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4.3. Les critères du choix d'un modèle déterminé

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En effet, pour des raisons liées aux politiques des firmes d'importation, dans certains pays (tels que le Sénégal), l'on ne retrouve presque exclusivement que des moulins à marteaux, tandis que dans d'autres (le Burkina Faso, le Mali et le Niger par ex.) l'on ne trouve que des moulins à meules. Les expériences de terrain ont démontré que chaque fois les programmes ou projets oui ont essayé d'introduire dans un pays donné un type de moulin ou de oroyeur qui n'était pas disponible sur place ont échoué, faute de connaissance technique sur place pour l'entretien et la réparation, et par manque de pièces de rechange.

Le choix donc ne se pose pas tellement en terme de type de moulin, mais plutôt en terme de modèle parmi la gamme de même type disponible sur place.

Le choix d'un modèle donné se ferait en fonction de plusieurs critères, à la fois techniques et économiques, à savoir:

i) la gamme de produits disponibles sur place susceptibles d'être broyés;

ii) le nombre de ménages que le broyeur est censé desservir;

iii) la simplicité de maniement de la machine afin que l'utilisateur puisse contrôler facilement l'opération;

iv) la facilité de réglage de l'appareil: il est souhaitable de bien étudier les normes conseillées par les constructeurs et de choisir des modèles dont les réglages sont faciles à comprendre et les pièces à régler commodes d'accès;

v) la facilité d'accès des pièces d'usure courante (meules, marteaux, grilles); l'appareil doit être facile à démonter et simple de fabrication afin d'éviter que toute panne ne prenne des dimensions disproportionnées, ce qui entraîne l'immobilisation de l'appareil pour de longues périodes:

vi) la simplicité d'entretien de l'appareil; vii) la réversibilité de certaines pièces (marteaux ou meules): cela rallonge la durée de vie de ces pièces et réduit considérablement les coûts de fonctionnement;

viii) la robustesse de l'appareil et le rapport qualité/prix, compte tenu aussi du coût des pièces d'usure courante;

ix) la disponibilité des pièces de rechange et leur coût;

x) les débits réels et la relation consommations spécifiques/débit; afin d'obtenir ceux-ci, il est nécessaire de mener des essais sur place, les débits théoriques affichés par les constructeurs étant toujours bien en dessous des débits réels. En effet, d'abord les constructeurs tendent à surestimer les débits, ensuite, ceux-ci ne sont calculés, ni en fonction de la nature du produit à moudre, ni en fonction de la granulométrie souhaitée. Enfin, l'organisation du travail des meuniers détermine aussi les débits

4.4. Les moteurs thermiques

Il existe deux types de montures thermiques;

a) moteur à essence;
b) moteur diesel.

4.4.1. Les avantages principaux des moteurs à essence peuvent se résumer ainsi:

- un prix d'achat moins élevé;
- un fonctionnement et un entretien plus simples ce qui nécessite une formation moins poussée des meuniers.

Les inconvénients majeurs par contre sont la fragilité de ces moteurs et les pannes fréquentes qui en découlent - et surtout des coûts de fonctionnement beaucoup plus élevés, l'essence étant beaucoup plus chère que le gas-oil.

4.4.2. En règle générale, il est donc préférable de faire recours aux moteurs diesel.

Parmi les moteurs diesel, il existe aussi deux types:

- refroidissement par air;
- refroidissement par eau.

Les premiers sont beaucoup moins coûteux mais ils nécessitent une attention particulière quant à leur maniement et entretien; il semblerait aussi qu'ils aient une durée de vie moins longue que les moteurs à refroidissement par eau Pour ces raisons, dans certains pays sahéliens, plusieurs utilisateurs semblent préférer ces derniers car ils permettent une utilisation journalière prolongée, sans se soucier de l'échauffement excessif du moteur. En effet si le couple moteur/moulin est correct, l'installation de deux appareils est effectuée correctement dans des abris bien ventilés, et le moteur est entretenu correctement, le problème de l'échauffement ne se pose pas. Ceci est d'autant plus vrai si l'on considère que la plupart des moulins villageois ne fonctionnent guère plus de 3-4 heures d'affilée.

4.4.3. Par contre, il y a certains paramètres essentiels, mais souvent négligés, qu'il faut prendre en compte:

i) la puissance (et la vitesse) du moteur doit être égale - ou légèrement supérieure - à la puissance (et à la vitesse) à développer à l'arbre. Des puissances supérieures à celles requises comportent des consommations en carburant élevées tandis que des puissances inférieures sont à l'origine de pannes fréquentes La plupart des moulins installés dans les pays sahéliens visités sont couplés avec des moteurs à puissances bien au-dessus de celles absorbées: ainsi il arrive souvent qu'un moulin nécessitant une puissance absorbée de 4-5 CV soit couplé à un moteur qui développe une puissance de 8-9 CV Du coup les consommations en carburant - donc les coûts de fonctionnement augmentent considérablement.

ii) la transmission au moulin et au moteur doit être adaptée. La relation du diamètre de la poulie du moteur - Dm - et de la vitesse de rotation du moteur - Wm - doit être égale à celle du diamètre de la poulie du broyeur - Db - et de la vitesse de rotation du broyeur Wb (vitesse conseillée à l'arbre) soit: Dm x Wm = Db x Wb. Par exemple, pour calculer le diamètre de la poulie du moteur, l'on fait recours à la formule suivante:

Dm=(Db x Wb) / Wm

iii) la poulie du broyeur et celle du moteur doivent être compatibles (toute les deux plates ou trapézoïdales).

Ces caractéristiques sont d'autant plus importantes si l'on considère qu'en général les moteurs sont livrés indépendamment des broyeurs.

Outre les paramètres que l'on vient de décrire, le choix d'un modèle de moteur s'effectuera en fonction des caractéristiques suivantes:

i) robustesse du moteur et de ses composantes principales, sa simplicité et le rapport qualité/prix;

ii) accessibilité des pièces qui nécessitent une vérification fréquente (ex. filtre à air);

iii) présence (ou absence) de certaines pièces:

- l'absence d'une jauge du niveau d'huile pose des problèmes pour la vérification du niveau d'huile;

- l'absence du filtre à huile ainsi que l'absence du filtre à eau dans les moteurs à refroidissement par eau peuvent boucher les circuits et provoquer des pannes graves;

iv) la cadence d'usure des pièces et leur coût;

v) la disponibilité des pièces de rechange;

vi) la capacité technique préexistante dans une région donnée à l'entretien et à la réparation des appareils.

Les paramètres et les caractéristiques décrits ci-dessus ainsi que les résultats des essais menés sur les broyeurs/moteurs pour en évaluer la performance permettront le choix final du matériel à acquérir (ou à faire fabriquer sur place).

Il est souhaitable, dans la mesure du possible dans un pays donné, de créer un consortium d'acheteurs afin d'en accroître le pouvoir à l'égard des maisons de vente de la place. En regroupant ainsi les achats, l'on obtiendrait des prix concurrentiels, un service aprèsvente correct et de plus grandes facilités de formation et/ou recyclage d'un certain nombre de mécaniciens préalablement choisis. Outre les machines, il faut pourvoir à l'achat d'un certain nombre d'accessoires indispensables et d'un jeu de pièces de rechange à usure courante.

4.5. Moulins à traction animale

Depuis quelque temps (1984), des expériences de moulins à traction animale sont en cours au Sénégal (et au Burkina Faso). Ce type de moulin pourra répondre valablement aux besoins des villages de trop petite taille pour rentabiliser un moulin à moteur ou des utilisateurs qui ne sont pas à même de payer pour la mouture mécanique. L'expérience en cours au Sénégal est relatée ici. La description tu principe de fonctionnement de ce genre de moulin se trouve à l 'Annexe 1-3, tandis que l'on donnera ci-après un aperçu de leur coût et du type d'organisation que les groupements concernés ont choisi pour leur fonctionnement.

4.5.1. Le coût actuel de ce type de moulin à manège (moulin, construction du manège et installation dans le village) s'élève à 350.000 F.CFA, mais l'on estime que ces coûts peuvent être réduits à moins te 300.000 F.CFA en cas de fabrication locale du moulin La contribution du groupement bénéficiaire s'élève à 50.000 F.CFA (ce fonds provenant des cotisations des membres) en espèces et à la main-d'oeuvre pour la construction de la partie génie civil, les autres coûts étant pour l'instant à la charge du projet Actuellement il y a 3 moulins de ce genre qui fonctionnent dans la région de Kaolack au Sénégal et l'on envisage d'en implanter 10 autres dans le courant de 1986. Il semble toutefois qu'il y ait une très forte demande pour ce genre de moulins, le programme ne pouvant faire face qu'à 10 pour cent des demandes actuelles.

Actuellement les coûts de fonctionnement sont très bas car, à la demande des utilisatrices, chacune fournit l'animal pour la traction (le sien ou un animal emprunté), s'occupe elle-même de l'attelage de l'animal et de la surveillance (du moulin et de l'animal) pendant la mouture et ne paie pas pour l'utilisation du moulin. Les utilisateurs néanmoins se côtisent en cas de frais d'entretien.

4.5.2. Afin de calculer la rentabilité de ce moulin-manège, l'on peut envisager deux alternatives:

i) poursuite du même type d'organisation qui prévaut actuellement, à savoir que chaque utilisatrice amène un animal de traite. Dans cette alternative les coûts sur 5 ans peuvent s'établir comme suit:

  F.CFA
- installation 300.000
- suivi/formation 40.000
- meules 60.000
- divers (10% prix d'installation) 30.000
TOTAL 430.000 soit 86.000/an

Afin de couvrir les coûts seulement, le prix de revient s'élèverait à 2.42 F.CFA/kg moulu dans l'hypothèse de 35 t/an ou à 2,9 F/kg dans l'hypothèse de 30 t/an.

ii) établissement d'un nouveau système d'organisation, à savoir doter l'installation d'un cheval exclusivement pour le manège. Les coûts de cette deuxième alternative se monteraient à:

  F.CFA
- installation 300.000
- suivi/formation 40.000
- meules 60.000
- cheval 70.000
- nourriture et entretien animal 750.000
- divers (10 % coût de l'installation) 30.000
TOTAL 1250.000 soit 250.000/an

Pour le recouvrement des coûts, le prix de revient serait de:

- 8,4 F/kg moulu pour 30t/an
- 7,4 F/kg " " 35t/an
- 6,3 F/kg " " 40t/an

Les chiffres ci-dessus démontrent clairement l'intérêt de ce genre d'installation; l'organisation actuelle adoptée par les femmes est la moins coûteuse et par conséquent il serait souhaitable de la poursuivre dans la mesure du possible, tout en élargissant le nombre d'utilisatrices. Même dans la deuxième alternative (où les coûts ont été sciemment inflationnés), cette technologie pourrait être valablement adoptée bien que les problèmes d'organisation soient plus complexes.

En effet les avantages de ce type d'installation peuvent se résumer ainsi:

- des coûts de mouture beaucoup plus à la portée de la majorité des femmes rurales et la possibilité de recours à ce type de mouture par le plus grand nombre;

- la possibilité de répondre aux besoins des villages de trop petite taille pour rentabiliser l'installation d'un moulin à moteur;

- la possibilité de retenir l'indépendance des ressortissants du village d'implantation car, une fois l'installation effectuée, elle peut fonctionner avec des produits locaux (animal) ce qui n'est pas le cas avec un moulin à moteur;

- le procédé de mouture sèche pourrait résoudre, à terme, le problème de conservation de la farine: dans les zones où les hameaux de culture sont trop éloignés du village, les femmes pourraient apporter des quantités de céréales plus importantes à moudre pour nourrir le ménage pendant plusieurs jours. Ceci nécessiterait tout de même une sensibilisation et une formation supplémentaires.


V. Les mesures prealables a l'installation d'un moulin

Une fois les villages d'implantation choisis, avant l'installation des équipements, une série de mesures devraient être prises.

5.1. Une enquête participative du milieu d'accueil

La première activité concernerait une enquête participative du milieu d'accueil. Les objectifs de cette enquête seraient de faire imprégner l'encadrement des réalités du milieu, mais aussi d'analyser, avec les groupes concernés, les réseaux relationnels existant dans le milieu et de découvrir les ressources que le milieu concerné recèle. Cette enquête se pencherait notamment sur les points suivants:

i) la structure organisationnelle du village: les différents types de groupements féminins existants - traditionnels et modernes seront répertoriés, ainsi que leurs activités et les personnes concernées, ceci afin de permettre une représentativité plus large de la structure d'accueil des équipements;

ii) l'identification avec le milieu concerné - femmes "t hommes - du site destiné à la construction de l'abri; l'on choisira de préférence un site central, à côté du marché ou de tout autre lieu de rassemblement de la population - surtout des femmes - du village et des alentours;

iii) le recensement de toutes les opérations de développement en cours dans le village - aussi bien endogènes qu'importées - et l'évaluation de leur portée pourraient permettre d'identifier là où les opérations auxquelles le programme moulins pourrait utilement se greffer, mais aussi d'analyser, avec les intéressées, laquelle des opérations pourrait être utilement renforcée; ce recensement devrait être l'occasion de mener une réflexion en commun avec les femmes, sur les contraintes économiques et autres qu'elles rencontrent et de chercher ensemble des solutions pour les surmonter;

iv) un recensement des ressources humaines disponibles dans le milieu portera notamment sur l'identification de:

- la nature et le type d'encadrement existant, ainsi que son degré d'insertion dans le milieu;
- les personnes du village (femmes, enfants, hommes), lettrées ou alphabétisées;
- les mécaniciens-réparateurs du village et leur degré de compétence.

5.2. Une sensibilisation de tout le village

Pendant le déroulement de l'enquête participative, il faudrait prévoir une sensibilisation de tout le village au fonctionnement et à la gestion d'une unité économique complexe telle que le moulin villageois. De préférence, cette sensibilisation initiale sera appuyée par des supports audio-visuels - tels qu'un système disporama, films fixes ou série éducative, afin que les idées nouvelles soient fixées par des images. (Pour plus de détails, cf. 7.1. ci-dessous).

5.3. La construction de l'abri

Une fois le site défini, la construction de l'abri devrait avoir lieu de préférence pendant la saison sèche: une attention particulière sera accordée au fait que tout le monde devra participer à la construction de l'abri, construction qui sera effectuée selon un plan préétabli par le programme. L'encadrement devrait veiller à ce que la construction soit conforme au plan, une attention particulière devrait être portée à la position des portes et des fenêtres par rapport aux vents prédominants. (cf. schéma 1).

Avant l'installation du moulin, il faudrait aussi faire exécuter par un forgeron un châssis-support pour le moulin et le moteur afin de permettre une installation correcte du matériel. Le châssis assure la rigidité de l'ensemble. Le châssis métallique peut comporter deux barres latérales afin de faciliter l'alignement et le nivellement du moulin, du moteur et des poulies. (cf. schéma 2).

Pour pallier aux vibrations des moulins à moteur, deux solutions peuvent être envisagées (cf. schéma 3):

i) fixer la base du châssis sur une dalle en béton armé (d'environ 50 cm d'épaisseur) sur un lit de gravier. Cette solution, plus coûteuse, est préférable mais son efficacité est déterminée par la qualité du béton; si elle est mauvaise, la dalle finit par se fissurer et les vibrations se reproduisent;

ii) placer le moulin dans une petite fosse d'environ 15 cm de profondeur de la même dimension que le châssis et ensuite recouvrir la fosse avec de la terre ou du sable pour amortir les vibrations.

5.4. La désignation du comité de gestion et des animatrices du moulin

Le programme définira la composition, le profil et les tâches du comité de gestion, ainsi que la place dévolue aux femmes dans la composition de ce comité. Bien que la composition du comité de gestion puisse varier d'un programme à l'autre, les postes clés semblent être ceux de Présidente, Trésorière, Secrétaire et Commissaire aux comptes. Bien que deux autres fonctions soient souvent négligées dans la composition du comité de gestion, elles n'en demeurent pas moins essentielles pour la bonne marche d'un programme moulin. Il s'agit notamment du poste de responsable du contrôle des approvisionnements et de celui concernant la supervision de l'entretien des unités de mouture. L'on veillera à ce que chaque poste clé soit doublé: les fonctions principales seraient assurées par des femmes pas trop jeunes, jouissant d'une autorité et d'un respect certains dans le village, tandis que les postes d'adjointes pourraient être confiés à des femmes plus jeunes et plus actives. Dans la mesure du possible, il faudrait que la secrétaire - ou son adjointe - soit lettrée ou alphabétisée. Un homme pourrait jouer le rôle de conseiller dans le comité de gestion.

Les animatrices du moulin - dont le nombre varierait en fonction de la taille du village et de son organisation dans l'espace - devraient avoir la fonction de sensibiliser et de former les utilisatrices aux heures d'ouverture du moulin et à la propreté des céréales. Bien que le profil des membres du comité de gestion et des animatrices soit tracé par le programme, leur élection sera du ressort de l'assemblée générale du village: avant que l'élection n'ait lieu, le concept de représentativité des membres du comité de gestion mériterait d'être précisé. Ceci fera l'objet d'une réflexion commune avec l'assemblée générale; l'organisation des femmes pour contrôler les opérations de mouture ainsi que l'introduction du principe de l'aide-meunière seraient aussi amplement débattues lors de cette réflexion.

Schéma No. 1 - L'abri du moulin

Schéma No. 2 - Le châssis du moulin

Schéma No. 3 - La fixation du matériel sur le sol

5.5. L'identification des meuniers (ères)

Le profil des meuniers - ou d'un meunier et d'une aide-meunière, là où l'idée est acceptée - sera défini aussi par le programme. Il faudra veiller à ce que ces personnes ne soient pas trop jeunes, qu'elles soient intégrées dans le milieu et qu'elles aient des attaches permanentes avec celui-ci. Il est toujours préférable d'avoir deux meuniers (ères).

5.6. L'adoption de principes de gestion standardisés et la mise en place d'un système de gestion

Ces deux mesures sont la condition sine qua non de la réussite d'un programme moulin.

5.6.1. Il est préférable d'adopter, dès le début, avec les groupes concernés, des modalités claires et définies de répartition des recettes. Indépendemment des modalités précises, il est préférable de répartir les recettes nettes selon les postes suivants:

- paiement des salaires;
- entretien - réparation;
- amortissement et/ou remboursement des installations;
- bénéfices.

Selon les circonstances, cette répartition peut être effectuée en proportions variables selon le poste, ou en proportions égales. Le choix du système à adopter dépendra de plusieurs facteurs, y compris le montant de l'amortissement/remboursement et les spécificités du milieu d'implantation des unités. L'avantage principal de la répartition des recettes nettes en parties égales est la simplicité du principe et son potentiel d'être facilement compris et assimilé par les femmes. Ses inconvénients majeurs sont sa rigidité et son manque d'adaptation aux spécificités (aussi bien physiques que socio-économiques) des zones d'implantation. Quant à la première alternative, elle a l'inconvénient d'être très complexe mais a l'avantage d'être d'une grande souplesse.

Indépendemment du principe adapté, son efficacité et sa pertinence devraient être suivies et évaluées périodiquement et des changements apportés si cela s'avère nécessaire.

5.6.2. Les principalés composantes d'un système unifié de gestion seraient:

i) un contrôle de l'usinage et de l'encaissement par l'introduction de tickets (ou jetons) de couleurs et tailles différentes, chaque ticket - ou Jeton - correspondrait à une somme préalablement établie. Une ou deux femmes conditionnent et encaissent dn donnant à la cliente l'équivalent de la somme perçue en tickets. Ces tickets sont portés au meunier avec les céréales à moudre. A la fin de la journée, la somme en caisse devrait correspondre à l'équivalent en tickets perçus par le meunier;

ii) le choix de(s) vendeuse(s) de tickets; deux alternatives peuvent être envisagées; les expériences de terrain montrent que les deux sont valables: le choix peut être laissé au comité de gestion et à l'assemblée générale des femmes. La première alternative comporte le choix d'une ou deux vendeuses, en général des femmes âgées: elles seraient rémunérées selon un pourcentage des encaissements, pourcentage préalablement établi. La deuxième alternative préconise la participation de toutes les femmes du village: chaque femme, à tour de rôle, assure la fonction de conditionneuse/vendeuse bénévole, selon un programme préétabli. La deuxième alternative a l'avantage de faire participer toutes les femmes aux opérations de mouture, mais elle requiert une organisation plus importante;

iii) la fixation de la rémunération des meuniers(ères) et des vendeuses de tickets (en cas de vendeuses fixes); cette rémunération serait proportionnelle aux recettes nettes réalisées mensuellement par l'unité. En général elle est de l'ordre de 10-20 pour cent pour les meuniers(ères) et de 5 pour cent pour les vendeuses de tickets, en cas de vendeuses fixes;

iv) un système te contrôle de décaissements. Ce système comprendra l'instauration d'un système de reçus pour tous les achats effectués, ainsi que l'identification d'un membre du comité de gestion chargé du contrôle des quantités achetées et de la vérification des stocks;

v) la mise en place d'un système de fiches simples de comptabilité:

- une fiche recettes et une fiche tickets pouvant être remplies journalièrement par les vendeuses de tickets à l'aide de bâtons (s'il s'agit de femmes illettrées);

- une fiche mensuelle des dépenses, à remplir par la personne chargée du contrôle des achats; cette fiche aussi pourrait être remplie par une illettrée à l'aide de bâtons;

- une fiche récapitulative mensuelle des dépenses et des recettes, à remplir par une personne lettrée ou alphabétisée, de préférence la secrétaire ou son adjointe, si elles sont lettrées ou alphabétisées, ou tout autre ressortissant du village, lettré ou alphabétisé

Le système mis en place dans le cadre d'un projet au Burkina Faso et qui a donné des résultats positifs pourrait servir de cadre de référence. (cf. Annexe IV).


VI. Les modalites de financement et la contribution villageoise

6.1. Les modalités de financement

Les modalités de financement varient en général en fonction du pays d'intervention; certains gouvernements découragent une politique de subvention tandis que d'autres l'encouragent. Que l'investissement initial soit un don ou un prêt, il importe de définir clairement l'importance de la contrepartie villageoise, la période d'amortissement, ainsi que les mécanismes précis à prévoir pour l'amortissement et/ou le remboursement des équipements et pour l'utilisation des marges bénéficiaires

6.2. La contrepartie villageoise

L'importance de la contrepartie villageoise peut être un gage de l'intérêt que les groupes portent à l'unité que l'on envisage d'installer. Cette contrepartie devrait comprendre les éléments suivants:

i) la cession d'un site central choisi de concert avec les femmes bénéficiaires pour la construction de l'abri;

ii) la main-d'oeuvre, spécialisée et non spécialisée, pour la construction de l'abri selon un plan préalablement établi par le programme;

iii) une contribution financière du village destinée à l'achat du matériel nécessaire à la construction de l'abri, ainsi qu'au démarrage des opérations; le montant de cette contribution pourrait varier entre 20 et 25 pour cent du prix d'achat des équipements.

6.3. Le plan d'amortissement et/ou de remboursement

Plusieurs facteurs devraient être pris en compte dans l'établissement du plan d'amortissement et/ou de remboursement: parmi ceux-ci, deux peuvent être considérés comme des variables exogènes, à savoir:

i) le montant du prix d'achat des équipements: celui-ci peut varier du simple au double selon qu'il s'agisse d'équipements achetés hors taxes ou toutes taxes comprises et du type d'équipements achetés (modèles construits en Occident ou dans quelques pays du tiers monde):

ii) le calcul des débits réels et des coûts de fonctionnement (charges récurrentes) en milieu rural. Ainsi un plan d'amortissement/remboursement d'une unité dont le coût s'élève à environ 800.000 F.CFA pourrait s'étaler sur 4 ans avec une année de différé, si les villages d'implantation ont été choisis selon des critères judicieux et si la gestion des unités est rigoureuse Par contre, pour des unités plus coûteuses (1.200.000 F.CFA), il faudrait prévoir un étalement sur 6 ans avec une année de différé. (cf. tableau 2 - par. 3.7. - pour les montants des annuités).

D'autres éléments peuvent aussi rentrer dans l'établissement d'un plan d'amortissement/remboursement, à savoir l'intérêt des membres du groupement concerné pour entreprendre des activités lucratives et les potentialités du milieu pour le développement de telles activités. L'on peut songer, dès le départ, à consacrer une partie de la marge bénéficiaire réalisée par les moulins au financement d'actions de développement sur une petite échelle, visant à accroître les revenus de femmes au niveau individuel ou collectif. Une condition essentielle serait l'identification d'activités réellement rémunératrices et la capacité du programme de prévoir le support technique nécessaire pour leur développement.

Là où les conditions sont réunies, l'on pourrait prévoir un plan d'amortissement/remboursement étalé sur des périodes plus longues mais qui ne dépasseraient pas 8 ans (ou dix ans dans des cas tout à fait exceptionnels).

6.4. Les modalités d'amortissement/remboursement et de gardiennage de la marge bénéficiaire

Dès le départ, un programme d'installation de moulins se devrait d'établir des modalités précises pour les remboursements ou le versement de l'amortissement et s'assurer que ces modalités sont bien comprises et acceptées par les groupes bénéficiaires. Les modalités précises varieront évidemment en fonction des spécificités des pays - ou des régions - d'intervention. L'on se bornera ici à donner des indications tirées des expériences de terrain. La pratique d'engranger les bénéfices réalisés par le fonctionnement du moulin dans les villages ne semblerait pas être adaptée, surtout s'il s'agit de sommes importantes. L'argent est souvent gardé par les hommes, les femmes craignant les voleurs; les hommes ont tendance, non seulement à garder des liquidités, mais aussi à contrôler leur destination De plus, compte tenu de la paupérisation du milieu, le gardiennage de l'argent entraîne souvent le risque de prélèvements qui, bien que considérés au départ comme temporaires, terminent parfois en véritables détournements, surtout si des contrôles périodiques ne sont pas effectués. Même si les hommes gardent l'argent, pouquoi les femmes ne garderaient-elles pas la clé de la caisse?

Au-delà des sommes nécessaires pour faire face aux dépenses courantes de fonctionnement des unités, la pratique de l'ouverture d'un compte bancaire ou d'un compte d'épargne (là où des caisses d'épargne existent), sur lequel l'on verserait les sommes destinées à l'amortissement/remboursement, ainsi que toute autre marge bénéficiaire importante, semblerait sans doute la mieux adaptée.

Selon les pays ou les régions d'intervention, il s'agirait, soit d'un compte unique pour tous les villages d'intervention, soit d'un compte pour chaque village. Dans les deux cas, il faudra veiller à instaurer un système bien défini de reçus, une des souches serait gardée par le groupement ayant effectué le versement, l'autre par le programme. L'on veillera aussi à ce que les fiches de suivi des remboursements soient systématiquement tenues à jour.


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