agriculteurs de la zone ne produisaient pas de surplus auparavant uniquement parce qu'il n'y avait pas de demande, etc.).