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4. Les programmes d'appui technologique pour la transformation du manioc au Ghana

Le manioc représente au Ghana une culture vivrière essentielle, les produits dérivés du manioc faisant partie des habitudes alimentaires des populations, tant rurales qu'urbaines.

En 1988, le projet financé par le FIDA (Fonds International pour le Développement de l'Agriculture) "Ghana Smallholder Rehabilitation and Development Project" (GSRDP) comprend :

Ce projet a été relayé par le Ministère ghanéen de l'agriculture (Ministry of Food and Agriculture) par la mise en oeuvre d'un projet de recherche ("National Agricultural Research Project" - NARP) comprenant les volets suivants relatifs au manioc : amélioration des techniques culturales, recherche agronomique, lutte contre les maladies et les ravageurs, amélioration des systèmes post-récolte.

En 1997, le Ministère ghanéen de l'agriculture a publié une étude sur la filière manioc "a case study of cassava development in Ghana", réalisée dans le cadre du programme FIDA "Global cassava development strategy" concernant les 7 pays sélectionnés par le FIDA, à savoir l'Ouganda, la Zambie, le Ghana, le Brésil, la Colombie, la Thaïlande et le Vietnam.
Cette étude, présentée au FIDA en Octobre 1997, a permis la mise en place d'un prêt de 10 Millions de US$ pour l'amélioration des techniques culturales, dont 70% sera destiné, dès 1998, à la culture du manioc.
Par ailleurs, le salon industriel INDUTECH'97 (Industry and Technology Fair) à Accra du 28/02/97 au 10/03/97 a été l'occasion de faire la promotion de la filière manioc (stand dédié aux techniques culturales et de transformation ainsi qu'à la dégustation de produits dérivés du manioc ; distribution de la brochure "cassava, the old crop reborn").
Ce salon a permis de vérifier, par des tests de dégustation, qu'une farine mélangée contenant 20% de farine de manioc et 80% de farine de blé est acceptée par les consommateurs au même titre qu'une farine contenant 100% de farine de blé.
Ces quelques points montrent l'importance accordée à la filière manioc au Ghana et l'implication des organismes ghanéens concernés par le développement de cette filière.

Des responsables de programmes d'appui technologique à la transformation du manioc ont été rencontrés au cours de la mission au Ghana ; les organismes en charge de ces programmes sont présentés ci-dessous.

4.1. Organismes dédiés au développement agronomique

4.1.1. FOOD RESEARCH INSTITUTE (FRI)
Le FRI mène de nombreux travaux de recherche dans le domaine de la transformation du manioc, en particulier pour la formulation de farines composées / améliorées (cf encadré ci-contre).
Dans le but de promouvoir des technologies de transformation du manioc plus performantes, une unité pilote, le "Cassava Processing Demonstration Unit" - CPDU, a été réalisé par le Food Research Institute (FRI - Accra), en collaboration avec le Centre Régional Africain de Technologie (ARCT - DAKAR) ; ses activités ont démarré en 1990.
Les objectifs de ce centre sont :
  • la formation des opérateurs (trices) sur les différents types d'équipements de transformation du manioc (accessibles aux
Visite de l'entreprise ELSA-FOOD à TEMA (ACCRA)

En parallèle d'une activité de fabrication de pâtes alimentaires à base de farine de blé, Madame E. Afriyie Maldini a investi en 1995 dans une petite unité de produits déshydratés dérivés des tubercules vivriers, avec l'appui d'un AIPB en Cedis (20 Millions de Cedis) pour la finition du bâtiment ; acquisition en Suisse d'un broyeur à marteaux (2T/h) avec filtre et d'un mélangeur (1T/h) ; conception, réalisation et installation par le FRI d'une cabine de séchage électrique.
Production de produits déshydratés en sachets de 500g et de 1 Kg :

  • farines instantanées (instant flour) "fufu" : plantain fufu, yam (igname) fufu, cocoyam fufu
  • farines de maïs fermenté, farine de manioc fermenté
La formulation des produits a été réalisé par le FRI.
Afin d'améliorer la productivité et la qualité des produits, ELSA-FOOD, avec l'appui de l'APDF (Africa Project Development Facility), a réalisé l'étude technique et financière - Business Plan - de la modernisation de son unité, comprenant notamment l'acquisition d'un séchoir en continu (1,2 T en 8 h, 40%HR à l'entrée, 10% à la sortie).

opérateurs nationaux et étrangers africains), Ce centre est situé à Pokuase (district d'Akuapim), à 30 Km au Nord d'Accra, dans une région productrice de manioc.
Le centre est conçu de façon rationnelle, dans une optique industrielle pour une production de qualité et suivant les règles minima d'hygiène alimentaire : locaux fermés, eaux collectées et évacuées (cependant pas de récupération de l'amidon), éviers carrelés pour le lavage, sols cimentés nettoyables, peintures, ....

Les ateliers disposent des différents types de matériels disponibles sur le marché ghanéen, des plus sommaires au plus performants :

A noter que le rôtisseur mécanique rotatif n'est plus utilisé car il ne donne pas satisfaction (production d'un gari de mauvaise qualité ; cuisson pas homogène).
Un manuel détaillé décrit les différents équipements du centre : spécification technique, croquis, mode opératoire, consignes de nettoyage et d'entretien, dépannage.

L'information concernant ce centre du FRI ainsi que les conditions des formations proposées devraient être plus largement diffusées ; des organismes d'appui (ONG, institutions, ...) des différents pays de la région pourraient en faire bénéficier des responsables de GF, des techniciens d'ateliers de fabrication de matériels, ....

Enfin, le FRI et l'ARCT ont réalisé conjointement en 1996 des enquêtes dans le but de cerner le contexte actuel et les contraintes techniques et financières des opérateurs (trices), ceci pour déterminer les conditions du passage d'une activité traditionnelle ("household / cottage level") à une activité semi-industrielle implicant des technologies performantes ("small / medium scale enterprise with improved technology").

Les conclusions de l'enquête révèlent une situation au Ghana contrastée par rapport à celle constatée au Bénin (cf encadré ci-contre).

Résultats des enquêtes en 1996 auprès de 37 transformateurs (trices) de manioc au
Ghana :
  • 37 opérateurs (7 hommes, 30 femmes), répartis dans 5 régions du Ghana, transformant individuellement (29) ou collectivement (8) le manioc en gari (23), tapioca (2), Agbelima (7), amidon (1), biscuits à base de farine de manioc (2)
  • 84% des opérateurs (trices) travaillent le manioc à temps partiel, toute l'année,
  • 78% des opérateurs (trices) transforment le manioc à titre individuel,
  • activité réalisée dans le but de commercialiser le produit fabriqué (la notion d'autoconsommation n'est pas citée dans les conclusions de l'enquête ?),
  • 74% n'ont pas de problèmes d'approvisionnement en racines,
  • problèmes de qualité du gari dû à un manque d'efficacité du pressage (absence de presse), à des variétés de manioc dégradant la couleur du gari, coût élevé du bois de chauffage (?) pour la cuisson conduisant à une "garification" insuffisante, une humidité résiduelle et un "croustillant" insuffisant
  • pas de problème de commercialisation.

4.1.2. SASAKAWA AFRICA ASSOCIATION (SAA)

Cette ONG a été créée en 1986 à Genève à l'initiative de Ryoichi Sasakawa, Président de la "Sasakawa Foundation of Japan" (aujourd'hui : "Nippon Foundation") avec le support technique du Docteur Borlaug, Prix Nobel de la Paix ; le but de cette ONG est le financement et l'appui technique de projets pilote de vulgarisation des techniques agricoles auprès des petits producteurs, l'objectif étant :

ceci pour faire face à la problématique de la sécurité alimentaire en Afrique, à l'instar de la "révolution verte" en Asie.

A la même date, la Fondation Carter ("Carter Center" à Atlanta) se préoccupe de la situation de crise alimentaire en Afrique ; les 2 organismes décident de conjuguer leurs efforts à travers le programme SASAKAWA - GLOBAL 2000.
Ce programme est actuellement opérationnel au Mali, en Guinée, au Burkina-Faso, au Ghana, au Togo, au Bénin (cf § 3.4.2 A2 ci-dessus), au Nigéria, en Erytrée, en Ethiopie, en Ouganda, en Tanzanie et au Mozambique.

Dans ces pays, SAA : SAA intervient au Ghana depuis 1986, en partenariat avec l'IITA d'Ibadan (Nigéria) et GRATIS (cf § 4. 2.1 ci-dessous) pour: SAA n'a pas encore entamé d'action concernant les foyers améliorés mais reconnaît que des actions de sensibilisation, formation et accompagnement sont nécessaires pour la réalisation de ce type de foyers améliorés.

4.1.3. Autres organismes

D'autres organismes intervenant en appui au développement agricole ont été cités par les différents interlocuteurs rencontrés ; cependant, la durée courte de la mission au Ghana n'a pas permis de rencontrer ces organismes pour approfondir leurs modes d'action ; il s'agit des organismes suivants : Cette étude conclut à un marché trop étroit pour l'amidon industriel ; par contre, l'accent est mis sur le potentiel très important de la farine de manioc.
L'étude recommande de poursuivre les recherches concernant ce débouché pour le manioc, en s'appuyant notamment sur l'expérience colombienne du Centro Internacional de Agricultura Tropical (CIAT) / International Development Research Centre (IDRC).

4.2.Organismes d'appui au secteur privé

4.2.1. GRATIS (Ghana Appropriate Technology Industrial Service)

Le projet GRATIS a été initié en 1987 par le Ministère ghanéen de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie pour contribuer à la promotion de la petite industrie ghanéenne.

GRATIS anime un réseau de 10 centres techniques régionaux "Intermediate Technology Transfer Units" (ITTU's) qui proposent les services suivants aux petites entreprises industrielles de leur région : Les ITTU's disposent d'ateliers de mécanique (machines-outils), de petite serrurerie - chaudronnerie, de menuiserie bois et en général d'une petite fonderie ; ces ateliers leur permettent : Les ITTU's se sont spécialisés, celui de CAPE COAST plus particulièrement dans la filière agro-alimentaire, dont la transformation du manioc.

Les ITTU's bénéficient de l'appui des services "centraux" à TEMA (ACCRA) :

Le département Engineering (EDC) a la capacité d'un bureau de conception et de design industriel.
Les ITTU's facturent leurs prestations, assurant ainsi leur autonomie financière, l'Etat ghanéen assurant le coût des services centraux.
Le projet GRATIS a reçu l'appui des bailleurs de fonds internationaux (Union Européenne et ACDI notamment), qui ont fourni une partie des équipements des ITTU's.

Dans le domaine de la transformation du manioc, le département EDC travaille en étroite collaboration avec le Food Research Institute (cf §4.1.1 ci-dessus) et l'IITA d'Ibadan pour la mise au point de matériels : séchoirs, broyeurs à disque, conception de petites unités complètes (en projet avec FRI à partir des travaux déjà réalisés par le FRI, en liaison avec l'IRI - Industrial Research Institute).
Par ailleurs, un travail systématique de documentation (établissement de plans et spécifications techniques) et de standardisation (pièces de rechange notamment) des matériels de transformation du manioc a été entrepris par l'EDC.

4.2.2.EMPRETEC

EMPRETEC, Ghana Foundation for Entrepreneurship Development, apporte, depuis fin 1990, un appui aux petites et moyennes entreprises au moyen:
EMPRETEC à Accra et ses 4 agences régionales regroupent un effectif de 65 personnes.

EMPRETEC, pour assurer son fonctionnement, bénéficie de subventions du Gouvernement ghanéen (Ghana Enterprise Development Program), de l'ODA et de la Banque Mondiale.

EMPRETEC n'intervient pas spécifiquement dans la filière manioc ; cependant, Madame Esta AGBODO (ESTA QUALITY FOODS Ltd) a bénéficié des services d'EMPRETEC (cf encadré ci-contre).

Entretien avec Madame AGBODO (ESTA QUALITY FOODS Ltd)

Cette entreprise produit du gari dans son atelier de transformation à Agogo - 235 Km au Nord d'Accra, à l'Est de Kumasi ; procédé artisanal, manuel, à l'exception du râpage - 1 râpeuse mécanique type IITA 500 Kg / h ; pressage par 1 presse double vis manuelle ; effectif 20 à 30 personnes ; production d'environ 100 Kg de gari / j à partir de racines (250 Kg / j) achetées sur pied aux producteurs de la région ; 60% de la production vendue en sacs de 25Kg à des sociétés de commercialisation à l'étranger (UK, Allemagne) ; en projet : mise en sachets + boîtes en carton pour l'export (problème du fonds de roulement nécessaire pour financer la réalisation des 3 500 premières boîtes) ; solde de la production (40%) vendu dans les supermarchés d'Accra en sachets de 500g, 1 et 2 Kg (prix au consommateur : 1800 cedis soit 475 FCFA / Kg au 1/12/97).

NOTA :
L'expérience de l'entreprise Transport and Commodities general - T&CG, au Ghana, dans le domaine de l'exportation de cossettes de manioc mérite d'être mentionnée.
Cette entreprise exporte depuis 1994 des cossettes de manioc vers l'Europe ; ce projet, pionnier au Ghana, se distingue par la logistique de collecte du manioc mise en place par Monsieur Goosie Tanoh, General Manager de l'entreprise.
La mise en place de cette logistique a été coûteuse pour l'entreprise mais elle lui assure la maîtrise de son approvisionnement (cf encadré ci-dessous).

L'agence de la CFD à Accra a contribué au développement de l'entreprise par un AIPB de 400 000 FF en Mai 1994 pour l'acquisition de coupe-racines à moteur à essence, pour le débit, sur les lieux de production, des tubercules de manioc en cossettes non épluchées.

Logistique pour l'acquisition et la collecte de cossettes de manioc par l'entreprise T&CG

Tonnages exportés par l'entreprise (contrat cadre négocié avec TRANEX, importateur belge en Août 94) :

    1994 : 2 370 tonnes (2 expéditions)
    1995 : 3 300 tonnes (1 expédition)
    1996 : 19 758 tonnes (6 expéditions)
    01/01 au 31/07/97 : 22 793 tonnes (5 expéditions)
Prévisions - sous réserve de l'obtention d'un prêt moyen terme de 2 millions de US$ pour le refinancement de la dette actuelle de l'entreprise (emprunts bancaires à court terme) et un complément d'investissement en moyens logistiques, notamment pour le chargement des bateaux - cf dossier de demande de financement établi par T&C G:
    1998 : 70 000 tonnes
    1999 : 100 000 tonnes
    2000 à 2003 : 120 000 tonnes
    à partir de 2004 : 150 000 tonnes et plus.

Pour réaliser ce programme, l'entreprise a déjà investi de façon conséquente dans la logistique de collecte des cossettes :
  • mise en place de centres d'achat des cossettes au niveau des villages (village buying centers) ; paiement cash - au moins dans les premiers temps - par l'agent de l'entreprise (buying agent) en charge des tests de qualité réalisés sur place et de la formation des producteurs : sélection variétale, techniques de culture (période de récolte), de coupe des cossettes , de séchage (choix des aires de séchage),
  • financement de l'acquisition de coupe-racines motorisés mobiles (prestations réalisées dans les villages, pour le compte des producteurs, par les propriétaires de ces coupe-racines, moyennant rémunération),
  • achat de tracteurs et de camions pour le transport des cossettes en sacs de 50 Kg, des villages jusqu'aux dépôts (district evacuation depots), acquisition de semi-remorques pour le transport jusqu'à l'entrepôt au port de TEMA,
  • un responsable de la logistique dans chacune des régions de collecte au Centre et au Nord du Ghana.
Cette logistique permet la maîtrise de l'approvisionnement ; l'entreprise affirme ne plus avoir de problème de disponibilité de cossettes pour répondre à la demande européenne.
Cependant, l'entreprise doit :
  • améliorer sa situation financière actuelle caractérisée par des emprunts court terme pour le financement d'investissements sur le long terme,
  • réduire le coût de l'évacuation des cossettes :
  • négociation en cours avec VLTC qui détient le monopole du transport par barge sur le lac Volta,
  • acquisition de sauterelles mobiles pour le chargement des bateaux au port de TEMA.

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